samedi 10 mai 2025
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STREAMING, concours de chant. 3 compétitions en direct sur OperaVision : les 5, 11 puis 22 octobre 2024 / Bois-le-Duc, Neue Stimmen, Genève 2024

CONCOURS DE CHANT 2024… Quels sont les talents émergents de la scène lyrique de ce mois d’octobre 2024 ? Tout au long du mois d’octobre, OperaVision retransmet en direct les grands concours de chant d’Europe : après le Concours international de chant de Bois-le-Duc (‘s-Hertogenbosch) ce soir samedi 5 oct (19h), ne manquez pas le direct du 11 octobre (concours Neue Stimmen en Allemagne) ni le 22 octobre, le Concours de Genève en Suisse. Les spectateurs d’OperaVision pourront plus tard en octobre voter pour leur artiste préféré dans le cadre des trois concours. Préparez vos grilles d’évaluation ! Plus de détails à venir sur OperaVision.

 

VOIR les STREAMINGS en direct des CONCOURS de CHANT, de Bois-le-Duc, Neue Stimme, Genève 2024, directement sur le site d’OperaVision : https://operavision.eu/fr

CD & CONCERT. Le pianiste russe Nikolay Khozyainov présente son nouveau programme : « Monument to Beethoven », 11 oct (cd) et 17 déc (concert au TCE, Paris)  

Au dernier trimestre 2024, l’actualité d’un nouveau géant du piano, Nikolay Khozyainov, est double. Son nouveau programme qui célèbre le génie beethovénien comme source d’inspiration, et contient aussi l’une de ses propres partitions comme compositeur « Pétales de la Paix » (2022), produit deux événements incontournables. « Pétales de la Paix » a été commandée par les Nations Unies pour son grand Concert pour la Paix à la Salle des Droits de l’Homme en novembre 2022.

 

Le 11 octobre 2024
NOUVEAU CD « Monument to Beethoven »,  sortie le 11 octobre 2024 chez Rondeau ; avec en bonus exclusif sur la version digitale : le Prélude en do dièse mineur, op. 45 de Chopin.

Le 17 décembre 2024
CONCERT. PARIS, Théâtre des Champs-Elysées 17 décembre 2024
Réservez vos places directement sur le site du TCE PARIS / concert : https://www.theatrechampselysees.fr/saison-2024-2025/musique-de-chambre/nikolay-khozyainov-2

Ambassadeur pour la Paix aux Nations-Unis, le pianiste russe Nikolay Khozyainov est un phénomène, déjà célébré outre Atlantique pour sa technicité foudroyante et un style particulièrement investi, très incarné : il a ainsi été applaudi au Carnegie Hall et au Lincoln Center à New York, au Kennedy Center à Washington, sans omettre le Wigmore Hall à Londres… Paris l’accueille en décembre au TCE.

Auparavant l’artiste publie son nouvel album discographique dédié à Beethoven. Pianiste et compositeur, il sait captiver l’auditoire, ressuscitant les légendes du piano par son feu digital et son engagement expressif. Médaille d’Or de la Paix des Nations-Unies 2022, 1er prix des Concours Internationaux de Dublin et Sydney, Médaille d’or du Conservatoire Tchaïkovski de Moscou 2015, Nikolay Khozyainov a construit son nouveau programme incluant des pièces de Mendelssohn, Schumann et Liszt inspirés par le grand Ludwig : il rend ainsi hommage aux compositeurs qui ont su recueillir des fonds pour le premier monument célébrant Beethoven.

 

SUR LES PAS DE LISZT, DANS L’ADMIRATION DE BEETHOVEN... Ainsi Nikolay Khozyainov suit les traces de Liszt qui dans les années 1830, avait décidé d’aider à financer le premier monument à la mémoire de L. van Beethoven pour son 75ème anniversaire. Mendelssohn (Variations Sérieuses), Schumann (Fantaisie en do majeur, op.17) participèrent à cet acte solidaire remarquable. Ainsi la première statue de Beethoven fut finalement érigée à Bonn en 1845, où elle se trouve encore aujourd’hui.

« Ce programme nous emmène à la découverte de grands chefs-d’œuvre inspirés et dédiés au génie de Beethoven, des chefs-d’œuvre plus intemporels qu’aucun monument ne pourra jamais l’être« , précise Nikolay Khozyainov.

BIO express… Né à Blagoveshchensk en 1992, une ville de l’Extrême-Orient russe, Nikolay Khozyainov a commencé à jouer du piano à l’âge de cinq ans et son talent musical a été découvert immédiatement. Il a déménagé dans la capitale Moscou, pour poursuivre ses études à l’École centrale de musique, et à l’âge de sept ans, il fait ses débuts avec le Concerto pour piano et orchestre de Haendel avec l’Orchestre philharmonique de Moscou. Il a continué ses études supérieures au Conservatoire P.I. Tchaïkovski dont il est sorti avec la Médaille d’Or et le prix du « Meilleur étudiant de l’année »…
Portrait de Nikolay Khozyainov / Photo © Marie Staggat / DR

 

 

Programme du cd :

Beethoven – transceiption de Franz Liszt :
Allegretto de la Symphonie nᵒ 7 en la majeur, op. 92

Schumann :
Etudes en forme de variation sur un thème de Beethoven, WoO 31

Mendelssohn :
17 Variations Sérieuses, op. 54

Beethoven – transceiption de Franz Liszt :
Nimmm sie hin denn, diese Lieder (aus: An die ferne Geliebte)

Schumann :
Fantaisie en do majeur, op. 17

Khozyainov :
Pétales de la Paix (2022)

 

Programme du concert au TCE, Paris le 17 décembre :
Schumann : Variations sur un thème de Beethoven, WoO 31
Khozyainov : Fantaisie (Première française, 2024)
Stravinsky : Trois mouvements de Petrouchka

RÉSERVEZ vos places directement sur le site du TCE Théâtre des Champs -Élysées, PARIS : https://www.theatrechampselysees.fr/saison-2024-2025/musique-de-chambre/nikolay-khozyainov-2

 

VIDÉO : Beethoven / Liszt, Allegretto de la 7ème Symphonie…

 

OPÉRA DE MASSY. AMBROISE THOMAS : Hamlet, les 15 et 17 novembre 2024. Armando Noguera, Florie Valiquette, Ahlima Mhamdi… Frank Van Laecke / Hervé Niquet

En novembre 2024, événement lyrique à Massy : heureux massicois, Hamlet d’Ambroise Thomas, sommet du romantisme français, fait son entrée au répertoire de l’Opéra de Massy. Compositeur célébré à juste titre au Second Empire, Ambroise Thomas se montre particulièrement inspiré par Shakespeare.

 

Tous les personnages brûlent la scène, à commencer par la touchante Ophélie, tout en reflétant, chacun à sa manière, l’âme sombre du héros : un Hamlet d’une exceptionnelle épaisseur psychologique, à la fois héroïque et détruit qui sombre dans la folie (et entraîne avec lui celle qui l’aime, Ophélie). Ambroise Thomas offre à tous les barytons, un rôle impressionnant. Dans ce sens, le metteur en scène Frank Van Laecke élabore une production aux teintes grises qui nous offre un éloquent théâtre dans le théâtre pour donner vie aux pensées de Hamlet et à son destin grave et tragique. L’ouvrage mêle très habilement la veine poétique sensible de Shakespeare et le surgissement du surnaturel, quand dès le premier acte, Hamlet voit le spectre de son père assassiné qui l’exhorte à le venger… « Pour moi, le compositeur est le guide et Ambroise Thomas nous indique très clairement ce que nous devons faire. La musique nous fait entrer dans la tête et l’âme d’Hamlet. Nous avons trouvé un moyen de rester quasi constamment avec lui en créant un espace dans lequel il s’est enfermé avec l’urne de son père. Il y a ainsi deux dimensions : celle d’Hamlet, enfermé dans une sorte de catacombe où le jour et la nuit n’existent plus, et où il dort à côté de l’urne de son père qui matérialise le sentiment de deuil. L’autre dimension, c’est le reste du palais. C’est l’espace qui appartient aux autres et où Hamlet n’apparaît que lorsqu’il se regarde dans le miroir et se retrouve ainsi confronté avec son ultime juge : lui-même. »

 

Argument pour cette nouvelle production à Massy, deux prises de rôles : celle de Florie Valiquette et Ahlima Mhamdi. La mezzo soprano Ahlima Mhamdi (Dialogues des Carmélites – Mère Marie de l’Incarnation, 2023 / Carmen – rôle-titre, 2021) incarnera ainsi sa première Gertrude à Massy ; et la soprano canadienne Florie Valiquette chantera sa première Ophélie. C’est aussi pour le public massicois, l’occasion de retrouver le baryton Armando Noguera (Eugène Onéguine – rôle-titre, 2022) dans le rôle écrasant et captivant d’Hamlet, mais aussi Patrick Bolleire (Rigoletto – Sparafucile, 2019), dans celui de Claudius. En fosse, le chef Hervé Niquet retrouve l’Orchestre national d’Île-de-France dans un répertoire qu’il explore avec le même engagement que les ouvrages baroques. La production avait été présentée à Angers Nantes Opéra en 2019 avec une autre distribution : LIRE ici notre critique d’HAMLET d’Ambroise Thomas à Angers Nantes Opéra en oct 2019 : https://www.classiquenews.com/compte-rendu-critique-opera-nantes-opera-graslin-le-2-oct-2019-thomas-hamlet-franck-van-laecke-pierre-dumoussaud/

 

 

 

 

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Hamlet d’Ambroise Thomas (1868) à l’Opéra de Massy

Vendredi 15 novembre 2024 – 20h

Dimanche 17 novembre 2024 – 16h
Réservez vos places directement sur le site de l’Opéra de Massy : https://www.opera-massy.com/fr/hamlet.html?cmp_id=77&news_id=1043&vID=3

Opéra d’après la pièce de William Shakespeare
Reprise en production déléguée : Opéra de Massy – nouvelle distribution
Coproduction Angers Nantes Opéra / Opéra de Rennes (2019)
Opéra en français, surtitré – Durée estimée : 3h
Tarifs : de 48€ à 90€ / Etudiants : 20€ (cat. 2 ou 3) : www.opera-massy.com / 01 60 13 13 13

 

 

Photos : © Jean-Marie Jagu / ANO Angers Nantes Opéra

 

 

 

DISTRIBUTION
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Direction musicale : Hervé Niquet
Mise en scène : Frank Van Laecke
Décors et Costumes : Philippe Miesch
Lumières : Frank Van Laecke, Jasmin Šehić
Chorégraphie : Tom Baert

Hamlet : Armando Noguera
Ophélie : Florie Valiquette
Claudius : Patrick Bolleire
Gertrude : Ahlima Mhamdi
Laërte : Kaelig Boché
Marcellus : Yoann Le Lan
Horatio : Florent Karrer
Le Spectre : Jean Vincent Blot
Polonius : Nikolaj Bukavec
Premier fossoyeur : Pablo Castillo Carrasco
Deuxième fossoyeur : Bo Sung Kim

Orchestre National d’Ile-de-France
Chœur d’Angers Nantes Opéra
Chœur de l’Opéra de Massy
Opéra de Massy
Tarifs : de 48€ à 90€ / Etudiants : 20€ (cat. 2 ou 3)

www.opera-massy.com / 01 60 13 13 13

 

 

 

VIDÉO Hamlet d’Ambroise Thomas

 

 

 

Parcours croisé à destination du public :

Œil en coulisses : Hamlet – Visite de l’Opéra dans les décors de la production (samedi 9 et 16/11 à 11h) : 5€ / personne.

Soirée étudiante : Une visite guidée des coulisses à quelques minutes de la première avec rencontre de l’un des membres de l’équipe artistique : 20€ / personne (visite + ticket boisson + accès au spectacle)

Conférence gratuite par Cyril Plante : vendredi 15/11 à 18h30 (sur inscription)

Festival Shakespeare : Atelier Masque en famille : samedi 9/11 à 14h (sur inscription)

Photos : Jean-Marie Jagu lors des représentations d’Hamlet d’Ambroise Thomas à Nantes (2019)

 

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ENSEMBLE ALIA MENS. Résidence à Château-Thierry : Cantates de JS BACH, ven 11 oct 2024. « Anti-Melancholicus » : Cantates BWV 131, 13, 106 de J.S. Bach.

Ce vendredi 11 octobre 2024, l’Ensemble Alia Mens, collectif sur instruments d’époque fondé par le claveciniste Olivier Spilmont propose le concert d’ouverture de sa nouvelle Résidence à Château-Thierry ; au programme Cantates de Jean-Sébastien Bach, église Saint-Crépin, 20h30, dans le cadre du 33è Festival Jean de La Fontaine.

