samedi 10 mai 2025
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CRITIQUE, opéra. CLERMONT-FERRAND, Opéra-Théâtre, le 31 janvier 2025. VERDI : Le Trouvère. David Banos (Manrico), Irina Stopina (Leonora), Paolo Ruggiero (Luna), Chinara Shirin (Azucena)… Aquiles Machado / Martin Mazik

Et de 3 ! Après Turandot et Norma, c’est au tour du Trouvère de Giuseppe Verdi d’être présenté – sur la scène de Clermont Auvergne Opéra – par la compagnie lyrique espagnole Opera 2001 (basée à Alicante). Si les deux premiers titres avaient bénéficié du vaste plateau de la Maison de la culture, c’est au ravissant (mais petit) théâtre de la Place de Jaude (500 places) que sont données cette fois les représentations (trois en 24h avec deux distributions différentes) !

 

Et c’est à nouveau le ténor-metteur en scène vénézuélien Aquiles Machado qui se colle à la mise en scène, qui se veut “itinérante”, et donc simplifiée à l’extrême, avec essentiellement l’utilisation de toiles peintes… “à l’ancienne” pourrait-on dire. L’avantage est de rendre pleinement lisible l’action, où les deux factions rivales arborent des couleurs différentes (bleutées pour la noblesse espagnole et rougeâtres pour les gitans). La direction d’acteurs se montre discrète, mais soutient a minima le drame, et l’engagement des chanteurs-acteurs réunis à Clermont-Ferrand fait le reste.

 

En Leonora, la soprano française Irina Stopina a toutes ses chances pour continuer à faire une belle carrière : égalité des registres, intensité dramatique, registre grave nourri, ou encore contrastes habilement négociés entre grâce et énergie. Un grand bravo à elle ! Son partenaire masculin, le ténor espagnol David Banos suscite le même enthousiasme, tant chez votre serviteur que parmi le public qui lui offre, à juste titre, un beau triomphe au moment des saluts. Et ce que l’on apprécie avant tout chez lui, au-delà de la puissance phénoménale de la voix, ce sont les nuances qu’il parvient néanmoins à faire apparaître dans la partie de Manrico, comme dans le fameux air « Ah si ben mio » sur lequel tout le monde ou presque se casse le souffle, mais ici négocié avec un bel art de la demi-teinte. Pour autant, le tonitruant et redoutable « Di quella pira » ne lui pose pas le moindre problème, et le métal autant que la clameur de trompette ici requise sont bel et bien présents. Quel bonheur également de voir le rôle d’Azucena distribué à une jeune chanteuse, en l’occurrence la mezzo Chinara Shirin), en lieu et place d’une interprète « sur le retour » comme c’est (trop) souvent le cas… La chanteuse azerbaïjannaise déploie de puissantes ressources de mezzo-soprano, avec un aigu ferme et un grave naturellement riche, doublé d’un art consommé de la dynamique expressive. Par ailleurs, sa formidable présence scénique lui permet de donner de son personnage un portrait ni banal ni vulgaire, et elle récolte elle aussi un véritable plébiscite auprès de l’audience. Sans que l’on sache s’il était malade, le Comte de Luna du baryton italien Paolo Ruggiero ne rend pas justice à son personnage, avec un phrasé chaotique et des passages de registre laborieux, mais la prestation de la basse ukrainienne Viacheslav Strelkov (Ferrando) s’avère bien pire, avec un chant manquant totalement de justesse. Les deux comprimari – Leonora Llieva en Inés et Federico Parisi en Ruiz – n’ont pas de mal à laisser un meilleur souvenir. 

 

Malgré quelques décalages entre fosse et plateau et le nombre restreint d’instrumentistes, la direction du chef slovaque Martin Mazik ne parvient pas moins à exalter les beautés et les fulgurances orchestrales du chef d’œuvre de Verdi, tandis que le Coro Lirico Siciliano se montrent à la hauteur des nombreuses interventions chorales du Trouvère. Un beau succès public vient couronner cette soirée verdienne !

 

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CRITIQUE, opéra. CLERMONT-FERRAND, Opéra-Théâtre, le 31 janvier 2025. VERDI : Le Trouvère. David Banos (Manrico), Irina Stopina (Leonora), Paolo Ruggiero (Luna), Chinara Shirin (Azucena)… Aquiles Machado / Martin Mazik / Photo © classiquenews.com

 

 

LIRE aussi la critique du même TROVATORE / Le Trouvère de Verdi par notre rédacteur Alexandre Pham, Opéra de Massy, 19 janvier 2025 : https://www.classiquenews.com/critique-opera-opera-de-massy-le-19-janvier-2025-verdi-le-trouvere-vicent-romero-manrico-irina-stopina-leonora-jiujie-jin-azucena-nicola-ziccardi-luna-orchestre-de-l/

 

CRITIQUE, opéra. Opéra de Massy, le 19 janvier 2025. VERDI : Le Trouvère. David Banos (Manrico), Irina Stopina (Leonora), Jiujie Jin (Azucena), Nicola Ziccardi (Luna), … Orchestre de l’Opéra de Massy, Constantin Rouits / Aquiles Machado

 

CRITIQUE, concert. MONTPELLIER, Opéra Berlioz, vendredi 31 janvier 2025. « Traversées » : Ravel, Barber, Tchaïkovski. Orchestre national Montpellier Occitanie, Roderick Cox (direction)

Sur la nef Opéra Berlioz, la traversée entre l’Europe et l’Amérique du nord s’effectue avec splendeur sous la direction de Roderick Cox, directeur musical de l’Orchestre national Montpellier Occitanie depuis septembre dernier. De la Pavane de Maurice Ravel aux Symphonies de Samuel Barber et de Piotr Illitch Tchaïkovski, les gradations sonores gagnent en profondeur. Lors de son interview sur France Musique, le 9 décembre dernier, le chef d’orchestre Roderick Cox confiait : « Je suis chez moi à Montpellier, cela me permet d’être dans l’esprit d’équipe et de créer quelque chose sur la scène internationale ». 

 

S’il est un domaine où les frontières s’effacent, plus encore que celui sportif, c’est bien celui musical qui enjambe les frontières, tout en conservant les identités. Le programme de cette soirée l’illustre parfaitement, déjà par le programme sélectionnant tour à tour la subtile orchestration ravélienne, les orgues monumentaux de Barber avant de remonter le temps avec la fougue romantique de Tchaïkovski. Mais la stature charismatique du chef nord-américain illustre tout autant cet effacement des frontières. L’accueil enthousiaste que lui réserve le public montpelliérain remplissant l’Opéra Berlioz (2.000 places) dévoile une fière appropriation du « chef de son orchestre ». Tel était déjà le cas lors de l’arrivée du chef danois, Michael Schønwandt, en 2015.

 

Avec sa 1ère Symphonie, le jeune compositeur Samuel Barber (27 ans) fait le pari d’unifier les mouvements traditionnels en une seule entité, comme Schönberg le tentait avec sa Symphonie de chambre op. 9. Mais chez le nord-américain, le registre est celui de l’épopée, à l’instar d’un Sibelius ou d’un Honegger. D’emblée, le brasier symphonique brasse flux et reflux incessants d’une immense formation post-romantique. Si quatre tempi (ou phases) se dégagent pleinement, chacun est porteur d’une grandiloquence, de secousses et de ruptures qui se répercutent… jusqu’au pont supérieur de la nef Opéra Berlioz. L’ambitus des registres (de l’excellent tuba jusqu’aux violons) et les alliances de timbres génèrent une densité souvent monolithique. Cette densité s’accommode même d’une construction finale variée (une passacaille) qui amplifie le thème initial, sans atteindre la subtilité du final de la 4ème Symphonie de Johannes Brahms. Auparavant, l’interprétation soigne l’unique épisode Vivace. Ici, le motif (évoquant celui straussien de Till l’espiègle) caracole de pupitres en pupitres de manière quasi cinématographique.

 

Dirigée par cœur par Roderick Cox, la 4ème Symphonie op. 36 de Piotr Illitch Tchaïkovski soulève les passions conflictuelles au fil de mouvements suggérant les aléas d’une destinée. Le thème initial, désigné par le compositeur comme celui du « Destin », résonne avec une parfaite stéréophonie entre trompettes et cors, alors que la suite manque de rebond dans les syncopes qui creusent habituellement le climat d’incertitude. Si la mélancolie nimbe l’Andantino central par la grâce d’une canzone qui circule souplement à l’orchestre, la virtuosité du Scherzo fait valoir les piques bondissantes émises par chaque famille – pizzicati des cordes, staccato des bois et accelerando des cuivres. L’Allegro con fuoco éclaire la soirée par son joyeux bouillonnement qui dénoue librement les thèmes récurrents.

 

Sur le podium, la gestuelle d’une force maîtrisée du chef insuffle une énergie qui irrigue tous les rangs de la phalange. Et révèle également la qualité optimale de solistes sollicités par ces œuvres, notamment le corniste (S. Carboni) défiant la Pavane sur son cor naturel (et non à pistons), le hautbois solo (Y. Chang Jung), rêveur poétique de l’Andante tranquillo chez Barber, le basson solo (R. Bernard) déroulant les déhanchés syncopés de la symphonie romantique. Aussi, aux saluts, le public trépignant acclame autant le collectif de l’orchestre que les pupitres que le chef fait lever un par un. On ne peut que souhaiter de longues traversées à l’équipage de Roderick Cox à l’Opéra Orchestre national Montpellier Occitanie.

 

 

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CRITIQUE, concert. MONTPELLIER, Opéra Berlioz, vendredi 31 janvier 2025. « Traversées » : Ravel, Barber, Tchaïkovski. Orchestre national Montpellier Occitanie, Roderick Cox (direction). Toutes les photos © Marc Ginot

OPÉRA, Top 3 de février : I Puritani à PARIS, Norma à VIENNE, Roméo et Juliette à NAPLES… les 3 productions lyriques événements de février 2025

A partir de février 2025, OPERA DIARY et CLASSIQUENEWS analysent l’actualité lyrique à l’affiche et distingue les productions à ne manquer sous aucun prétexte. Et nous vous disons surtout pour quelles raisons y assister.
Voici le TOP 3 opéra de février 2025

En février 2025, vous irez à PARIS, VIENNE, NAPLES…

 

 

 

 

 

 

PARIS : I Puritani de Bellini – Opéra de Paris (du 6 fév au 5 mars 2025) – Retour très attendu de la soprano Lisette Oropesa dans un rôle phare qu’elle n’a pas défendu depuis plusieurs années dans une mise en scène. D’autant que le prince du Belcanto, le ténor Larry Brownlee qui revient pour la deuxième fois en 3 mois à Paris (après La Fille du Régiment avec 12 dates sur 1 mois, il revient pour I Puritani, l’un de ses tout premiers rôles). Mise en scène : Laurent Pelly – Production événement. D’autant plus recommandée qu’elle fait partie des productions de l’offre flash de l’Opéra de Paris, productions à prix attractif jusqu’au 4 février 2025.

Lien vers la vidéo de Larry (Opera Diary) : https://www.instagram.com/p/DC4C4LPo76G/

Lien vers la version préférée d’Opera Diary : https://www.amazon.co.uk/Bellini-I-Puritani-Vincenzo/dp/B0000041SB

PLUS D’INFOS directement sur le site de l’Opéra National de Paris : https://www.operadeparis.fr/saison-24-25/opera/les-puritains

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VIENNE : Norma de Bellini – Wiener Staatsoper (11 dates : du 19 fév au 26 mai 2025) . Prise de rôle de Juan Diego Florez (Pollione) qui n’a probablement jamais chanté ce rôle. Elégance, phrasés ciselés, incarnation subtile… le ténor péruvien a tout pour réussir dans la défense du personnage qui de traître amoureux évolue et succombe face à l’admirable profil moral de la prêtresse gauloise Norma (qu’au fond il n’aura jamais cessé d’aimer)… Avec Federica Lombardi (Norma)… Mise en scène : Cyril Teste. Michele Mariotti, direction musicale.
Lien vers la version préférée d’OPERA DIARY : https://www.warnerclassics.com/release/bellini-norma

INFOS directement sur le site du Wiener StaatsOper : https://www.wiener-staatsoper.at/en/calendar/detail/norma/2025-02-19/

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NAPLES : Roméo et Juliette de Gounod – Teatro San Carlo Napoli (du 15 au 25 février 2025) – Le duo légendaire Nadine Sierra / Javier Camarena s’affirme… iconique. Ils viennent de chanter ensemble (SOLD-OUT) 5 représentations à Barcelone dans La Traviata ; le Teatro San Carlo affiche leur nouvelle coopération, certainement marquante au service de Roméo et Juliette, l’opéra romantique français par excellence signé Gounod. Mise en scène : Georgia Guerra. Sesto Quatrini, direction musicale.

Lien de la vidéo Javier Camarena : https://www.instagram.com/p/C5drOxFrmZt/

Lien vers la version préférée d’OPERA DIARY : https://angelagheorghiu.com/product/gounod-romeo-et-juliette/

INFOS directement sur le site du Teatro San Carlo di NAPOLI : https://www.teatrosancarlo.it/en/events/romeo-et-juliette/

 

 

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TOP 3 OPÉRA, la sélection opéra opérée chaque mois par Classiquenews et Opera Diary

 

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CRITIQUE CD. Richard STRAUSS : Concerto pour violon, Quintette avec piano, Sonate pour violon et piano, Metamorphosen, Ein Heldenleben – Renaud Capuçon, violon – Wiener Symphoniker (Petr Popelka) – Gustav Mahler Jugendorchester (Seiji Ozawa) – 3 cd DG Deutsche Grammophon – 2000 et 2024

Le triple disque souligne le tempérament déjà très impétueux et totalement maîtrisé du jeune Richard Strauss, tel qu’il rayonne dans son Concerto pour violon, partition d’un jeune homme de 17 ans qui se souvient (en 1882) de Beethoven, Brahms, surtout de la légèreté souriante et ductile d’un Mendelssohn. Le jeu de Renaud Capuçon en souligne la hardiesse harmonique, le souffle déjà dramatique (qui annonce la verve et le génie opératique à venir…).

 

Même (re)découverte heureuse et opportune pour la Sonate violon / piano opus 18 en mi bémol majeur de 1887. A 22 ans, Richard Strauss montre combien il connaît la nuance brahmsienne et la profondeur que cela implique ; profondeur mais subtile pudeur ici absorbée dans une équation entre élégance et passion (comme l’indique le bouillonnement d’idées du finale qui préfigure le poème symphonique Don Juan). Renaud Capuçon signe là une lecture franche et droite, efficace et ardente des deux oeuvres que l’on aimerait effectivement écouter plus souvent en concert. Le chef hongrois Petr Popelka, découvert lors de l’Académie de direction d’orchestre (Conducting Academy au Gstaad Menuhin Festival 2017, et lauréat du Prix décerné alors) se montre souple et dramatique, idéal complice dans le Concerto à la fois noble et passionné.

 

L’intérêt augmente encore avec le programme des deux derniers cd ; aux côtés du Quintette avec piano opus 13 de 1885, lui aussi embrasé et même lumineux (premier mouvement là aussi brahmsien ; dans son ensemble, la partition se révèle très schumannienne), le violoniste vedette enregistre aussi dans le CD2, l’introduction (Sextuor) de l’opéra Capriccio de 1942 (avec partie des Hagen et Gérard Caussé) ; tandis que le choix de la version très chambriste des Métamorphoses (TrV 290) – version originale pour un septuor de cordes (au lieu des 23 instrumentistes plus familiers), subjugue littéralement par la pudeur, la tension, l’intensité du son collectif : une soie tissée par les 7 musiciens qui savent fondre et exposer chaque timbre associé. Il en ressort cette couleur du deuil, cette déploration funèbre qui est en réalité en 1945, et la description des ruines encore fumantes de l’Allemagne nazie détruite et l’hommage à la culture germanique qui fut sacrifiée ainsi sans mesure par les barbares hitlériens.

 

Complément qui accrédite la valeur du coffret, « Ein Heldenleben » opus 40 (1898) -, fleuron du CD3, en complicité avec les jeunes instrumentistes de l’Orchestre Gustav Mahler sous la baguette acérée, vive du maestro Seiji Ozawa, véritable félin, capable ainsi en 1999 d’une souplesse détaillée qui exprime d’Une vie de héros, toute la charge émotionnelle ; force jaillissante, à l’impérieuse motricité qui implique les sentiments du compositeur lui-même, ses démêlés avec son épouse et les critiques (« le champ de bataille du Héros), qui font du cycle d’Une vie de Héros, la symphonie la plus personnelle voire autobiographique de l’auteur. Renaud Capuçon joue la partie de violon solo (la voix du compositeur, héros ici de sa propre histoire / symphonie) précisément dans l’épisode 3 évoquant les avatars de la vie conjugale (« la compagne du héros »)…

 

Deutsche Grammophon a bien raison d’éditer tel coffret parfaitement défendu, révélant plusieurs joyaux méconnus du jeune Strauss, décidément plus précoce qu’on le dit (et l’écrit) : en témoignent le Concerto pour violon, le Quintette avec piano, la Sonate violon / piano, ici enregistrés au printemps et à l’été 2024). L’archive symphonique avec Seiji Ozawa remonte à un enregistrement réalisé à Salzbourg en 2000. Globalement, cette somme straussienne par Renaud Capucçon est incontournable. CLIC de CLASSIQUENEWS février 2025.

 

 

 

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CRITIQUE CD. Richard STRAUSS (1864 – 1949) : Concerto pour violon, Quintette avec piano, Sonate pour violon et piano, Metamorphosen, Ein Heldenleben (3 cd DG Deutsche Grammophon – 2000 et 2024) – Renaud Capuçon, violon – Wiener Symphoniker (Petr Popelka) – Gustav Mahler Jugendorchester (Seiji Ozawa). Réf DG : 00028948670826 – Plus d’infos sur le site de l’éditeur Deutsche Grammophon : https://www.deutschegrammophon.com/en/catalogue/products/richard-strauss-renaud-capucon-13677 : et aussi ici : https://www.deutschegrammophon.com/en/catalogue/products/richard-strauss-renaud-capucon-13677

 

RICHARD STRAUSS
CD 1
Richard Strauss : Violin Concerto in D minor, Op.8
Renaud Capuçon, Wiener Symphoniker / Petr Popelka, direction
I. Allegro
II. Lento ma non troppo
III. Rondo. Prestissimo
Sonata for Violin and Piano in E flat, Op.18
Renaud Capuçon, Guillaume Bellom
I. Allegro ma non troppo
II. Improvisation. Andante cantabile
III. Finale. Andante – Allegro
Daphne-Etude, TrV 272b
Renaud Capuçon
CD2
Quintette avec piano
I. Allegro
II. Scherzo. Presto
III. Andante
IV. Finale. Vivace
Renaud Capuçon, Guillaume Bellom, Veronika Hagen, Paul Zientara, Julia Hagen
Capriccio, Op. 85
Renaud Capuçon, Christoph Koncz, Gérard Caussé, Veronika Hagen, Clemens Hagen, Julia Hagen
Sextet, TrV 279a (Live)
Metamorphosen, TrV 290
Renaud Capuçon, Christoph Koncz, Gérard Caussé, Veronika Hagen, Clemens Hagen, Julia Hagen, Alois Posch
Metamorphosen, TrV 290 (Version for String Septet, Realised by Leopold) – Live
CD3
Ein Heldenleben, Op. 40
Renaud Capuçon, Gustav Mahler Jugendorchester, Seiji Ozawa, direction
I. Der Held (Live)
II. Des Helden Widersacher (Live)
III. Des Helden Gefährtin (Live)
IV. Des Helden Walstatt « Battle Scene » (Live)
V. Des Helden Friedenswerke (Live)
VI. Des Helden Weltflucht und Vollendung (Live)

 

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GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY (18 juillet – 6 septembre 2025) : dernière édition de Christoph Müller – la billetterie est ouverte ! Temps forts : William Christie, Fazil Say, Christina Pluhar, Daniil Trifonov, Patricia Kopatchinkaja, Víkingur Ólafsson…

LA BILLETTERIE EST OUVERTE : réservez dès à présent votre séjour à GSTAAD cet été pour le 69ème Festival MENUHIN ; d’autant que cette prochaine édition est la dernière du directeur général et artistique Christoph Müller. Ainsi se referme une somptueuse histoire écrite pendant 24 années, soit un quart de siècle d’une programmation engagée, artistique et écologiquement. Le thème générique « MIGRATION » referme le cycle triennal intitulé « CHANGEMENT / CHANGE », expression d’une prise de conscience sur notre monde en pleine mutation.

 

 

 

A l’été 2025, Christoph Müller interroge ainsi les relations entre musique et appartenance, origine et déracinement, vie en exil et envie de sécurité. Ces différents champs de recherche combinés aux forces créatrices de la musique, sont la promesse de concerts d’exception. VOIR ici le programme du 69è GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY : https://www.gstaadmenuhinfestival.ch/fr/programme-and-location/programme-2025

 

Entre autres temps forts : l’oratorio de Haendel en ouverture les 19 et 19 juillet, ISRAEL EN EGYPTE, exode historique et exemple d’une migration hautement symbolique à l’époque biblique (par William Christie et ses Arts Florissants)… ; 3 concerts du pianiste turc en résidence FAZIL SAY (20, 22, 24 juillet 2025) ou 3 questionnements sur l’identité dont son propre Trio intitulé « Immigrants » ; de même, des ensembles tels que L’Arpeggiata de Christina Pluhar (6 août) ou Between Worlds d’Avi Avital (5 août) mêlent influences des musiques du monde et œuvres classiques issues de pays et de régions traversés par les grands courants migratoires européens, à l’image de la Grèce, de la Macédoine, de la Serbie, de l’Afrique du Nord et de l’Italie du Sud. Les récitals de Bomsori Kim (21 & 24 juillet) ou Daniil Trifonov (27 juillet) expriment quant à eux, la nostalgie, le regret du temps passé et le mal du pays, tandis que Patricia Kopatchinskaja et Sol Gabetta avec leur récital Chostakovitch du 3 août – explorent la question des racines en exil et les voies de l’émigration intérieure. Ne manquez pas non plus, les concerts de la série «Music for the Planet» : Patricia Kopatchinskaja ambassadrice engagée, y questionne musicalement les mots puissants de l’écrivain suisse Franz Holer avec les notes de Chostakovitch (3 août), tandis que le 8 août elle aborde les compositions de Panufnik (qui fut très proche de Yehudi Menuhin), Schubert, Telemann et Schnittke – marquées par la quête d’une nouvelle stabilité en exil –, en dialogue avec les photographies artistiques de Marco Borggreve.

Autre événements incontournables d’une édition 2025 mémorable : les débuts au GSTAAD MENUHIN FESTIVAL, du pianiste Víkingur Ólafsson (31 juillet), dans les trois dernières Sonates de Beethoven ; le Quintette avec piano de Brahms dessiné par Mao Fujita et le Quatuor Hagen (21 août) ; le retour des étoiles de la planète piano tels Sir András Schiff (2 août), Khatia Buniatishvili (10 août), Francesco Piemontesi, ce dernier porte haut les couleurs de la Suisse autour du monde (3 & 15 août).

NE MANQUEZ PAS NON PLUS les concerts perchés sur la terrasse du restaurant de montagne de l’Eggli (intitulée « MONTAIN SPIRIT », l’expérience inaugurée l’été dernier 2024, est ainsi renouvelée ainsi pour le plus grand plaisir du public) : fin juillet, dans cet environnement à couper le souffle, s’annoncent le mariage sur les rives du Bosphore de la flûte traversière d’Aslıhan And et du piano de Fazıl Say (22 juillet) ; suivi de Nemanja Radulović et son ensemble Double Sens en première partie d’une grande soirée qui se poursuivra jusque tard dans la nuit en mode électronique avec AWEN Live (26 juillet) ; enfin les légendaires King’s Singers (28 juillet) en guise d’ultime soirée sous les étoiles, avec toujours et encore cette vue unique sur tout le panorama alpin.

 

 

 

 

TOUTES LES INFOS et LA BILLETTERIE EN LIGNE sur le site de la 69e édition de Gstaad Menuhin Festival & Academy – 18 juillet – 6 septembre 2025 : https://www.gstaadmenuhinfestival.ch/fr

 

 

LIRE notre présentation de la 69è édition du GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY,   » MIGRATION «  : la dernière programmation conçue par Christoph Müller s’annonce flamboyante et engagée / https://www.classiquenews.com/69eme-gstaad-menuhin-festival-academy-migration-du-18-juillet-au-6-sept-2025-cycle-changement-iii/

 

69ème GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY : « Migration », du 18 juillet au 6 sept 2025 / Cycle « Changement III ». La dernière programmation de Christoph Müller s’annonce aussi engagée que flamboyante

 

 

CRITIQUE, opéra. BORDEAUX, Grand-Théâtre (du 29 janvier au 6 février). BELLINI : Norma. K. Deshayes, J. F. Borras, O. Syniakova… Anne Delbée / Paolo Carignani

Lorsque s’ouvre le rideau sur cette Norma de Vincenzo Bellini au Grand-Théâtre de Bordeaux, le décor, majestueux, impose aussitôt son inventivité plastique. De chaque côté du plateau, de longues toiles déploient des motifs inquiétants, encres étalées qui figurent de sombres branchages, de chênes forcément. Une fois retirées, elles laisseront voir comme les coques d’un paquebot ou d’un astronef, donnant alors à l’autel central, fortement incliné, l’allure d’une rampe de lancement. S’y dresse le Dieu Cerf, un druide chamanique, longue robe blanche en couches de drapés imposants, heaume argenté surmonté de bois de cerf. D’autres bois, stylisés, s’imposent à l’avant-scène et l’on verra aussi un druide brandissant une serpe géante rappelant cette forme tourmentée, acérée comme une griffe de vélociraptor. Le jeu des lumières tire parfaitement profit de cet écrin, pour dessiner de voluptueux nocturnes comme des cérémonies d’un blanc écrasant, virant au gris métallique, voire au noir et blanc. Les costumes sont à l’avenant, tout aussi réussis et offrant d’intéressantes passerelles entre Gaule imaginaire et modernité intemporelle.

