mardi 18 février 2025

CRITIQUE, concert. PARIS, Théâtre des Champs-Élysées (Les Grandes Voix), le 18 janvier 2025. PERGOLESI : Stabat mater. L. Olivia, E. Zaïcik… Vincent Dumestre / Le Poème Harmonique.

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Naples, 1736. Une confrérie commande à Giovanni Battista Pergolesi un  Stabat Mater pour remplacer celui d’Alessandro Scarlatti (le père de celui des 555 sonates pour clavecin), que l’on trouve démodé. À cette époque dans le golfe parthénopéen, les Stabat Mater ou la passion du christ se chantent non seulement à l’église mais dans les rues, à deux ou trois voix, a capella ou presque. C’est cette ambiance que le Poème Harmonique et son chef Vincent Dumestre ont choisi de nous restituer avant une magnifique interprétation du Stabat Mater de Pergolèse, à la fois franche et raffinée.

 

La salle est plongée dans le noir, la porte jardin du plateau s’ouvre, on entend une puis deux voix de ténor qui entament une intonation de Stabat Mater anonyme, la magie bien connue du Poème Harmonique opère déjà. Ce sont Serge Goubioud et Hugues Primard. Les voix se joignent fort bien, ne manquent pas de puissance et ne font défaut ni de justesse ni de nuance. Toutefois, un abus d’accents aux saveurs de pop, comme les aiment certains adeptes de la musique ancienne (baroqueux), peut lasser.

 

Mené par nos deux chanteurs et suivis par Vincent Dumestre, sa guitare dans les mains, un cortèges de musiciens, chanteurs, instrumentistes, percussionnistes, et même un violoncelliste portant son instrument en bandoulière (Cyril Poulet) traversent la salle pour se rendre devant le bord de la scène en interprétant un Tarentelle (reprise en bis) narrant la passion du Christ dans une folie tout à fait napolitaine. Mais lorsque la musique s’arrête net, la lumière s’éteint sur le plateau et éclaire les deux solistes féminines du programme disposées de part et d’autre de la scène au premier balcon. C’est un nouveau Stabat Mater, issu du manuscrit de Monopoli qu’elles interprètent en dialogue avec les deux ténors cités précédemment rejoints par le baryton Emmanuel Vistorky. Eva Zaïcik et Lauranne Oliva sont nobles et délivrent leurs interventions avec grandeur et piété.

 

L’orchestre a ensuite interprété seul un concerto à quatre de Francesco Durante. Une musique sans génie mais rendue belle par un orchestre précis, coloré et chantant. Enfin, après un autre Stabat provenant du manuscrit d’Ostuni interprété par les trois hommes à nouveau a capella, nous arrivons à la pièce maîtresse du programme, quatrième Stabat Mater de la soirée et pas des moindres. Lauranne Oliva, très jeune soprano franco-catalane dispose d’une clarté de timbre agréable, d’une voix facile qu’elle n’a jamais besoin de pousser. Elle est sensible mais manque parfois de puissance et de précision dans la diction. La mezzo-soprano Eva Zaïcik, unanimement reconnue et récompensée, ne dément pas son succès. La voix est magnifiquement naturelle, ample, généreuse, lumineuse. Sur scène, elle est solaire, souriante et attentionnée envers ses collègues. Toutes ces qualités étaient accompagnées d’une robe remarquablement élégante, ce qui mérite d’être mentionné.

 

 

Vincent Dumestre dirige avec passion et intelligence un ensemble tout à fait remarquable dont il convient au moins de mentionner les chefs de pupitre brillants et énergiques, qui mettent en mouvement leurs pupitre avec élégance : Fiona-Émilie Poupard et Louise Ayrton (violons), Delphine Millour (alto) et Cyril Poulet (violoncelle). Cette soirée napolitaine fut très réussie à tous les égards. Nous apprécions particulièrement un concert lors duquel il n’y a aucune place faite aux applaudissements, d’autant plus retentissants et mérités à la fin du concert. Notons que, pour ceux qui auraient  manqué l’événement, ce concert sera retransmis sur France Musique, le 18 février à 20h.

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Théâtre des Champs-Élysées (Les grandes voix), le 18 janvier 2025. PERGOLESI : Stabat Mater. L. Olivia, E. Zaïcik… Vincent Dumestre / Le Poème Harmonique. Crédit photo © Droits réservés

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