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Portrait d’Olivier Spilmont, fondateur et directeur artistique d’ALIA MENS © Frédéric Briois

 

 

NOUVELLE RÉSIDENCE… Alia Mens inaugure ainsi sa Résidence au Festival Jean de La Fontaine, à la Communauté d’Agglomération de la Région de Château-Thierry et à la Ville de Château-Thierry à partir d’octobre 2024 pour une durée de 3 années. Au cours de cette période, l’ensemble développera davantage son activité de création et de diffusion de son répertoire, et de médiation auprès des publics. Olivier Spilmont, directeur artistique précise : « Pouvoir mettre un nom sur les visages présents. Le « public » est une somme d’individus. Établir une relation personnelle, avec les femmes, les enfants et les hommes de ce territoire est le centre de notre préoccupation. Pouvoir offrir un moment d’exception qui crée un avant et un après en présentant des oeuvres d’art mûrement choisies et travaillées est un des axes de notre travail. Il s’agit pour nous de créer les conditions de la rencontre et que ces moments puissent être des phares, des moments de partage et de célébration

Le collectif a particulièrement convaincu CLASSIQUENEWS qui a attribué à ces précédents cd le fameux CLIC de CLASSIQUENEWS pour la réalisation superlative des Cantates de JS Bach (édité chez PARATY). « La musique, la création, la transmission seront au coeur de nos partages. Ils se vivront dans les écoles, avec les associations du territoire, dans les salles de concerts, les églises, au Palais des Rencontres… Partager dans cette cité millénaire, entre ses murs et hors ses murs, notre art. Et rencontrer. Voila notre désir » poursuit Olivier Spilmont.

 

Lors du concert du 11 octobre prochain, Alia Mens jouera le programme de son album « Anti-Melancholicus » – Cantates BWV 131, 13, 106 – J.S. Bach ; « J’ai conçu ce programme comme un itinéraire, comme le dessin d’un chemin symbolique
tracé par les textes et les sujets abordés. L’allégorie du labyrinthe y est convoquée avec le parcours que Bach nous invite à suivre en guidant l’auditeur dans le dédale de son exploration tant musicale que spirituelle. « Aus der Tieffe, rufe, ich zu dir » (BWV 131), cette intense prière que l’homme dans sa détresse adresse à Dieu, poursuit son exploration des profondeurs avec le désespoir et l’obscurité de la Cantate BWV 13 (« Meine Seufzer, Meine Tränen ») pour aboutir à la sérénité consolante de la Cantate BWV 106, « Gottes Zeit ist die allerbeste Zeit ». Anti-Melancholicus est le titre d’un ouvrage d’August Pfeiffer que Bach a noté, pour s’en souvenir, sur la page de garde du cahier pour Anna-Magdalena.
Pour Luther, la mélancolie est le bain du diable. L’écho de cette pensée sur la construction même de ces trois Cantates est éclairant. Puisse cet Anti-Melancholicus, en reprenant une image d’Edgard Morin, être comme une île de ravitaillement dans un océan d’incertitudes », explique Olivier Spilmont (septembre 2024) – LIRE notre critique du CD événement : ANTI-MELANCHOLICUS. JS BACH : Cantates BWV 131, 13, 106 – Alia Mens / Olivier Spilmont (1 cd Paraty) / CLIC de CLASSIQUENEWS, mars 2023 :
https://www.classiquenews.com/critique-cd-evenement-anti-melancholicus-js-bach-cantates-bwv-131-13-106-alia-mens-olivier-spilmont-1-cd-paraty/

 

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ALIA MENS, nouvelle résidence à Château-Thierry
Cantates de Jean-Sébastien Bach
Vendredi 11 octobre 2024, 20h30,
Église Saint Crépin, Château-Thierry
Festival Jean de La Fontaine

RÉSERVEZ vos places directement sur le site du Festival JEAN DE LA FONTAINE 2024 :
https://www.festival-jeandelafontaine.com/Anti-Melancholicus

Anti-Melancholicus
Cantates BWV 131, 13 et 106, J.S. Bach
Avec:
Marie-Luise Werneburg, Soprano
Nicolas Kuntzelmann, Alto
Thomas Hobbs, Ténor,
Romain Bockler, Basse
Ensemble Alia Mens
Olivier Spilmont, Direction

 

VIDÉOS Alia Mens :

Cantate BWV 127, J.S. Bach: https://youtu.be/5xlHltMGv74
Cantate BWV 131, J.S. Bach: https://youtu.be/czyQBAbPQKg
Cantate BWV 33, J.S.Bach   : https://youtu.be/9cQXH66gcBE?si=PxAamnIb6gmd4jvm

ORCHESTRE PHILHARMONIQUE de MONTE-CARLO, saison 2024 – 2025 (Kazuki Yamada, direction). Mozart à Monaco, Hommages à Ravel & Chostakovitch, Charles Dutoit, Martha Argerich, Mirga Grazinyte-Tyla, Nathalie Stutzmann, Lucas & Arthur Jussen…

La nouvelle saison 2024 – 2025 de l’OPMC s’est ouverte lors d’un premier concert Mahler au fini et à la sincérité inoubliables (Symphonie n°3 sous la direction de son directeur musical, depuis 2016, l’impressionnant et passionnant Kazuki Yamada, né en 1979 à Hadano au Japon). Le maestro a porté la phalange monégasque à un niveau d’excellence qui – le temps de ce concert d’ouverture (22 sept dernier) – a montré ses qualités multiples : souplesse, articulation, intériorité, cohérence exceptionnelle du son global, richesse et subtilité agogiques…

 

…de quoi produire pour chaque concert ce « présent étincelant » qu’évoque le chef lui-même, en véritable poète et orfèvre musicien, dans son travail avec les instrumentistes de la phalange monégasque. Autant d’arguments prometteurs qui annoncent sous les meilleurs auspices ce que va être la présente saison 2024 – 2025 de l’OPMC / Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo (la 9ème saison du maestro japonais) : diversité, célébration, excellence.

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Photo grand format ci-dessus : portrait de Kazuki Yamada © Sasha Gousov / OPMC

 

 

 

LYRIQUE 
Le prochain temps fort affiche un opéra français, romantique, perle méconnue signée Saint-Saëns, qui a d’autant plus de légitimité à être recréée sur le rocher que L’Ancêtre fut de fait créé à l’Opéra de Monte-Carlo en février 1906. Kazuki Yamada a la passion de la musique française et le démontre chaque saison. En témoigne ce concert lyrique programmé le 6 octobre prochain (Auditorium Rainier III). Dans la lignée de l’opéra Déjanire du même Saint-Saëns (enregistré en 2022, édité au printemps 2024). Pour L’Ancêtre, il s’agit aussi pour Kazuki Yamada d’accueillir et de travailler avec un chœur invité (comme ce fut le cas de la 3ème Symphonie de Mahler), en l’occurrence pour l’opéra de Saint-Saëns : le Chœur philharmonique de Tokyo. LIRE ici notre présentation de l’Ancêtre de Saint-Saëns par L’OPMC / Kazuki Yamada : https://www.classiquenews.com/orchestre-philharmonique-de-monte-carlo-dim-6-oct-2024-saint-saens-lancetre-version-de-concert-jennifer-holloway-kazuki-yamada-direction/

 

 

Répétitions de L’Ancêtre © Alice Blangero

 

 

CONCERTS DE KAZUKI YAMADA

 

Parmi les concerts prochains dirigés par Kazuki Yamada, vous ne manquerez pas le 8 décembre 2024 : Ainsi parlait Zarathoustra opus 30 de Richard Strauss, couplé avec Les Fontaines de Rome de Respighi et de Benjamin Britten : A simple Symphony opus 4, Double Concerto pour violon et alto avec les solistes Vilde Frang, violon et Lawrence Power, alto ; le 2 février dans le cadre du Festival « Mozart à Monaco » : entre autres partitions, Concerto pour piano n°12, Concerto pour violon n°1 avec les solistes Bohdan Luts et Alexandra Dovgan, Symphonie n°40 K 550… ; le 30 mars, concert « Hommage à Ravel », dont les 2 concertos pour piano avec Nelson Goerner, couplés avec Une barque sur l’océan, Boléro… ; le 8 juin, concert Brahms (double concerto pour violon et violoncelle opus 102 avec Anne-Sophie Mutter et Pablo Ferrández), Takemitsu (I hear the water dreaming), Saint-Saëns : Symphonie n°3 en do mineur opus 78 « avec orgue »… (Portrait photo ci dessus © Sasha Gusov).

 

© Sasha Gousov / OPMC

 

 

AUTRES VERTIGES SYMPHONIQUES
De la même façon, pour vivre le grand vertige symphonique, plusieurs autres programmes s’annoncent marquants dont : le 17 janv 2025, le rare et saisissant Lieczyslaw Weinberg dont l’excellente cheffe Mirga Grazinyte-Tyla est une ambassadrice irrésistible désormais (Suite The Golden Key, op 55d) couplé avec le Concerto pour piano n°2 en fa mineur opus 21 de Chopin (Georgijs Osokins, piano)… puis la Symphonie n°9 « Du nouveau monde » de Dvorak ; de même, le 13 mars 2025 : Prélude de l’Acte I de Parsifal de Wagner et Symphonie n°8 de Bruckner (version Haas, WAB 108) sous la direction de Jukka-Pekka Saraste

 

RAVEL
Comme en témoigne la Symphonie avec orgue de Saint-Saëns, toujours exceptionnelle au concert, Kazuki Yamada aime la musique française, en particulier Claude Debussy, et bien sûr Maurice Ravel dont il a dirigé avec l’OPMC, le subtil et poétique « Enfant et les Sortilèges » (somptueux spectacle qui a marqué la fin de l’année 2023, avec les Ballets de Monte-Carlo et Jean-Christophe Maillot). Ainsi le fil « Hommage à Ravel » permet de célébrer fort à propos l’anniversaire Ravel 2025 : La Valse (le 1er déc, couplée avec Petrouchka de Stravinsky dans la version originale de 1911 ; et le Concerto pour violoncelle de Dvorak avec Gautier Capuçon, sous la direction de Charles Dutoit) ; Tombeau de Couperin, Concerto pour piano en sol majeur (Martha Argerich, piano), couplés avec Prélude à l’Après midi d’un faune et La Mer de Debussy sous la direction également de Charles Dutoit (le 9 fév 2025). Un autre temps fort du cycle Ravel est le concert du 30 mars 2025 : Kazuki Yamada dirige les 2 concertos pour piano (en sol majeur et pour la main gauche) avec Nelson Goerner (piano), couplés avec Pavane pour une infante défunte, Une barque sur l’océan, Boléro

 

CHOSTAKOVITCH
Autre « parcours » événement de cette nouvelle saison, l’Hommage à Chostakovitch qui regroupe pas moins de 8 programmes dont entre autres, le 13 oct (Symphonie n°9 opus 70, couplée avec Les Tableaux d’une exposition de Moussorgski et le Concerto pour violon n°2 de Prokofiev avec Daniel Lozakovich, sous la direction de Lio Kuokman), le 20 oct (Symphonie n°5 opus 47, couplée avec le Concerto pour harpe de Mossolov avec Xavier de Maistre, sous la direction de Nathalie Stutzmann), le 4 mai 2025 (Suite Katerina Ismailova, le Concerto pour piano et trompette avec Martha Argerich et Serguei Nakariakov, la Symphonie n°6 en si mineur opus 54 sous la direction de Dima Slobodeniouk) ; ou le dernier concert, le 15 juin, sous la direction de Juraj Valcuha, et Andrei Korobeinikov (piano) : Concerto pour piano n°2 en fa majeur opus 102 (couplé avec Une vie de héros de R. Strauss).

 

FESTIVAL « MOZART A MONACO »
L’OPMC a à cœur de jouer Mozart, sa subtilité et sa profondeur favorisant toujours l’enrichissement des instrumentistes… Depuis 3 ans, l’Orchestre organise son propre cycle Mozart dans divers lieux de Monaco, sur 10 jours, avec au programme plusieurs œuvres clés de Mozart : du 23 janvier au 2 février 2025. Temps forts entre autres : concert du 25 janv (Ton Koopman, direction), du 27 janv avec le Chœur d’enfants de l’Académie Rainier III sous la direction de Diego Ceretta (Concerto pour clarinette avec Pierre Génisson, Laudamus te de la Grande Messe en Ut avec Emöke Baráth, Messe en do majeur K 167…), du 2 février 2025 sous la direction de Kazuki Yamada (Divertimento en ré majeur, K. 136/125a, Concerto pour violon n°1 en si bémol majeur, K. 207, Concerto pour piano n°12 en la majeur, K. 414/385p, Symphonie n°40 en sol mineur, K. 550 – solistes : Bohdan Luts, violon et Alexandra Dovgan, piano)…

 

JEUNE PUBLIC
Les jeunes spectateurs ne sont pas oubliés grâce à 3 programmes spécifiques pour les 4 – 10 ans (et leurs parents) dont l’onirique « Snegourotchka » (« La fille de neige ») de Rimsky-Korsakov le 4 déc (Philippe Béran, direction / Joan Mompart, comédien / et Marina Sosnina, artiste sur sable).