 

La mise en scène d’Anne Delbée n’en tire pas toujours profit, qui n’évite pas le statisme et laisse parfois les chanteurs désemparés. Ainsi de Jean-François Borras dont le Pollione agite les bras de manière désordonnée mais préfère visiblement se dresser face au public pour chanter sans trop se préoccuper de vérité scénique. Karine Deshayes impose une Norma digne, parfois hiératique mais l’on peut aussi s’interroger sur certaines postures, telle celle où elle semble faire une imposition des mains sur Pollione ! A quelques reprises, le chamane récite des textes certes issus de la religion celte mais abscons, couvrant en partie la musique de Bellini sans que l’on sache l’intérêt de ces ajouts. S’y joint un recours à la vidéo parfaitement inutile, qui appuie lourdement certains effets : Norma chérissant les vêtements de ses enfants (acte II, sc. 1) est assez expressive de pour que l’on n’ait nul besoin à l’écran de la frimousse d’un bambin soufflant sur un pissenlit !

 

En revanche, outre qu’ils sont impeccables de bout en bout, les Chœurs de l’Opéra de Bordeaux s’acquittent parfaitement des mouvements de foule les plus divers, du recueillement à l’ire guerrière. Vocalement, le plateau est de bonne tenue. Dans le rôle-titre, Karine Deshayes sait intelligemment accompagner l’évolution de son personnage par une prestation de plus en plus dramatique. Casta diva est ainsi susurré, tout en retenue et délicatesse, lorsque la prêtresse fera preuve d’un imposant tranchant au tableau final. Tout aussi solide, Jean- François Borras compense par la voix ce qui pèche scéniquement. En dépit du temps, le timbre demeure métallique et la projection solaire, avec un vibrato habilement distillé. En Adalgisa, la mezzo ukrainienne Olga Syniakova restitue parfaitement les nuances d’un personnage tourmenté malgré, là encore, des choix scéniques étranges tel celui où elle se saisit d’une rose comme le ferait une rockstar d’un micro. On saluera aussi la puissance et la profondeur de voix de la basse géorgienne Goderdzi Janelidze, impressionnant Oroveso. Les différents ensembles couronnent ces prestations, montrant la complicité des chanteurs. Peut-être faut-il alors rendre justice à une mise en scène qui, malgré ses tâtonnements, leur laisse suffisamment d’espace pour s’épanouir vocalement, au détriment de l’incarnation.

 

On a connu l’Orchestre de l’Opéra national de Bordeaux en meilleure forme. En dépit d’une direction rigoureuse de la part du chef italien Paolo Carignani, il manque ici l’élan, la flamme qui devraient nourrir la tragédie. Comme si la direction routinière se contentait de soutenir le plateau. En définitive, une production plutôt réussie malgré quelques faiblesses..

 

 

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CRITIQUE, opéra. BORDEAUX, Grand-Théâtre (du 29 janvier au 6 février). BELLINI : Norma. K. Deshayes, J. F. Borras, O. Syniakova… Anne Delbée / Paolo Carignani. Toutes les photos © Christian Dresse

 

VIDÉO : Trailer de « Norma » de Bellini selon Anne Delbée à l’Opéra national de Bordeaux

 

CINÉMA. MARIA de Pablo Larraín, le biopic événement avec Angelina Jolie (en salles, mercredi 5 février 2025)

L’actrice engagée Angelina Jolie incarne Maria Callas sur le grand écran dans un biopic signé du réalisateur chilien Pablo Larraín… Le film évoque le crépuscule de la diva dans le Paris des années 1970, tout en récapitulant la carrière lyrique exceptionnelle de la plus grande voix d’opéra au monde…

 

Connu pour ses précédents biopics, du dictateur chilien Augusto Pinochet (« Le Comte »), de Lady Di (« Spencer » avec Kristen Stewart, 2021) sans omettre Jackie Kennedy (« Jackie » avec Natalie Portman, 2016), Pablo Larraín orchestre le retour au cinéma d’Angelina Jolie. Si la star américaine n’a plus à démontrer ses talents dramatiques, elle a réussi un tout autre pari, celui de chanter réellement, d’apprendre donc l’art vocal pour donner l’illusion la plus parfaite à l’écran. Visage en ovale, eye-liner ciselé, cheveux noirs relevés en chignon… l’actrice captive par une réelle ressemblance avec son modèle. Le tournage a eu lieu entre Paris, la Grèce, Budapest et Milan. Présenté à la Mostra de Venise à l’été 2024, le film n’a remporté aucun prix cependant.

Maria Callas (1923-1977) fut une star absolue, une diva assoluta, cantatrice de premier ordre et tragédienne accomplie, sachant incarner avec une sincérité et une intensité hors normes chaque rôle qu’elle a marqué de façon indélébile : Norma, Leonora, Lady Macbeth, Tosca… et aussi Carmen de Bizet. Son art maîtrisé lui a permis d’exceller dans l’art si exigeant du bel canto jusqu’au vérisme d’un Puccini, comprenant tous les enjeux des styles de Bellini, Rossini, Verdi… Maria la femme fut éprise de l’armateur richissime Aristote Onassis, avec lequel elle entretien une relation pendant 9 ans, avant qu’il ne la délaisse pour épouser Jackie Kennedy. Trahie, seule, Maria Callas tente (vainement) de recouvrer le splendeur de sa voix passée… Elle mourra d’un arrêt cardiaque à 53 ans, dans son vaste appartement parisien de l’avenue Mendel. Angelina Jolie a d’autant mieux réussi à trouver la clé du personnage Callas, qu’elle a avoué été particulièrement touchée par sa fragilité intérieure, une faille, voire une blessure que la diva savait masquer et ne jamais exprimer en public… pudeur et destruction, dignité et tragédie : de la scène à la vie, les réalités se mêlent. Angelina Jolie a travaillé pendant 6 mois attitude, regard, port de tête, et même façon de parler pour se rapprocher au plus près de la personnalité de Maria.

 

Qui fut-elle réellement ? En elle vivaient deux entités : Maria et La Callas. Deux réalités inséparables et profondément imbriquées, pour le pire et le meilleur… Aux côtés de la star américaine, presque quinqua, 3 acteurs italiens, Valeria Golino dans le rôle de sa sœur, Pierfrancesco Favino et Alba Rohrwacher dans celui de son couple de domestiques, complètent la vérité de la reconstitution cinématographique.  Après « Maria », Angelina Jolie est annoncée dans un long métrage français, réalisé par Alice Winocour (« Revoir Paris »), intrigue au moment de la Fashion Week également à Paris (comme son titre l’indique). Elle vient aussi de réaliser le film Without Blood avec Salma Hayek.

 

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« MARIA » avec Angelina Jolie, en salle mercredi 5 février 2025 – Avec l’actrice italienne Valeria Golino (Jackie Kennedy), Pierfrancesco Favino (Dernière Nuit à Milan), Alba Rohrwacher (Heureux comme Lazzaro), Haluk Bilginer (Winter Sleep), et Kodi Smit-McPhee (The Power of the Dog).

 

 

 

 

 

VIDÉO MARIA CALLAS, biopic de Pablo Larraín (2024)

 

 

 

Becoming MARIA – Featurette – Starring  : Angelina Jolie

Angelina Jolie and the filmmaking team behind Maria discuss brining Maria Callas’ story to the big screen in MARIA.

 

PLUS D’INFOS sur le film MARIA CALLAS / Angelina Jolie :
https://www.studiocanal.co.uk/news/angelina-jolie-is-maria-callas-new-teaser-out-now/

Genre : Biopic
Réalisateur : Pablo Larraín
Acteurs : Angelina Jolie, Pierfrancesco Favino, Alba Rohrwacher
Pays : États-Unis/Chili/Italie/Allemagne
Durée : 2h03
Sortie : 5 février 2025
Synopsis : La vie de la plus grande chanteuse d’opéra du monde, Maria Callas, lors de ses derniers jours, en 1977, à Paris.

 

MARIA, le nouveau biopic dédié à la vie et à la carrière lyrique de Maria Callas affirme outre le talent immense d’une interprète unique à l’opéra, la figure d’une femme qui prit soin de soigner son image comme celle d’une icône glamour, particulièrement médiatisée, nouveau modèle féminin à la fois fragile et divin… Prochaine critique sur CLASSIQUENEWS

 

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STREAMING, opéra. ANVERS (Opera Vlaanderen), R. STRAUSS : Salomé. Le 7 février 2025, 19h. Allison Cook… Alejo Pérez / Ersan Mondtag

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Hérode convoite sa belle-fille Salomé et désire la voir danser [tout en se dénudant, ainsi qu’il est d’usage pour la fameuse danse des 7 voiles, chacun retiré peu à peu, dévoilant son corps enviable et convoité de jeune beauté nubile…]. C’est alors l’une des pages symphonique parmi les plus saisissantes jamais conçues par le compositeur… Ainsi Strauss décrit-il l’attraction perverse que le tétrarque Herode éprouve pour sa jeune belle fille, fille de son épouse Herodias. Mais insensible, Salomé désire quant à elle, embrasser la bouche de Jean-Baptiste, le beau prophète emprisonné par Hérode, et qui proclame l’indignité décadente du tétrarque et de sa vile épouse…

 

 

Dans l’opéra scandaleux de Strauss, adapté de la pièce d’Oscar Wilde, chacun ne cherche qu’à soumettre l’autre, pour satisfaire son propre désir.  Le metteur en scène Ersan Mondtag, qui a déjà signé plusieurs productions à l’Opera Ballet Vlaanderen [Der Schmied von Gent de Schreker], actualise l’ouvrage, y plaque la grille d’un thriller politique. Il établit des parallèles entre l’Hérode historique, vassal de l’Empire romain, et les dictateurs contemporains tels… le président biélorusse Aleksandr Lukashenko.

Tous deux dépendent entièrement d’une superpuissance pour maintenir leur pouvoir. Cependant, des forces révolutionnaires sont résolues à détruire l’empire en déclin d’Hérode.  Dans cette production, Alejo Pérez dirige l’orchestre symphonique de l’Opera Ballet Vlaanderen, dans une production qui en janvier dernier, fut bien accueillie.

 

 

 

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VOIR la Salomé présentée à ANVERS [janvier 2205] sur OperaVision : https://operavision.eu/fr/performance/salome-0

Filmé en janvier de cette année [2025], la production de Salomé produite par Opéra ballet Vlanderen est diffusé à partir du 7 février 2025, 19h [replay jusqu’au 7 août 2025, 12h]

 

 

 

 

 

 

DISTRIBUTION

Salomé : Allison Cook
Erodes : Thomas Blondelle
Herodias : Angela Denoke
Jochanaan : Michael Kupfer-Radecky
Narraboth : Denzil Delaere

Le page d’Hérodias : Linsey Coppens

Juifs
Daniel Arnaldos
Hugo Kampschreur
Timothy Veryser
Hyunduk Kim
Marcel Brunner

Nazaréens
Reuben Mbonambi
Leander Carlier

Cappadocien
Reuben Mbonambi

Soldats
Igor Bakan
Marcel Brunner

Esclave
Linsey Coppens

Danseuses
Sandra Hilaerts
Antonella Fittipaldi
Parisa Madani
Gifty Lartey

Orchestre symphonique de l’Opéra Ballet de Flandre

Musique : Richard Strauss
Texte : Hedwig Lachmann

Direction musicale : Alejo Pérez 

 

 

 

CRITIQUE, opéra. PARIS, Théâtre du Châtelet (du 23 janvier au 2 février 2025). HAENDEL : Orlando, K. Bradic, S. Stagg, E. DeShong, G. Semenzato… Jeanne Desoubeaux / Christophe Rousset

Il est d’usage dans notre époque rationnelle de penser que la sensibilité d’un autre temps est surannée. Nos codes ne sont plus les mêmes et la vision d’un monde lointain reste diffus dans une ère où tout semble à portée de main. Les histoires de chevalerie nous semblent aussi lointaines que les délires fébriles d’un exotisme révolu. Amadis, Roland, Fierrabras, Lancelot ou d’autres preux chevaliers ont laissé place à un imaginaire translucide qui n’a que la fadeur d’un brouillard sans âme. Mais depuis plus d’un demi-siècle, la révolution « baroque » a remis au goût du jour les livrets d’inspiration fantastique. Qu’elle soit la hiératique mythologie ovidienne ou la grandiloquente geste du Tasse, de l’Arioste ou de Cervantes, le coeur battant des intrigues des opéras baroques a puisé sa source dans l’univers de la fable historiée.

 

 

Le retour d’Orlando de Haendel sur les planches parisiennes est un véritable événement. L’on se souvient vaguement de la somptueuse production abstruse de Robert Carsen et des Arts Florissants, en 1996 au Théâtre des Champs-Élysées, avec une distribution à tomber. Presque trois décennies plus tard, le Théâtre du Châtelet a le courage de monter un tel opéra si méconnu au cœur foisonnant de Paris. Opéra au thème éminemment baroque, puisqu’inspiré du Roland furieux de Ludovico Ariosto (L’Arioste). Sujet évocateur de la mythographie française puisqu’il est question de Roland de Roncevaux aux prises avec le dard cruel de l’amour. Si le livret originel d’Orlando est signé par un des librettistes stars de l’époque, Carlo Sigismondo Capece, ce n’est qu’une adaptation qu’une main anonyme à conçu pour Händel. D’aucuns pourraient même y voir la main du compositeur lui-même.
Quand Händel crée Orlando en 1733, le contexte ne lui était pas du tout favorable, au contraire, sa situation à Londres était plus que contestée. Händel était vu comme un proche du roi et surtout du premier ministre Robert Walpole. Ce dernier a affronté cette année là, l’une des pires crises de ses ministeriats. En effet afin de contrer la contrebande et tenir la noblesse d’opposition en tenaille, il a décidé d’une taxe d’accise ou de régie sur les produits de luxe tels le vin, le rhum et le tabac. Cette taxe qui était facturée non dans les ports mais dans les entrepôts était vue par la noblesse, consommatrice compulsive des produits surtaxés, comme une attaque frontale. Déjà bien échauffée contre Händel, la haute noblesse décide alors de s’attaquer au « monopole » du saxon sur l’opéra allant jusqu’à le chasser de son théâtre. Händel était vu comme une créature de Walpole et de sa politique. C’est bien après la création d’Orlando en juin 1733 que surgit alors The Opera of Nobility en réaction à la troupe de Händel et de la taxe d’accise indirectement.
On l’aura compris, en janvier 1733, Händel était au plus bas de son influence et de son pouvoir en Angleterre, la noblesse l’avait déjà déserté malgré le soutien indéfectible du couple royal. Il a composé Orlando vraisemblablement comme un acte de résistance et, malgré tout, de survie. Le livret de Capece a été raboté et réduit à la quintessence en faisant un drame philosophique plus qu’un divertissement curial. Chaque personnage a une importance cruciale dans cette fable réinventée. Du mage Zoroastro, hiératique moraliste quasiment identique à son pendant mozartien et son double inversée, Dorinda qui incarne le sens commun. Dorinda, personnage inventé de toutes pièces, est semblable à certains personnages shakespeariens qui incarnent la sagesse populaire face aux fureurs héroïques. Dorinda est l’esprit de la « Merry England« , l’honnête « yeoman » en jupons. Toute la richesse de ce livret se trouve dans la construction dramatique finement ciselée et à la lumière du contexte de création Orlando est une oeuvre aux lectures multiples dont une extrêmement importante a une part quelque peu mystérieuse. Chaque personnage se révèle différent face à l’épreuve d’un anéantissement, une initiation.
Pour la production au Théâtre du Châtelet, alors que tout était réuni pour faire une expérience incroyable, sur le plateau la vision de Jeanne Desoubeaux n’a pas permis à Orlando d’être autre chose qu’une parodie mal dégrossie de son véritable propos. Avoir adapté ce livret dans une sorte de virée muséale doublée d’une sorte d’action artistique et culturelle passablement agaçante dévitalise la profondeur d’Orlando et relègue au dernier plan toute la richesse de son propos.
Il semblerait que Jeanne Desoubeaux se contente de simplifier une histoire déjà adaptée en 1733. Elle semble ne pas souhaiter que le spectateur s’ennuie, rompant définitivement la confiance qu’on doit avoir dans une oeuvre et son impact. Pour la metteuse en scène, Orlando est une confrontation fantasmatique entre le passé et le présent. Si l’idée semblait sur le papier assez stimulante sur notre rapport aux émotions révolues, l’expérience avec un groupe d’enfants s’avère plus confuse qu’efficace. La sobriété de certains des plus beaux airs est totalement balayée pour faire danser des chorégraphies abstruses aux enfants doublant les solistes. Ce dédoublement n’est pas une innovation mais une faute, une distraction sans objet. Par ailleurs les personnages sont tous affublés de costumes poussiéreux et surannés. Dorinda est une sorte de soubrette campagnarde plus mozartienne que le rôle unique que Händel lui a donné. Angelica et Medoro sont des parodies de porcelaines de Meissen ou du très mauvais Fragonard. Zoroastro est le sosie de Michel Foucault, col roulé citrouille et lunettes 70’s et Orlando est une sorte de Louis XIV échevelé. Passons sur la dramaturgie qu’essaye de construire Jeanne Desoubeaux mais nous n’acceptons pas le manque total de compréhension de deux moments magnifiques de cette production. Le trio final de l’Acte I qui est un grand moment de sincérité émotionnelle et de cruauté est mis en scène comme un « threesome » entre Angelica, Medoro et Dorinda, exactement le contraire de ce que la musique et le livret racontent, cette scène devient une lecture vulgaire et facile. Et que dire des airs de Zoroastro, qui perdent toute leur puissance philosophique à cause de la présence constante des enfants rendant le message parodique et stupide. Et finalement, le finale de l’opéra, absurde moment où les personnages sont les parents préoccupés venus récupérer leurs bambins dans le musée, dansant une ronde dans le meilleur des mondes bourgeois-bohèmes. Ce finale est le parangon de l’oeuvre, une morale où la société brisée et fragile de l’Angleterre de 1733 se retrouve dans la cabane de la Dorinda-Merry England. Bref, moderniser c’est bien mais pas en faisant n’importe quoi, n’importe comment !…
Heureusement que musicalement cet Orlando est désormais LA version. Après l’enregistrement divin de William Christie chez Erato ou celui plus expérimental de Jacobs pour Archiv, l’interprétation de Orlando de Händel par Christophe Rousset et ses Talens Lyriques est un flux continu de beauté en fosse et sur le plateau. Rousset est définitivement chez lui dans Händel, il saisit la partition avec un souci constant de sertir les plus belles mélodies d’une multitude de couleurs ravissantes. Chaque soliste est mis en avant avec un souci infini du détail, du raffinement, de l’écriture. Christophe Rousset a donné une telle voix à la musique de Händel que juste en fermant les yeux on aurait pu imaginer les incantations du maître saxon sans aucun artifice scénique superflu.
Le plateau vocal est sompteux. Orlando est tenu par la mezzo-soprano Katarina Bradic à l’agilité impressionnante et aux couleurs veloutées. Elle incarne Orlando dans toute sa complexité. Angelica est tenue par la soprano Siobhan Stagg formidable et irremplaçable dans son « Verdi piante« . Medoro est Elizabeth DeShong, qu’on a adoré en Fidès dans Le Prophète de Meyerbeer à Aix, et qui dans Händel est juste sublime. Dorinda est idéalement campée par la subtilité et la richesse du timbre de Giulia Semenzato. Riccardo Novaro fait preuve encore une fois de la maîtrise du style et des écueils du rôle virtuose de Zoroastro. Une telle distribution encourage à aller écouter Orlando et se perdre dans la forêt fascinante de cette partition avec une telle équipe artistique.
Faire une production d’opéra au XXIème siècle n’est pas un acte anodin. Comme en 1733, les années récentes ont démontré la fragilité de certains modèles qui s’écroulent comme des châteaux de cartes. Mais, tels le phénix Händel ou la folie de Roland, serons-nous assez fous encore pour ne pas saisir dans ces histoires aux émotions profondes un message qui n’a de complexe que la versification? Orlando ne nous apprend pas seulement à veiller à se surpasser et oublier les plus bas instincts, mais c’est un miroir sur une société qui méprise la sensibilité pure, la communion des arts et le ciment sociétal. Derrière la folie furieuse souvent réside la plus grande sagesse. Cervantes n’en fit-il pas un des corollaires de son monumental Quichotte qui parodiait le Roland Furieux? Jane Austen n’en fait-elle pas aussi la fratrie parfaite dans Sense and Sensibility ? Ayons donc le plus grand des courages, vivons fous pour trépasser en sages.
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CRITIQUE, opéra. PARIS, Théâtre du Châtelet (du 23 janvier au 2 février 2025). HAENDEL : Orlando. K. Bradic, S. Stagg, E. DeShong, G. Semenzato… Jeanne Desoubeaux / Christophe Rousset. Toutes les photos © Thomas Amouroux

CRITIQUE, opéra. COMPIEGNE, Théâtre Impérial, le 31 janvier 2025. CAMPRA : Le Carnaval de Venise (1699), Anna Reinhold, Victoire Bunel, Guilhem Worms, Sergio Villegas Galvain, Il Caravaggio, Camille Delaforge (direction). Yvan Clédat & Coco Petitpierre (mise en scène)

Rares les productions comme ce soir aussi réjouissantes visuellement que musicalement. Soulignons même que les références esthétiques défendues par les décors et les costumes (fabriqués par l’Opéra de Rennes), toute la conception scénographique s’accordent idéalement aux qualités expressives de l’orchestre en fosse (Il Caravaggio), d’une constante souplesse hédoniste, aux nuances maîtrisées, continument renouvelées qui régénèrent la vivacité des récits comme des airs, solos, duos, trios, chœurs…

 

L’ouvrage de Campra, un opéra-ballet créé en 1699, soit à la fin du règne de Louis XIV, n’est pas à proprement parler dramatique ; il collectionne surtout les airs isolés et les ensembles avec ce génie des rythmes de danses omniprésentes, ce dès les premières scènes qui succèdent au Prologue (où paraît une Minerve, moins martiale que déesse de la détente, agent des divertissements et des plaisirs). C’est évidemment la danse qui assure l’unité organique de l’action : elle permet aux instrumentistes de briller… et ce soir avec une maîtrise souveraine. De son côté, la grand finesse de la mise en scène sait éclairer la comique des situations [avec les 5 Polichinelles, tout de blanc vêtus, figures vénitiennes qui commentent, parodient, surlignent aussi chaque séquence], leur référence directe au Carnaval de Venise, aux fresques truculentes d’un Tiepolo, à la verve mordante de Goldoni, accrédite la légitimité du titre de la partition.

 

 

Mais de Venise, Campra s’intéresse surtout au mythe sensuel, à la patrie du désir et des plaisirs, au temple de l’effusion et de la séduction ; le spectacle souligne essentiellement la toute puissance de l’amour, sentiment déferlant peu à peu, comme une force poétique et envoûtante qui soumet tout à son empire [c’est bien le sens du dernier chœur, lors du bal final, après la parodie de la descente d’Orphée aux enfers]…

 

 

 

Joyau baroque au Théâtre Impérial de Compiègne
UN CARNAVAL TRES HAUTE COUTURE

 

Anna Reinhold, Léonore amoureuse éprise, écartée / La Co(opéra)tive / © Martin Argyrolo

 

Nuances et accents de l’ensemble Il Caravaggio se déploient dans une clarté et une belle énergie, caractérisant avec beaucoup de naturel et de subtilité chaque séquence émotionnelle. Sur le plan psychologique, c’est surtout le couple Isabelle / Léandre qui est ici central, et donc le plus fouillé ; renforcé même dans sa fusion amoureuse par la figure de Léonore qui ouvre l’action, éprise mais vite écartée, tragique, jalouse, vengeresse ; et qui d’ailleurs disparaît rapidement en fin d’action comme gommée par un Campra, rien qu’intéressé par son affection souveraine pour l’expression d’une impérieuse et ineffable tendresse.
On retrouve cette même suavité rayonnante dans l’univers visuel des metteurs en scène Yvan Clédat et Coco Petitpierre, lesquels ne trahissent pas leur origine ; ils viennent de la mode et de l’esprit haute couture ; cela se révèle ici sans réserve, et avec quel goût : immenses glands de passementerie, qui descendent des cintres fort à propos ; sphères colorées en soie texturée, costumes bigarrés qui citent la théâtralité italienne la plus élégante (Commedia dell’arte) dont le luxe raffiné et toujours très juste, se révèle davantage dans le tableau des enfers séparant Orphée et Eurydice,… Tous les éléments de la scénographie produisent matériellement la métaphore de la sensualité, offrant visuellement la sensation de la texture même de la tendresse… Ce que les chanteurs expriment constamment, se voit matériellement sur la scène à chaque moment clé.