MUSIQUE & CINÉMA
3 ciné-concerts vont régaler le public : deux pour les enfants (projection de 4 Charlot dont « Charlot fait une cure » et « Charlot, garçon de théâtre », avec le concours et le charisme du pianiste improvisateur Paul Lay, les 16 oct 2024 puis 9 mars 2025) ; le dernier ciné-concert pour le grand public révélant un ballet méconnu de Chostakovitch « La Nouvelle Babylone », partition majeure de l’ère soviétique stalinienne… complétant ainsi judicieusement le fil Chostakovitch (le 30 mai 2025)…

HAPPY HOUR
Vous ne manquerez pas non plus les « Happy hour musicaux » à 18h30, par les Musiciens de l’OPMC, comme ceux affichant une œuvre de Chostakovitch, des 29 oct, puis 26 nov 2024, et 16 avril 2025 ; sans omettre celui du 10 juin (Ravel, Jadin).

 

 

ARTISTES EN RÉSIDENCE
Pour la saison 2024 – 2025, les frères pianistes qui jouent en duo, Lucas & Arthur Jussen (nés en 1993 et 1996) sont les artistes en résidence à l’OPMC (comme le furent pour la saison 2023 – 2024 : Simon Trpceski et Daniel Lozakovich…). Les deux néerlandais jouent à 4 mains et sur deux pianos. Selon Kazuki Yamada, les deux jeunes interprètes charment et captivent car leur musique « est perpétuellement vivante autant que leur personnalité est attachante et dynamique ». A Monaco, ils ont déjà joué avec les instrumentistes de l’OPMC lors du festival « Mozart à Monaco » (2023) ; pour cette nouvelle saison, les deux complices proposent un cycle complet allant de Mozart à Poulenc, en passant par Stravinsky, et même des pièces contemporaines. A ne pas manquer, 3 concerts événements à venir : 13 avril, 22 juin puis 20 juillet 2025.

 

 

RÉCITALS
Enfin, parmi les récitals à ne pas manquer : ceux de Krystian Zimerman (le 9 oct), Julia Fischer & Jan Lisiecki (2 nov), Arcadi Volodos (15 déc 2024), Leif Ove Andsnes (10 janvier 2025), Christian Zacharias (28 fev), Grigory Sokolov (27 avril), Hélène Grimaud (5 juin), …

 

Symphonie n°3 de Mahler © Direction de la Communication OPMC / Frederic Nebinger

 

 

 

TOUTES LES INFOS, le détail des programmes, les cycles, les artistes invités et en résidence, la billetterie en ligne… sur le site de l’OPMC Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo saison 2024 – 2025 : https://opmc.mc/saison-24-25/

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Auditorium de Radio-France, les 26 et 27 septembre 2024. RACHMANINOV : Intégrale des Concertos pour piano. Mikhaïl Pletnev (piano), OPRF, Dima Slobodeniouk (direction).

Le big boss débarque à Paris ! Mikhaïl Pletnev jouit d’une aura surnaturelle en Russie : c’est le pianiste préféré de vos pianistes préférés, un compositeur respecté, un bâtisseur d’orchestres et un chef adulé. Très rare au pupitre dans nos contrées, il est parfois vu comme un OVNI du piano pour ses interprétations hautement personnelles. Et pourtant, il y a bel et bien une cohérence dans celles-ci, et en aucun cas la pédanterie du virtuose trop doué cherchant à attirer les regards. Le voilà à Paris pour deux soirées et une Intégrale des Concertos de Sergueï Rachmaninov avec le Philharmonique de Radio France et Dima Slobodeniouk dans une Maison de la radio pleine à craquer.

 

 Crédit photo © Edouard Brane

 

Accompagner Pletnev en concert requiert un peu plus d’écoute qu’avec un autre soliste : les tempi se sont encore ralentis, les dynamiques restreintes. Par chance, on lui a donné un immense chef pour ces deux concerts : Dima Slobodeniouk. Le chef et le pianiste doivent travailler ensemble pour proposer la vision de Pletnev : ouvrir l’espace, aller chercher le détail, proposer un chant ample et aéré. Et pour cela, ces messieurs auront à leur disposition le Philharmonique de Radio France, bonne nouvelle ! L’orchestre le plus sérieux qui soit, portant avec toute la discipline du monde cette esthétique, formé d’une petite harmonie au charme infini qui rayonne dans les superbes lignes de Rachmaninov, et de cordes solides et cohérentes.

L’esthétique en question est d’abord caractérisée par un refus du pathos et du sentimentalisme. L’exemple le plus frappant se situe dans l’ouverture du Concerto n°2 : un premier accord arpégé tout à fait léger joué par Pletnev, les suivants expédiés comme si de rien n’était. Entrée de l’orchestre. Pletnev ne souhaite pas porter le drame quand il est trop marqué, il refuse de caractériser une souffrance romantique dans ces pages. Les mouvements lents sont pourtant des sommets d’émotion, mais une émotion transmise par une élévation féerique, comme dans un ton de conteur dans le solo de l’andante du Concerto n°1. Le drame est bien présent, mais sous-jacent, créé au piano par le don qu’a Pletnev de créer le vertige en une suite d’accords, par un changement d’éclairage, par une profondeur de son. Citons également le second thème du final du Concerto n°2. Une prise de parole de Pletnev tellement concentrée et sensuelle dans l’un des plus beaux thèmes de Rachmaninov. Et la clarinette de Baldeyrou qui vient se poser juste en dessous, l’accompagner puis s’éteindre.

Les finales des Concertos n° 2 et 3 sont des réussites. Pas de lyrisme exacerbé ou de final électrique, seulement des cordes cohérentes, expressives et sonnant larges sur lesquelles se pose la détente totale de Pletnev. Le Concerto n°4 est une sorte d’aboutissement de toutes ces esthétiques. Peut-être que l’on entend mieux les intentions d’un orchestre, du chef et du pianiste après trois concertos, mais on semble aller encore un pas plus loin. L’œuvre est lente, mise à nu. C’est une exposition de ses entrailles et de ses rouages. Les moments inoubliables ne manquent évidemment pas, de la couleur des accords ouvrant le largo à la coulée de lave qu’est le retour du thème. Le son de Pletnev venant d’abord du fond du piano, se développant avec l’orchestre, se plaçant juste au-dessus l’espace d’un instant avant de se loger de nouveau dans le son des cordes.

Avec un tel pianiste, chaque mesure est notable, “intéressante” selon le cliché du commentaire artistique. On pourrait procéder à l’état des lieux de la performance, mais il s’agirait de s’intéresser à la direction prise par cette interprétation si différente des autres. Pletnev entre dans l’œuvre pour la disséquer : refus du drame, narration légendaire, sens du détail, lyrisme ample, vertige de sa décontraction absolue. L’expérience est différente de l’honnêteté désarmante et du puritanisme d’un Lugansky, du jaillissement torrentiel si naturel d’un Berezovsky, de la prétention à un lyrisme immense de Kholodenko ou Geniusas. Différente, mais plus questionnable sur la durée des quatre concertos et moins frappante émotionnellement. Cette esthétique a des limites dans les mouvements extrêmes, particulièrement dans cette acoustique sèche et rude pour le pianiste. En concerto, Pletnev a logiquement un espace d’expression restreint où son piano n’a pas le contrôle sonore total. Dans certains des passages les plus joueurs, dans certaines transitions, le pianiste et l’orchestre doivent travailler ensemble pour créer une luxuriance, des jeux, des échos, des frottements… mais le piano se trouve ici délaissé de son pouvoir magique de prise de parole et ne porte plus l’orchestre et les traits divins des vents. L’orchestre, par ce tempo lent, se trouve délaissé de sa luxuriance et de ses jeux sonores, et les cordes ne portent plus ce piano capable de créer le vertige en se posant dessus.

Pour conclure, trois bis inoubliables : un Nocturne op.9/2 d’une douceur, d’un ton aristocratique et informel… jouer dans une salle de 1.500 places comme on joue dans son salon. Une Etude de Moszkowski à la réalisation exceptionnelle et au son dénué de toute électricité. Un Prélude op.23/4 de Rachmaninov comme apothéose du parti-pris des concertos, une détente totale du discours baignée dans un clair-obscur. Pletnev est un pianiste immense parce que son idiosyncrasie sert la cohérence d’un discours hautement personnel et reconnaissable entre mille. C’est art du pas de côté dans l’œuvre capable d’alléger le drame en comptine et d’élever l’anecdotique en événement par une mise en valeur des frottements d’une partition. La création d’un univers sonore entre sophistication du phrasé, intimité, miroitement et plasticité du son, ton informel mimant l’improvisation et candeur populaire… un pianiste qui plie l’instrument à son imaginaire.

 

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Auditorium de Radio-France, les 26 et 27 septembre 2024. RACHMANINOV : Intégrale des Concertos pour piano. Mikhaïl Pletnev (piano), OPRF, Dima Slobodeniouk (direction). Photos © Edouard Brane.

 

VIDEO : Mikhaïl Pletnev interprète l’Intégrale des 5 Concertos pour piano de Rachmaninov (sous la direction de Kent Nagano).

 

CRITIQUE, concert. PARIS, Philharmonie, le 2 oct 2024. MAHLER : Symphonie n°9. Orchestre de Paris / Klaus Mäkelä (direction).

 

La Neuvième symphonie de Gustav Mahler fait partie de ces œuvres monumentales que l’on n’entend en concert que deux ou trois fois dans sa vie. Pas question, donc, de rater le concert qui était donné à la Philharmonie de Paris par l’Orchestre de Paris dirigé par son jeune directeur musical (28 ans !), Klaus Mäkelä. On eut droit à une interprétation étourdissante, bouleversante, mémorable de cette œuvre hors du commun.

 

            Crédit photo © André Peyrègne

 

Un an avant sa mort, Mahler a concentré tout son génie dans sa Neuvième symphonie. Sans avoir recours aux chanteurs et aux chœurs comme dans ses symphonies précédentes, il a investi son inspiration de démiurge dans un orchestre seul. Cette œuvre est son testament. Tous les styles auxquels il nous a habitués auparavant s’y retrouvent sublimement réunis : ses envolées monumentales, ses éclats dantesques, ses élans romantiques, ses confidences rêveuses, ses rythmes capricieux, sa grâce virevoltante, ses passages « populaires » ou burlesques, ses alternances d’espoir et de désespoir, ses marches funèbres, ses envols vers le Ciel. Le dernier mouvement se termine sur un sublime et poignant retour au silence. La musique s’achève, pianissimo, et même pianississimo. Mahler dit adieu à la vie. On a le frisson !

Pendant l’heure et demie que dure cette œuvre babylonienne, il y avait de quoi se perdre. Mais Klaus Mäkelä était là. Ce merveilleux jeune chef, aux allures d’ado, sut constamment capter notre attention, nous rattraper, nous guider. Il avait en mains à la fois son public et ses musiciens. Ses musiciens, il les électrisent. On sentait que tous donnaient le meilleur d’eux-mêmes, qu’ils soient solistes ou musiciens du rang. Et il y eut cette fin où la musique avait rendez-vous avec le néant. Les sons, peu à peu, s’amenuisaient pour finir par s’éteindre. La salle retenait son souffle. L’orchestre produisait des sons si ténus, précis, soignés, et si frémissants… que vingt violons ne semblaient être plus qu’un. On percevait des notes infimes, transparentes au point qu’on croyait entendre le silence. On n’osait plus bouger, comme pétrifiés d’admiration. Puis, soudain, la Philharmonie toute entière explosa en bravos – une explosion formidable comme il s’en produit à la fin des grands concerts ou des grands opéras. On venait d’entendre une mémorable Neuvième de Mahler. 

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Philharmonie, le 2 oct 2024. MAHLER: Symphonie n°9. Orchestre de Paris / Klaus Mäkelä (direction).

 

VIDÉO : Claudio Abbado dirige la 9ème symphonie de Gustav Mahler au Festival de Lucerne

 

CRITIQUE, opéra. TOULOUSE, Théâtre du Capitole (du 24 sept au 6 oct 2024). VERDI : Nabucco. G. Myshketa, Y. Auyanet, J. F. Borras, N. Courjal… Stefano Poda / Giacomo Sagripanti.

Avant de faire les beaux soirs des Arènes de Vérone l’été prochain, la production de Nabucco de Verdi imaginée par l’homme de théâtre et philosophe Stefano Poda fait actuellement ceux du Théâtre du Capitole (après Lausanne en juin dernier), pour une spectaculaire ouverture de saison. A son habitude, l’italien signe également les décors, les costumes, les lumières et les chorégraphies de ses spectacles, (avec l’aide de son fidèle assistant, Paolo Giani Cei). 

 

                    Crédit photographique © Mirco Magliocca

 

Comme il en a désormais l’habitude, la « touche » Poda se reconnaît facilement, avec une production visuellement toujours aussi spectaculaire (à l’instar de son Faust liégeois en 2019), et toujours aussi esthétique, voire esthétisant, un régal de tous les instants pour les yeux. Une production abstraite et intemporelle aussi, qui joue beaucoup sur les symboles. Le metteur en scène met en exergue, et à l’envi, l’opposition entre Hébreux et Babyloniens, qu’il traduit dans les couleurs des costumes (blancs pour les premiers, rouges pour les seconds) mais aussi des immenses parois à l’intérieur desquelles se joue l’intrigue, les blanches montant dans les cintres pour laisser descendre les rouges. Au début du spectacle, un immense pendule de Foucault va et vient au-dessus de la scène, puis ce sera le tour d’une immense mappemonde de faire son apparition depuis les cintres. On verra également descendre un gigantesque cylindre transparent qui va d’abord encercler les Hébreux, puis Nabucco. Mais l’aspect visuel du spectacle, malgré ses 17 danseurs ici omniprésents et qui accaparent l’action, réduit à la portion congrue la direction d’acteurs des protagonistes. Ainsi, rien ne vient distinguer le Nabucco du début de l’ouvrage, tyran assoiffé de pouvoir et imbu de sa personne, de celui de la seconde partie, fragile et émouvant, au repentir sincère…

Dans le rôle-titre, le baryton albanais Gëzim Myshketa rallie tous les suffrages. On admire une fois de plus son prodigieux phrasé, mais aussi le bel éclat du timbre, à l’aise dans les hauteurs de la tessiture, ainsi que la force de conviction de l’interprète qui capte la lumière, immanquablement, et en toute situation. Le redoutable rôle d’Abigaille est confié à la soprano Yolanda Auyanet (en double distribution avec Catherine Hunold). On sait dès lors que la diva espagnole possède assurément la stature de ce personnage hors-norme, impressionnante furie au regard halluciné. Elle en assume aussi l’incroyable ambitus, du grave, appuyé très haut, à l’aigu, dardé avec la précision d’un laser, et cependant capable d’impalpables suspensions. La basse française Nicolas Courjal incarne un Zaccaria à la technique et au style irréprochables, avec la voix profonde et sonore qu’on lui connaît. La Fenena d’Elena Sherazadishvili convainc aisément dans ses quelques interventions (faisant notamment de son air « Oh, dischiuso è il firmamento » un des plus beaux moments d’émotion de la soirée), tandis que le ténor niçois Jean-François Borras séduit grandement, grâce à un superbe timbre de juvénilité et une expression toujours nuancée. Rien à redire sur les comprimari très bien choisis, à commencer par l’Abdallo d’Emmanuel Hasler

En fosse, le chef italien Giacomo Sagripanti ne se contente pas de battre la mesure et d’accuser le profil martial de la partition. Il obtient de la phalange toulousaine (entendue la veille dans une fastueuse Deuxième Symphonie de Mahler dirigée par Tarmo Peltokoski dans la voisine Halle aux Grains) des couleurs, une dynamique, une souplesse qui donnent un sens au discours verdien. Le chœur, surtout, est chaleureux, nuancé quand il le faut. Moment évidemment très attendu, le sublime « Va pensiero » est abordé pianissimo, pour ensuite s’envoler tout en gardant un bel élan. 

 

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CRITIQUE, opéra. TOULOUSE, Théâtre du Capitole (du 24 sept au 6 oct 2024). VERDI : Nabucco. G. Myshketa, Y. Auyanet, J. F. Borras, N. Courjal… Stefano Poda / Giacomo Sagripanti. Photos © Mirco Magliocca.

 

VIDEO : Christophe Ghristi présente « Nabucco » de Verdi au Théâtre du Capitole

 

 

ORCHESTRE LAMOUREUX, saison 2024 – 2025 (Adrien Perruchon, direction). Bébé concerts, Bernard Lavilliers, Mozart à Paris (1778), «  dans le style ancien », Symphonie n°8 de Beethoven, Phoenix de Raphaël Sévère…

Travail continu et donc progrès constant, « immense répertoire », discographie déjà impressionnante, élargissement significatif du répertoire, l’Orchestre Lamoureux en activité dès 1920 sous la baguette du pionnier visionnaire Paul Paray, dirigé de 1957 à 1962 par l’excellent et inclassable Igor Markevitch, approfondit encore son approche des œuvres, dans une diversité de formes et de styles qui démontrent en l’état son étonnante adaptabilité. Fidèle à une histoire prestigieuse qui a compté entre autres la première interprétation parisienne de Tristan et Yseult de Wagner le 2 mars 1884 (premier acte) où fut témoin (très enthousiaste) Debussy, ou encore la création française de Lohengrin du même Wagner le 3 mai 1887 sous la direction de Charles Lamoureux, sans omettre la création de La Mer de Debussy le 10 oct 1905 (sous la direction de Camille Chevilard)… le directeur musical actuel, Adrien Perruchon a à cœur de préserver toujours ce qui fait la singularité de l’Orchestre : nuances, flexibilité, création et contemporanéité, ouverture et accessibilité… La nouvelle saison de l’Orchestre Lamoureux, prestigieuse phalange parisienne, propose en 2024 – 2025, une saison éclectique, passionnée, affichant symphonies et concertos, mais aussi expériences musicales innovantes et toujours passionnées…
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Après deux programmes phares (Aznavour symphonique puis Vol de nuit le 6 oct 2024) qui auront lancé sa nouvelle saison 2024 2025, l’Orchestre Lamoureux poursuit son aventure musicale sous la direction musicale du chef Adrien Perruchon.

A ne pas manquer prochainement plusieurs grands concerts qui promettent le vertige symphonique : grand récital avec orchestre de Bernard Lavilliers « Métamorphose », le 13 oct (à la Philharmonie de Paris), puis le 19 oct (au Zénith de Rouen) ; puis « Mozart parisien », dim 17 Nov à la Salle Gaveau dédié au dernier voyage de Mozart à… Paris, séjour fructueux qui voit la naissance de l’irrésistible double concerto pour harpe et flûte, manifeste élégantissime du Paris des Lumières (1778), avec Julien Beaudiment, flûte, et Anaïs Gaudemard, harpe, couplé à une collections d’airs d’opéras pour flûte et orchestre, et surtout au Requiem (avec un quatuor vocal très prometteur qui réunit Fanny Soyer, soprano / Chloé Briot, mezzo-soprano / Julien Behr, ténor / Dong-Hwan Lee, basse et le Choeur Vittoria d’Île-de-France…

En 2025, vous ne manquerez pas le récital événement de la soprano Nadine Sierra qui chantera plusieurs d’opéras signés Puccini, Charpentier, Gounod, Verdi, Gershwin, Donizetti… (Salle Gaveau, le 4 fév 2025) ; puis le 30 mars, Hugues Borsarello au violon et à la direction propose un programme tout autant passionnant « Dans le style ancien », qui comprend les œuvres de plusieurs compositeurs inspirés par leurs prédécesseurs, en particulier de l’époque baroque, les auteurs des Suites de danse… Ainsi Grieg qui s’inspire de JS Bach ; ainsi Britten qui relit les œuvres de Bridge… ou encore le violoniste et compositeur Fritz Kreisler qui compose dans le style de Gaetano Pugnani. Le 17 mai (Salle Gaveau), Adrien Perruchon joue entre autres le Concerto pour violoncelle en ré mineur de Marie Jaëll créé en 1882 (soliste : Stéphanie Huang, violoncelle) couplé avec La Muse et le poète de Saint-Saëns et la Symphonie n°8 de Beethoven.

Enfin, dernier concert de la saison, Adrien Perruchon dirige le 7 juin (Seine Musicale, auditorium Patrick Devedjian), le Double concerto pour clarinette, alto et orchestre de Max Bruch avec l’altiste Adrien La Marca et le clarinettiste Raphaël Sévère, lequel joue aussi son propre concerto « Phoenix », couplés avec Tableaux d’une exposition de Moussorgski, orchestration de Ravel.

https://orchestrelamoureux.com / Au cours de cette saison, l’Orchestre Lamoureux veille à sensibiliser les spectateurs de demain : d’innombrables « bébé concerts », pour les très jeunes auditeurs jusqu’à 5 ans (dont plusieurs focus sur Wolfgang Amadeus Mozart), ainsi que des spectacles Jeune Public (comme « Malevolo et l’oiseau qui fait venir le jour » les 16 et 19 mars 2025), sont à l’affiche tout au long de la saison 2024 – 2025. Photo : Adrien Perruchon (c) DR.

 

 

PLUS D’INFOS, le détail des programmes, les artistes invités, la billetterie en ligne… sur le site de l’Orchestre Lamoureux, saison 2024 – 2025 :
https://orchestrelamoureux.com/saison-2022-2023/

CRITIQUE, concert. TOULOUSE, Halle aux Grains, le 28 septembre 2024. MAHLER : 2ème Symphonie dite « Résurrection ». Orchestre National du Capitole de Toulouse / Tarmo Peltokoski (direction).

 

A seulement 24 ans, le chef finlandais Tarmo Peltokoski vient de prendre ses fonctions de directeur musical de l’Orchestre National de Toulouse avec un concert qui restera dans la mémoire tant des toulousains (accourus en masse) que des annales de la Halle aux grains ! Car c’est avec rien moins que la monumentale et sublime Deuxième Symphonie (dite « Résurrection ») de Gustav Mahler (qu’il a dirigée sans partition !) que le jeune chef a tenu à débuter son mandat, véritable Everest symphonique (et également notre symphonie préférée !).

 

Tarmo Peltokoski dirige une grandiose Deuxième Symphonie de Mahler pour son “intronisation” à la tête de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse !

 

Tarmo Peltokoski et l’ONCT © Romain Alcaraz

 

La soirée débute cependant par une exécution de l’ouverture de Tristan und Isolde de Richard Wagner, dont les trois derniers accords sont aussitôt suivis, sans temps de pause ou respiration aucune (pour mieux en accentuer la filiation ?…), par le fameux Totenfeier et sa déflagration d’un pupitre de violoncelles incisif et vigoureux : c’est bien une vision spectaculaire et sombre de cette œuvre que s’attachera à dessiner la baguette du fringant et passionné jeune chef (qui vient également d’être nommé à la tête de l’Orchestre Philharmonique de Hong-Kong qu’il dirigera à partir de septembre 2026). On se délecte aussi, dans l’Allegro Maestoso, des admirables pizzicati qui absorbent l’écoute. Dans l’Andante moderato, c’est la finesse des cordes, toutes en volupté, qui capte aussitôt l’attention. Tarmo Peltokoski fait ensuite ressortir dans le Scherzo tout le grinçant contenu dans ce mouvement, et dont se souviendra plus tard Chostakovitch… Mais il se distingue avant tout par une aisance incroyable, entre puissance et souplesse, le corps entièrement donné à la musique (qu’il torsionne en avant ou en arrière, se désarticulant presque quand il s’agit de déclencher un fortissimo !), doublée d’une battue virtuose, et surtout un charisme naturel qui fait que nul ne peut détacher ses yeux du podium, pas plus les musiciens que le public.

Dans l’Urlicht, nous découvrons la superbe contralto allemande Wiebke LehmKuhl qui apporte à cette partie une humanité confondante, tranchant radicalement avec les trois premiers mouvements. Elle délivre un chant très pudique d’une voix intense et blessée. Le chef s’engage alors dans un final étiré et néanmoins terrifiant. La lente montée vers le Wild herausfahrendest, impeccablement traitée, fait courir le frisson derrière l’échine, avant que la soprano colorature finlandaise Silja Aalto ne prenne le relais dans le long finale où les Chœurs conjugués du Capitole de Toulouse et de Radio France ne murmurent (comme il se doit…) le Mit flügeln. Ils délivrent ensuite “con tutta la forza” un Bereite dich zu leben (“Prépare-toi à vivre” !) vibrant d’émotion – qui emporte tout sur son passage, et notamment l’adhésion enthousiaste du public qui se rend bien compte qu’il vient de vivre un moment historique !

Vivement de retrouver ce prodige de la baguette à Toulouse, et cela sera dès le 23 novembre (nous y serons !) pour un programme Schönberg/Chostakovitch, puis pour le Concert du Nouvel An (les 31/12, 1&2 janvier 2025) pour faire résonner la Neuvième Symphonie de Beethoven et sa fameuse “Ode à la joie” ! Et il reviendra pas moins de 5 fois d’ici la fin de la saison diriger la phalange toulousaine… qui a su décidément dénicher la perle rare – leur rencontre (électrique) ne datant que de la fin août 2022, lors d’un tout aussi incroyable concert au Festival Ravel (nous y étions également !).

 

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CRITIQUE, concert. TOULOUSE, Halle aux Grains, le 28 septembre 2024. MAHLER : 2ème Symphonie dite « Résurrection ». Orchestre National du Capitole de Toulouse / Tarmo Peltokoski (direction). Crédits photos © Romain Alcaraz.

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Lire aussi notre présentation de la Saison 24/25 de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse : https://www.classiquenews.com/orchestre-national-du-capitole-de-toulouse-nouvelle-saison-2023-2024-marek-janowski-bertrand-chamayou-isabelle-faust-ariane-matiakh-dylan-corlay/

OPÉRA DE NICE. ÉRIC VU-AN : Coppélia (Delibes), les 10, 11, 12, 13, 15 octobre 2024. Ballet Nice Méditerranée, Orchestre Philharmonique de Nice, Léonard Ganvert (direction).