La joute amoureuse qui au début oppose les deux femmes rivales (Léonore / Isabelle) s’affirme comme dans un labyrinthe circulaire ; plateau symbolique qui forme un échiquier des sentiments où les passions peuvent s’exacerber ; les cœurs se briser, ou… s’électriser ; dans cette arène sensible, crépitent les intrigues haineuses (fomentées par Léonore et Rodolphe), surtout l’infinie langueur des cœurs épris (Léandre et Isabelle, superbe duo au II ; puis sérénade du trio de Léandre et des musiciens italiens)…

Les musiciens d’Il Caravaggio confirment leur affinité avec le répertoire baroque français. On retrouve en concert les qualités expressives et cette grande sensibilité aux phrasés, si appréciées dans leur dernier album édité par Château de Versailles Spectacles [Le Devoir du premier commandement, dévoilant comme jamais la finesse et l’intelligence du jeune MOZART / Die Schuldigkeit des Ersten Gebots (Salzbourg, 1767) enregistrement distingué par notre CLIC de CLASSIQUENEWS : lire notre critique complète ici : https://www.classiquenews.com/critique-cd-evenement-mozart-le-devoir-du-premier-commandement-die-schuldigkeit-des-ersten-gebots-salzbourg-1767-gwendoline-blondeel-charte-sargsyan-mouaissia-il-caravaggio-camil/].

 

 

Dans le labyrinthe amoureux se perdent Leonore et Rodolphe, animés par l’esprit de vengeance (© Martin Argyroglo)

 

 

Au service de l’irrésistible suavité d’un Campra inspiré par l’amour, le geste affûté et souple de Camille Delaforge éclaire ainsi le raffinement d’une partition qui acclimate les situations de la comédie italienne au style théâtral français. Mieux le geste interprétatif particulièrement convaincant par sa cohérence et sa séduction, replace Campra à sa juste mesure, sachant assimiler la noblesse versaillaise d’un Lully, comme l’élégance motorique de Haendel, préfigurant ainsi dans le genre de l’opéra-ballet, l’immense Rameau à venir.

Vocalement la distribution est irréprochable, attestant l’essor actuel des chanteurs français sur la scène baroque. Parmi une équipe très complice, saluons le duo Isabelle / Léandre (Victoire Bunel et Sergio Villegas Galvain) qui incarne avec l’épaisseur et la vérité requises, le couple sincèrement épris l’un de l’autre ; le mezzo velouté et intense d’Anna Reinhold, Isabelle ardente, éprouvée, juste, puis Eurydice toute aussi crédible ; son Orphée ne l’est pas moins (David Tricou, inspiré dans un jeu parodique mesuré), comme Guilhem Worms dont les 3 rôles L’Ordonnateur, Rodolphe et enfin Pluton (qui se laisse émouvoir par Eurydice) sont finement abordés. Même enthousiasme pour la piquante et délirante Fortune de Clarisse Dalles dont le tempérament vocal et scénique, se distingue lui aussi très nettement.

Clarisse Dalles (La Fortune) : La Co(opéra)tive / © Martin Argyrolo

 

 

 

Nouvelle production de La Co(opéra)tive (sa 9ème précisément), ce Carnaval de Venise est un joyau irrésistible, dont la finesse autant visuelle que musicale captive du début à la fin. Saluons le Théâtre Impérial de Compiègne et son directeur Éric Rouchaud de porter ainsi une telle production en tout point réussie et qui réactive toute la magie de l’opéra baroque. Avec d’autant plus d’intensité que l’acoustique du Théâtre Impérial est l’écrin qui se prête parfaitement au travail d’orfèvrerie défendu par l’équipe artistique.

Joué avant Compiègne à Besançon, le spectacle va tourner dans l’Hexagone pour le plus grand plaisir d’un très vaste public ; il est annoncé au Théâtre de Cornouaille, scène nationale de Quimper, à l’Opéra de Rennes au Théâtre Sénart, Scène nationale, à l’Atelier Lyrique de Tourcoing, au Quartz, Scène nationale de Brest, sur les planches de L’Équinoxe, Scène nationale de Châteauroux, à la MC2: Maison de la Culture de Grenoble, Scène nationale, enfin à Angers-Nantes Opéra… Production événement. Donc incontournable.

 

 

Le couple central : Isabelle et Léandre / Victoire Bunel et Sergio Villegas Galvain

 

 

 

 

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CRITIQUE, opéra. Compiègne, Théâtre Impérial, le 31 janvier 2025. CAMPRA : Le Carnaval de Venise (1699), Anna Reinhold, Victoire Bunel, Guilhem Worms, Sergio Villegas Galvain, Il Caravaggio, Camille Delaforge (direction). Yvan Clédat & Coco Petitpierre (mise en scène)

Toutes les photos : La Co(opéra)tive / © Martin Argyrolo

 

 

 

PLUS D’INFOS sur le site de LA CO(OPERA)TIVE : http://www.lacoopera.com/la-dame-blanche-1-2

LIRE aussi notre présentation du CARNAVAL de VENISE d’André CAMPRA sur la scène du Théâtre Impérial de Compiègne, les 30 et 31 janvier 2025 : https://www.classiquenews.com/compiegne-theatre-imperial-campra-le-carnaval-de-venise-les-30-et-31-janv-2025-nouvelle-production-yvan-cledat-et-coco-petitpierre-il-caravaggio-camille-delaforge/

 

COMPIEGNE, Théâtre Impérial. CAMPRA : Le Carnaval de Venise, les 30 et 31 janv 2025. Nouvelle production. Yvan Clédat et Coco Petitpierre / Il Caravaggio. Camille Delaforge.

 

CRITIQUE, concert. LYON, Auditorium Maurice Ravel, le 30 janvier 2024. SCHUBERT / MAHLER. Orchestre national de Lyon, Nikolaj Szeps-Znaider (direction)

Alors que l’Auditorium Maurice Ravel de Lyon s’apprête, en février, à fêter son 50ème anniversaire – en même temps que les 150 ans de Maurice Ravel et les 100 ans de Pierre Boulez et de Luciano Berio, auxquels trois concerts leur seront dédiés ce même mois -, c’est pour l’heure Schubert et Mahler qui sont célébrés, à travers deux ouvrages emblématiques de leur auteur, la Symphonie Inachevée et Le Chant de la terre.

 

Le programme débute donc avec la fameuse Symphonie N°8 dite “inachevée” de Franz Schubert, dans laquelle le chant des contrebasses et des violoncelles retient positivement l’attention, tandis que le hautbois et la clarinette s’épanouissent dans un fondu de grande beauté. Bien qu’on aurait souhaité plus de tension encore dans le premier mouvement, la direction de Nikolaj Szeps-Znaider s’avère efficace, et il fait en sorte que la fin du deuxième mouvement laisse l’auditeur dans l’indéfini, l’incomplet, l’éternel…

 

Après cette courte première partie, le directeur musical de la phalange lyonnaise déchaîne les éléments du “Chant de la Terre” de Gustav Mahler, une œuvre écrite en 1908 mais qui ne sera créée par l’ami Bruno Walter qu’après la disparition du compositeur. Cette œuvre sombre est notamment le reflet de la période noire que traverse Mahler car au décès de sa fille s’ajoutent des problèmes cardiaques tout juste diagnostiqués et son congé récemment donné de la direction de l’Opéra de Vienne (1907). Elaboré à partir de sept poèmes chinois du VIIe au IXe siècles de notre ère découverts dans le recueil La Flûte chinoise de Hans Bethge, Le Chant de la terre est une véritable symphonie de Lieder pour alto, ténor et orchestre où Mahler évoque la condition humaine oscillant entre héroïsme et intimité : l’extase et le désespoir, la solitude et la nature, la jeunesse et la beauté, le printemps et enfin l’adieu à l’ami qui s’achève dans un murmure sur le mot “Ewig” (“Pour l’éternité”) répété sept fois…

 

Entouré du ténor néo-zélandais Simon O’ Neil (accouru de Paris le matin même suite à la défection de son collègue Stuart Skelton…) et la contralto allemande Wiebke Lehmkuhl, le directeur musical de la phalange lyonnaise nous donne à entendre une interprétation chargée d’émotion et, en mahlérien convaincu, conduit ses troupes avec toute l’énergie, le dynamisme et l’élan que requiert la partition, avec également le sentiment d’accéder à l’inexprimable. Les solistes ne sont pas en reste dans cette réussite qui joue avec les sens : O’neil possède une santé vocale éblouissante, avec une voix claire mais puissamment projetée, tandis que Lehmkul se montre capable d’apprivoiser un chant luxuriant et généreux accoutumé à Wagner et Strauss, pour atteindre une mezza voce qu’elle conduit peu à peu aux limites du silence pour atteindre cette dimension d’éternité dans “L’Adieu” conclusif que Mahler, pourtant chef d’orchestre hors pair, pensait impossible à diriger. Les longues secondes de silence qui suivent les derniers accords en disent long sur l’émotion qui étreint alors la gorge des auditeurs, mais c’est pour mieux laisser éclater la joie ensuite, et les rappels s’enchaînent les uns après les autres.

 

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CRITIQUE, concert. LYON, Auditorium Maurice Ravel, le 30 janvier 2024. SCHUBERT / MAHLER. Orchestre national de Lyon, Nikolaj Szeps-Znaider (direction). Crédit photographique (c) Emmanuel Andrieu

 

VIDEO : Hartmut Haenchen dirige « Le Chant de la Terre » de Mahler au Festival de Saint-Denis

 

GRAND-THÉÂTRE DE PROVENCE (AIX-EN-PROVENCE), le 15 février 2025. Grand concert pour les 80 ans de William Christie. Les Arts Florissants / Bill Christie (direction

William Christie fête ses 80 ans au Grand -Théâtre de Provence ! C’est l’occasion de se féliciter du chemin parcouru avec l’ensemble Les Arts florissants, qu’il a fondé il y a 45 ans, et les chanteurs du Jardin des voix, créé il y a plus de vingt ans.

« Le Jardin des voix m’a donné la joie de voir émerger de nouvelles générations de chanteurs qui sont devenus des interprètes et des défenseurs passionnés du répertoire baroque. Beaucoup se produisent aujourd’hui régulièrement, en concert ou dans les maisons d’opéra, aux côtés des spécialistes les plus expérimentés de cette musique », explique William Christie.

 

Qu’ils soient encore en début de carrière, ou qu’ils jouissent déjà d’une grande visibilité sur les scènes internationales, six d’entre eux reviennent l’entourer pour un récital consacré à Haendel et Rameau.

 

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Grand-Théâtre de Provence  / Aix-en-Provence

Grand Concert pour les 80 ans de William Christie / Samedi 15 février 2025.

RÉSERVEZ vos places directement sur le site du GTP : https://www.lestheatres.net/fr/a/4951-les-arts-florissants

 

 

Extraits d’opéras de Jean-Baptiste Lully et Jean-Philippe Rameau

 

Choeur et orchestre
des Arts Florissants
Direction William Christie
Soprano Ana Viera Leite
Mezzo-soprano Juliette Mey
Mezzo-soprano Rebecca Leggett
Ténor Bastien Rimondi
Ténor Richard Pittsinger
Baryton Matthieu Walendzik

 

On en parle dans la presse !

  • L’ART IMMENSE DE WILLIAM CHRISTIE (LE FIGARO)

Les Arts Florissants sont soutenus par l’État, Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) des Pays de la Loire, le Département de la Vendée et la Région des Pays de la Loire. La Selz Foundation est leur Mécène Principal. Aline Foriel-Destezet et les American Friends of Les Arts Florissants sont Grands Mécènes. Depuis 2015, Les Arts Florissants sont accueillis en résidence à la Philharmonie de Paris et sont par ailleurs labellisés Centre Culturel de Rencontre.

Cité musicale de METZ, ARSENAL, le dimanche 9 fév 2025. BEETHOVEN : Triple Concerto… Orchestre national de Metz Grand Est / David Reiland (direction)

La Grande Salle de l’Arsenal de Metz ouvre grand ses portes ce dimanche 9 février pour un joyau de la musique romantique concertante du grand Ludwig : son triple Concerto pour violon, violoncelle, piano et orchestre, œuvre brillante mais aussi propre au compositeur, tendre et remarquablement élégante… Mais auparavant, orchestre, chef et solistes remontent à la source de la grâce et l’élégance viennoise, Mozart…

 

Tout le monde connaît les premières mesures de la Petite Musique de nuit. Cette fabuleuse mélodie inoubliable rappelle quel génie était Mozart dans ses œuvres les plus ambitieuses comme dans les plus modestes. Deux solistes de l’Orchestre national de Metz Grand Est, Nicolas Alvarez (violon) et Antonin Musset (violoncelle), s’accordent au pianiste belge Julien Gernay dans la partition vedette du concert : le Triple Concerto de Beethoven. En cultivant l’art d’être ensemble à mi-chemin entre concerto, musique de chambre et symphonie, cette partition atypique est d’une séduction immédiate, dotée de thèmes mémorables…

 

LE TRIPLE CONCERTO DE BEETHOVEN (Vienne, 1807) est une oeuvre élégante propre à l’esprit des mondanités viennoises (dédié au Prince Lobkowitz) : la complicité progressive entre les 3 instrumentistes solistes qui devant s’accorder au tempérament du chef, doit savoir aussi préserver l’intimité d’une pièce de grand format, symphonique certes, mais résolument chambriste (polonaise du rondo final – la séquence la mieux écrite)…

 

 

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DIMANCHE 9 FÉVRIER 2025, 18h
Apéro-concert : Triple Concerto de Beethoven
Orchestre national de Metz Grand Est, David Reiland,
Nicolas Alvarez, Antonin Musset, Julien Gernay
RÉSERVEZ directement vos places sur le site de la Cité musicale METZ :
https://www.citemusicale-metz.fr/fr/programmation/saison-24-25/arsenal/apero-concert-triple-concerto-de-beethoven

 

distribution

David Reiland, direction
Orchestre national de Metz Grand Est
Nicolas Alvarez, violon
Antonin Musset, violoncelle
Julien Gernay, piano

Wolfgang Amadeus Mozart : 
Une petite musique de nuit

Ludwig van Beethoven : 
Triple Concerto pour piano, violon et violoncelle

Durée : 1h10

 

Ouverture des portes à 17h
Début du concert à 18h
Placement numéroté, assis
Vestiaire disponible

Venez partager un verre avec les musiciens après le concert !

CRITIQUE, opéra. ROUEN, Théâtre des Arts, le 30 janvier 2024. POULENC : Dialogues des carmélites. E. Gazeille, L. Richardot, E. Joneau… Tiphaine Raffier / Ben Glassberg

L’Opéra de Rouen Normandie met à son affiche le chef d’œuvre de Francis Poulenc dans le cadre de sa saison 2024-2025, du 28 janvier au 4 février 2025, en coproduction avec l’Opéra national de Lorraine. Amateurs de belles histoires, passionnés d’intrigues amoureuses, de drames convenus ou de tragédie prévisible, passez votre chemin : Francis Poulenc nous conduit au plus près du destin de chacun d’entre nous, et comment l’assumer… Francis Poulenc (1899-1963) s’est emparé de cette œuvre, créée en 1957 à La Scala de Milan, qui reprend le récit de l’arrestation, la condamnation à mort et l’exécution, en 1794, des Carmélites de Compiègne, béatifiées par l’Église en 1906 et récemment canonisées (en 2024). Récit de ce drame à travers le parcours d’une jeune aristocrate, Blanche de la Force, depuis sa décision d’entrer chez les Carmélites jusqu’à sa mort et celle des Sœurs. Le compositeur de cet ouvrage, sans autre exemple dans la production lyrique, a tissé une musique puissante, tendue de bout en bout, qui sublime littéralement le texte de la pièce de théâtre de l’écrivain Georges Bernanos (1888-1948), elle-même inspirée d’une nouvelle de Gertrude von Le Fort (1876-1971). Une musique que le compositeur a souhaité, par sa dédicace, placer explicitement sous l’autorité esthétique de Debussy, Monteverdi, Verdi et Moussorgski.

 

Nous pouvons l’affirmer, la grande réussite de cette soirée – outre la grande forme de l’Orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie et de son chef Ben Glassberg -, est la très belle mise en scène de Tiphaine Raffier. Le défi était d’importance pour cette jeune metteuse en scène dont c’était la première mise en scène de l’ouvrage, tous ayant en mémoire la mise en scène d’Olivier Py, référence s’il en est, de cette œuvre. Tiphaine Raffier (assistée pour la dramaturgie par Eddy Garaudel) a dépouillé l’ouvrage de toute référence explicite à la période révolutionnaire, à ses cocardes tricolores (mais des textes de discours, de lois, de cette époque troublée balisent visuellement la représentation), à son décorum fin XVIIIème siècle, et même à son contexte ecclésiastique, le tout réduit au minimum ; pari risqué, mais pari pleinement réussi : la dimension métaphysique de ce drame en sort renforcée, son interrogation philosophique acquiert une plus grande lisibilité, et ce qui est sans doute le plus important, et peut-être inattendu, le drame y gagne en émotion, tout au long de l’ouvrage, avec quelques intenses sommets, notamment lors de l’agonie de la Prieure, Madame de Croissy, magistralement incarnée par la mezzo-soprano Lucile Richardot. Si la fureur révolutionnaire est palpable dès la première scène de l’ouvrage, ce qui s’impose, c’est ce qui se résume dans l’expression choisie par la metteuse en scène dans sa note d’intention: apprendre à mourir…

 

Cette réussite doit aussi à l’équipe artistique : Scénographie (Hélène Jourdan), Costumes (Caroline Tavernier), Lumières (Kelig Le Bars) et Vidéo (Nicolas Morgan). Elle est aussi due, d’évidence, à un plateau de solistes dont la qualité première est l’homogénéité, à de rares exceptions près. Côté femmes, outre l’exceptionnelle Lucile Richardot, il convient de noter les très belles interventions tant scéniques que vocales de la jeune soprano Emy Gazeilles dans Sœur Constance, émouvante et parfois drôle dans sa candeur et sa simplicité, confidente privilégiée de Blanche, de la mezzo-soprano Eugénie Joneau dans Mère Marie et la soprano Aurélia Legay dans Mère Jeanne, toutes remarquables dans cette rude partition, d’une âpre modernité. Axelle Fanyo en Madame Lidoine, si elle est une solide chanteuse lyrique, délivre néanmoins un chant qui incline naturellement un peu trop vers un style belcantiste. La soprano Hélène Carpentier réussit sa prise de rôle de Blanche de la Force, le personnage central du drame : son chant est parfois vibré à l’excès et comporte des aigus un peu durs ; mais cela ne nous empêche pas d’être séduit par sa présence scénique, d’une grande réussite. Elle parvient à donner vie à Blanche, à son parcours de vie, ses doutes et sa peur, et à son parcours funeste.

 

Du côté des hommes, s’ils sont moins nombreux, leur présence dramaturgique n’en est pas moins essentielle ; de grande qualité vocale, le baryton-basse Jean-Fernand Setti dans le Marquis de la Force, père de l’héroïne, désemparé face à l’attitude de sa fille quand elle lui annonce sa décision d’entrer au Carmel. Le Chevalier de la Force est assumé vaillamment par le jeune ténor Julien Henric, tandis que François Rougier campe l’Aumônier du Carmel, prêtre tout à la fois paternel et terrorisé. A noter la belle présence du ténor Matthieu Justine dans le rôle du Premier commissaire, dont la voix a parfois du mal à s’imposer, notamment pendant les fortissimi de l’orchestre. Enfin, l’Orchestre de l’Opéra de Rouen Normandie, sous la baguette inspirée de Ben Glassberg, restitue puissamment la partition de Poulenc.

 

 

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CRITIQUE, opéra. ROUEN, Théâtre des Arts, le 30 janvier 2024. POULENC : Dialogues des carmélites. E. Gazeille, L. Richardot, E. Joneau… Tiphaine Raffier / Ben Glassberg. Toutes les photos © Caroline Doutre

 

VIDEO : Trailer de « Dialogues des carmélites » de Poulenc selon Tiphaine Raffier à l’Opéra Rouen Normandie

 

OPÉRA GRAND AVIGNON. Les 28 fév, 2 et 4 mars 2025. PUCCINI : La Bohème. Gabrielle Philiponet, Diego Godoy… Frédéric ROELS (mise en scène)

Sous les mansardes du Paris de Louis Philippe, Mimi, une cousette aux mains glacées et Rodolfo, un poète au cœur ardent, éprouvant le miracle du coup de foudre… à la lueur d’une chandelle. Ce qui suscite chez Puccini le plus beau duo d’amour jamais écrit à l’opéra (et qui conclut ici l’acte I).

 

Dans la mise en scène de Frédéric Roels, directeur de l’Opéra Grand Avignon, la flamme amoureuse affronte les caprices du destin… « C’est le début d’un amour mémorable, d’un amour pour les siècles, d’un amour qui nous transperce et qui nous brûle toujours aujourd’hui : car ils l’ignorent encore, mais la flamme qui les anime succombera bientôt à la fureur des vents et de la neige, au froid qui consume, au froid qui tue ».
Grisante saga de la vie ordinaire, entre burlesque et grandiose, (- comédie aussi avec le couple détonant Musetta / Marcello), La Bohème inspirée du roman de Burger, évoque la vie misérable mais solidaire et parfois truculente des artistes et saltimbanques sans le sou (Marcello le peintre / Colline le philosophe, Schaunard le musicien…) ; l’humanité touchante et digne des petites gens qui savent rêver et s’enchanter. Le personnage de Mimì raconte également la force touchante de l’humilité, la résilience et l’amour de la vie, « le plaisir des choses simples, du printemps et des premiers soleils, aussi éphémères soient-ils ».

 

La force de l’ouvrage tient aussi à la puissance poétique de l’orchestre, vrai personnage, comme dans tous les opéras de Puccini. Dans la franchise et la sincérité d’un théâtre de la vérité (tragique au final), la mise en scène de Frédéric Roels interroge ce sublime dénuement : « source des plus terribles tragédies humaines », « matière première des plus grandes œuvres d’art ». Justesse et déflagration. Nouvelle production événement.

 

 

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Opéra Grand Avignon
PUCCINI : La Bohème
3 représentations événements
Vendredi 28 février 2025 à 20h
Dimanche 2 mars 2025 à 14h30
Mardi 4 mars 2025 à 20h
RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’OPÉRA GRAND AVIGNON : https://www.operagrandavignon.fr/la-boheme-puccini

 

Direction musicale : Federico Santi
Mise en scène : Frédéric Roels
Décors / Costumes : Lionel Lesire
Lumières : Arnaud Viala
Assistanat à la mise en scène : Nathalie Gendrot
Études musicales : Thomas Palmer
Chef de Chœur : Alan Woodbridge
Responsable de la Maîtrise : Florence Goyon-Pogemberg

Mimì : Gabrielle Philiponet
Rodolfo : Diego Godoy
Musetta : Charlotte Bonnet
Marcello : Geoffroy Salvas
Schaunard : Mikhael Piccone
Colline : Dmitrii Grigorev
Alcindoro / Benoît : Yuri Kissin

Chœur de l’Opéra Grand Avignon
Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre national Avignon-Provence

 

LE PLUS
Immersion à l’Opéra La BOHEME, ven 28 fev 2025 à 18h45, pour les détenteur du billet du spectacle du soir

OPÉRA NATIONAL du CAPITOLE de TOULOUSE. HAENDEL : Giulio Cesare. Du 21 fév au 2 mars 2025. Damiano Michieletto / Christophe Rousset

Jules César a vaincu Pompée en Égypte. Mais l’empereur romain doit à présent affronter le souverain égyptien Ptolémée, lui-même en conflit avec sa soeur Cléopâtre. Haendel s’empare de l’Histoire Antique pour aborder l’empire de l’amour, celui qui aimante dès leur rencontre, César et Cléopâtre, couple mythique, légendaire bien avant les Tristan et Yseult, ou Roméo et Juliette… le compositeur respecte le rituel et les codes de l’opera seria et imagine une fin heureuse pour conclure son action.

 

Le génie mélodique de Haendel produit plusieurs merveilles, des joyaux vocaux qui fondent toujours l’attrait spécifique de son opéra égyptien. Nombreux rebondissements, épisodes burlesques et comiques, grands élans pathétiques et sentimentaux, le Giulio Cesare de Haendel illustre aussi une dramaturgie puissante dont la construction relance constamment la tension lyrique et la variété des situations psychologiques. Grand conteur musical, Haendel écrit une partition instrumentale parmi les plus virtuoses et justes de son catalogue (avec Alcina). Voici assurément son opéra italien le mieux conçu, avant les prochains oratorios anglais qu’il porte au plus haut niveau spirituel. Outre les affrontements politiques et amoureux (le fils de Pompée, tué par César, réclame vengeance / César affronte le roi égyptien Ptolémée / Cléopâtre déguisée en Lydia séduit et envoûte littéralement César,…le général grec Achilla s’éprend de la belle veuve de Pompée, Cornélie…, etc), Haendel ménage des épisodes dramatiques d’une irrésistible suavité, tel le divertissement (théâtre dans le théâtre) que donne Cléopâtre / Lydia (déguisée en Vertu !) pour César… (avec son fameux air « V’adoro pupille ») …

 

Même immense aria d’une séduction cette fois implorante mais digne dans le second air enivré, – à la redoutable coloratura : « Piangero la sorte mia », quand Cleopatra prisonnière de son frère Ptolémée, se croit abandonnée, solitaire, perdue… Au final, les femmes (Cleopatra, Cornélie) triomphent, le compositeur signant là l’un de ses ouvrages les plus spectaculaires, où son génie sait inféoder les codes de l’opera seria, aux mouvements des passions humaines, pour un spectacle total, aussi enivrant, que psychologique et dramatique.

 

Photo : Jules César, coproduction Opéra national du Capitole / Théâtre des Champs-Elysées / Oper Leipzig / Opéra national de Montpellier / Teatro dell’Opera di Roma, 2022. © Vincent Pontet

 

 

 

 

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Toulouse, Opéra national du Capitole
Georg Friedrich Haendel : JULES CÉSAR
5 représentations
Les 21, 25 et 28 février 2025, 19h
23 février et 2 mars 2025, 15h
Théâtre national du Capitole de Toulouse

Infos et réservations directement sur le site de l’Opéra National du Capitole de Toulouse : https://opera.toulouse.fr/jules-cesar/

NOUVELLE PRODUCTION. Giulio Cesare in Egitto, Dramma per musica en trois actes – Livret de Nicola Francesco Haym d’après Giacomo Francesco Bussani  –  
Créé le 20 février 1724 au King’s Theatre in the Haymarket de Londres

 

 

ATTENTION changement de distribution :
Rose Naggar-Tremblay , Cléopâtre
Irina Sherazadishvili , Cornelia

Durée : 3h30
Chanté en italien – surtitres en français

 

 

Autour de Jules César

AVANT CHAQUE REPRÉSENTATION
Préludes – Introduction à l’œuvre 45 minutes avant le début de chaque représentation par Jules Bigey. Entrée libre – Foyer Mady Mesplé

 

JEUDI 13 FÉVRIER 9h À 17h
Journée d’étude : Jules César / 41è journée d’étude – autour de l’opéra de Georg Friedrich Haendel – / Journées scientifiques de conférences et débats, animées par des spécialistes. En collaboration avec l’Institut de Recherche Pluridisciplinaire en Arts, Lettres et Langues (IRPALL). LA REPRÉSENTATION DU MONARQUE SUR LA
SCÈNE EUROPÉENNE AUX XVIIE ET XVIIIE SIÈCLES > Programme détaillé : https://opera.toulouse.fr/wp-content/uploads/sites/7/2025/01/Dep-4-Pages-JE-Jules-Cesar-BD-PAP.pdf

Entrée libre – Foyer Mady Mesplé

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CRITIQUE, théâtre musical. GENEVE, La Cité Bleue, le 25 janvier 2025. SCHUBERT : Winterreise. V. Bunel (mezzo), J.C. Lanièce (baryton), P. Gladieux (Conception), R. Louveau (piano & conception)

Deux voix (une mezzo et un baryton) et un pianiste pour un voyage intime… sur les pas (enchanteurs) de Franz Schubert. Le spectacle imaginé (en 2021) par la Compagnie Miroirs Étendus – et « incarné » par les chanteurs solistes Victoire Bunel et Jean-Christophe Lanièce (avec la complicité du pianiste Romain Louveau) – revisite ces paysages intensément désespérés, miroitant entre langueur, blessure, et renoncement, et tisse l’action d’une séparation amoureuse.

 

Certes, la matière musicale n’est pas des plus festives : le cycle de Lieder Die Winterreise porte le crépuscule du dernier Schubert, malade et fragilisé : son testament spirituel, fraternel, et musical… Certes les poèmes de Wilhelm Müller évoquent ainsi la trajectoire d’un voyageur qu’une errance solitaire et suspendue mène aux portes de la mort. Si le cycle originel transcende le sentiment de renoncement, en parcours halluciné et létal, comme pétrifié sous une neige sépulcrale, le spectacle conçu par Philippe Gladieux et Antoine Thiollier raconte une toute autre histoire, celle de deux cœurs éprouvés que sépare et éloigne continûment l’impossibilité de s’écouter et de se comprendre. Distanciation que souligne aussi le sens même de la dramaturgie du spectacle (Antoine Thiollier a traduit chaque poème pour mieux suivre les méandres de ce cheminement imprévisible…) : quand « elle » chante face au public, « lui » est éloigné à cour ou à jardin, et inversement… et, dans le final, l’éloignement confirme deux êtres condamnés chacun à un exil solitaire.

 

De quelle façon la chaleur de sentiments à peine ressuscités peuvent-ils permettre le retour à la vie ? Est-il possible d’aimer après avoir souffert ? Où puiser la force de poursuivre ? Victoire Bunel et Jean-Christophe Lanièce ont déjà chanté ensemble l’un des Lieder extraits du Winterreise, en soulignant l’infinie « intranquillité » des sentiments humains frappés par la rupture. Les deux chanteurs se répartissent le cycle, en suivant les deux cahiers qui le composent : première session pour la mezzo, puis seconde partie pour le baryton, en contrastes constants, lui dans l’ombre, elle dans la lumière ; les deux exposés, sans filtre, face aux spectateurs, avant d’alterner leur chant en fin de cycle.

 

Ce chant à 2 voix renouvelle la perception même du cycle dans sa continuité. La tradition et l’habitude se tournent vers les barytons, interprètes familiers du cycle. La présence si prenante de la mezzo est d’autant plus appréciée : puissance et nuances, intensité doublée de sincérité, la mezzo Victoire Bunel est aussi habitée que combative, éprouvant l’amertume, acceptant l’impérieux départ, toujours « résiliante », et convaincante de bout en bout. A ses côtés, le baryton Jean-François Lanièce inscrit chaque mélodie dans une expressivité tout aussi juste, très intériorisée, où éblouissent les ténèbres d’un désespoir parfaitement vécu. Tous deux savent réaliser un chant tragique mais digne, dont la radicalité émotionnelle produit un geste vocal riche, ample et profond.

 

 

Comme un troisième personnage, le piano de Romain Louveau accuse sans dureté chaque accent de l’âme, chaque geste sincère, chaque défi de l’expérience amoureuse. Une expérience cependant définitivement inscrite dans la mélancolie éperdue de deux coeurs étrangers l’un à l’autre. Présenté entre autres à Quimper, à l’Athénée à Paris, et l’été dernier à la Ferme de Villefavard, le spectacle réussit pleinement à renouveler la compréhension du cycle de Lieder conçus par Schubert. Le voyage crépusculaire et hivernal du compositeur allemand y gagne même de nouvelles couleurs, intenses voire incandescentes, qui réactivent profondément ce nocturne envoûtant.

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CRITIQUE, théâtre musical. GENEVE, La Cité Bleue, le 25 janvier 2025. SCHUBERT : Die Winterreise. V. Bunel (mezzo), J.C. Lanièce (baryton), P. Gladieux (Conception), R. Louveau (piano & conception). Toutes les photos © Giulia Charbit

 

 

CRITIQUE, opéra. MONACO, Salle Garnier, le 28 janvier. MOZART : La Clémence de Titus. G. Sala, M. Galoyan, C Bartoli, M. Petit… Jetske Mijnssen / Gianluca Capuano

A la fin, Titus n’est pas du tout clément : il ne pardonne à personne… et se suicide ! A part le fait que la metteuse en scène néerlandaise Jetske Mijnssen n’a pas pris le temps de lire le titre de l’opéra pour arriver à une telle scène finale, la Clémence de Titus de W. A. Mozart donnée à l’Opéra de Monte-Carlo hier soir est une réussite. Car – et c’est le principal ! – la distribution vocale est superbe avec, au centre, Cecilia Bartoli, aussi brillante en cantatrice qu’en directrice de l’institution monégasque. Et, à la fin, c’est Mozart qui gagne !

 

La mise en scène, déjà vue à Copenhague et Hambourg, transpose l’histoire dans notre monde moderne : Titus et ses sénateurs sont en costard-cravate. Et c’est avec un revolver sorti de sa poche à la fin, que cet empereur romain en tenue de PDG. du CAC. 40 menace ceux qui l’ont trahi… et se tue. Le propos de la metteuse en scène est clair : faire un spectacle sur la folie intemporelle du pouvoir. Le pouvoir rend fou, on le sait depuis toujours. Il n’y a qu’à voir l’actualité internationale ! Pour être sûr qu’on comprenne son histoire, la metteuse en scène écrit en grosses lettres sur le mur de l’unique décor les mots évoquant l’avancée de l’action : « Delizia », « Tradimento » et « Clemenza ». Cela ne rend pas la mise en scène davantage convaincante. Mais une chose est certaine : elle ne nuit pas à la musique. Et c’est bien là le principal…

 

Côté distribution, nous l’avons dit, c’est un régal. On trouve, au centre, Cecilia Bartoli. Elle est la musique-même, incarnant le rôle de Sesto, l’ami traître de Titus. Le public l’ovationne. On trouve également Mane Galoyan en Vitellia (femme avide de pouvoir), admirable dans l’aisance de ses vocalises et dans la couleur de son timbre. Mélissa Petit, qui est la régionale de l’étape (native de Saint-Raphaël !), est adorable en Servilia. Son duo « Ah perdona al primo affetto » avec Annio au premier acte est un régal mozartien. En Annio, justement, voici l’éblouissante Anna Tetruashvilli, vivante, frémissante, à la voix fruitée. Côté masculin, Giovanni Sala incarne un Titus triomphant, claironnant. A ses côtés, Peter Kalman est très bon en Publius. Tout cela est de niveau international.

 

Le Choeur de l’Opéra de Monte-Carlo mérite un énorme bravo. Il excelle comme toujours, mais là… il se surpasse ! Le style, l’élan, l’homogénéité : tout y est. L’orchestre est celui des Musiciens du Prince-Monaco dirigé par l’italien Gianluca Capuano. Il offre de bons phrasés, mais aussi des sonorités parfois épaisses qui, dans l’actuel Festival Mozart de Monaco, ne concurrencent ni l’élégance mozartienne de l’Orchestre de l’Opéra de Vienne entendu la semaine précédente dans Don Giovanni en ces mêmes lieux, ni celle d’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, entendu trois jours plus tôt, à l’Auditorium Rainier III, sous la direction de Ton Koopman… 

Pour trois semaines, Monaco est devenu un Salzburg-sur-Méditerranée !

 

 

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CRITIQUE, opéra. MONACO, Salle Garnier, le 28 janvier. MOZART : La Clémence de Titus. G. Sala, M. Galoyan, C Bartoli, M. Petit… Jetske Mijnsen / Gianluca Capuano. Toutes les photos (c) Marco Borrelli

CRITIQUE, concert. AVIGNON, Opéra Grand Avignon, le 26 janvier 2025. VIVALDI / PERGOLESI : Stabat Mater. Paul Figuier (contre-ténor), Bruno de Sa (sopraniste), Ensemble Les Accents, Thibaut Noally (direction)

Désormais bien ancrée dans le paysage de la cité des Papes, l’Association Musique Baroque en Avignon, toujours ardemment dirigée par son fondateur Robert Dewulf, ne propose pas moins de 7 concerts de prestige lors de cette 25ème édition, dans les lieux les plus emblématiques de la ville. En ce dimanche 26 janvier, ce n’est non pas l’une des innombrables églises et chapelles de la Cité papale qui a été retenue, mais l’Opéra de la ville, et pour cause, les quelque 700 places de l’institution provençale étaient toutes occupées ! Il faut dire que l’affiche avait de quoi faire saliver, avec la venue de Thibault Noally et de son ensemble Les Accents, pour servir d’écrin aux deux superbes voix du contre-ténor français Paul Figuier et du sopraniste brésilien Bruno de Sa.

 

Et le programme n’a certainement pas été étranger non plus au succès remporté par la billetterie, car ces deux “tubes” de la musique baroque que sont les Stabat Mater de Pergolèse et de Vivaldi font toujours se déplacer les mélomanes. Celui de Vivaldi, écrit pour voix solo, échoit au jeune et brillant contre-ténor Paul Figuier, applaudi dernièrement au Festival d’Ambronay. La précoce étendue de ses moyens techniques le portent vers une certaine esthétisation du chant doloriste, aussi bien que jubilatoire, sans pour autant s’en tenir à des artifices vocaux affectés. C’est un chant vécu dans l’évidence et depuis l’intérieur, avec la conviction que l’univers vivaldien dépasse le simple objet décoratif. L’éclat et la vigueur du « Nunc Jubilare » sont d’abord chez le jeune chanteur au service d’un jaillissement autant que d’une plénitude spirituelle. Les qualités objectives du phrasé lui suffisent pour s’assurer une fluidité, une justesse et une conviction de ton toujours fascinantes. Et après l’exécution d’un des multiples concertos du Prêtre roux, interprété avec l’énergie communicative habituelle de Noally et son ensemble, c’est au tour de Bruno de Sa d’ensorceler le public par sa rare voix de sopraniste et sa pyrotechnie associée, dans l’aria vivaldienne “In Furore Iustissimae”, une œuvre en quatre parties contrastées : une aria agitée, un bref récitatif suppliant, une seconde aria de remerciements sincères, et un Alleluia conclusif. Sa tessiture ne cesse de surprendre par sa hauteur d’émission, l’aspect planant dans la manière de prendre les sons, avec un timbre qui s’approche de manière impressionnante de celui d’une soprano, teinté de couleurs rondes et chaudes, tout en étant doté d’un volume impressionnant. Il réussit ici à varier à l’envi le son qu’il parvient à enfler et à faire diminuer sans effort apparent, pour la plus grande joie d’un public fasciné.

 

Tout aussi populaire que les œuvres l’ayant précédées, le Stabat Mater de Pergolèse permet ensuite aux deux interprètes de délivrer naturellement la version réduite pour deux violons, un alto, un violoncelle et une basse. Thibault Noally respecte le caractère galant de l’ouvrage, soutenu par un ensemble instrumental léger et savoureux, fort d’un jeu délié et de sonorités claires, rendant l’écrin de l’Opéra avignonnais presque intimiste. Du côté des deux voix, leur mariage exprime une agréable harmonie, bien que différentes, et le dessin des lignes mélodiques respirent ici le naturel. Ils font assaut de virtuosité dans l‘Alleluia conclusif, et obtiennent un légitime triomphe, sans que nous sachions si l’enthousiaste public leur a arraché des bis, des contraintes ferroviaires nous ayant obligé à quitter la salle à l’issue du dernier ouvrage inscrit au programme…

 

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CRITIQUE, concert. AVIGNON, Opéra Grand Avignon, le 26 janvier 2025. VIVALDI / PERGOLESI : Stabat Mater. Paul Figuier (contre-ténor), Bruno de Sa (sopraniste), Ensemble Les Accents, Thibaut Noally (direction). Crédit photographique (c) Emmanuel Andrieu

 

VIDEO : Paul Figuier chante « In darkness let me dwell‘ de John Dowland

 

CRITIQUE, concert. PARIS, INVALIDES, jeudi 23 janvier 2025. « Ici Londres » : Beethoven, Bizet, Chausson, Ravel… Orchestre symphonique de la Garde républicaine, Svetlin Roussev, violon / Bastien Stil, direction

Somptueux (et généreux) programme présenté sous la nef de la Cathédrale Saint-Louis des Invalides, le concert du 23 janvier promettait l’éclat et le raffinement des grandes soirées symphoniques. Pari tenu et même dépassé à l’écoute de partitions qui sont autant risquées que flamboyantes.

 

 

Après une Marseillaise aussi habitée que brillante, le maestro Bastien Stil, 10ème chef de la phalange et qui dirige ce soir son premier concert de la saison, engage toutes les ressources de l’Orchestre de la Garde Républicaine dans l’ouverture « Patrie » d’un Bizet qui est en 1874, maître de ses effets et ici, (répondant à une commande de l’Orchestre Pasdeloup), à la fois conquérant voire martial mais fabuleusement miroitant ; l’écriture impérieuse et conquérante, n’écarte pas de superbes vagues d’une volupté assumée (aux violoncelles entre autres), soulignant de la part des instrumentistes, leur capacité ciselée dans la puissance comme dans le détail et la nuance.

 

Fleuron de ce programme ambitieux, le Poème pour violon et orchestre d’Ernest Chausson qui révèle toute la science de l’élève de Massenet, surtout de César Franck dont il partage le goût des harmonies raffinées, du principe cyclique avec cette allusion saisissante pour la texture miroitante, sulfureuse, vénéneuse de Wagner. La partition est d’autant plus maîtrisée qu’elle est l’une des plus tardives (1896), étonnamment rare au concert, en raison de la difficulté exigée aussi bien de l’orchestre que du soliste ; défi relevé et avec quel style par les interprètes de ce soir : la compréhension de la pièce faussement libre et improvisée (en réalité très savamment architecturée), la fluidité raffinée en partage chez tous les pupitres (de l’alto primordial à la harpe aux scintillements franckistes…), l’attention du chef aux passages harmoniques, les phrasés en nombre, l’acuité des timbres admirablement détaillés, – c’est à dire individualisés mais en communion, … la pâte globale de la phalange, d’une transparence voluptueuse tout du long, composent une soie magicienne, à la fois enivrée et construite pour le soliste, le violoniste bulgare Svetlin Roussev, au son clair et vaporeux à la fois, dont le verbe articulé, poétique, dans une sonorité comme hallucinée et suave, produit cet envoûtement tant espéré de l’auditeur. Le pouvoir et la puissance de l’amour y sont exprimés avec une ineffable intensité dont pourtant les instruments, soliste en tête, savent préserver tout le mystère intranquille. L’orchestre produit une houle texturée, ample et souple qui sous la direction du chef se fait lave incandescente et feutrée. Exquise équation magnifiquement réalisée ce soir.

 

Au mérite du violoniste vedette, revient la lecture dans le même concert, en première partie, du Concerto pour violon de Beethoven, portique majestueux de 1806, et en réalité d’une tendresse infinie, qui souligne l’un des axes du concert, l’esprit de réconciliation entre France et Allemagne. Ainsi en avril 1943, Yehudi Menuhin donnait ce même programme (d’où le titre du concert : « Ici Londres »). Les dimensions nobles et d’une lumière intérieure souvent irrésistible doivent beaucoup au sentiment qui exalte alors l’inspiration du compositeur : bien que son opéra Fidelio n’ait pas eu le succès attendu (fin mars 1806), la période est heureuse, portée par l’amour de la fiancée secrète de Ludwig, Thérèse von Brunswick. Chef et instrumentistes soulignent d’ailleurs à juste titre l’entente entre l’orchestre et la partie du violon solo, continûment habitée par un sentiment aussi dense qu’éperdu, comme suspendu dans une sérénité épanouie. Le son de Svetlin Roussev éblouit au sens strict, par sa finesse d’intonation, son sens organique du chant, sa virtuosité brillante, jamais démonstrative mais au contraire comme mesurée et toujours contenue par un admirable sens de la pudeur. Comme dans le Chausson, le Larghetto, dans l’esprit d’une romance libre, fantaisiste même, fait surgir un climat de rêve voire d’extase où brillent en particulier ce soir les cors et les clarinettes, dialoguant remarquablement avec le violon solo.

 

Fracassante et éruptive, l’ouverture « Carnaval romain » de Berlioz (1844) accomplit une conclusion idéale ; la partition crépite et envoûte de la même façon, véritable résumé de l’opéra « Benvenuto Cellini » où rayonne entre autres solistes convaincants, le cor anglais pour le chant d’amour ; c’est une fin bienvenue, festive, et si raffinée dans ses contrastes et dans le jeu des timbres ; une partition qui souligne les qualités de l’Orchestre de la Garde Républicaine : intensité, élégance, cohésion. De quoi attendre avec impatience le prochain concert symphonique du 6 février 2025, même lieu et même audace assumée dans le choix des œuvres présentées : Requiem de Tomasi et Symphonie n°2 d’Elsa Barraine. Ce qui en fait là aussi un concert-événement.

 

 

Svetlin ROUSSEV et l’Orchestre de la Garde Républicaine sous la direction de Bastien STIL  © COCAF / Invalides 2025

 

Photos : Orchestre de la Garde Républicaine / © COCAF

 

 

prochain concert aux INVALIDES

INVALIDES, Cathédrale Saint-Louis. Jeu 6 fév 2025 : Requiem de Tomasi, Symphonie n°2 « Voïna » d’Elsa Barraine. Orchestre de la Garde Républicaine, Sébastien Billard (direction) :  https://www.classiquenews.com/invalides-jeu-6-fev-2025-requiem-de-tomasi-symphonie-n2-voina-delsa-barraine-orchestre-de-la-garde-republicaine-pascal-billard-direction/

 

INVALIDES. Jeu 6 fév 2025 : Requiem de Tomasi, Symphonie n°2 « Voïna » d’Elsa Barraine. Orchestre de la Garde Républicaine, Sébastien Billard (direction)

 

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LIRE aussi notre présentation annonce du concert ICI LONDRES aux INVALIDES, le 23 janvier 2025 :
https://www.classiquenews.com/paris-invalides-jeudi-23-janvier-2025-ici-londres-beethoven-bizet-chausson-ravel-orchestre-symphonique-de-la-garde-republicaine-svetlin-roussev-violon/

CRITIQUE, opéra. GENEVE, Grand-Théâtre (du 22 janvier au 2 février 2025). R. STRAUSS : Salomé. O. Golovevna, G. Bretz, J. Daszak… Jukka-Pekka Saraste / Kornel Mondruczo

Familier des metteurs en scène les plus sulfureux du moment, Aviel Cahn fait revenir au Grand-Théâtre de Genève – après sa décoiffante “Affaire Makropoulos” en 2020 -, le trublion hongrois Kornél Mondruczo, pour une lecture toute aussi “hors-piste” de la Salomé de Richard Strauss.

 

De fait, nul Judée antiquisante ici, mais l’étage cossu d’un building new-yorkais, qui s’avère être la Trump Tower, ce que nous révèle l’arrivée pétaradante d’un Hérode grimé en Donald Trump, coiffure similaire et cravate orange à l’appui, tandis que ses patibulaires acolytes portent des casquettes rouges où s’affichent des “MAGA” (Make America Great Again) !… En contrebas, des manifestants crient leur mécontentement, auxquels les sbires de Hérode/Trump et les nombreuses escort-girls qui les accompagnent prêtent parfois l’oreil… entre deux lignes de coke et quelques rasades de whisky ! Salomé ressemble aux girls, en affichant la même vulgarité, tandis que Iokanaan est attifé comme un gaucho de base, confiné dans un ascenseur qui lui sert de prison, et dans lequel Hérode culbutera de la plus violente façon Salomé après qu’elle ait effectué la fameuse Danse des 7 voiles… Après le viol de l’héroïne, la scène passe de la violence à la folie, et l’on assiste à une bacchanale de notre temps, avec des objets symboliquement phalliques qui tombent des cintres, images cependant bien moins impressionnantes que l’étonnante scène finale où émerge progressivement, dans le noir depuis le fond de scène, la tête tranchée en format géant de Iokanaan. Salomé et ses sœurs de souffrance en sortent par tous les orifices (nez, bouche et même ses oreilles…), en se livrant à des contorsions à la fois morbides et lascives… 

 

La soprano ruse Olesya Golovevna s’empare du rôle-titre avec une présence exceptionnelle. La voix n’est pas en reste, claire, admirablement projetée, qui restitue toute la monstruosité de cette femme-enfant et sait s’autoriser des raucités vulgaires (avec quel mépris elle énonce les syllabes de « Tetrach ! »). Elle forme en plus un couple d’une séduction irrésistible avec le magnifique Iokanaan de la basse hongroise Gabor Bretz, au chant plein de charisme et de grandeur, malgré son ridicule accoutrement. De son côté, le ténor britannique John Daszak, aussi excellent acteur que chanteur, campe un Hérode à la voix superbement projetée, tandis que le personnage de Hérodiade trouve dans la mezzo allemande Tanja Ariane Baumgartner une interprète de haute volée, aux moyens amples et au timbre chaud. Loin de la traditionnelle harpie dans laquelle nombre de metteurs en scène enferment volontiers le rôle, elle dessine une Hérodiade terriblement humaine dont la voix révèle sans cesse la détresse. Matthew Newlin est tout simplement superbe dans le rôle de Narraboth, tandis que la mezzo Ena Pongrac se montre très convaincante dans la tessiture du Page. 