Le ballet Coppélia (1870) à l’affiche de l’Opéra de Nice Côte d’Azur en ce mois d’octobre rend hommage au directeur de la danse qui a dirigé le corps de ballet maison et qui est récemment disparu, Éric Vu-An (décédé à Nice le 8 juin 2024 à l’âge de 60 ans). En 2011, ce dernier faisait entrer l’ouvrage au répertoire du Ballet Nice Méditerranée, ainsi dans sa propre chorégraphie. Sa version de Coppélia, ballet majeur du répertoire, concentre le style du chorégraphe : sobre, juste, précis, apportant cette part d’élégance et de lisibilité aux ensembles comme aux séquences solistes.

 

Avec les décors et costumes réalisés par les ateliers de l’Opéra de Nice pour la création de 2011, accompagnés par les musiciens de l’Orchestre Philharmonique de Nice, les danseurs du Ballet Nice Méditerranée redonnent vie à un ballet enchanteur. Une place de village baignée par le soleil de Galicie, des jeunes enivrés portés par un désir amoureux dansant avec insouciance, et surtout Coppélia, une poupée mécanique si réaliste qu’elle suscite désir et jalousie. Proche en cela de l’autre poupée Olympia des Contes d’Hoffmann d’Offenbach, la créature de Delibes concentre tous les fantasmes romantiques à la fin du siècle ; prodige technologique qui donc dépasse l’art dans sa faculté à imiter la nature – Coppélia paraît plus vraie qu’une réelle danseuse ; mais aussi figure féminine et objet assujetti au seul désir des hommes….

 

La poupée de Coppélius

Ce chef-d’œuvre du XIXᵉ siècle, créé par Saint-Léon et Léo Delibes, a traversé les époques sans altération majeure, capturant l’essence de son époque.
La version proposée par l’ex danseur de l’Opéra de Paris et chorégraphe, Eric Vu-An, allie avec brio la pantomime, la danse idéalement fusionné avec la musique de Léo Delibes, dans le respect de la tradition. Sa Coppélia met en lumière l’ensemble des danseurs, favorisant la complicité et l’enthousiasme sur scène. Eric Vu-An fut l’interprète du personnage de Coppélius durant de nombreuses saisons.

L’histoire de Coppélia tient en quelques mots : Coppélia est une poupée qu’un vieux savant (Coppélius) a rendue suffisamment réaliste pour troubler les esprits, provoquer la jalousie d’une demoiselle sur le point de se marier…
Coppélia est un ballet savamment dosé qui possède tous les ingrédients du succès… l’équilibre entre la pantomime et la danse – qui en fait un grand ballet dramatique ; la musique de Léo Delibes efficace, inventive permettant d’enchaîner soli, pas de quatre ou danses de caractère, corps de ballet qui se déploie sur deux rangs… toute la musique rayonne par sa créativité mélodique, notamment à travers les danses colorées empruntées au folklore d’Europe Centrale. La réussite des tableaux collectifs écartent ce qui ailleurs n’est qu’exposition d’une technique solitaire. Les ballets de Tchaïkovski retrouveront ensuite une cohésion aussi aboutie.
Seul personnage demeuré en retrait de cette joie contagieuse, Coppélius, est obsédé par l’idée de transmettre la vie à un automate plutôt que de considérer celle qui fleurit sous sa fenêtre. Malgré tout, ce vieux personnage resté dans l’enfance émeut par sa naïveté et montre qu’il n’est pas un misanthrope endurci. Mais un savant qui a du cœur… Coppélia, la fille aux yeux d’émail est un ballet mythique à (re)voir pour en mesurer l’appel au rêve, au surnaturel, à la force enivrante d’une imagination flamboyante et tendre : les relations de Frantz et Coppélia, du savant Coppélius et de Swanilda affirment des individualités non des types. Chef d’œuvre éternel.

 

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Opéra de Nice Côte d’Azur
5 représentations événements, du 10 au 15 octobre 2024
10 oct. 2024  à  20h
11 oct. 2024  à  20h
12 oct. 2024  à  20h
13 oct. 2024  à  15h
15 oct. 2024  à  20h

Chorégraphie : Eric Vu-An
Musique : Léo Delibes
Ballet Nice Méditerranée
Orchestre Philharmonique de Nice
Léonard Ganvert, direction musicale

RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’Opéra de Nice Côte d’Azur :
https://opera-nice.org/fr/evenement/1170/coppelia?origin=menu

 

Coppélia, avec Éric Vu-An (Coppélius à droite) © Opéra de Nice DR

 

De la Sylphide (1832) et de Giselle (1841), ballet romantique par excellence, Coppélia emprunte sa construction claire, numéros courts et leitmotiv associé à chacun des personnages importants (Frantz, Coppélius, Swanilda…). Sylvia, le ballet qui suit Coppélia, créé en 1876, est le premier ballet autonome, non relié à un opéra ou intégré. Les concepteurs ont soigné le contraste et l’enchaînement spectaculaire des tableaux : paysage d’Europe central pour l’acte I ; maison de Coppélius dont son sublime cabinet des automates au II ; Fête seigneuriale au III (qui revisite en fait le principe du divertissement hérité des opéras de Lully, Campra, Rameau).

Après la création triomphale de mai 1870, Napoléon III fait appelé dans sa loge les protagonistes du succès : la danseuse Bozzacchi et sa partenaire, Eugénie Fiocre, qui travesti, incarnait Frantz, car alors, les rôles masculins sont assurés par les femmes : les danseurs hommes ayant déserté depuis longtemps la classe de danse de l’Académie royale et impériale.

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Durée : 2h avec entracte
 / Tarifs : De 10€ à 47€

EN FAMILLE : « Viens avec tes parents ! » : pendant que vous assistez au spectacle, confiez-nous vos enfants (5-10 ans) pour un atelier artistique encadré par des professionnels, le temps de la représentation… Dimanche 13 octobre à 15h / Tarif : 5 € par enfant

 

Approfondir

d’autres articles et critiques sur le Ballet COPPÉLIA :
https://www.classiquenews.com/?s=coppélia

 

 

VIDÉO Coppélia / Eric Vu An à l’Opéra NICE CÔTE D’AZUR, saison 2024 – 2025

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CLERMONT AUVERGNE OPÉRA. OFFENBACH : La Belle Hélène, sam 12 et dim 13 oct 2024. Gaspard Brécourt / Olivier Desbordes.

Après Così fan tutte et Carmen Al-Andalus, la compagnie Opéra Éclaté présente sur la scène de l’Opéra de Clermont-Ferrand, l’opérette la plus enlevée et la plus drôle d’Offenbach, La Belle Hélène dans une version colorée, déjantée.
Offenbach aimait s’amuser.

 

Il détourne et parodie dieux et déesses de la mythologie grecque, invente des personnages comiques et délirant (l’option publique), cible en réalité les frasques de la société du Second Empire tout en flattant son goût pour la représentation et le spectacle. Olivier Desbordes perpétue la tradition dans sa mise en scène follement drôle et actuelle, mêlant princesses de tabloïds et influenceuses botoxées.
« Offenbach s’est servi de La Belle Hélène pour réaliser une satire du pouvoir de Napoléon III. Nous transposerons la famille des Atrides dans une famille royale pour parodier les grands de ce monde qui rêvent aussi d’avoir une vie de simples bourgeois et cherchent à paraître proches du peuple tout en restant loin de la réalité ! »
La musique d’Offenbach, les situations qu’elle rehausse constamment créent une performance théâtrale explosive, drôle et sensible, noire et lumineuse : ici on s’amuse en moquant, tel que l’a fixé l’art irrésistible et libertaire de la satire. Un art bien français. Production événement.

 

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Jacques OFFENBACH : La Belle Hélène
Opéra bouffe à partir de 10 ans
2 représentations
Sam. 12 octobre 2024 – 20h
Dim. 13 octobre 2024 – 15h
CLERMONT-FERRAND, Opéra-Théâtre
Durée : 2h30 entracte compris

RÉSERVEZ vos places directement sur le site de CLERMONT AUVERGNE OPERA : https://clermont-auvergne-opera.com/evenement/la-belle-helene/

 

Hélène : Ahlima Mhamdi
Pâris : Raphaël Jardin
Calchas : Matthieu Toulouse
Agamemnon : Thibault de Damas
Ménélas : Alfred Bironien
Oreste : Analia Téléga
Achille : Fabio Sitzia
Ajax1 : Alexis Brison
Ajax2 : Eduard Ferenczi Gurban
Parthenis : Aviva Manenti
Léæna : Pauline Jolly
Bacchis : Flore Boixel
La princesse du Pirée : Nathalie Schaaff

Livret Ludovic Halévy et Henri Meilhac
Création le 17 décembre 1864, Théâtre des Variétés, Paris
Chanté et parlé en français – Surtitré en français / Tarifs : de 12 à 50 €

Mise en scène et adaptation du livret : Olivier Desbordes
Direction musicale / Piano-claviers : Gaspard Brécourt
Orchestration : Stéphane Pelegri
Assistant mise en scène : Yassine Benameur
Costumes : Stella Croce
Lumières : Simon Gautier
Vidéaste : Clément Chébli
Peintures : Loran Martinel
Collaboration scénographie : Patrice Gouron
Cheffe de chant : Mari Laurila-Lili
Orchestre Opéra Éclaté
Flûte : Lucie Humbrecht
Clarinette et clarinette basse : Mathieu Steffanus
Cornet : Jérôme Lacquet
Contrebasse : Aurélie Martin
Percussions : Olivier Pham Van Tham
Percussions : Émilie Buttazzoni

 

AUTOUR DU SPECTACLE
Rencontre musicale avec les chanteurs
Librairie Les Volcans – Ven. 11 octobre 2024 – 17h30 / Voir Côté Publics – Rencontres

Avant-scène 30 minutes pour découvrir le spectacle
Foyer de l’Opéra-Théâtre – Sam. 12 octobre 2024 – 19h / Voir Côté Publics – Rencontres

Atelier Marm’opéra pour les enfants (6/10 ans) Gratuit sur réservation
Opéra-Théâtre – Dim. 13 octobre 2024 – 14h45 / Voir Côtés Publics – l’Opéra en famille

 

ORCHESTRE SYMPHONIQUE D’ORLÉANS. Sam 19 et dim 20 oct 2024 : BRUCKNER, Symphonie n°4. Marius Stieghorst, direction.

La Symphonie n°4 d’Anton Bruckner (1824-1896) est en général jouée dans la version, WAB 104, soit la première version de 1874 (édition Leopold Nowak). 2024 marque le bicentenaire d’Anton Bruckner ; l’Orchestre Symphonique d’Orléans a toute légitimité à aborder ce massif symphonique parmi les plus lumineux du catalogue Brucknérien.

 

De surcroît sous la baguette de son directeur musical Marius Stieghorst, lequel avant de jouer la partition, la présentera en en expliquant quelques clés de compréhension…
La partition inspirée de Wagner, – le grand modèle de Bruckner, s’inscrit dans une ferveur éclatante. En particulier dans son premier mouvement « allegro molto moderato », l’un des plus complexes par son assise, mais d’une construction éblouissante, diamantine. Certainement en liaison avec sa foi catholique ardente et sincère.
Notons la couleur nuancée mélancolique de l’Andante, moins endeuillé que songeur voire énigmatique ; l’énergie cynégétique du Scherzo, celui réécrit par Bruckner (pour la version ultime de 1880), doué d’une inspiration très programmatique et saisissante par sa flamboyance contrastée ; enfin, l’équilibre et la résolution qui ordonne dans une aisance souveraine, le FINALE, dont le portique dernier donne la mesure de l’imaginaire mystique de Bruckner : un Hosanna miraculeux dont il convient d’exprimer la légèreté et l’élan irrépressible.

Dite « Romantique », la Quatrième ouvre le cycle des Symphonies brucknériennes « en majeur ». Il existe trois versions connues, validées par l’auteur. Bruckner compose la partition originale de janvier à novembre 1874 et la dédie au Prince Constantin Hohenlohe, espérant une protection. La période est difficile pour Bruckner qui n’a presque plus aucune ressource pour vivre.
L’oeuvre ne sera révélée au concert que dans sa version originelle éditée par Nowak… en 1975 !  En 1878, Bruckner reprenait les deux premiers mouvements, puis en 1880, réécrivait le finale. C’est cette dernière version, la troisième, qui fut créée à Vienne, le 20 février 1881 sous la direction de Hans Richter.

« Romantique » : serait-ce parce qu’elle réussit une nouvelle sagesse ample et majestueuse malgré l’ampleur des effectifs ; le sentiment préservé malgré l’esprit du colossal ? La noblesse parfois emphatique, la solennité parfois spectaculaire ne doivent jamais amoindrir l’allant altier, l’électricité souterraine qui illumine de l’intérieur, une partition toute dédiée à l’auteur de Tristan, et comme traversée par le souffle de la sainte nature : l’ampleur des tutti, le clair obscur âpre, mordant, violent, sauvage des contrastes, opposant, affrontant les pupitres et familles d’instruments (cordes / bois / cuivres en fanfare déployée), enfin l’allure… doivent immédiatement se nourrir d’une vitalité jamais éteinte : continue, tendue, soutenue de haute lutte. Voilà qui fait les grandes interprétations (Jochuum, Gand, et le plus récent, de surcroît sur instruments d’époque, Herreweghe avec son fabuleux orchestre des Champs-Elysées, lequel dépoussière aussi de façon décisive… le massif brahmsien).