 

Excellente, enfin, la direction musicale du chef finlandais Jukka-Pekka Saraste qui sait souligner les sortilèges et les luxuriances de l’orchestration, ainsi que ses contrastes entre pur lyrisme et dramatisme exacerbé. Sans jamais laisser retomber la tension, le jeune chef allemand parvient à ne jamais couvrir les voix, ne déchaînant un Orchestre de la Suisse Romande, magnifique de cohésion et de clarté, que dans les séquences instrumentales ou les imprécations de Iokanaan.

 

 

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CRITIQUE, opéra. GENEVE, Grand-Théâtre (du 22 janvier au 2 février). R. STRAUSS : Salomé. O. Golovevna, G. Bretz, J. Daszak… Jukka-Pekka Saraste / Kornel Mondruczo. Toutes les photos © Magali Dougados

 

VIDEO : Trailer de « Salomé » de R. Strauss selon Kornél Mondruzo au Grand-Théâtre de Genève

 

ENTRETIEN avec VICTOR JULIEN-LAFERRIERE, à propos de son orchestre CONSUELO… profil des instrumentistes, Suite de l’intégrale Beethoven, répertoire, nouvel album (Suites de Tchaikovski), projets futurs……

Inspiré par George Sand et son roman musical Consuelo, le violoncelliste Victor Julien-Laferrière a fondé son propre orchestre dont le profil chambriste de chaque instrumentiste fonde un rapport humain renouvelé, et aussi une autre conception des partitions choisies… L’orchestre souple et adaptable, de 15 à 50 musiciens, peut ainsi ciseler chaque détail (articulation, nuances, phrasés…). L’intégrale Beethoven en cours en témoigne, le résultat sonore découle de sessions préparatoires de plusieurs mois. Dans le futur, la phalange souhaite jouer des partitions méconnues comme servir les fondamentaux du répertoire symphonique, un jeu d’équilibre qui stimule la créativité et promet dans les mois à venir, de nouvelles réalisations passionnantes. Début février, paraît le nouvel album de l’Orchestre Consuelo : les Suites n°1 et 2 de Tchaikovski, nouveau jalon d’une trajectoire artistique avec laquelle il faut désormais compter.

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CLASSIQUENEWS : Pourquoi avoir baptisé votre propre orchestre  » Consuelo » ? Quelle en est la référence / l’intention et le projet sous-jacent ?
Victor Julien-Laferrière : Consciemment ou non, j’étais attiré par le fait de nous placer sous la figure tutélaire de George Sand, personnage considérable de l’histoire de la musique de par son lien profond avec plusieurs compositeurs de son temps. Puis m’est revenu en mémoire la lecture de son roman Consuelo, qui m’avait marqué par évocations multiples de la musique. C’est un roman très particulier dans la littérature française, puisqu’il faudra ensuite attendre Proust pour retrouver autant de musique dans un roman.

 

CLASSIQUENEWS : Quel est le profil des instrumentistes de Consuelo ? Comment les sélectionnez-vous ? Y a-t-il un fonctionnement spécifique à l’orchestre ? 
Victor Julien-Laferrière : Il y a deux profils principaux : le premier, celui du « chambriste », spécialiste du trio, quatuor, quintette voire qui peut venir aussi du baroque ou de la musique contemporaine, un profil «  free lance » en quelque sorte. Il est attiré par le répertoire symphonique et par le fait de l’aborder dans un cadre d’orchestre plus « humain » que les très grandes institutions. Cadre qui permet un contact plus direct au sein de l’orchestre du fait de sa taille réduite (40/50 musiciens). L’autre profil, c’est celui de membres de grands orchestres français ou européens qui cherchent à aborder le répertoire symphonique différemment et certainement aussi à côtoyer les musiciens chambristes, attirés par un autre profil de collègues, et cela leur est possible à Consuelo.

 

CLASSIQUENEWS : Dans les répétitions sur quels points travaillez-vous spécifiquement avec les instrumentistes ? 
Victor Julien-Laferrière : Difficile de répondre car je suis souvent trop immergé dans le processus pour avoir le recul de comparer. Un observateur extérieur noterait probablement une attention précise à l’endroit du texte musical. D’ailleurs ce rapport à la partition est très différent selon les compositeurs et les éditions. Par exemple, selon que le manuscrit est une version définitive ou non, ou que le compositeur ait bénéficié d’un bon travail de l’éditeur ou non. Généralement, cette attention au détail passe aussi par un travail minutieux de l’articulation, des nuances et des phrasés. On profite de la particularité de notre fonctionnement pour apporter une attention à certains aspects qu’il n’est pas aisé d’aborder habituellement.

 

CLASSIQUENEWS : En quoi votre approche des Symphonies de Beethoven est-elle une expérience formatrice pour l’orchestre ?
Victor Julien-Laferrière : C’en est une par le simple fait d’aborder ce cycle immense et incroyable, sur le temps long. Cela dure 4 ans avec des séquences de plusieurs mois pour chaque symphonie ce qui, au regard de ce qui est pratiqué généralement dans le monde des orchestres, est conséquent. C’est exaltant de les enregistrer dans ces conditions, avec un ensemble qui n’a pas de tradition préconçue. Cela nous donne une vraie liberté dans le choix d’interprétation.

 

CLASSIQUENEWS : Quel est le répertoire type de l’Orchestre ? Après Beethoven, quels sont les prochains compositeurs et programmes abordés ?
Victor Julien-Laferrière : Nous avons deux grands piliers en ce qui concerne le répertoire. Le premier est celui qui n’est pas tellement abordé par les institutions car elles ont souvent moins de souplesse dans la taille d’orchestre (nous pouvons descendre jusqu’à 15 musiciens ou monter à plus de 50). On a donc une place toute naturelle pour jouer un répertoire injustement délaissé. Les Suites pour orchestre de Tchaïkovski s’inscrivent dans cette démarche, comme c’était le cas d’une certaine façon avec les Sérénades de Brahms pour notre premier album. L’autre pilier, c’est le répertoire éternel, les classiques, fondamentaux, que chaque génération doit, selon moi, aborder pour développer sa vision, son rapport à cet héritage commun. A l’avenir, il y aura sûrement un grand projet des Symphonies de Schubert, encouragé par la célébration du bicentenaire de sa mort. Pour les œuvres moins jouées, j’aimerais beaucoup aborder certaines de Liszt, redécouvrir des compositeurs français méconnus et créer une œuvre écrite pour nous !

 

CLASSIQUENEWS : En quoi votre propre activité comme violoncelliste peut-elle enrichir voire singulariser votre activité de chef et votre travail avec les instrumentistes de Consuelo ? Quels sont les œuvres prévues où vous jouerez avec l’Orchestre comme soliste ? Qui dirige alors ? 
Victor Julien-Laferrière : Ce n’est pas la vocation de l’orchestre de m’accompagner en soliste. Le cœur de notre projet est bien le répertoire symphonique. Je me joins en tant que soliste de façon sporadique, ce qui est un grand plaisir. J’ai surtout beaucoup de bonheur à accompagner d’autres solistes. Sur l’apport de mon profil de violoncelliste, je penserais à l’inverse : depuis que je suis chef, je prends peut-être encore plus de plaisir à jouer en tant que violoncelliste, c’est un équilibre assez exceptionnel et un peu fou par l’intensité que cela requiert que de pouvoir vivre les deux activités simultanément.

 

CLASSIQUENEWS : Quel sera votre approche des œuvres de Tchaïkovski ? En quoi cela complète, prolonge-t-il le travail chez Beethoven ? 
Victor Julien-Laferrière : Dans le rapport au texte, c’est très différent de Beethoven. Tchaïkovski nous livre des manuscrits extrêmement détaillés et propres. Bien sûr il y a eu des changements auprès de l’éditeur ou d’autres versions, mais se plonger dans ses manuscrits est un vrai plaisir. C’est assez inégal dans l’édition de ses œuvres, on trouve des choses peu cohérentes, donc ce retour aux sources est important. Enfin, il y a une énorme partie de la production de Tchaïkovski qui n’est pas bien connue en France ou à l’Ouest. Je l’ai mieux connue quand j’ai joué en Europe de l’Est ou en lisant des ouvrages liés à la musique russe. Ce qui est très agréable dans ces suites c’est d’aborder du Tchaïkovski sans le connaître. La plupart du temps c’est impossible car on connait très bien ses symphonies ou ses musiques de ballet, .

 

CLASSIQUENEWS : Les premiers enregistrements sont des prises live. Comparé aux prises studio quelle en est la qualité et en quoi cela reflète-t-il votre démarche artistique ? 
Victor Julien-Laferrière : Beethoven ce sont des prises live, alors que Tchaïkovski c’est en studio. Dans les prises live, le point le plus intéressant c’est qu’on obligé d’être sans filet, on doit avoir cette honnêteté intellectuelle de se plonger dans le moment présent. C’est très agréable car on doit aller à l’essentiel et s’interdire toutes circonvolutions comme c’est parfois tentant en studio. C’est un live à peine corrigé, au sein d’un festival d’été avec le bouillonnement qui le caractérise. On se sert de la dynamique du moment pour colorer ces symphonies de Beethoven. Pour les suites de Tchaïkovski, c’est un peu différent : on créé une énergie initiée lors des concerts car on enregistre après avoir joué plusieurs fois la pièce. On essaye malgré tout de garder un naturel. Mais ces œuvres exigent de l’orchestre une grande agilité dans toutes les sections et le temps passé en studio pour les enregistrer était plus que nécessaire !

Propos recueillis en janvier 2025

 

 

 

actualités de CONSUELO / agenda
Evénements sélectionnés par CLASSIQUENEWS

 

ORCHESTRE CONSUELO. TCHAIKOVSKI : Suites d’orchestre n°1 et 2. Concerts les 7, 12, 13, 14 février 2025 – Victor Julien-Laferrière (direction). Nouveau CD (Mirare – parution : 31 janv 2025) : https://www.classiquenews.com/orchestre-consuelo-tchaikovski-suites-dorchestre-n1-et-2-concerts-les-7-12-13-14-fevrier-2025-victor-julien-laferriere-direction-nouveau-cd-mirare-parution-31-janv-2025/

 

ORCHESTRE CONSUELO. La Coursive de La Rochelle, le 7 fév 2025. Beethoven, Dvorak, Tchaikovsky. Liya Petrova (violon), Victor Julien-Laferrière (violoncelle et direction) : https://www.classiquenews.com/orchestre-consuelo-beethoven-dvorak-tchaikovsky-la-rochelle-le-7-fev-2025-liya-petrova-violon-victor-julien-laferriere-violoncelle-et-direction/

 

Orchestre CONSUELO. Nantes, Folle Journée, les 31 janvier puis 1er février 2025. Tchaikovski : Suite n°3, La tempête, Concert pour violon (Bomsori Kim), Victor-Julien Laferrière, direction : https://www.classiquenews.com/orchestre-consuelo-nantes-folle-journee-les-31-janvier-puis-1er-fevrier-2025-tchaikovski-suite-n3-la-tempete-concert-pour-violon-bomsori-kim-victor-julien-laferriere-direction/

 

 

OPÉRA DE PARIS. OFFRE FLASH EXCEPTIONNELLE : 4000 places à partir de 35 euros sur 3 productions lyriques à venir (Les Puritains, Pelléas et Mélisande, Don Carlos)

OFFRE FLASH EXCEPTIONNELLE… L’Opéra national de Paris propose ce 28 janvier (et jusqu’au 4 février 20254 000 places aux tarifs exceptionnels de 35 € à 90 €* (au lieu de 48 € à 180 €) pour 3 opéras à venir : Les Puritains, Pelléas et Mélisande et Don Carlos. 3 productions parmi les plus convaincantes de la saison en cours et qui témoignent de la riche diversité des approches artistiques, mises en scène et distributions…

 

 

Bénéficiez de cette offre jusqu’au 4 février inclus en sélectionnant les dates qui portent la mention en rouge « Offre spéciale : 4 000 places à partir de 35 € » sur le site de l’Opéra de Paris. Réservez vite et profitez d’un large choix sur les séances et les places disponibles.

OFFRE LIMITÉE, non-rétroactive et non-cumulable, valable dans la limite des disponibilités sur une sélection de représentations et de catégories à l’Opéra Bastille.

 

 

Les 3 opéras inclus dans l’offre FLASH

 

 

LES PURITAINS – du 6 février au 5 mars 2025 à l’Opéra Bastille
Compositeur : Vincenzo Bellini / Metteur en scène : Laurent Pelly, de 35 € à 70 €
PLUS D’INFOS et BANDE-ANNONCE sur le site de l’Opéra de Paris : https://www.operadeparis.fr/saison-24-25/opera/les-puritains

L’opéra ultime de Bellini qui devait mourir à Puteaux en 1835… Les Puritains / I Puritani indique le dernier Bellini, grand invité de Rossini à Paris qui offre l’un des plus beaux rôles féminins, chanté par Lisette Oropesa (Elvira). Vincenzo Bellini, l’auteur de Norma réunit ici tous les ingrédients inhérents au genre belcantiste passé par le prisme du grand opéra romantique : une histoire d’amour passionnée au temps de Cromwell (entre Elvira et Arturo), un somptueux effectif orchestral et choral et de grands moments de bravoure vocale taillés pour 4 chanteurs d’exception. Sur la scène de l’Opéra Bastille, le chef Corrado Rovaris dirige Lisette Oropesa, Lawrence Brownlee, Roberto Tagliavini et Andrei Kymach dans une mise en scène stylisée de Laurent Pelly.

 

 

PELLÉAS ET MÉLISANDE – du 28 février au 27 mars 2025 à l’Opéra Bastille – Compositeur : Claude Debussy / Metteur en scène : Wajdi Mouawad, de 50 € à 90 €
PLUS D’INFOS et BANDE ANNONCE sur le site de l’Opéra national de Paris : https://www.operadeparis.fr/saison-24-25/opera/pelleas-et-melisande

Présentation : Le chef-d’œuvre lyrique de Claude Debussy dans une mise en scène inédite de Wajdi Mouawad. Sur un livret d’après Maurice Maeterlinck, Debussy l’œuvre maîtresse de l’opéra en France au début du XXè (1902), réalisant une voie originale à l’ombre écrasante de Richard Wagner. Sous influence symboliste et impressionniste, Debussy écrit une partition aux nuances infinies, offrant une parfaite harmonie entre déclamation lyrique extrêmement subtile et parure orchestrale d’une clarté diaphane. Sabine Devieilhe et Huw Montague Rendall incarnent les amants maudits, sous la direction musicale d’Antonello Manacorda et dans une nouvelle production signée à Wajdi Mouawad.

 

 

DON CARLOS – du 29 mars au 25 avril 2025
Compositeur : Giuseppe Verdi / Metteur en scène : Krzysztof Warlikowski, de 50 € à 90 € – PLUS D’INFOS et BANDE ANNONCE directement sur le site de l’Opéra national de Paris : https://www.operadeparis.fr/saison-24-25/opera/don-carlos

Présentation : Un grand opéra à la française sur une partition de Giuseppe Verdi. Grand opéra romantique français (chanté en français puisque écrit pour l’Opéra de Paris), Don Carlos est une œuvre d’une grandeur tragique exceptionnelle, dans laquelle Verdi dresse de personnages pris dans un entrelacs de conflits politiques, familiaux et amoureux des portraits musicaux d’une grande subtilité. Simone Young dirige une superbe distribution emmenée par Charles Castronovo et Marina Rebeka, dans la mise en scène de Krzysztof Warlikowski, qui confère à cette fresque historique du XVIe siècle la profondeur d’un huit clos moderne où la psyché est mise à nu.

 

 

Modalités de réservation

– En ligne sur operadeparis.fr. Représentations qui portent la mention rouge « Offre spéciale : 4 000 places de 35 € à 90 € »
– Par téléphone au 08 92 89 90 90 (0,35 € TTC / min)
– Aux guichets du Palais Garnier et de l’Opéra Bastille

 

 

 

CRITIQUE, concert. PARIS, Espace Bernanos, le 25 janvier 2025. Récital d’Etsuko Hirose. Tiziana De Carolis, Béatrice Thiriet, Henri Nafilyan. Etsuko Hirose : transcription de Sheherazade de Rimsky-Korsakov.

Une première partie dédiée aux compositeurs.trices contemporain(e)s souligne la valeur et l’ouverture du récital de la pianiste Etsuko Hirose, donné dans l’Auditorium de l’Espace Bernanos, à quelques pas de la gare Saint-Lazare. La passionnante interprète s’empare de trois écritures, très diverses et contrastées ; celle d’abord, ardente et souple, très accessible et narrative de Tiziana De Carolis (inspirée par Jane Austeen)…

 

…méditative et comme suspendue de Béatrice Thiriet ; enfin les climats caractérisés fougueux, volubiles d’Henri Nafilyan, à travers la verve, vive, éruptive, des 16 « Noèmes » dont Etsuko Hirose exprime le flux créatif, l’énergie d’essence schumannienne (comme en témoigne le dernier noème qui semble s’embraser dans la lumière).  Le clou de la soirée (véritable prétexte à notre présence en réalité) demeure en seconde partie, la propre transcription d’Etsuko Hirose de l’une des partitions les plus flamboyantes pour orchestre : Shéhérazade de Rimsky-Korsakov. C’est déjà un défi de choisir une telle œuvre ; d’en exprimer sur les seules touches du piano, le souffle et la profondeur orchestrale, tout le scintillement instrumental, les couleurs autant que les… rythmes. La transcription a récemment fait l’objet d’un enregistrement discographique, célébré à juste titre par notre distinction : le CLIC de CLASSIQUENEWS.

 

Très ancrée dans le piano, révélant au centre du clavier de somptueuses notes médianes, la pianiste ne réduit en rien la partition originelle ; elle prend appui, dans un jeu solide, charpenté pour exprimer tout l’infini poétique de chacune des quatre parties ainsi transcrites. Le souffle épique qui naît de la mélodie primitive, d’une ondulation voluptueuse dans la première, celle du vaisseau de Sindbad sur la mer : la clarté polyphonique, la ciselure nuancée de chaque mélodie, les nuances qui suscitent les timbres originaux ressuscitent alors le piano virtuose, à la fois brillant et conteur des plus grands : Liszt, Chopin, Kalkbrenner (dont d’ailleurs Etsuko Hirose a joué et enregistré la transcription de la 9ème de Beethoven).

 

Même maîtrise totale entre martialité motorique et volupté épique pour l’évocation du Prince Kalendar, noble guerrier dont la pianiste exprime le tempérament impétueux et aussi contemplatif, enivré d’exploits, de gloire, d’ivresse conquérante. On retrouve dans la Grande Fête à Bagdad, dernier volet, ce crépitement digital, à la fois puissant et orfévré, bouillonnement et déflagration qui s’achève comme chez Liszt, dans une transcendance éthérée.

Le grand frisson s’est réalisé à un niveau supérieur encore dans le 3è épisode, celui le plus enivré, wagnérien, entre rêve et extase… narrant les amours du prince et de la princesse ; très à son aise, intimement inspirée, la pianiste embrasse tout le mouvement avec une souplesse, des respirations plus profondes encore qui expriment davantage l’ivresse et l’accomplissement romantique de la séquence : registre médium très puissant, jeu structuré ; aux accents lisztéens et wagnériens, voici ce grand piano sorcier, flamboyant, orchestral, prodigieux et raffiné. Captivant !

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CRITIQUE, concert. PARIS, espace Bernanos, le 25 janvier 2025. Récital d’Etsuko Hirose, piano. Tiziana De Carolis (Sense & Sensibility – Androgynous), Béatrice Thiriet (La nuit, Ce soir là…), Henri Nafilyan (16 Noèmes). Etsuko Hirose : transcription de Sheherazade de Rimsky-Korsakov.

CRITIQUE, concert. TOULOUSE, Halle-aux-grains, le 24 janvier 2025 (Les Grands Interprètes). W. A. MOZART : Symphonie n°40 / Requiem / Ave Verum. Bach Collegium Japan / Masato Suzuki (direction)

Masato Suzuki et son Bach Collegium Japan sont mondialement connus par leur intégrale des Cantates de Bach très épurées. Cette proposition du Requiem de W. A. Mozart était hors de leur répertoire habituel. Ils l’ont enregistré en 2013 et présenté en concert en 2014. Il ressort de leur proposition interprétative que les Japonais apportent des éléments très intéressants. La version de Suzuki fait des changements par rapport à la version de Süssmayer avec de nombreux enrichissements. Si les premières mesures de l’orchestre nous ont semblé manquer de mystère et de souplesse, l’entrée du chœur a complètement changé la donne. L’équilibre des pupitres du chœur est en faveur des voix d’hommes. Le pupitre de basse et de ténor sont placés au centre, les sopranos à gauche, les alti à droite. Il y a 5 basses, 5 ténors, 5 alti dont deux hommes et seulement 4 sopranos pour ce concert. L’entrée des basses est à la fois majestueuse et réconfortante. Tout le long ce superbe pupitre soutiendra à la perfection tout l’édifice. Les ténors ne sont pas en reste lumineux et tendres mais également mordants quand il le faut. Les alti assurent une présence harmonique solide et les sopranos sans aucune surenchère apportent la grâce de leurs voix très pures dans un chant toujours limpide. L’orchestre restera comme en retrait, favorisant une vocalité généreuse. 

 

Les solistes : Carolyn Sampson en soprano, Marianne Beate Kielland en mezzo-soprano, Shimon Yoshida en ténor et Dominik Wörner en basse, forment un quatuor équilibré et musical. C’est vraiment le chœur qui apporte toute la délicate dramaturgie de ce si beau Requiem. La précision des attaques dans le Kyrie est sensationnelle. Les fugues sont simples et belles et toujours d’une parfaite lisibilité. Les amples phrasés, les magnifiques couleurs ombrées, les nuances infimes font de ce chant choral un véritable enchantement. Jamais, je n’avais entendu dans ce Requiem un chœur si précis et si parfait musicalement. L’Ave Verum est de la même qualité avec une magie délicate. La beauté des phrasés et de très belles nuances apportent une touche de mystère bienvenue. 

 

Nous oublierons, en revanche, la première partie du concert avec la Quarantième symphonie de Mozart. Un orchestre sec à force de précision, une direction quasi-robotique n’ont pas permis à la profondeur de la partition de se déployer. Un Mozart orchestral comme « hygiénique » et sans saveurs ne peut convaincre. Oublions cette symphonie, car le Requiem restera un souvenir merveilleux avec un chœur superlatif.

 

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CRITIQUE, concert, TOULOUSE, Halle-aux-grains, le 24 janvier 2025 (Les Grands Interprètes). W.A. MOZART : Symphonie n°40 / Requiem / Ave Verum. Bach Collegium Japan / Masato Suzuki (direction). Crédit photographique © Droits réservés

 

 

CRITIQUE, 31ème Festival CLASSICAVAL. VAL D’ISERE, les 15 et 16 janvier 2025. Anne-Lise Gastaldi, Virginie Buscail, Clément Saunier… Loann Fourmental

L’édition 2025 du festival CLASSICAVAL de Val d’Isère restera dans les mémoires comme un cru d’excellence ; une édition qui a incarné avec éclat les fondamentaux de l’événement musical : excellence, transmission, découvertes…

 

Une pleine réussite qui est aussi le renforcement de son ancrage dans le village avec pour personnage principal, l’église baroque où ont lieu tous les concerts : Saint Bernard de Menthon. La 31ème édition célèbre à nouveau les noces spécifiques des cimes enneigées et de la musique classique, en particulier chambriste. Val d’Isère poursuit sa transformation dans le sens d’un raffinement et d’une montée en gamme de son offre touristique ; évidemment les touristes toujours au rendez-vous viennent principalement skier ; tous savent combien ici l’enneigement y est exceptionnel et ses pistes parmi les plus attrayantes d’Europe.

 

Mais il y a à Val d’Isère ce supplément d’âme qui fait le charme d’une station qui a su conserver, entretenir, et même renforcer son identité aveline, un trésor qui écarte l’artificialité mondialisée [pour le moment]. L’art de vivre en haute tarentaise et spécifiquement à Val d’Isère, n’a pas son pareil et la destination offre une expérience exclusive. La présence d’un festival de musique classique ajoute évidemment au prestige et à la singularité du site [les offres culturelles et surtout la musique classique, demeurent [trop] rares dans les stations de ski, l’hiver. Pendant 3 soirs, avalins et visiteurs ont pu suivre les programmes musicaux conçus par la pianiste Anne-Lise Gastaldi, directrice artistique de l’événement. L’artiste a à coeur de poursuivre l’héritage du fondateur Jean Rezine quand encore jeune musicienne au démarrage d’une carrière professionnelle, il s’agissait de jouer pour parfaire encore sa pratique, enrichir son expérience, recevoir les conseils des plus avisés. Entre transmission et partage, CLASSICAVAL qui a fêté ses 30 ans en 2024, propose ainsi plusieurs programmes riches, équilibrés, originaux.