PLAN : Allegro molto moderato / Andante, quasi allegretto / Scherzo bewegt, agité / FINALE noté bewegt, doch nicht zu schnell : animé mais sans précipitation

 

 

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BRUCKNER, la symphonie commentée
Symphonie n°4 en mi bémol majeur dite « Romantique »
samedi 19 octobre 2024 – 20h30
dimanche 20 octobre 2024 – 16h
Théâtre d’Orléans, salle Touchard

ORCHESTRE SYMPHONIQUE D’ORLÉANS
Marius Stieghorst, direction

RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’Orchestre Symphonique d’Orléans
https://www.orchestre-orleans.com/concert/bruckner-la-symphonie-commentee/

 

BRUCKNER/ Symphonie n°4
En première partie Marius Stiegorst explique l’oeuvre afin que vous ayez quelques clés d’écoute et vous plonger un peu plus dans l’univers de Bruckner

 

Tarifs :

Hors abo
Cat 1 : 36 €/ Cat 2 TP : 33 € / Cat. 2 TR : 30€ / Cat 3 : 25 €

Abonnement 5 concerts
Cat.1 : 144€ / Cat.2 : 132€ / -26 ans : 35€

 

approfondir

LIRE notre critique de la Symphonie n°4 de Bruckner par Andris Nelsons / Gewandhausorchester Leipzig (1 cd Deutsche Grammophon 2017) : https://www.classiquenews.com/cd-compte-rendu-critique-bruckner-symphonie-n4-andris-nelsons-gewandhausorchester-leipzig-1-cd-deutsche-grammophon-2017/

GRAND-THÉÂTRE de LUXEMBOURG. LONE WOLF (création). Anne Simon / Isaac Bush : 13 > 16 oct 2024.

Le Grand-Théâtre de Luxembourg présente au cours de saison 2024 – 2025 plusieurs temps forts ; ainsi un cycle de pièces et programmes en création dont les sujets s’inscrivent dans l’actualité. Chacun s’adresse en particulier aux adolescents invités à réfléchir et s’impliquer autour des thèmes abordés (cycle « focus adolescence generati#ns »).

 

La pièce théâtrale et musicale « LONE WOLF » d’Anne Simon (artiste associée) et Isaac Bush prends sa source au cours d’ateliers en milieu scolaire à Luxembourg et à New York. En Gibberish (charabia :vrais mots assemblés qui n’ont aucun sens), le spectacle évoque sans filtre les sujets de la société actuelle ; il analyse au scalpel les dérives qui fondent nos tragédies contemporaines : revendications sociales, dérives du consumérisme, fusillades dans les écoles, ainsi que la tension entre le comportement aveugle d’un groupe et le besoin de reconnaissance de l’individu… Cynisme, barbarie, violence, manipulation… « À la fois conte de fées absurde, sombrement comique et pièce de théâtre musical et physique axée sur les mécanismes d’exclusion et l’esprit de la meute, Lone Wolf explore la part d’imprévisibilité en nous ».

Scène burlesque, absurde, surréaliste aussi, le spectacle cible au plus juste le mouvement de la foule, souvent non raisonnée, pilotée par la seule peur et l’anxiété sourde, aussi dangereuse que contagieuse… Des bruitages (réalisés en direct) se mêlent aux paroles en charabia, un langage propre inspiré de la danse contemporaine, du music-hall et du mime, compose ce poème à la fois cynique et poétique sur nos sociétés malades… Après avoir été créée à New York, la pièce musicale fait escale à Luxembourg pour une tournée européenne courant 2024…

 

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LONE WOLF, création
GRAND THÉÂTRE de LUXEMBOURG, studio
1h10 sans entracte

Dimanche 13 octobre 2024, 20h
Mardi 15 oct 2024, 20h
Mer 16 oct 2024, 20h

RÉSERVEZ vos places directement sur le site du Grand Théâtre de LUXEMBOURG :
https://theatres.lu/fr/lonewolf

                                                                                                      Photo :© Jokes on

Distribution

Idea & concept : Anne Simon, Isaac Bush
Director : Anne Simon
Movement Director : Isaac Bush
Devised by the Ensemble
Participating schools :
Lënster Lycee – International School ; LTML – International School

 

ENGLISH : Lone Wolf is a vibrant, immersive production, created by Anne Simon and Isaac Bush, which blends music and physical performance and explores themes of exclusion and group mentality through a surreal, darkly comedic lens. Born from workshops with students in Luxembourg and New York City, Lone Wolf delves into the moments and impulses that cause changes – whether constructive or detrimental – in how we interact with our larger community. The movement piece is delivered in a perpetually playful and unmistakably absurd manner, communicated through Gibberish. While looking at how we relate to others in society, the pressure to conform, the desire for individual recognition, and the masks we wear in the pursuit of societal acceptance, it also aims to remind us of the unpredictable nature of youth we all harbour, yet frequently conceal beneath a veneer of maturity.

 

Introduction
Introduction à la pièce par les participants au workshop 30 minutes avant le début de représentation (EN)

 

tarif
Adultes 20€, 8€
Jeunes 8€
Kulturpass bienvenu

Vous pouvez également réserver par
[email protected]
+35247963901

Lone Wolf
An immersive movement piece
Created by Anne Simon & Isaac Bush

Focus adolescence generati#n·s

OPÉRA GRAND AVIGNON. VERDI : La Traviata, les 11, 13 et 15 oct 2024. J. Muzychenko, J. Hacker, S. Vasile. Chloé Lechat / Federico Santi

VIOLETTA, UNE FEMME A LIBÉRER.……. «  Toujours libre “ / Sempre libera : ainsi chante et proclame à la fin du premier acte, la courtisane Violetta dans un air des plus flamboyants et virtuoses. Constat ou revendication voire tragique illusion ? Même désirée et couverte de diamants, adulée pour sa beauté [éphémère], Violetta est en réalité une esclave enchaînée au seul plaisir des hommes… qui la traitent plus en objet moins en femme…. libre.

Dans la tragédie de la célèbre “dévoyée”, révérée ou conspuée selon son utilité mercantile, la mise en scène de Chloé Lechat souligne la mécanique implacable de
la domination patriarcale et de l’exploitation capitaliste des femmes, objet des surenchères vénales. De la piste de danse aux confins du sanatorium, du monde des plaisirs aux supplices socialisés, s’affirme toujours l’ignoble et cynique contrôle des hommes phallocrates sur le corps de la femme.

Verdi compose pour La Traviata une musique miroir de son héroïne ; romantique et fémininiste, le compositeur ouvrage une partition fiévreuse, ardente, mais aussi comme exténuée,  cherchant sans relâche à s’affranchir des normes et des conventions pour laisser s’épancher la vérité de l’âme. Tomber le corset qui l’étouffe et ne cesse de la contraindre… Exprimer un amour pur qu’elle n’attendait pas. Foudroyée par un cœur sincère… auquel, en figure abandonnée au sacrifice, elle doit renoncer…

Photo visuel La Traviata © Isabelle Chapuis

 

 

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AVIGNON, Opéra Grand Avignon
3 représentations
VEN 11 OCTOBRE 2024, 20h
DIM 13 OCTOBRE 2024, 14h30
MAR 15 OCTOBRE 2024, 20h

RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’Opéra Grand Avignon :
https://www.operagrandavignon.fr/la-traviata-verdi#

 

 

Opéra en trois actes de Giuseppe Verdi
Livret de Francesco Maria Piave
Création : VENISE, le 6 mars 1853 à la Fenice

 

Direction musicale : Federico Santi
Mise en scène : Chloé Lechat

Décors / Conception vidéo : Emmanuelle Favre
Costumes : Arianna Fantin
Lumières Dominique Bruguière reprises par Pierre Gaillardot
Chorégraphie : Jean Hostache

Violetta : Julia Muzychenko
Alfredo : Jonas Hacker
Germont : Serban Vasile
Flora : Albane Carrère
Annina : Sandrine Buendia
Baron Douphol : Gabriele Ribis
Marchese d’Obigny : Dominic Veilleux
Comédiennes : Jacqueline Cornille
Noémie Develay-Ressiguier, Paloma Donnini

Chœur de l’Opéra Grand Avignon
Chef de Chœur : Alan Woodbridge
Orchestre national Avignon-Provence

Production Opéra de Limoges

GRAND-THÉÂTRE DE GENEVE. MOZART : La Clémence de Titus (16 > 29 oct 2024). Bernard Richter, Serena Farnocchia, Maria Kataeva… Tomáš Netopil / Milo Rau.

Un volcan qui crache, des ruines qui fument, le Capitole qui brûle, un putsch mené par un meilleur ami… et miracle, une intrigante prête à tout, renonce au crime et se repent ; La Clémence de Titus, le dernier opéra de W. A. Mozart (qui compose en même temps La Flûte enchantée) bouscule le cadre de l’opera seria, un genre qu’il a traité et renouveler à sa façon avec les précédents Lucio Silla, Mitridate, Idomeneo

 

 

Mozart toujours inventif et audacieux, replace l’orchestre au centre du drame héroïco-tragique, introduit des éléments buffo au seria, célèbre chez Titus, sa grandeur morale et humaniste… il pardonne à ceux qui ont voulu l’assassiner. Serait-ce une invitation politique et philosophique adressée allusivement à l’empereur Léopold II, dont le couronnement en tant que roi de Bohème – en pleine Révolution française – sert alors de prétexte à la commande de La Clémence de Titus.

 

Mais Titus est-il vraiment clément ? La question est posée par le metteur en scène Milo Rau. La scène genevoise présente après son succès en Flandre et à Vienne, son propre questionnement sur l’opera seria. Pour Rau ne serait-il question que du pardon d’un souverain populiste sous des dehors éclairés ? En d’autres termes, Titus est-il sincère ? La vision est mordante et particulièrement critique vis à vis des êtres au pouvoir : tandis que des foules de personnes déplacées tentent de survivre dans un ghetto de caravanes à l’extérieur des murs du palais, l’élite sociale célèbre sa propre bienveillance dans l’élégance d’un musée. Plutôt sceptique sur les vertus du politique, Milo Rau épingle » Titus et sa clique qui s’admirent et s’envoient des fleurs et des vannes sur leur bonté et leur attitude plus ou moins utilitariste du monde extérieur ».

Après la création de l’opéra Justice, Milo Rau interroge la complexité de notre monde à travers l’exposition de simulacres et contrefaçons, entre rituels chamaniques et lynchages politiques. Après l’avoir applaudi dans les opéras de Janaček, les spectateurs genevois retrouvent ici le chef d’orchestre tchèque Tomáš Netopil (à la tête de l’Orchestre de la Suisse Romande) dans un ouvrage mozartien parmi les plus profonds et bouleversants. Le ténor suisse Bernard Richter dans le rôle-titre, fait ainsi suite à son Idomeneo la saison précédente. A noter l’étoile montante parmi les mezzos belcantistes, Maria Kataeva (Sesto).

 

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Wolfgang Amadeus Mozart : La clemenza di Tito / La Clémence de Titus, 1791
Grand Théâtre de Genève

6 représentations à Genève
Mer 16 oct 2024, 19h30
Ven 18 oct 2024, 20h
Mer 23 oct 2024, 19h30
Ven 25 oct 2024, 20h
Dim 27 oct 2024, 15h
Mar 29 oct 2024, 19h

RÉSERVEZ vos places directement sur le site du Grand Théâtre de Genève : https://www.gtg.ch/saison-24-25/la-clemence-de-titus/

 

 

La Clemenza di Tito
Opéra de Wolfgang Amadeus Mozart
Livret de Caterino Mazzolà d’après Pietro Metastasio
Créé le 6 septembre 1791 au Théâtre des États à Prague
Dernière fois au Grand Théâtre de Genève en 2005-2006
Reprise de la production de 2020-2021 (diffusion en streaming)
Coproduction avec les Wiener Festwochen, l’Opera Ballet Vlaanderen et les Théâtres de la Ville de Luxembourg
16 et 23 octobre 2024 – 19h30
18 et 25 octobre 2024 – 20h
27 octobre 2024 – 15h | représentation disponible en audiodescription, pour en bénéficier, s’inscrire auprès de [email protected] ou par téléphone au 079 893 26 15*
29 octobre 2024 – 19h
Chanté en italien avec récitatifs en français et surtitres en français et anglais
Durée : approx. 2h55 avec un entracte inclus

 

DISTRIBUTION
Direction musicale : Tomáš Netopil
Mise en scène: Milo Rau

Tito : Bernard Richter
Vitellia : Serena Farnocchia
Sesto : Maria Kataeva
Servilia : Yuliia Zasimova
Annio : Giuseppina Bridelli
Publio : Justin Hopkins (16.10, 18.10, 25.10, 27.10)
/ Mark Kurmanbayev (23.10, 29.10)

Chœur du Grand Théâtre de Genève
Orchestre de la Suisse Romande

 

Titus à La Plage
Découvrez toutes les activités qui gravitent autour de la production :
https://www.gtg.ch/saison-24-25/la-clemence-de-titus/

 

 

CRITIQUE, concert. LILLE, Nouveau Siècle, le 27 sept 2024. MAHLER: Symphonie n°5. Orchestre National de Lille, Joshua Weilerstein (direction)

Ce programme revêt la plus haute importance : concert d’ouverture de la nouvelle saison du National de Lille, invité d’honneur plus que prestigieux en la personne du pianiste Alexandre Kantorow (en première partie), surtout premier concert officiel du nouveau directeur musical, le britannique JOSHUA WEILERSTEIN à la tête des instrumentistes lillois en grand complet pour une 5ème de Mahler qui restera … inoubliable.