 

Preuve en est donnée le premier soir de notre présence, mercredi 15 janvier ; comme une tradition bien comprise des festivaliers, chaque concert du mercredi met en avant un instrument spécifique, ce soir, la trompette… Incarnée par un virtuose déjà connu, Clément Saunier, membre de l’Intercontemporain. L’instrument rarement exposé dans un dispositif chambriste, permet ce soir d’écouter plusieurs partitions rares [d’autant plus appréciées] : l’exceptionnel et rarissime Septuor de SAINT-SAËNS, mais aussi Telemann [bienvenu dans l’écrin baroque de l’église], de Robert Planel.
La complicité entre les musiciens produit ses fruits avec des cordes attentives, précises, engagées (conduites par Virginie Buscail), entre le piano d’Anne Lise Gastaldi et la trompette aux inserts raffinés et épisodiques auxquels le trompettiste apporte la plus grande douceur grâce à une maîtrise exceptionnelle des nuances. SAINT-SAËNS se délecte à varier les séquences entre vivacité, entrain, humour aussi. La partie du piano est majeure [Anne-Lise Gastaldi habitée, concentrée, argumentée comme à son habitude], les cordes exaltées, raffinées et la trompette aussi économe que fluide et percutante. Ce Septuor magnifiquement écrit est un joyau, d’autant plus apprécié à CLASSICAVAL.

 

Le lendemain (16 janvier 2025), récital d’un élève d’Anne-Lise Gastaldi, Loann Fourmental, qui après un Chopin ample et d’une force ancrée, sépulcrale, réalise un somptueux récital Robert Schumann à travers les 14 épisodes des « Bunte Blätter » / feuillets musicaux ; cycle de séquences courtes, ébauchées avec nervosité et caractère, sachant alterner le vif et le tendre… Entre souffle et fulgurance, le pianiste trouve ses marques faisant chanter le clavier avec une impétuosité ciselée, délivrant de Schumann cet allant enivré, exalté, voire éperdu grâce à l’éloquence articulée de son jeu. En conclusion, et comme un nouvel accomplissement, le jeune pianiste joue La Semaine grasse du ballet Petrouchka de Stravinski, dans sa version originale pour piano de 1911 : solide et précis, puissant et nuancé, le piano de Loann Fourmental exprime toute la malice indomptable de la marionnette séditieuse, héros impétueux qu’il intègre ainsi dans une geste irrésistible en verve et contrastes maîtrisés. RV est déjà pris pour l’année prochaine (janvier 2026).

 

Prochain concert
En 2025, CLASSICAVAL propose son 2è volet, le 12 mars prochain. Au programme, récital de piano avec Elena Rozanova, Anastasia Dewynter (piano), Chloé Roussev (violon), François Salque (violoncelle). Œuvres de Schubert, Mendelssohn, Tchaikovsky, Dvorak, Popper…

 

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Nos plus – les bons plans à Val d’Isère

Pendant notre séjour, nous recommandons l’hôtel Avancher, situé au fond du village : excellent petit déjeuner, chambres confortables et très calmes.
Pour la restauration vous apprécierez en particulier 2 tables [raffinées, soucieuses de cuisiner des produits locaux] : Restaurant de l’hôtel Experimental, et aussi Les Barmes de l’ours (le premier restaurant à droite après l’entrée / l’établissement propose aussi une offre premium grâce à son 2è restaurant gastronomique)

Toutes les infos sur le site de l’Office de Tourisme de Val d’Isère : https://www.valdisere.com/

 

 

LIRE aussi notre présentation du Festival CLASSICAVAL 2025 (13-16 janvier 2025) : https://www.classiquenews.com/val-disere-31eme-festival-classicaval-les-13-14-15-et-16-janvier-2025-anne-lise-gastaldi-direction-artistique

 

LIRE aussi notre ENTRETIEN avec Anne-Lise Gastaldi, directrice artistique : https://www.classiquenews.com/entretien-avec-anne-lise-gastaldi-directrice-artistique-du-festival-classicaval-a-loccasion-de-ledition-2025/

CHÂTEAU DE VERSAILLES. Concert des 3 ténors, le 30 janv 2025. Samuel Mariño, Théo Imart, Rafal Tomkiewicz…Orchestre de l’Opéra Royal, Stefan Plewniak

Le Château de Versailles ressuscite le temps glorieux des castrats, virtuoses du chant capables de prouesses inimaginables, qui font de l’opéra, un vaste champ d’expérimentation vocale, de dépassement inouï qui transporte l’audience à chaque défi relevé… Ce 30 janvier, 3 contre-ténors réactivent les grands frissons que produit le « grand concours de virtuosité »…

 

Dans l’Europe baroque, les castrats « première stars de l’histoire de la musique », rayonnent… Senesino, Cafarelli, Farinelli sont (entre autres) les souverains de l’opéra. Majoritairement italiens, les plus grands castrats sont formés dans les conservatoires de Naples : « primi uomi » sont payés cher pour sublimer l’activité des chapelles princières d’Europe dont celle du Vatican, du Château de Versailles… chantent les rôles féminins (Rome), illuminent les spectacles lyriques, les oratorios, rivalisant entre eux, grâce aux « airs de valise » qui n’ayant rien à voir avec l’histoire de l’opéra concerné, leur permet d’éblouir en démontrant leurs capacités. Ils sont mieux payés que les sopranos vedettes (prime donna)

 

Depuis plusieurs années, Château de Versailles Spectacles préserve l’art de 3 chanteurs particulièrement convaincants : le sopraniste vénézuélien Samuel Mariño, le français Théo Imart, le polonais Rafał Tomkiewicz … c’est à une compétition de haute volée que le public est convié. Le concert tout en ressuscitant la gloire des castrats, permet au public de goûter les airs italiens baroques parmi les plus éblouissants et spectaculaires du XVIIIè, signés Porpora, Haendel… Incontournable.

 

 

 

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Château de Versailles
Salon d’Hercule
Jeudi 30 janvier 2025, 21h
Durée : 1h30, sans entracte
INFOS & RÉSERVATIONS, réservez vos places directement sur le site de Château de Versailles Spectacles : https://www.operaroyal-versailles.fr/event/les-trois-contre-tenors/

 

 

 

 

programme

 

Attilio Ariosti (1666 – 1729)
Il Vespasiano : Ouverture 1

Georg Friedrich Haendel (1685 – 1759)
Rodelinda : « Vivi, tiranno »

Antonio Vivaldi (1678 – 1741)
Giustino : « Vedrò con mio diletto »

Nicola Antonio Porpora (1686 – 1768)
Siface : « Come Nave in mezzo all’onde »
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Georg Friedrich Haendel
Berenice, Regina d’Egitto : « Se il mio amor fu il tuo delitto »

Nicola Antonio Porpora
Polifemo : « La gioia immortal che alletta »

Georg Friedrich Haendel
Solomon : Arrival of the Queen of Sheba
Siroe : « Deggio morir o stelle »
Giulio Cesare in Egitto : « Se pietà »
Alcina : « Sta nell’ircana »

Nicola Antonio Porpora
Germanico in Germania : « Temi lo sdegno mio, perfido traditore »

 

distribution

Samuel Mariño
Théo Imart
Rafał Tomkiewicz
Orchestre de l’Opéra Royal
Stefan Plewniak, direction

 

 

 

Programme repris à

KARLSRUHE, le 22 février 2025
Internationale Händel-Festspiele, Großes Haus
https://www.staatstheater.karlsruhe.de/programm/info/3719/

TOURNÉE à HONG KONG, du 1er au 15 juin 2025
Avec Samuel Mariño, Meili Li, Filippo Mineccia…
Plus d’infos : https://www.operaroyal-versailles.fr/articles/lorchestre-de-lopera-royal-en-tournee/

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CRITIQUE, concert. MULHOUSE, La Filature, le 24 janvier 2025. W. A. MOZART : Symphonie Linz et Grande Messe en Ut. Orchestre National de Mulhouse, Choeur Philharmonique de Strasbourg et Choeur de Haute Alscace, Christoph Koncz (direction)

National ! C’est officiel, depuis ce mois-ci, l’Orchestre Symphonique de Mulhouse doit désormais être appelé Orchestre National de Mulhouse ! Ainsi, après les Orchestres d’Auvergne et de Cannes dernièrement, la phalange alsacienne devient le 15ème Orchestre National en Région ! Une fierté et une reconnaissance pour le travail accompli, notamment par son directeur général, Guillaume Hébert, et Christophe Koncz, son directeur musical (depuis sept 2023). 

 

Et c’est justement le jeune et fringant chef autrichien qui dirige le concert de ce vendredi 25 janvier, entièrement dédié à son illustre compatriote W. A. Mozart, à travers deux œuvres d’ampleur et contemporaines : la Symphonie Linz et la Grande Messe en Ut. Didactique, en propos d’avant concert, le chef explique la genèse des deux oeuvres, la première étant créée à Salzbourg en 1783, avec sa femme Konstance dans la partie solo de soprano, et la Symphonie Linz (sa 36ème…) à Linz, où il s’est arrêté saluer son ami le Comte Thun, sur son chemin de retour vers Vienne. Pour le remercier de son accueil, il décide de lui composer une œuvre pour la jouer en son château : cela sera la Symphonie Linz, composée en seulement 4 jours !…

 

L’Allegro spiritoso initial est le premier dans une symphonie mozartienne à être précédé d’un Adagio introductif à la manière d’un grandiose portail symphonique, réminiscence de l’ouverture baroque à la française, procédé que Haydn aura bien plus l’occasion d’appliquer dans ses propres symphonies. Surtout notable est le Poco adagio suivant, l’un des plus inspirés chez Mozart, avec son rythme de sicilienne pastorale parfois porteur d’inquiétude lorsque la musique passe en mode mineur. Christoph Koncz réussit à tirer partie du petit effectif de l’orchestre pour imposer un Mozart léger mais conquérant. On ressent, de sa part, une direction démonstrative et un grand sens du phrasé, en s’appuyant sur un orchestre solide, homogène dans ses tutti, précis dans ses interventions solistes, et d’une superbe sonorité… 

 

La Grande Messe en ut mineur KV 427 qui lui fait suite est une partition inachevée de Wolfgang Amadeus Mozart, écrite en 1782 : c’est une œuvre majeure que Mozart compose à Vienne, alors qu’il se marie avec Konstanze Weber. L’œuvre atteste une conscience ambitieuse, une ferveur sincère, et touche par sa grâce qui renouvelle le format traditionnel de la messe viennoise. Retenons les tempi particulièrement vifs imposés par Koncz, souvent d’une ferveur exacerbée. Son interprétation prégnante et transcendante de l’œuvre est corroborée par un orchestre toujours attentif et précis et par la grande maîtrise du Chœur philharmonique de Strasbourg, rejoint ce soir par le Chœur de Haute Alsace. Car dans la Grande Messe en ut de Mozart, le chœur est prépondérant, et ils impressionnent ici par leur puissance, voire leur véhémence. Las, les quatre solistes ne génèrent pas tous le même enthousiasme, avec une soprano (Alysia Hanshaw) manquant de pureté mais à la technique solide, une mezzo (Coline Dutilleul) à la belle couleur de voix mais qui devient stridente dans le registre suraigu, un ténor (Glen Cunningham) qu’on peine à entendre tellement le format vocale est réduit, et seul le baryton Damien Gastl coche toutes les cases… mais il n’apparaît malheureusement que dans le dernier morceau de l’ouvrage !…

 

On n’en sort pas moins ravi de notre soirée, avec la conviction que l’Orchestre de Mulhouse mérite sans conteste son label de “National”, de par la qualité de ses instrumentistes et de leur belle cohésion, et parce que dirigée par un chef énergique qui saura les mener, nous n’en doutons pas, vers une reconnaissance débordant le cadre “national”. Vivement de ré-entendre le bel Orchestre National de Mulhouse !

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CRITIQUE, concert. MULHOUSE, La Filature, le 24 janvier 2025. W. A. MOZART : Symphonie Linz et Grande Messe en Ut. Orchestre National de Mulhouse, Choeur Philharmonique de Strasbourg et Choeur de Haute Alscace, Christoph Koncz (direction). Photos (c) Emmanuel Andrieu

 

VIDEO : Teaser de la 9ème Symphonie de Beethoven interprétée par Christoph Koncz à la tête de l’Orchestre Symphonique de Muhlouse

 

ORCHESTRE NATIONAL AUVERGNE-RHÔNE-ALPES : présentation des concerts et programmes de février à juin 2025. Temps forts : Festival Orchestre en Cathédrales, Tournée aux Etats-Unis… Renaud Capuçon, Christian Zacharias, Thomas Zehetmair…

Le visuel de la saison 24/25 de l’Orchestre National Auvergne-Rhône-Alpes appelle au rêve, à l’infini de l’espace, entre planètes et voûte étoilée. C’est pourtant une autre thématique toute aussi prometteuse qui se précise au premier semestre 2025 : celle des héros ! Ainsi le marquis de Lafayette (Gilbert du Motier), auvergnat de naissance (né au Château de Chavaniac, en Haute-Loire, en 1757), inspire un programme cousu main, présenté récemment in loco (nous y avons assisté), mais aussi lors d’une tournée aux USA (en avril 2025), à l’occasion des 200 ans de son voyage aux Etats-Unis (1825)…

 

L’International est d’autant plus foisonnant dans les activités de la phalange auvergnate qu’il est aussi l’invité du célèbre festival de Pyeongchang (en Corée du sud), lors de la rencontre des villes Michelin à Anderson (Caroline du sud), et enfin à Norman (Oklahoma) pour les 30 ans du jumelage avec la ville de Clermont-Ferrand. Mobile, adaptable, l’Orchestre National Auvergne-Rhône-Alpes se déplace partout depuis Clermont-Ferrand et dans tout le territoire de la Région AUVERGNE RHÔNE-ALPES dont il est l’ambassadeur musical majeur. Pour preuve outre ses concerts décentralisés, la phalange propose son propre FESTIVAL : le récent festival ORCHESTRE EN CATHÉDRALES qui a accordé vertiges orchestraux et patrimoine sacré l’an dernier et devrait se reproduire l’été prochain 2025 (dates à venir)… Pour preuve aussi ce qui fonde l’exemplarité de son activité en Région Auvergne-Rhône-Alpes, l’accessibilité et l’excellence permises pour tous : «  proposer un programme culturel de grande qualité, accessible à tous », tels sont la devise et l’objectif premiers de l’Orchestre tout au long de chacune de ses saisons. Une mission excitante et stimulante que n’auraient pas renié deux immenses compositeurs romantiques natifs de la Région : Hector Berlioz et George Onslow…

 

Dans les faits, l’Orchestre sait multiplier les offres à destination des plus jeunes, toujours soucieux de renouveler ses publics comme accueillir dans les meilleures conditions enfants et familles : concerts gratuits à l’hôtel de ville de Clermont-Ferrand, et les quartiers suburbains ; Baby concerts à la Coopérative de mai (dim 23 fév, dim 18 mai 2025) ; parcours musique ayant déjà sensibilisé plus de 1000 jeunes spectateurs et mobilisés 21 établissements clermontois en 2024 ; sans omettre le projet « L’Âme heureuse » qui enseigne le violon aux malades du CHU en long séjour… musique festive, transcendante et aussi, ainsi, musique thérapeutique…

TOUTES LES INFOS, LA BILLETTERIE EN LIGNE, le détail des programmes, les artistes invités et les compositeurs.trices à l’honneur, sur le site de l’ORCHESTRE NATIONAL D’AUVERGNE RHÔNE-ALPES :
https://onauvergne.com/

 

 

 

 

 

TEMPS FORTS de février à juin 2025

 

14 fév 2025 (Opéra de Vichy)
15 fév 2025 (Clermont-Ferrand, Opéra Théâtre) Renaud Capuçon
Les étoiles de Renaud Capuçon
(JS BACH, MOZART, BRAHMS)
Guillaume Chilemme, violon
https://onauvergne.com/events/les-etoiles-de-renaud-capucon-vichy/

21 fév 2025 (Théâtre d’Aurillac)
BOCCHERINI, ALBENIZ, PIAZZOLLA, CASALS…)
Jean-Marie Trotereau, direction et violoncelle

 

 

 

14 mars 2025 (Clermont-Ferrand, Opéra Théâtre)
Les classiques de Christian Zacharias
HAYDN, MOZART, BACEWICZ, HAYDN
Christian Zacahrias, piano et direction

30 mars 2025 (Clermont-Ferrand, Théâtre Opéra)
Erno DOHNANYI, Sérénade opus 10
Richard STRAUSS, Métamorphoses

 

6 avril 2025 (Opéra théâtre, Clermont-Ferrand)
9 avril 2025 (TCE, Paris)
JS BACH : Passion selon Saint-Matthieu
Enrico Onofri, direction
Werner Gera, l’Évangéliste

13, 14 mai 2025 (Cathédrale Notre-Dame, Paris)
16 mai 2025 (Opéra de Vichy)
MOZART : Requiem
Henri Chalet, direction
Maîtrise Notre-Dame de Paris

23 mai 2025
Invitation à la danse
BUCKLEY, MENDELSSOHN, FAURÉ, BIZET
Thomas Zehetmair, violon et direction

 

6 juin 2025 (Clermont-Ferrand, Opéra-Théâtre)
Alpesh Chauhan, direction
Romantisme and swing !
IBERT, ELGAR, RODRIGO, STRAVINSKY, MILHAUD

13 juin 2025 (Clermont-Ferrand, Maison de la culture)
Jeanne Dambreville, direction
Concert par Chœur
Howard MOODY, Les raiders
Collégiens du Puy de Dôme
volontaires amateurs du club de mécènes BriO

 

 

 

 

TOUTES LES INFOS, LA BILLETTERIE EN LIGNE, le détail des programmes, les artistes invités et les compositeurs.trices à l’honneur, sur le site de l’ORCHESTRE NATIONAL D’AUVERGNE RHÔNE-ALPES :
https://onauvergne.com/

 

 

 

 

approfondir

D’autres articles, annonces et critiques / ORCHESTRE NATIONAL D’AUVERGNE RHÔNE-ALPES sur CLASSIQUENEWS :

14 janvier 2025 / Requiem de Mozart : https://www.classiquenews.com/orchestre-national-auvergne-rhone-alpes-paris-notre-dame-les-14-janvier-puis-13-et-14-mai-2025-requiems-de-faure-et-mozart/

19 et 21 janvier 2025 / The Lafayette Tour :
https://www.classiquenews.com/orchestre-national-dauvergne-rhones-alpes-the-lafayette-tour-les-19-et-21-janvier-2025-puy-en-velay-clermont-ferrand/

CRITIQUE, concert. CLERMONT-FERRAND, Opéra-Théâtre, le 21 janvier 2024. “The Lafayette Tour” : Concert-Hommage au Marquis de La Fayette. Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes, Thomas Zehetmair (direction) : https://www.classiquenews.com/critique-concert-clermont-ferrand-opera-theatre-le-19-janvier-2024-the-lafayette-tour-concert-hommage-au-marquis-de-la-fayette-orchestre-national-dauvergne-thomas-z/

 

 

 

 

 

 

 

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INVALIDES. Jeu 6 fév 2025 : Requiem de Tomasi, Symphonie n°2 « Voïna » d’Elsa Barraine. Orchestre de la Garde Républicaine, Sébastien Billard (direction)

Le Musée de l’Armée aux INVALIDES à PARIS propose pas moins de 37 concerts tout au long de sa nouvelle saison musicale 2024 – 2025. Plusieurs temps forts se sont déjà déroulés dont les thématiques sont choisies selon le sujet des expositions du Musée de l’Armée.

Une conjonction artistique désormais reconnue qui réalise pour chaque concert, d’étonnantes (re)découvertes. Après un somptueux programme Beethoven / Chausson du 23 janv dernier, la majestueuse nef de la Cathédrale Saint-Louis dans l’enceinte des Invalides, accueille jeudi 6 fév un nouveau programme audacieux, prometteur révélant aux côtés de la Symphonie « Voïna » d’Elsa Barraine de 1938, le Requiem pour la Paix (en hommage à tous les Résistants et les Justes morts pour la France) d’Henri Tomasi de 1943… 2 partitions méconnues et rarement jouées.
Encore injustement estimée, Elsa Barraine remporte le Premier Grand prix de Rome de composition à 19 ans (en 1929, pour sa cantate « La Vierge guerrière ») ; elle récidive ainsi l’exploit précédemment réalisé par la compositrice Lili Boulanger qui en 1913 remportait le même Prix (à 18 ans). Ses parents dont son père, premier violoncelliste à l’Opéra de Paris, lui ont transmis la passion de la musique. Paul Dukas est son professeur de composition ; il lui insuffle l’exigence du sens (il ne suffit pas seulement d’exprimer quelque chose mais aussi quelqu’un : le compositeur… en l’occurrence la compositrice qui fut une antifasciste déterminée).
Elsa (décédée en 1990), se distingue pendant le 2è guerre mondiale ; » elle devient en 1944 une résistante intrépide. Engagée et inspirée, sa 2e symphonie Voïna, composée en 1938, – quand sont signé les accords de Munich, exprime clairement son opposition farouche à la politique extérieure française. Elsa, communiste convaincue, élabore sa Symphonie  dont le titre « Voïna » signifie guerre en russe. La symphonie est l’un des jalons d’une vie artistique des plus engagées. Communiste, la compositrice quitte le parti, et coopère pour la création de l’Association française des musiciens dits « progressistes », avec  Roger Désormière ou Charles Koechlin.
De son côté, le puissant Requiem pour la paix de Henri Tomasi y fait suite, dans l’interprétation nuancée et fervente de la Garde républicaine et du choeur universitaire de l’OCUP. Tendue, inspirée par une crise  spirituelle, née dans la tourmente de 1940, la partition de Tomasi  interroge la place et l’avenir de l’homme dans un monde qui l’opprime. Le Requiem s’achève sur terre et non au ciel, l’homme privé d’un ultime secours divin ne pouvant puiser qu’en lui-même et en sa propre foi réaffirmée, pour espérer une forme de rédemption. Elle se compose de 3 mouvements : guerre, mort, fin.
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INVALIDES, Cathédrale Saint-Louis
Jeudi 6 février 2025, 20h
BARRAINE : Symphonie n°2 « Voïna » (1938)
TOMASI : Requiem pour la paix
INFOS & RÉSERVATIONS directement sur le site des Invalides : https://www.musee-armee.fr/au-programme/cette-semaine-au-musee/detail/requiem-pour-la-paix-1.html
Programme
Elsa Barraine, Symphonie no 2, Voïna (Guerre)
Henri Tomasi, Requiem pour la paix, « dédié à tous les martyrs de la Résistance et à tous ceux qui sont morts pour la France »

 

Distribution
Orchestre symphonique de la Garde républicaine
Choeur universitaire de l’OCUP,
Guillaume Connesson, chef de choeur
Sébastien Billard, direction
Accès : Musée de l’Armée
 : 129 rue de Grenelle , Paris 7e
Jeudi 6 février 2025 – 
De 20h à 21h 30 – Tarif : 25 € / 8€
Réservation :
Réservation conseillée – 01 44 42 38 77

 

 

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CRITIQUE, opéra. STRASBOURG, Opéra du Rhin (du 20 au 30 janvier 2025). OFFENBACH : Les Contes d’Hoffmann. A. Glaser, L. Ruiten, J. S. Bou… Lotte de Beer / Pierre Dumoussaud

En coproduction avec l’Opéra Comique, l’Opéra de Reims et le Volksoper de Vienne, l’Opéra national du Rhin propose actuellement une nouvelle production des Contes d’Hoffmann de Jacques Offenbach confiée à la néerlandaise Lotte de Beer, dont on se rappelle Les Noces de Figaro en 2021 au Festival d’Aix-en-Provence. Las, cette nouvelle régie, malgré quelques bonne trouvailles, ne nous a guère mieux convaincus que son premier travail auquel nous ayons assisté. 

 

Nous savons pertinemment qu’il n’existe pas de version “définitive” des Contes d’Hoffmann, son auteur ayant disparu avant que l’ouvrage ne soit donné à scène, mais est-ce une bonne raison pour défigurer, en ré-écrivant les textes parlés mais surtout en coupant aux ciseaux, le chef d’oeuvre d’Offenbach. Ré-écrits par Peter Te Nuyl, les dialogues deviennent ici un texte confié à la Muse qui vient interroger les choix d’Hoffmann, et jouer les psys de bazar en donnant son avis sur tout, et nous énumérerons pas les énormes coupes à la hache de la partition. La scénographie, imaginée par Christof Hetzer n’emballe guère non plus, avec son décor unique et étriqué de bar couvert de vieux papier peint défraîchi. La seule bonne idée, cela dit emprunté à la fameuse production de Jérôme Savary aux débuts des années 2000, est le dédoublement en version gigantesque et minuscule de la poupée Olympia…

 

La distribution s’avère inégale, et aucun des principaux rôles, si ce n’est l’épatante Muse de Floriane Hasler, n’emportent vraiment l’adhésion. Le rôle titre confié au ténor germano-italien Attilio Glaser possède une bonne diction et notre langue et affronte crânement les difficultés de sa partie, mais avec une voix qui détimbre systématiquement dans l’aigu. Formidable Lucia il y a quelques années, Lenneke Ruiten ne maîtrise plus aussi bien son registre suraigu, ce qui nous vaut des notes stridentes en Olympia, tandis qu’elle ne possède ni le médium d’Antonia ni les graves de Giuletta. Excellent comédien, le baryton français Jean-Sébastien Bou chante certes très bien mais n’a pas la noirceur de voix qu’appelle les quatre Diables (expressément destinés à une voix de basse !). Le pauvre Raphaël Brémard, aussi bon chanteur que comédien, n’a malheureusement que l’air de Frantz pour Briller, tandis que le vétéran Marc Barrard se montre impayable avec sa gouaille habituelle en Luther (mais on lui a retiré à lui aussi son unique air…). Enfin, Bernardette Johns, membre de l’Opéra Studio, offre des accents touchants à la mère d’Antonia.