 

Le Concerto pour piano n°2 de Liszt (créé à Weimar en janvier 1857 sous la direction de…Liszt, son élève Hans von Bronsart au clavier) impose d’emblée la verve voire la démesure intensément dramatique du compositeur, et aussi son inclassable virtuosité qui touche au délire … méphistophélien. Alexandre Kantorow se jette à corps maîtrisé dans ce bouillonnement permanent, subjuguant par sa digitalité aussi détaillée, incisive qu’articulée, trépidante.
En fusion totale avec chef et orchestre (le dialogue avec le violoncelle et sa cantilène éperdue), la construction rhapsodique, contrastée de ce concerto où tout s’enchaîne, se détache avec naturel ; d’abord son éveil comme sorti de l’ombre, d’une volupté irrésistible (sublime colonne des bois) puis l’affirmation du piano profond, lugubre, aux couleurs d’un mystère et d’un souffle diabolique… un temps [bref] presque dansant et tendre au son du cor [son premier air] ; puis le clavier plus conquérant encore, doublé par le même cor, pilote et commande, impérieux à l’orchestre et l’entraîne dans une course échevelée, infernale. Guerrier, sardonique parfois grimaçant, le grand conteur qu’est Liszt (inventeur du poème symphonique) se dévoile ici sans entrave, ses variations et ses cadences, crépitantes, toutes en verve, miroitantes, fugaces renouvellent totalement le développement formel.
Pour répondre à l’enthousiasme justifié du public, Alexandre Kantorow joue en bis, seul un Schubert des plus suggestifs (probablement dans la transcription de Liszt) : imaginaire illimité, puissance des nuances, respirations souveraines … L’indiscutable diseur, le poète des accents les plus ténus captive l’audience.

En seconde partie, l’orchestre nous assène l’un des programmes les plus marquants de son histoire : une 5ème de Mahler découpée au scalpel, mordante, acérée, vive, aux blessures multiples qui dansent et crient dans une manière de transe musicale continue, magistralement maîtrisée ; la lecture est d’autant plus captivante qu’elle prolonge ainsi le travail du directeur musical précédent, Alexandre Bloch dont les Symphonies de Mahler avaient constitué l’un des temps forts de sa direction. La 5ème de ce soir offre comme un prolongement du travail précédent, tout en dévoilant et confirmant les qualités esthétiques de son successeur. Bel exemple de diversité sensible dans la continuité. Ce nouvel accomplissement s’inscrit tout autant dans les premières expériences malhériennes signées par le chef fondateur Jean-Claude Casadesus : Gustav Mahler fait ainsi partie du répertoire essentiel de la phalange lilloise, et c’est donc tout un symbole que la forge malhérienne permette ce soir de découvrir et révéler le tempérament du nouveau chef.

 

Au cœur de la forge malhérienne,
Joshua Weilerstein capte et exprime chaque brûlure
d’un cœur apatride…

 

 

Joshua Weilerstein qui dirige sans partition, – dans une liberté de geste et en connexion directe avec les musiciens -, impose d’emblée, dès la « Trauermarsch » initiale (marche funèbre), une atmosphère inscrite dans l’âpreté et l’expressivité aiguë, hypersensible, volontiers acide et franche.
Il en a argumenté les options et parti pris en prenant la parole en préambule ; sa conception souligne combien la 5ème serait la symphonie la plus juive de Mahler, éclairant le désespoir et les cris de ses deux premiers mouvements ; soulignant combien l’auteur est un apatride, un cœur déchiré, en proie à l’angoisse la plus brûlante.

Ainsi comme épurée et allégée pour en dégager le squelette contrapuntique, la texture orchestrale est comme recomposée, favorisant souvent l’incise des cuivres [admirables cors et trombones] plutôt que privilégiant la soie des cordes ; le chef conçoit un Mahler véhément voire vindicatif dans un chant continûment exaspéré, exténué, tourmenté, agité… Dans un vortex funèbre et sévère. Un être déchiré qui souffre et veut dans le même temps s’en sortir… Joshua Weilerstein soigne toujours le relief très individualisé des bois : clarinette, flûte ; et bien sur le cor souverain, magistral à l’esprit pastoral et réconfortant comme réhumanisé dans cette forge éruptive en particulier dans le Scherzo (dont le compositeur use du terme sciemment et pour la première fois).

Tout le développement exprime la lutte d’un être éprouvé qui a vécu dans sa chair le cynisme et la barbarie inepte de l’existence terrestre. C’est une traversée continue, sans répit, un tunnel d’aigreur, d’amertume, de sentiments et aspirations refoulés consumées par un acide embrasé dont il affronte et surmonte chaque morsure brûlante.

Ici les cordes perdent en longueur sonore, sont perdues, noyées, dans les déflagrations des cuivres ; bois et vents mordent, grimacent. Mahler affiche des rictus nerveux incontrôlables… En ce sens rien n’est épargné aux auditeurs.

Il revient au chef, seul pilote dans cette tempête imprévisible et qui dirige par cœur, d’indiquer les points de repère, jouant sur les décalages et les ruptures de rythmes, l’infini vivace des syncopes, la citation des landlers et des valses dont il se délecte dans une chorégraphie gestuelle totalement libre, à nourrir la charge parodique, la brûlante suractivité panique. Même le final (et son impressionnante construction fuguée) n’est pas exempte d’une ironie tenace et souterraine.

Enchaîné à ce maelstrom percutant, en ébullition constante, l’Adagietto impose soudainement un autre monde, un souffle magicien qui répare et apaise mais pourtant brûle avec la même intensité ; il faut vivre le volcanisme des mouvements précédents, leur course à l’abîme, pour mesurer toute la tendresse et l’appel à l’oubli contenu dans ce mouvement devenu à juste titre célèbre et où justement, les cordes seules [sans les cuivres ni les bois] reprennent ce chant ample, souverain qui leur est propre et qui leur était interdit jusque là. Les cordes jusque là voix étouffées, renaissent et se déploient avec une respiration enfin reconquise. Bravo maestro !

 

Toutes les photos © Ugo Ponte / ON LILLE Orchestre National de Lille 2024

 

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Retrouvez la puissance et la haute expressivité de la 5ème de Mahler par Joshua Weilerstein et les instrumentistes de l’Orchestre National de Lille sur la chaîne vidéo de l’Orchestre lillois, « l’Audito 2.0 », sa salle de concert digitale : mise en ligne prochaine.
DIFFUSION, sur Radio Classique samedi 12 octobre 2024, 20h. Incontournable.

 

LIRE aussi notre présentation du concert d’ouverture de l’ON LILLE Orchestre National de Lille / Cocnerto pour piano n°2 de Liszt (Alexandre Kantorow) / 5ème Symphonie de Mahler : https://www.classiquenews.com/orchestre-national-de-lille-les-26-et-27-sept-2024-joshua-weilerstein-joue-la-5e-symphonie-mahler-concert-douverture/

 

Toutes les photos © Ugo Ponte / ON LILLE Orchestre National de Lille 2024

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Théâtre des Champs-Elysées, le 28 septembre 2024. ROUKENS / BARTOK / DVORAK. Orchestre Philharmonique de Rotterdam / Lahav Shani (direction).

Partenaire régulier de la scène du Théâtre des Champs-Elysées, l’Orchestre Philharmonique de Rotterdam fait son retour à Paris sous la baguette de son directeur musical Lahav Shani (né en 1989), qui a pris la succession de Yannick Nézet Séguin voilà déjà six ans. Le chef israélien a depuis multiplié les engagements, à l’instar de son aîné québécois, en prenant les rênes des Philharmoniques d’Israël et de Munich. Mais si Shani est incontestablement un des chefs en vogue du moment, le public parisien a surtout fait le déplacement pour entendre l’éternelle prodige du piano qu’est Martha Argerich (née en 1941) : on se surprend toujours à redécouvrir son âge vénérable, tant le temps ne semble avoir aucune prise sur son art.

 

Martha Argerich © Adriano Heitmann

 

C’est peu dire que l’Argentine n’a rien perdu de son piano véloce et fougueux, qui concentre immédiatement l’attention dès les premières notes du Troisième Concerto (1945) de Bartók. Si cet ultime opus n’est pas réputé pour être le plus virtuose parmi les autres ouvrages concertants du compositeur hongrois, il trouve ici des phrasés à la lisibilité lumineuse, d’une franche autorité, qui contrastent avec la battue plus discrète de Shani. Le chef israélien n’est pas un sanguin, tant s’en faut, et préfère une battue fluide et naturelle, qui laisse la primauté au soliste. Il y a bien quelques détails fouillés ici et là, en ralentissant ostensiblement les tempi (une constante de la soirée), mais sans volonté d’explorer les modernités en clair-obscur de cette musique audacieuse en son temps.

On retrouve précisément un même état d’esprit dans le premier bis interprété par Martha Argerich, qui expédie en une agilité vertigineuse les « Traumes Wirren » des Fantasiestücke de Schumann. Aucun mystère ni sentimentalisme ne vient non plus éclairer « Le Jardin féerique » de Ma mère l’Oye de Ravel, interprété à quatre mains avec la vélocité complice de Lahav Shani, un ancien élève de Daniel Baremboïm.

Préalablement à ce moment de bravoure, la création française de l’Ouverture pour orchestre Con Spirito (2024) de Joey Roukens (né en 1982) avait été donnée pour chauffer l’orchestre, en une maestria festive faisant honneur à son modèle avoué Leonard Bernstein. Le style coloré et chaloupé joue la carte d’une rythmique souvent effrénée, ponctuée par les nombreuses percussions, mais manque d’originalité pour convaincre sur la durée. On découvre pour l’occasion le nouveau dispositif acoustique mis en place par le Théâtre des Champs-Elysées depuis la rentrée, qui offre incontestablement un confort sonore plus détaillé pour chaque groupe d’instruments. Cette réussite devrait encore s’améliorer au fil de la saison, après la mise en œuvre des ajustements encore nécessaires.

Après l’entracte, la Neuvième Symphonie (1893) de Dvorák résonne en des tempi assez sages, étoffés d’une mise en place redoutable de précision, notamment dans les transitions. On reste cependant sur sa faim face à cette interprétation d’un classicisme sans brillant, qui manque d’individualité dans les timbres, souvent trop neutres, du Philharmonique de Rotterdam. Seule exception, le beau solo du cor anglais dans le Largo, qui trouve une sorte d’évidence par son chant suave, et ce malgré quelques bruits extérieurs parasites (une porte qui claque bruyamment ou des toux irrépressibles dans le public). Le Molto vivace trouve ensuite Shani à son meilleur, en tournant ce mouvement vers l’allégresse primesautière d’un Brahms, en une rondeur d’interprétation qui lisse les angles pour mieux faire valoir la mélodie principale. On retrouve ce parti-pris dans le dernier mouvement, plus franc et direct aux cordes, malgré quelques ralentissements dans les passages lyriques, souvent explorés dans les piani. Une interprétation volontiers classique, à la mise en place quasi parfaite, mais trop prévisible. Dommage.

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CRITIQUE, concert. PARIS, Théâtre des Champs-Elysées, le 28 septembre 2024. ROUKENS : Con Spirito, BARTOK : Concerto pour piano n° 3, DVORAK : Symphonie n° 9. Martha Argerich (piano), Orchestre philharmonique de Rotterdam, Lahav Shani (direction musicale). Photo © Adriano Heitmann.

 

CRITIQUE, concert. BOULOGNE-BILLANCOURT, La Seine Musicale, le 25 sept 2024. SCHUMANN : Symphonie n°4. CHOPIN : Concerto pour piano n°1 (Lucas Debargue), INSULA ORCHESTRA, Laurence Equilbey (direction)

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Bassons et cors instables mais rugueux, expressifs, très caractérisés… d’une fragilité captivante en réalité. L’apport des instruments historiques permet ce format sonore et cette intensité des timbres spécifique qui renouvelle totalement notre approche des œuvres, tout en produisant, – comme c’est souvent le cas des baguettes aussi affûtées que celle de Laurence Equilbey, le sentiment irrépressible de jaillissement au moment du concert. Toutes ces qualités se déploient ce soir d’abord dans le chant intérieur et tendre du Concerto de Chopin auquel le jeu carré, droit du pianiste invité, Lucas Debargue apporte une clarté continue, surtout dans le premier mouvement.