 

En fosse, le jeune chef français Pierre Dumoussaud rallie, lui, tous les suffrages, et offre – à la tête d’un Orchestre Philharmonique de Strasbourg merveilleusement sonnant – une version chatoyante du chef d’œuvre d’Offenbach. La phalange alsacienne offre à entendre une souplesse et une clarté de texture tout simplement idéales dans ce répertoire. Les tempi sont plutôt rapides, mais d’habiles ruptures interrompent judicieusement le déroulement du spectacle, pour donner soudain plus de poids aux moments cruciaux du drame. Réalisant avec aisance la synthèse des divers styles musicaux de cette partition composite, le chef français parvient à faire scintiller chaque détail de l’instrumentation, tout en menant fermement à terme ce jeu de la faiblesse humaine, où humour et poésie diaphane alternent avec bonheur.

Une fois encore, c’est bien la musique qui est la grande triomphatrice de la soirée !

 

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CRITIQUE, opéra. STRASBOURG, Opéra du Rhin (du 20 au 30 janvier 2025). OFFENBACH : Les Contes d’Hoffmann. A. Glaser, L. Ruiten, J. S. Bou… Lotte de Beer / Pierre Dumoussaud. Toutes les photos © Klara Beck

 

VIDEO : Trailer des « Contes d’Hoffann » de Jacques Offenbach selon Lotte de Beer à l’Opéra National du Rhin

 

69ème GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY : « Migration », du 18 juillet au 6 sept 2025 / Cycle « Changement III ». La dernière programmation de Christoph Müller s’annonce aussi engagée que flamboyante

La dernière programmation de Christoph Müller s’annonce aussi engagée que flamboyante… Dans un édito particulièrement développé, le directeur général CHRISTOPH MÜLLER présente ainsi sa dernière édition. Après lui, à partir de l’édition 2026 (celle emblématique des 70 ans), le violoniste DANIEL HOPE, déjà familier de l’événement et proche du fondateur Yehudi Menuhin, prendra la direction générale et artistique du premier festival estival en Suisse… Chaque choix artistique, pour chaque programmation a su s’inscrire dans le sillon tracé par le fondateur, le violoniste légendaire Yehudi Menuhin, pour un festival de plus en plus durable : « Le droit des gens au calme, à un air et une eau purs, aux prairies et aux forêts, et à une alimentation saine, est inscrit dans la constitution de tous les Etats. » Yehudi Menuhin, fondateur du festival en 1957

 

 

MIGRATION… Quelles migrations ? La troisième et dernière année du cycle dédié au « changement » (2023-2025), – élaboré par Christoph Müller, qui accompagne ainsi le Festival jusqu’à son 70è édition en 2026, réalise de façon emblématique, l’équation : musique, migration, appartenance. Engagé, respectueux des nouvelles normes écologiques, le GSTAAD MENUHIN FESTIVAL a montré l’exemple et questionne ainsi à l’été 2025, : la migration, « l’un des plus grands défis mondiaux, autant sur le plan politique que sociétal ». 79 millions de personnes sont actuellement en fuite. 244 millions de personnes vivent avec un passé d’immigration (dont 30 millions d’enfants !) ; elles portent en elles les stigmates des violences, persécution, abandon du foyer et de la patrie (source : Département fédéral des affaires étrangères et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR).

 

Toujours la notion de migration questionne les valeurs de l’identité, des métissages, le fondement même des cultures et des sociétés. Et la musique exprime cette tension entre souffrance, désir et espoir : « Des notions centrales comme la mémoire, l’identité et l’appartenance deviennent, en l’intégrant, de puissants catalyseurs d’expression. La musique est le véhicule d’un désir insatiable et irrésistible de ce qui est familier, perdu ou abandonné. Mais c’est aussi une sorte de «stockage de données» pour les réfugiés ou les personnes issues de l’immigration: dans une perspective interdisciplinaire, la musique, en tant que lieu de mémoire, est capable, au travers d’échanges interculturels, de faire circuler des connaissances et des compétences entre les musicien·nes et les compositeurs / trices », explique Christophe Müller.

 

COMPOSITEURS ET MIGRATIONS… Le Festival 2025 interroge la migration sous quatre angles: «ORIGIN»: musique de la patrie, des racines; «ESCAPE TO EXIL»: musique de fuite et d’exil; «INNER EMIGRATION»: musique composée au sein de systèmes d’oppression totalitaires ou par des personnes qui, forcées ou volontaires, décident de se replier sur leur «moi intérieur» et trouvent ainsi le chemin de l’autolibération; NOSTALGIE: aspiration vers une patrie quittée, volontairement ou pas, expression d’une forme de «mal du pays».
ORIGIN : la série de concerts illustrent des thématiques très diverses, qui s’enrichissent mutuellement, dans lesquelles des formes de danse ou de chant populaires, folkloriques mais aussi séculaires, constituent souvent la base de nouvelles créations d’œuvres classiques: Fazil Say et ses Fantaisies du Bosphore, le projet «Nouveau Monde» des King’s Singers et les trésors musicaux des conquérants portugais et espagnols d’Amérique centrale et du Sud, ou le voyage d‘Avi Avital autour de la Méditerranée à partir de la musique traditionnelle des Pouilles, aux racines sonores traditionnelles puissantes.
ESCAPE TO EXIL : le processus de départ, de fuite, de vie en exil. Ainsi : l’exode, les souffrances incommensurables d’un peuple opprimé tels que sublimés par Haendel dans « Israël en Egypte », évoquant la libération des Israélites de l’esclavage des pharaons, surtout la célébration du Dieu libérateur et protecteur. La «Route des Balkans occidentale» mise en vibration par L’Arpeggiata, aborde les dangereuses voies de fuite empruntées par les réfugiés et migrants africains vers l’Europe via la Grèce, la Macédoine, la Serbie et la Hongrie, … Tandis que les musiques de Schulhoff, Jacobi et Hindemith dévoile comment le processus de création musicale peut naître d’un exil forcé – expression d’une forme d’abandon, de confrontation avec le passé, et plus encore peut-être de nostalgie… Ainsi, Serge Rachmaninov qui, en exil à Dresde (où il a déménagé avec sa famille en raison des troubles politiques et de l’incertitude née du «Dimanche sanglant» de Saint-Pétersbourg en 1905), qui ose enfin composer sa Deuxième Symphonie. « Dans la paix et la tranquillité d’un exil involontaire, il retrouve le chemin de la composition et crée une œuvre d’une beauté sombre. Le musicien se révèle un narrateur épique profondément enraciné dans l’âme populaire russe, comme en témoigne l’emploi de nombreuses citations de chansons folkloriques ». Et le Requiem de Verdi : ne pourrait-il pas, lui aussi, se lire comme une ode à la fuite, à l’évasion, une manière d’échapper à la vie terrestre pour se réfugier au paradis? Si dans le Dies Irae la fin du monde s’abat avec fracas sur l’humanité dans un frémissement symphonique terrifiant, Verdi laisse poindre un espoir de rédemption dans le Recordare Jesu pie. Et que dire de la fuite vers Rome d’Adalgisa et de Pollione dans l’opéra Norma de Bellini : elle est à la fois l’expression d’un départ et d’un nouveau départ, dans le cadre d’un drame où s’opposent amour et devoir.

Le GSTAAD MENUHIN FESTIVAL 2025 célèbre le 50è anniversaire de la mort de Dmitri Chostakovitch…. compositeur génial qui sut sous la terreur stalinienne concevoir un art musical singulier, engagé et aussi clandestin, à double voire triple sens… la figure le plus emblématique de l’exil intérieur…

Plus que jamais, la prochaine édition (69è) du GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY promet l’exceptionnel artistique accordé aux thématiques les plus engagées. Toutes les infos, le détail des programmes, les artistes invités par Christoph Müller pour sa dernière programmation, sur le site du GSTAAD MENUHIN FESTIVAL 2025 – du 18 juillet au 6 septembre 2025 : https://www.gstaadmenuhinfestival.ch/fr

 

L‘église de Saanen, cœur historique du Gstaad Menuhin Festival, où dès 1956, Yehudi Menuhin donnait ses premiers concerts…

 

 

 

 

approfondir

LIRE l’édito intégral de Christoph MÜLLER à propos de l’édition 2025 du 69è GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY : https://www.gstaadmenuhinfestival.ch/fr/programme-and-location/editorial-christoph-mueller

 

 

 

69ème GSTAAD MENUHIN FESTIVAL & ACADEMY : juillet – septembre 2025

 

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AUDITORIUM ORCHESTRE NATIONAL DE LYON. Concerts des 50 ans de l’Auditorium. RAVEL, BOULEZ, BERIO… Les 9, 14 et 15 février 2025. Pierre-Laurent Aimard (piano) le 9, et Emilio Pomarico (direction), les 14 et 15

50 ans après son inauguration en 1975, l’Auditorium de Lyon célèbre 50 ans d’activité artistique continue, les 9, 14 et 15 février prochains. A cela s’ajoutent les 150 ans de Maurice Ravel et les 100 ans de Pierre Boulez et de Luciano Berio

 

Festival de célébrations qui artistiquement promettent le meilleur et de nouvelles (re)découvertes symphoniques… D’abord, un récital-événement du pianiste Pierre-Laurent Aimard (le 9 fév 2025), interprète reconnu des compositeurs français , à commencer par Boulez, et qui était déjà présent en 1975 lors de l’inauguration du bâtiment… Puis vertiges symphoniques associant deux orchestrateurs géniaux, Luciano Berio et Maurice Ravel (les 14 et 15 fév 2025) par l’Orchestre National de Lyon (Emilio Pomarico, direction).

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Dim 9 février 2025 à 16h
RAVEL / BOULEZ
Pierre-Laurent Aimard, piano
Grande Salle, Auditorium de Lyon
En 1975, Pierre-Laurent Aimard participait à l’inauguration de l’Auditorium. Programme inventif et fascinant pour son retour à l’occasion des 50 ans du bâtiment lyonnais. Le récital célèbre aussi les 150 ans de Maurice Ravel et les 100 de Pierre Boulez.

Le pianiste joue Gaspard de la nuit, cycle ou trois «fantaisies à la manière de Rembrandt et de Callot» qui stimule l’imagination, évoquant une séduisante ondine, un pendu assistant au coucher du soleil, un gnome espiègle voire inquiétant, jouant avec l’ombre et les rêves. Proche d’Olivier Messiaen dès l’âge de 12 ans, accueilli par Pierre Boulez à l’Ensemble intercontemporain, Pierre-Laurent Aimard a forgé son style et son jeu au contact des compositeurs. L’interprète questionne « les facultés de l’inspiration, l’origine de la «première œuvre», la capacité à inventer et à «écarteler la mémoire», selon la formule boulézienne, et, dans les Notations, à confronter la méthode de Schönberg à une multitude de caractères. » puis, dans les Bagatelles de Beethoven, ces petites choses captivent par la justesse de l’idée originelle. Tandis que la Sonate op. 1 de Berg exprime la recherche d’un auteur qui ose des voies inédites quand la Première Sonate de Boulez respecte et reprend un développement classique, geste réformateur en vérité qui annonce directement Incises.

 

INFOS & RÉSERVATIONS :
https://www.auditorium-lyon.com/fr/saison-2024-25/recital/pierre-laurent-aimard

programme
Ludwig van Beethoven : Six Bagatelles op. 119 – Onze Bagatelles op. 126 (extraits) – 11 min
Pierre Boulez : Notations – 12 min
Alban Berg : Sonate pour piano op. 1 – 10 min
Pierre Boulez : Première Sonate – 9 min
Pierre Boulez : Incises – 6 min
Maurice Ravel : Gaspard de la nuit – 22 min
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Vendredi 14, samedi 15 février 2025
RAVEL / BOLÉRO
Grande Salle, Auditorium de Lyon

«Refléter les racines expressives – à savoir culturelles – de chaque chanson», tel est le projet des Folk Songs, qui est au centre du concert. Berio (qui aurait eu 100 ans en 2025) cite des chants d’Amérique, de France ou d’Italie quand Ravel évoque l’Asie rêvée de Shéhérazade (et le souvenir de Schubert)… L’onirisme comme le jeu sont aussi à l’honneur : dans Bewegung (littéralement : Mouvement) un «rêve de passacaille», marcher sur les pas de Schubert ou encore s’adonner à une «occupation inutile» dans le tournoiement des Valses nobles et sentimentales – pour reprendre les mots des auteurs. Les mélodies grecques lui avaient permis de renouer avec le ton populaire, Ravel dans Shéhérazade fait scintiller un Orient personnel, intime, profondément investi, vécu, éprouvé, «vieux pays merveilleux des contes de nourrice» (cf le poème de Tristan Klingsor). Après Ravel, Berio conçoit ses Folk Songs après avoir écouté de vieux disques. Son épouse Cathy Berberian en exprime l’essence originelle, la puissance et la justesse… sur ses pas, la mezzo Christina Daletska, polyglotte, s’approprie l’ «expression spontanée du peuple» que voyait Berio dans le chant populaire. Incontournable.

Concert avant-scène le samedi à 17h.
 Les jeunes talents du CNSMD de Lyon vous proposent un prélude musical une heure avant votre concert. Grande salle, entrée et placement libres sur présentation du billet de concert (durée : 30 minutes).

 

INFOS & RÉSERVATIONS :
https://www.auditorium-lyon.com/fr/saison-2024-25/symphonique/ravel-berio

programme
Luciano Berio : Bewegung – 15 min
Maurice Ravel : Shéhérazade (mélodies d’après Tristan Klingsor) – 17 min
Luciano Berio : Folk Songs (version de 1973) – 20 min
Maurice Ravel : Valses nobles et sentimentales – 17 min
Orchestre National de Lyon
Emilio Pomarico, direction
Christina Daletska, mezzo-soprano

 

 

CRITIQUE, concert. PARIS, Salle Gaveau, le 23 janvier 2024. Récital d’Andreas Scholl

Andreas Scholl était de retour à la Salle Gaveau, hier soir, dans un programme de cantates, comme toujours judicieusement conçu, exigeant tout à la fois un chant élégiaque, introverti, suspendu, et, à l’opposé, vaillance, et mordant. On attendait donc beaucoup de cette soirée et ce d’autant plus que le contre-ténor partageait la scène avec la flûtiste Dorothee Oberlinger qui ne cesse de démontrer qu’elle est la meilleure spécialiste de son instrument. Depuis leur disque lumineux « Small gifts » consacré à J. S Bach, les deux artistes ont tissé des liens étroits dont l’essence profonde est à l’évidence le plaisir de faire de la musique ensemble. A cette affinité élective s’est joint le clavecin inspiré de Olga Watts. Cette soirée fut donc une affaire de fins musiciens dont la virtuosité a été l’écrin précieux d’un chant souverain.

 

En dépit de quelques résidus persistants d’une grippe récente qui se sont fait légèrement entendre, Andreas Scholl a montré, une fois de plus, toute la pureté de l’émission de sa voix et la qualité de sa projection. Plus encore que par l’aisance et l’élégance des vocalises de « Da Tuoi Lumi « de Caldara, on est capturé d’emblée par les sons filés et la grâce du contre-ténor dans la force méditative de la cantate « Nel dolce tempo » de Haendel. Et surtout, on ne s’est jamais lassé d’admirer, tout au long de la soirée, la beauté du timbre, notamment dans les airs « Pastorella co’ bei lumi erbe e fiori » et « Senti di te, ben mio ». Rare est cette voix d’une élégance subtile, savant équilibre entre naturelle aisance et maîtrise technique. Elle nous a fait, en effet, souvent l’offrande, au fil du programme, d’une parenthèse en apesanteur traduisant toute la pudeur et l’intensité de l’émotion contenue du contre-ténor dans une gamme de teintes raffinées, comme dans le récitatif « Troppo nobile ardor m’accese il seno » de l’aria « Vaghe Luci » de Caldara.

 

Le morceau de bravoure qu’est la cantate « Mi palpita il cor » de Haendel, a été également au cœur de ce récital. Andreas Scholl s’est joué ici de toutes les difficultés vocales par une diction claire et une riche ornementation. Dans les récitatifs « Tormento e gelosia » et « Clori, di te mi lagno », le chanteur a su animer la moindre phrase par un engagement total. Dans l’air « Se un di m’adora la mia crudele », on a pu pleinement apprécier dans cette interprétation habitée, les legati et crescendi, distillés dans un chant débarrassé de toute fioriture inutile. Car contrairement à certains contre-ténors, Andreas Scholl ne s’adonne ni au maniérisme, ni à la pyrotechnie vocale. L’artiste fait montre d’une virtuosité jamais ostentatoire, au service constant de l’expression et de la musique. Dans cette aisance naturelle sans effets inutiles, le contre-ténor a été en tout point rejoint par Olga Watts, au touché nerveux et énergique, dans La Chacone pour clavecin solo de Bach, extraite de sa Partita n°2 BWV 1004, et plus encore par Dorothee Oberlinger dont l’interprétation de La Follia et de La Sonate en fa majeur de Corelli a été suprême de bout en bout.

 

En guise de conclusion à ce récital, Andreas Scholl, et ses deux complices, nous ont fait l’offrande, de l’air « Il n’est point de bergère » tiré de La Pastorelle en Musique de Telemann, dans lequel le contre-ténor, abandonnant momentanément la voix de tête pour une tonalité grave de baryton, détonante mais au combien suave, a suscité les rires d’un public conquis. Avec une telle synergie, les trois artistes ont tenu l’auditoire à distance du froid de l’hiver en attisant le feu des couleurs d’un printemps à venir.

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Salle Gaveau, le 23 janvier 2024. Récital d’Andreas Scholl. Crédit Photographique (c) Brigitte Maroillat et Droits Réservés

 

VIDEO : Andreas Scholl chnate la largo « Ombra mai fu » extrait de Serse de Haendel

 

CRITIQUE, concert. CLERMONT-FERRAND, Opéra-Théâtre, le 21 janvier 2025. “The Lafayette Tour” : Concert-Hommage au Marquis de La Fayette. Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes, Thomas Zehetmair (direction)

En avant-première de sa prochaine tournée aux États-Unis, prévue au printemps 2025 l’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes célébrait la nouvelle année 2025 avec un programme rendant hommage à son héros local, le Marquis de Lafayette, né auvergnat, à l’occasion du bicentenaire de sa tournée américaine de 1825, 50 ans après la déclaration d’Indépendance des Etats-Unis. Et après le Théâtre du Puy en Velay qui a eu la primeur de l’événement, c’est à l’Opéra-Théâtre de Clermont-Ferrand que le spectacle mêlant l’Orchestre National d’Auvergne, dirigé par son nouveau directeur musical, le chef/violioniste Thomas Zehetmair, et un film-dessin animé conçu par un studio parisien retraçant l’incroyable histoire du Marquis, devenu Général de Lafayette, figure historique et symbole du lien fort entre la France et les États-Unis.

 

En six temps, le très didactique et intéressant « biopic » déroule la vie du héros auvergnat, dont 5 pièces musicales viennent servir d’Interludes musicaux, et c’est l’Ouverture “L’Amant anonyme” (1780) du Chevalier de Saint-George qui ouvre musicalement la soirée, seul opéra de son auteur, qui fait penser à la musique de Joseph Haydn, avec des thèmes enjoués et enlevés, pour ne pas dire triomphants. La seconde pièce nous transporte en 1931, aux Etats-Unis, avec l’Andante pour cordes de Ruth Crawford-Seeger, qui explore des procédures de contrepoint dissonant, et de techniques sérielles. Même si elle est légèrement postérieure, la pièce vient ici rendre hommage à l’Escadron Lafayette qui, en 1916, vint soutenir l’effort de guerre de la France face à l’ennemi allemand lors de la Première Guerre mondiale. 

 

Le troisième morceau est le célèbre 5ème Concerto pour violon de W. A. Mozart, joué par le chef à la tête de son ensemble. L’ouvrage de Mozart fut écrit en septembre 1775, soit l’année de l’Indépendance américaine, pour cordes, 2 hautbois et 2 cors. Ample, avec des mélodies de toute beauté, l’œuvre offre un dialogue violon-orchestre d’une grande finesse, brillant et alerte dans une théâtralité orchestrale séduisante comme l’entrée du soliste sur le bref Adagio en récitatif du premier mouvement ou encore le court intermède turc du Finale. Sans insister sur la sonorité ou la puissance, Thomas Zehetmair fait jouer la sensibilité et l’intelligence, la précision et le raffinement. Sans jamais céder à des alanguissements ou à des minauderies hors-propos, d’une précision redoutable dans les aigus, le violoniste allemand, qui joue ses propres cadences, sait remarquablement rendre les différents climats qui se succèdent dans cet ouvrage. Dans les tutti, il joue avec les premiers violons, un exemple parmi d’autres d’un souci constant de ne pas se mettre systématiquement en avant et d’une envie de faire, en toute humilité, de la musique avec “son” orchestre, qui le soutient à la perfection, incisif et allant droit à l’essentiel.

 

C’est ensuite une pièce composée par Zehetmair lui-même qui fait suite, sa “Passacaille, Burlesque et Choral pour orchestre à cordes”, en création mondiale, une pièce qui parcours “à-rebours l’espace et le temps, du dodécaphonisme au choral grégorien “Pange lingua” de saint-Thomas d’Aquin”. On en retient le superbe Scherzo interprété en pizzicato, avant le majestueux Choral qui clôt ce véritable concerto pour 21 instruments à cordes. Enfin, la dernière oeuvre est de la main du grand Ludwig van Beethoven, composé en 1825 soit l’année du triomphal “Tour” de Lafayette dans tous les Etats-Unis, cinquante après les avoir quittés… L’ouvrage retenu est la Grande Fugue opus 133, morceau initialement destiné à être le Finale de son Quatuor opus 130, et considérée comme une des pièces parmi les plus radicales de son auteur, et qui provoqua l’incompréhension et le rejet tant du public que de la critique à l’époque de sa création. Aussi engagé que précis, l’Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes en livre un discours abrupt, violemment accentué, où les timbres râpeux des instruments semblent se livrer un combat furieux et sauvage. Et si cette approche rend pleinement justice à l’élément de lutte, toujours important dans la dialectique beethovénienne, la phalange auvergnate n’en maintient pas moins la tension dans les passages plus apaisés. Un morceau qui permet de juger de l’excellente forme de l’orchestre, que l’on languit de retrouver sous la baguette de son directeur musical ou d’un autre chef, comme cela sera le cas le 15 février prochain, où Zehetmair laissera sa baguette… au très médiatique Renaud Capuçon !

 

 

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CRITIQUE, concert. CLERMONT-FERRAND, Opéra-Théâtre, le 21 janvier 2024. “The Lafayette Tour” : Concert-Hommage au Marquis de La Fayette. Orchestre national Auvergne-Rhône-Alpes, Thomas Zehetmair (direction). Toutes les photos (c) Droits Réservés

 

VIDEO : Teaser du “Lafayette Tour”

 

ORCHESTRE CONSUELO. TCHAIKOVSKI : Suites d’orchestre n°1 et 2. Concerts les 7, 12, 13, 14 février 2025 – Victor Julien-Laferrière (direction). Nouveau CD (Mirare – parution : 31 janv 2025)

Fascinantes et méconnues, les 2 premières Suites d’orchestre témoignent d’une rare maîtrise, concentrant le meilleur de Piotr Illytch. Entre liberté et geste savant, les deux partitions étonnent par leur liberté formelle, leur écriture harmonique, l’originalité de leur structure (grandes fantaisies des premiers mouvements comprenant les fameuses fugues, admirées du jeune Debussy).

 

A la liberté des premiers mouvements, chaque Suite alterne ensuite séquence dansée et épisode plus introspectif où rayonnent plusieurs trouvailles mélodiques dont le compositeur a le secret. Ainsi Tchaikovsky contribue au débat de l’époque concernant l’écriture chromatique abordée alors par César Franck ou Ferrucio Busoni. Les 2 Suites exigent beaucoup des pupitres, en particulier des vents. Trop rarement jouées en France, les Suites de Tchaikovsky sont des pièces passionnantes qui sont d’immenses défis pour tout orchestre. Victor Julien-Laferrière et les instrumentistes de son orchestre CONSUELO en affrontent chaque élément avec une énergie régénératrice, illustrant cette exploration des répertoires méconnus, complétant leur intégrale en cours des Symphonies de Beethoven (premier volume : symphonies 1, 2 et 4, édité en 2024 / CLIC de CLASSSIQUENEWS). L’enregistrement des deux Suites pour orchestre de Tchaikovsky paraît ce 31 janvier chez l’éditeur Mirare – le cd est labellisé album officiel de la Folle Journée à Nantes 2025 où les œuvres sont jouées.

 

 

 

Nouveau CD Tchaikovski : Suites n°1 et 2 (enregistré en mai 2023 et fév 2024 – 1 cd Mirare) – Parution : le 31 janvier 2025
Suite n° 1 en ré mineur opus 43
1. Introduzione e Fuga. Andante sostenuto – Moderato e con anima 11’11
2. Divertimento. Allegro moderato 6’01
3. Intermezzo. Andantino semplice 9’36
4. Marche miniature. Moderato con moto 2’02
5. Scherzo. Allegro con moto 7’35
6. Gavotte. Allegro 4’37
Suite n° 2 en ut majeur opus 53
7. Jeu de sons. Andantino un poco rubato – Allegro molto vivace 10’28
8. Valse. Moderat. Tempo di valse 6’13
9. Scherzo burlesque. Vivace con spirito 5’10
10. Rêves d’enfant. Andante molto sostenuto 11’39
11. Danse baroque. Vivacissimo 3’49

 

Enregistrement : 19 et 20 mai 2023 (Suite n°1) et du 11 au 13 février 2024 (Suite n°2) au RiffX Studio La Seine Musicale – Boulogne-Billancourt

 

 

 

 

Février 2025
CONCERTS de l’ORCHESTRE CONSUELO

 

Samedi 1er : Nantes : La Folle Journée de Nantes
Tchaïkovski :
– La Tempête, fantaisie symphonique opus 18
– Concerto pour violon en ré majeur, opus 35
avec Bomsori Kim / PLUS D’INFOS, présentation : https://www.classiquenews.com/orchestre-consuelo-nantes-folle-journee-les-31-janvier-puis-1er-fevrier-2025-tchaikovski-suite-n3-la-tempete-concert-pour-violon-bomsori-kim-victor-julien-laferriere-direction/

 

 

Vendredi 7 : La Rochelle : La Coursive
Beethoven : Concerto pour violon en ré majeur
Dvořák : Le Silence de la forêt
Tchaïkovski : Suite n°2 en ut majeur, opus 53
INFOS : https://www.la-coursive.com/projects/orchestre-consuelo-23-24/

 

Mercredi 12 : Paris : Cité de la Musique
Tchaïkovski :
– Variations Rococo, opus 33, arrangement pour violoncelle solo et cordes
– La Tempête, fantaisie symphonique opus 18
– Suite pour orchestre n° 2 avec l’Orchestre Consuelo
INFOS : https://philharmoniedeparis.fr/fr/activite/concert-symphonique/27303-tchaikovski

 

Jeudi 13 : Grenoble : MC2
Vendredi 14 : Chambéry : Malraux, scène nationale
Tchaïkovski : Variations Rococo, opus 33, arrangement pour violoncelle solo et cordes
Elgar : Sérénade pour cordes en mi mineur opus 20
Bartók : Divertimento avec l’Orchestre des Pays de Savoie
https://www.mc2grenoble.fr/spectacle/variations-au-violoncelle/

 

Vendredi 28 : Utrecht : TivoliVredenburg
Haydn : Concerto pour violoncelle n°2 en ré majeur Hob.VIIb.2
avec le Noord Nederlands Orkest
INFOS : https://www.tivolivredenburg.nl/agenda/41530114/brahms-1-en-het-celloconcert-van-haydn-28-02-2025

 

 

 

ORCHESTRE CONSUELO
« Quiconque se sent pénétré d’un amour vrai pour son art ne peut rien craindre » prophétise George Sand dans son roman Consuelo (1843). Cette audace et cette ambition, Victor Julien-Laferrière les a faits siennes pour créer en 2021 son propre orchestre qu’il baptise « Consuelo », héroïne romantique, double fictif de la légendaire Pauline Viardot, Consuelo incarne l’aspiration universelle des jeunes générations d’artistes à se mesurer au répertoire, à connaître les joies de la création, à bâtir leur propre chemin. Lauréat du Concours Reine Elisabeth 2017, le violoncelliste, cultive aussi son activité comme chef d’orchestre, nourrissant sa conception de la direction de sa grande connaissance des musiques de chambre et concertante.

 

Victor Julien-Laferrière et l’Orchestre Consuelo © François Leguen

 

 

 

 

entretien exclusif

ENTRETIEN avec VICTOR JULIEN-LAFERRIERE, à propos de son orchestre CONSUELO… Suite de l’intégrale Beethoven, profil des instrumentistes, répertoire, nouvel album (Suites de Tchaikovski), projets futurs…… https://www.classiquenews.com/entretien-avec-victor-julien-laferriere-a-propos-de-son-orchestre-consuelo-suite-de-lintegrale-beethoven-suites-de-tchaikovski/

 

ENTRETIEN avec VICTOR JULIEN-LAFERRIERE, à propos de son orchestre CONSUELO… profil des instrumentistes, Suite de l’intégrale Beethoven, répertoire, nouvel album (Suites de Tchaikovski), projets futurs……

 

CRITIQUE, opéra. PARIS, Opéra Bastille, le 19 janvier 2025. JANACEK, La petite renarde rusée. M. Siljanov, E. Tsallagova, P. Murrihy, E. Huchet… André Engel / Juraj Valcuha

Pour le promeneurs solitaire des champs et des bois, loin, bien loin du bruit mécanique des villes, c’est la rumeur du sous-bois qui invite aux cérémonies secrètes de la nature. Sommes-nous encore équipé.e.s pour être officiants dans ces communions ou tenons nous plutôt la place des intrus?  Outre l’aspect scientifique ou militant, le rapport que nous avons à la nature n’est plus celui qui serait le plus sain, celui qui inspire et décomplexe, celui de la contemplation. Cette contemplation qui est le creuset de toute création artistique, et encore plus un lien invisible avec toute chose vivante. Bach lui même n’a pas simplement vu la nature comme résultat de la main divine, mais dans ses cantates on entend les saisons, les oiseaux, les éléments déchaînés. Dans le même état d’esprit de rapport simple et honnête à la nature, Leos Janacek s’est toujours soucié de la nature et c’est bien dans la partition de La Petite renarde rusée qu’il a fait un manifeste contemplatif et émouvant de son attachement au sous-bois et la prairie. Créée il y a un siècle, La petite renarde rusée est un chant passionné, un cri déchirant sur la cruauté humaine et finalement notre propre ineptitude. A l’égal du Chantecler d’Edmond Rostand, le livret écrit par Janacek, montre comment la voix animale est aussi puissante, voire bien plus émouvante que celle des humains, toujours préoccupés dans des tâches sans intérêt. Les moments les plus passionnés sont dévolus aux bêtes, ces êtres qui nous observent dans les buissons et gardent leurs secrets dans leur langage énigmatique.

 

Reprenant la mise en scène de 2008 d’André Engel, la saison 2024/2025 de l’Opéra national de Paris commence l’année 2025 avec ce manifeste de Janacek. Si parfois on a craint que cette mise en scène tombe dans la caricature ou le simplisme, rien de tel. La mise en scène est d’une sincérité désarmante, dès le premier tableau on est plongé dans un univers à la poésie émouvante. Ce rêve d’enfance nous mène bien au delà des klaxons et sirènes hystériques de la Place de la Bastille, et nous plonge dans le silence fourmillant de vie d’une campagne onirique. Le mystère absolu étant le mariage glorieux de la Renarde et le Renard dans un décor blanc éclatant, comme le tabernacle joyeux d’une cérémonie secrète. Cette mise en scène révèle à la fin de l’opéra son tableau le plus beau. Le garde chasse couronné de fleurs tel un poète de jadis qui plonge dans une mer de tournesols pour épouser à jamais la terre, la fleur et la feuille et devenir un tournesol de plus, tournant toujours au gré de l’astre du jour.

 

La distribution est menée tambour battant par la Renarde fascinante d’Elena Tsallagova aux aigus riches et brillants. Le Garde-chasse émouvant à l’extrême de Milan Siljanov a des extraordinaires couleurs dans les phrasés. Le Renard de Paula Murrihy a une belle présence théâtrale tout comme Eric Huchet dans le rôle pathétique de l’Instituteur et Frédéric Caton dans celui du Prêtre. La palme absolue est dévolue aux petits génies intégrant le Prague Philharmonic Children’s Choir, créatures et esprits zéphyrins de cette belle reprise. A la tête des forces extraordinaires de l’Orchestre de l’Opéra national de Paris, le maestro Juraj Valcuha a su révéler les dynamiques et la grandeur généreuses de la musique de Janacek dans ces pages magnifiques. 

 

Serions-nous prêts comme le Garde-chasse à nous délester des mondanités et partir à travers champ vers l’horizon? Ou bien attendons-nous l’éclair roux d’un renard qui nous guide vers une liberté que l’on n’ose pas prendre à pleines mains? Janacek est mort suite à une longue promenade en forêt en 1928 et, selon sa volonté, le finale de sa Petite renarde a été joué à ses funérailles. Dès lors, sur sa tombe veille alerte la Petite renarde dont il a fait une diva absolue des feux de la rampe au même titre que Tosca, Violetta ou Manon.

 

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CRITIQUE, opéra. PARIS, Opéra Bastille, le 19 janvier 2025. JANACEK, La petite renarde rusée. M. Siljanov, E. Tsallagova, P. Murrihy, E. Huchet… André Engel / Juraj Valcuha. Toutes les photos © Vincent Pontet
VIDEO : Trailer de La Petite Renarde rusée de Janacek selon André Engel à l’Opéra national de Paris

CRITIQUE, opéra. NANTES, Théâtre Graslin, le 21 janv 2025. VERDI : La Traviata. Maria Novella Malfatti, Dyonisos Sourbis… Chœur d’Angers Nantes Opéra, ONPL, Laurent Campellone (direction) / Silvia Paoli (mise en scène)

Le regard de Silvia Paoli sur La Traviata est très juste et la production tient ses promesses : on retrouve d’ailleurs une belle cohérence globale, pareille à sa précédente mise en scène : une Tosca, tout aussi glaçante et cynique, aux tableaux forts et esthétiquement fouillés (en mai 2024)

 

A Nantes, le spectacle expose sans autre aménagement, le corps féminin au désir des hommes en frac dès le début : la cohorte masculine très conforme et bien costumée piétine [au sens strict] toute dignité féminine ; elle joue aussi sur le vertige du principe du théâtre dans le théâtre, insistant sur le corps contraint, jamais traité d’égal à égal, corps convoité, corps objet sur lequel le pouvoir phallocrate exerce une pression choquante ; ce qui se réalise au moment de la confrontation entre Germont père et Violetta : confrontation stridente qui est le moment phare de l’ouvrage. A plusieurs reprises le bon père de famille soucieux de l’honneur de son clan, s’impose à la courtisane avec des attitudes inappropriées [ce qui en dit long sur le degré d’estime qu’il porte alors à la jeune femme]… Violetta ne peut être qu’une sous créature, honteuse et méprisable, une pécheresse perdue, définitivement étiquetée, c’est à dire, dévalorisée.

 

Ainsi au II [dans la maison de campagne de Violetta] les masques tombent et tout est repris à la dévoyée [chaque objet est inventorié, étiqueté par les huissiers qui ont tout saisi] ; quand elle souligne le sacrifice inepte qui lui est exigé, et qu’elle accepte, soudain le décor petit bourgeois disparaît et la courtisane sacrifiée fait face à un mur miroir qui lui renvoie l’image de sa situation, dans toute sa cruauté barbare, son dénuement impuissant, la dépossession totale dont elle est la victime démunie.

 

MACHINE PATRIARCALE DESTRUCTRICE… Cette machine sociale, patriarcale, qui la détruit, achève son œuvre à travers le lynchage orchestré par Alfredo lui-même lors de la fête hispanisante chez Flora ; l’amant éconduit humilie publiquement son ancienne amoureuse en lui rappelant ce qu’elle est essentiellement : une prostituée dont on paye les charmes, ni plus ni moins. À coup de billets jetés en pleine figure.
Jusque-là insouciant et indifférent, profiteur, rien que jouisseur, le chœur compatit enfin au sort de celle qui sacrifie tout par amour [final du II].

Les décors sont très séduisants composant comme une scène en miroir de la vraie salle, avec des références directes au style fin de siècle [IIIe République]… ce qui induit une mise en abyme critique de ce que nous voyons sur scène. Cette société du plaisir n’hésite pas à vendre son âme et toute valeur au nom d’une morale bourgeoise factice, basculement assumé qu’illustre dans un dérèglement général l’inversion des codes vestimentaires dans la scène du bal [II] où les femmes ont des moustaches et des hauts de forme ; et les hommes, des tutus blancs ou noirs. Que vaut réellement un monde sans valeurs et parfaitement déshumanisé ?
Ce constat est d’autant plus criant qu’auparavant, dans la scène précédente, Germont père a exigé de Violetta le sacrifice ultime tout en lui faisant miroiter une vague miséricorde divine. Ce qu’elle éprouve ici bas comme une leçon expiatoire, elle en sera récompensée plus tard…

 

ESTHÉTISME & CYNISME
Tout en étant très esthétique, la réalisation ne perd rien de l’acuité de sa lecture dévoilant un système violent, permissif, puritain… Ici c’est la femme qui paye un lourd tribut et sur les traces du roman originel de Dumas fils [la dame aux camélias], Verdi brosse un portrait décapant de l’héroïne que la mise en scène percutante expose au plus près de cet abandon total qui a scellé son sort.

Au sein d’une distribution inégale, se détache nettement la Violetta constamment ardente, tendue, hypersensible de Maria Novella Malfatti, capable d’une présence captivante, au jeu aussi précis que son chant est affûté au scalpel, d’autant plus expressive et percutante que le chef en fosse, pilote les instrumentistes de l’ONPL avec une intensité continue, écartant tout abandon et toute ivresse lyrique, comme pour renforcer la machine cynique destinée à broyer l’héroïne. Le Germont père du baryton grec Dyonisos Sourbis, beau timbre, belle puissance [mais vibrato systématique] campe cette autorité hypervirile, d’une inflexible droiture, juge inébranlable que l’absence de toute compassion [ce qui contraste avec tant d’ autres conceptions du rôle] rend plus inhumain encore, au diapason de toute la réalisation. Le personnage est ici réduit à un sacrificateur parfaitement hypocrite, un machiste glaçant qui impose à la dévoyée, un marché inique.
D’ailleurs la scène finale où habituellement Violetta meurt dans les bras d’Alfredo, accompagné par son père, expose derechef l’héroïne dans un seule en scène qui souligne exclusivement sa solitude sacrificielle. Ultime exhibition d’une victime sociale à laquelle rien n’a été épargné : maladie [phtisie incurable], honte et humiliation abandon, misère, solitude… et mort.
En évitant toute dilution décorative ; cohérente et même radicale, la mise en scène de Silvia Paoli convainc de bout en bout, renforçant l’impact dramatique, la conception réaliste et cynique, du chef d’œuvre verdien de 1853.

 

 

L‘incandescente Maria Novella Malfatti, Traviata intense et expressioniste dans la mise en scène de Silvia Paoli © Delphine Perri

 

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CRITIQUE, opéra. NANTES, Opéra Graslin, le 21 janv 2025. VERDI : La Traviata. Maria Novella Malfatti, Dyonisos Sourbis, … Chœur d’Angers Nantes Opéra, ONPL, Laurent Campellone (direction) / Silvia Paoli (mise en scène). Toutes les photos © Delphine Perrin

 

 

LA TRAVIATA de Silvia Paoli à ANGERS NANTES OPÉRA – Plus d’infos sur le site d’ANGERS NANTES OPÉRA : https://www.angers-nantes-opera.com/la-traviata
Prochains spectacles et productions lyriques à Angers Nantes Opéra :
Le voyage de Wolfgang les 29 janv, 1er fév 2025 : https://www.angers-nantes-opera.com/le-voyage-de-wolfgang
La falaise des lendemains, création, jazz diskan opéra, du 26 fév au 24 avril 2025 : https://www.angers-nantes-opera.com/la-falaise-des-lendemains

 

Prochaines dates de LA TRAVIATA par SILVIA PAOLI : Opéra de Rennes, du 25 fév au 4 mars 2025 : https://opera-rennes.fr/fr/evenement/la-traviata
ANGERS – GRAND THÉÂTRE :les 16 et 18 mars 2025
Dimanche 16 mars 2025 – 16h (garderie gratuite à partir de 3 ans sur réservation)
Mardi 18 mars 2025 – 20h : https://www.angers-nantes-opera.com/la-traviata

 

 

 

précédente mise en scène de Silvia Paoli

CRITIQUE, opéra. ANGERS, Grand-Théâtre, le 7 mai 2024. PUCCINI : Tosca. Myrto Papatanasiu, Andeka Gorrotxategi, Stefano Meo… Clelia Cafiero / Silvia Paoli. : https://www.classiquenews.com/critique-opera-angers-grand-theatre-le-7-mai-2024-puccini-tosca-clelia-cafiero-silvia-paoli/

 

CRITIQUE, concert. PARIS, Opéra Garnier, le 17 janvier 2025. BIZET et ses contemporains. Solistes de l’Académie de l’Opéra national de Paris, Patrick Lange (direction)

Le mois de janvier 2025 a couvert d’une brume persistante la peau de zinc et d’ardoise de Paris. Dans la teinture onctueuse du brouillard l’on pourrait soupçonner quelque illusion de Constantin Guys ou des réminiscences de gris de Caillebotte se détacher aux abords du Palais Garnier. Mais non, nul spectre autre que des sirènes en goguette ou des pas pressés aux abords des bouches du métro. 2025, année commémorative de la mort précoce d’Alexandre-César dit Georges Bizet. Enfant choyé de la haute bourgeoisie parisienne et entrée plus tard par alliance dans la parentèle des Halévy, Boieldieu et Auber.  Bizet n’a pas connu la gloire immédiate malgré un Prix de Rome en 1857 remporté à seulement 19 ans. Destin tragique de tous les enfants prodiges ou complexité d’une époque symptomatique de ce qu’un jour Degas répondait à un jeune artiste: « De mon temps, monsieur, on n’y arrivait pas. » Ce sarcasme pourrait quasiment être la devise de tout artiste du passé dont le chemin vers la gloire a été une voie douloureuse. Bizet tel Mozart ou Linley le jeune, ont été fauchés alors qu’ils n’avaient pas atteint le pinacle tellement mérité. Promis à un destin fulgurant, la foudre même qui les fit naître parmi les hommes. L’année Bizet verra ainsi les théâtres de France célébrer l’étoile la plus brillante du firmament musical français du XIXème siècle.

 

Pour ce concert de l’Académie de l’Opéra national de Paris, les solistes ont interprété des larges extraits de Bizet dont des œuvres rarement entendues comme Le Docteur Miracle, Djamileh ou Don Procopio et d’autres contemporains comme Massenet ou Gounod. Nous eussions souhaité aussi entendre peut-être un peu de Halévy ou même pourquoi pas du Thomas, mais le programme était suffisamment fourni et bien agencé. Et surtout quel talent celui des formidables Solistes de l’Académie de l’Opéra national de Paris. Malgré quelques voix un peu en retrait, globalement les performances ont été ravissantes et fabuleuses. Nous remarquons notamment la soprano étasunienne Isobel Anthony dont le timbre sublime a donné à Leïla tout son pathos et sa grâce. Face à elle le Zurga de Igor Mostovoi a été tout aussi spectaculaire. Dans un autre style peut-être un peu plus sobre dans le théâtre mais d’un raffinement certain, le baryton autrichien Clemens Frank porte à la fois le bouffe et le sérieux à des hauteurs insoupçonnées, c’est un immense talent! Le ténor norvégien Bergsvein Toverund malgré un Don José qui laisse un peu à désirer est un Nadir ravissant aux couleurs débordantes et puissantes. Sima Ouahman et Lisa Chaïb-Auriol aux personnalités contrastantes nous ont offert une excellente scène de la Mireille de Gounod. En général, toutes et tous ont rendu cette soirée unique. 

 

Sur le plateau, les musiciennes et les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra national de Paris est un bijou de contrastes dans cette musique. Sous la baguette de Patrick Lange, on sent la maîtrise de ce répertoire pour ce chef où il excelle bien plus que dernièrement dans le Comte Ory au Théâtre des Champs-Elysées. Au fond du temple saint de la musique française, sur l’autel mordoré du Palais Garnier, c’est Bizet qui apparaît transfiguré dans les voix diamantines de la jeunesse. On peut saluer ainsi le brillant Apollon de l’opéra français, génie tutélaire des promesses musicales de l’avenir.

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CRITIQUE, concert. PARIS, Opéra Garnier, le 17 janvier 2025. BIZET et ses contemporains. Solistes de l’Académie de l’Opéra national de Paris, Patrick Lange (direction). Crédit photo © Vincent Lappartient Studio

 

CRITIQUE, concert. PARIS, Théâtre des Champs-Élysées (Les Grandes Voix), le 18 janvier 2025. PERGOLESI : Stabat mater. L. Olivia, E. Zaïcik… Vincent Dumestre / Le Poème Harmonique.

Naples, 1736. Une confrérie commande à Giovanni Battista Pergolesi un  Stabat Mater pour remplacer celui d’Alessandro Scarlatti (le père de celui des 555 sonates pour clavecin), que l’on trouve démodé. À cette époque dans le golfe parthénopéen, les Stabat Mater ou la passion du christ se chantent non seulement à l’église mais dans les rues, à deux ou trois voix, a capella ou presque. C’est cette ambiance que le Poème Harmonique et son chef Vincent Dumestre ont choisi de nous restituer avant une magnifique interprétation du Stabat Mater de Pergolèse, à la fois franche et raffinée.

 

La salle est plongée dans le noir, la porte jardin du plateau s’ouvre, on entend une puis deux voix de ténor qui entament une intonation de Stabat Mater anonyme, la magie bien connue du Poème Harmonique opère déjà. Ce sont Serge Goubioud et Hugues Primard. Les voix se joignent fort bien, ne manquent pas de puissance et ne font défaut ni de justesse ni de nuance. Toutefois, un abus d’accents aux saveurs de pop, comme les aiment certains adeptes de la musique ancienne (baroqueux), peut lasser.

 

Mené par nos deux chanteurs et suivis par Vincent Dumestre, sa guitare dans les mains, un cortèges de musiciens, chanteurs, instrumentistes, percussionnistes, et même un violoncelliste portant son instrument en bandoulière (Cyril Poulet) traversent la salle pour se rendre devant le bord de la scène en interprétant un Tarentelle (reprise en bis) narrant la passion du Christ dans une folie tout à fait napolitaine. Mais lorsque la musique s’arrête net, la lumière s’éteint sur le plateau et éclaire les deux solistes féminines du programme disposées de part et d’autre de la scène au premier balcon. C’est un nouveau Stabat Mater, issu du manuscrit de Monopoli qu’elles interprètent en dialogue avec les deux ténors cités précédemment rejoints par le baryton Emmanuel Vistorky. Eva Zaïcik et Lauranne Oliva sont nobles et délivrent leurs interventions avec grandeur et piété.

 

L’orchestre a ensuite interprété seul un concerto à quatre de Francesco Durante. Une musique sans génie mais rendue belle par un orchestre précis, coloré et chantant. Enfin, après un autre Stabat provenant du manuscrit d’Ostuni interprété par les trois hommes à nouveau a capella, nous arrivons à la pièce maîtresse du programme, quatrième Stabat Mater de la soirée et pas des moindres. Lauranne Oliva, très jeune soprano franco-catalane dispose d’une clarté de timbre agréable, d’une voix facile qu’elle n’a jamais besoin de pousser. Elle est sensible mais manque parfois de puissance et de précision dans la diction. La mezzo-soprano Eva Zaïcik, unanimement reconnue et récompensée, ne dément pas son succès. La voix est magnifiquement naturelle, ample, généreuse, lumineuse. Sur scène, elle est solaire, souriante et attentionnée envers ses collègues. Toutes ces qualités étaient accompagnées d’une robe remarquablement élégante, ce qui mérite d’être mentionné.

 

 

Vincent Dumestre dirige avec passion et intelligence un ensemble tout à fait remarquable dont il convient au moins de mentionner les chefs de pupitre brillants et énergiques, qui mettent en mouvement leurs pupitre avec élégance : Fiona-Émilie Poupard et Louise Ayrton (violons), Delphine Millour (alto) et Cyril Poulet (violoncelle). Cette soirée napolitaine fut très réussie à tous les égards. Nous apprécions particulièrement un concert lors duquel il n’y a aucune place faite aux applaudissements, d’autant plus retentissants et mérités à la fin du concert. Notons que, pour ceux qui auraient  manqué l’événement, ce concert sera retransmis sur France Musique, le 18 février à 20h.

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Théâtre des Champs-Élysées (Les grandes voix), le 18 janvier 2025. PERGOLESI : Stabat Mater. L. Olivia, E. Zaïcik… Vincent Dumestre / Le Poème Harmonique. Crédit photo © Droits réservés