 

 

Laurence Équilbey, Lucas Debargue et Insula Orchestra à la Seine musicale au moment des saluts © classiquenews 2024

 

 

De son côté l’orchestre de Laurence Equilbey affirme nervosité et transparence, dialoguant subtilement avec le clavier certes attendri de Chopin mais aussi prompte à rugir et conquérir dans un esprit…. Beethovénien.
En mi mineur, l’opus 11 de Chopin est une partition de jeunesse, parfois maladroite dans l’orchestration mais emblématique d’une hypersensibilité et d’un don de mélodiste aigu que Chopin maitrise dès l’adolescence. L’auteur n’a que 20 ans lorsqu’il le crée à Varsovie en octobre 1830 lors d’un concert qui reste son dernier en Pologne…
L’Allegro maestoso affirme une ampleur un souffle presque guerrier qui n’est pas sans rappeler l’opiniâtreté d’un Beethoven (et aussi son affirmation rythmique). Le mouvement central (Romance) immerge dans la féerie mélancolique de Chopin, préfigurant l’atmosphère des Nocturnes à venir ; de fait, les interprètes, soliste, orchestre et cheffe suggère tout en allusion maîtrisée, ce rêve printanier qu’illumine et fait scintiller un clair de lune… (selon Chopin lui-même dans une lettre explicative). Comme un songe murmuré, la main droite énonce une série de phrases suspendues, d’une rondeur élégiaque … bellinienne. Même fusion et complicité pour la Cracovienne, danse aux rythmes pointés qui conclut le Concerto comme un couronnement vif et sanguin.

La seconde partie du concert est plus encore enthousiasmante car outre la saveur spécifique de chaque instrument exposé, la cheffe précise et souple à la fois, affirme un son d’une rare cohérence, fédérant chaque mouvement dans une unité mouvante, organiquement fusionnée qui rayonne d’une énergie primitive irrésistible.
La 4è de Robert Schumann contient toute l’exaltation d’un jeune compositeur de 30 ans qui se passionne alors, au début des années 1840, pour le format orchestral. Composée dès 1841, la 4ème est révisée en 1851, pour clarifier et fluidifier davantage sa conception en un tout organiquement soudé, dans le déroulement de ses 4 mouvements enchaînés, – ce qui a quelque peu désorienter l’audience à la création, et ce qui nous subjugue tant désormais.
Tout en détaillant les prodiges d’une orchestration géniale, Laurence Equilbey sait fédérer tous les pupitres, les galvanisant dans le sens d’une énergie irrépressible, souveraine, impérieuse ; sa suractivité continue que relance constamment le motif en arabesque ondulant qui innerve tout l’ouvrage, se déploie peu à peu…

Mais au commencement, le premier mouvement débute majestueux, ample, dense (comme du Brahms) mais la texture s’organise, s’allège inexorablement dans un élan impérial qui traverse et emporte tout l’édifice ; elle nourrit ce mouvement serpentin, liquide et souple d’un mouvement à l’autre, en particulier dans le 2e mouvement où cette cellule chantante s’expose clairement au violon solo [broderie enivrée] au charme féerique.
Impressionnants et captivants, l’attention de la maestra aux rebonds, à la motricité, à la pulsion première qui se nourrit de la circulation des motifs d’un pupitre à l’autre, l’éloquence des nuances, le flux permanent qui fait respirer avec majesté le somptueux portique du Scherzo en ré mineur [une idée que reprend Dvorak dans 9e]. Ni robustesse démonstrative ni rudesse sévère ici…

La baguette de Laurence Equilbey unifie les parties dans une totalité expressive remarquable par son relief comme sa rondeur dansante. Le finale brillant, éclatant, triomphal exulte littéralement car la direction aussi détaillée que construite et puissamment architecturée, est d’un équilibre superlatif. Irrésistible, la jubilation de ce dernier mouvement (et son Presto final) que Laurence Equilbey cisèle comme une exultation miroitante. D’une durée de 30 mn, la Symphonie ainsi électrisée, sublimée, a filé comme un comète enivrée. Du grand ouvrage.

Pour sa 10e saison, INSULA ORCHESTRA affiche ainsi une santé des plus rayonnantes, permettant à un très large public à La Seine Musicale de goûter les délices d’un orchestre sur instruments historiques parmi les plus convaincants de l’Hexagone.
L’impatience nous gagne quand en fin de concert, Laurence Equilbey prenant le micro annonce un prochain concert Robert Schumann : l’oratorio « Le Paradis et la Péri », probable nouvel accomplissement Schumannien, absolument incontournable [ainsi annoncé les 14, 16 et 17 mai 2025] : rv est pris !

 

Insula Orchestra et Laurence Équilbey après avoir joué la Symphonie n°4 de Robert Schumann à la Seine musicale ce 25 septembre 2024 © classiquenews 2024

 

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CRITIQUE, opéra. PARIS, Opéra Bastille, le 26 septembre 2024. GOUNOD : Faust. P. Pati, A. Esposito, A. Edris, F. Sempey, M. Viotti… Tobias Krätzer / Emmanuel Villaume.

Ce soir-là, il avait plu sur toute la France ; définitivement, l’été avait abandonné les quais de la Seine, et les larges avenues autour de la place de la Bastille faisaient ronronner la valse triste des automobiles. Les vêpres annonçaient déjà, au sein du grand amphithéâtre de l’Opéra Bastille, le retour du Faust de Charles Gounod et ses incantations dramatiques. Le chef d’œuvre absolu de l’opéra français allait revenir dans une nouvelle production après une interruption forcée par la pandémie. Initialement mené par Benjamin Bernheim et Christian van Horn, ce Faust revisité dans le Paris de la fin des années 2010 nous promettait non seulement une vision nouvelle, mais une refondation du mythe goethéen. 

 

 (Faust à l’Opéra Bastille © Franck Ferville)

 

Le temps perdu

 

L’histoire de l’intellectuel obsédé par la quête de connaissance et de son pacte avec le Malin semble rappeler ces antiques runes qui font référence aux souffrances d’Odin pour boire à la source de ce savoir infini, dont la souffrance est le prix à payer. A la différence de la pièce originelle de Goethe, le Faust de Gounod désire la jeunesse en lui attribuant tous les pouvoirs face à une lassitude proche du désespoir. A l’égal de Juan Ponce de Léon en 1513, la recherche de la fontaine de jouvence n’aboutit qu’à la propre perdition dans des contrées inconnues et dangereuses. Contrairement au Fitzcarraldo de Werner Herzog, le Faust de Gounod se laisse berner par imprudence et devient l’objet de Méphistophélès malgré lui. La quête d’un idéal superficiel mène toujours à la perte et la damnation. 

Ce dernier postulat semble être la thèse de Tobias Krätzer pour sa mise en scène. Faust vit dans un appartement parisien cossu, lambrissé de moulures et à la bibliothèque fournie. Appartement d’un intellectuel raffiné qui a tout réussi sauf la joie simple du ménage domestique. Le canapé Roche Bobois voit la solitude partagée avec une belle nymphe au consentement monnayé et les lourds rideaux de brocart vert uni s’ouvrent sur la vie éclatante d’un Paris qui ne dort jamais. Dans la vision de Tobias Kratzer, il oppose l’opulence apparente de Faust au sordide quartier HLM de la banlieue est où habitent Marguerite, Valentin et Marthe. Déjà on est dérangé par le simplisme de cette vision. Elle nous rappelle fatalement une mise en scène révoltante de Don Giovanni de Mozart par le couple Leiser & Caurier, à Nantes, en 2016. Les décors sont quasiment les mêmes et les procédés dans la construction des personnages, confondants de similitude. Faut-il désormais étaler au grand jour des différences sociales inventées et mêler ça de quelques images poétiques ? Kratzer veut tout faire et tout montrer avec un manque de tact, un recueil de poésie et une impudicité manifeste. On peine parfois à suivre l’intrigue entre projections sur le rideau de tulle et autres gadgets technologiques. Ce qui a été remarquable dans La Traviata de Simon Stone, qui a tout réussi avec poésie et subtilité, peine à fonctionner dans ce Faust

 

(Pene Pati & Amina Edris dans Faust à l’Opéra Bastille © Franck Ferville)

 

Si sur scène, hélas, la mise en scène n’a été qu’une succession de poncifs et d’approximations, nous avons été gâtés par une distribution et une direction d’orchestre idéales. Pene Pati a non seulement les qualités vocales requises par le rôle, c’est un orfèvre dans l’ornementation et le style. Il est un Faust de rêve, à la fois puissant et aux mélismes délicats. Son « Salut, demeure chaste et pure » est iconique. Un véritable rêve d’entendre un tel musicien dans ce rôle. Nous nous réjouissons qu’il soit régulièrement sur la scène de l’Opéra de Paris. 

Le Méphistophélès d’Alex Esposito a la richesse de timbre que requiert le rôle. On remarque des graves veloutés et une puissance dans la cadence qui nous ravit. Il est déchaîné dans les ensembles et son jeu d’acteur est plus qu’inquiétant tellement, il sait interpréter ce personnage. La soprano égyptienne Amina Edris est une ravissante Marguerite. Parfois un peu en retrait sur la prosodie et avec un manque de projection dans certains passages, elle domine tout de même dans les airs et les fastueux ensembles. Le trio final est splendide et nous avons découvert une formidable artiste. Vivement son retour dans une autre production. Florian Sempey reprend le rôle de Valentin, qu’il avait déjà incarné en 2019. Ce fabuleux soliste est un artiste complet dont la voix porte des couleurs impressionnistes, toujours plus riches et surprenantes, avec lui tout type de répertoire sera un trésor à découvrir. La fantastique Marina Viotti campe un Siebel d’anthologie. Malgré la mise en scène, où le jeune étudiant est une espèce de « nerd » gauche sorti d’une sitcom, la mezzo-soprano égrène toutes ses interventions de belles inflexions. Nous redécouvrons avec plaisir les airs de ce rôle qui sont devenus des « tubes » mais qui semblent des nouveautés, rares et précieuses, dans l’étendue vocale de Marina Viotti.

Emmanuel Villaume – en expert de cette musique – dirige l’Orchestre et les Choeurs de l’Opéra national de Paris avec un talent inénarrable. Toute la partition est déployée dans l’étendue de sa poésie, le respect du langage de Gounod et la mise en valeur de la beauté du style. Maestro Villaume a su exactement construire l’intensité dramatique qui fit défaut sur scène. Pendant les ballets, on a pris littéralement une vague vivifiante de musique qui a redonné totalement sa place à ces pièces d’agrément dans l’ensemble du drame. Espérons qu’Emmanuel Villaume revienne sur les scènes et dans les fosses de France, où il se fait trop rare, alors que c’est un des plus grands chefs de sa génération et un incomparable talent. 

A la fin de Faust, peut-on alors rentrer inerte dans les intérieurs honnêtes de ce Paris qui se rendort dans son quotidien ? Que cherche Faust à la fin ? Peut-être la réponse que Marcel Proust a fini par offrir aux âges, celle du temps qui semble perdu à tout jamais, mais qui au fond est toujours retrouvé, souvent quand on l’espère le moins…

 

 

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CRITIQUE, opéra. PARIS, Opéra Bastille, le 26 septembre 2024. GOUNOD : Faust. P. Pati, A. Esposito, A. Edris, F. Sempey, M. Viotti… Emmanuel Villaume / Tobias Krätzer. Photos © Franck Ferville.

 

VIDÉO : Trailer de « Faust » selon Tobias Krätzer à l’Opéra Bastille

 

ENSEMBLE INTERCONTEMPORAIN. Echo From Afar : Portrait of Clara Iannotta, le 11 oct 2024. Clara Iannotta, électronique / Nicolò Umberto Foron (direction)

Initiée par un superbe concert d’ouverture (programme Jarrell / Mahler, le 13 sept dernier), la nouvelle saison 2024 – 2025 de l’Ensemble Intercontemporain imaginée par son directeur musical, Pierre Bleuse, propose plusieurs concerts monographiques dédiés aux créateurs d’aujourd’hui dont le premier met en lumière l’écriture de la compositrice Clara Iannotta que l’EIC suit depuis … 10 ans déjà.
Au programme, 3 créations françaises dont les titres empruntent à l’imaginaire de la poétesse irlandaise Dorothy Molloy.

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En travaillant le son détourné de sa source, en quête d’un univers sonore inconnu mais intime et précis, la compositrice n’hésite pas à utiliser des objets, interroge l’espace, la résonance,… son travail plonge au cœur du mystère sonore dans un bouillonnement expressif et poétique dont l’exigence et l’énergie produisent un continent sonore saisissant. En janvier 2024, l’Ensemble Intercontemporain créait « Vacant Lot (Strange Bird) », questionnement hypnotique lié à sa propre expérience intime.

Née à Rome en 1983, Clara Iannotta, entre poésie et musique contemporaine, éclaire l’imaginaire clair obscur de la poétesse Dorothy Molloy. Ainsi « A stir among the stars, a making way » (2019-2020) évoque la mue de l’araignée, et « ce double fantomatique ainsi abandonné » par l’insecte ; « Echo from afar » (2022), conçu à partir d’une radiothérapie, voudrait « écrire l’espace », l’arpenter, en mesurer l’épaisseur et la vibration, en exprimer la présence «  en tant que matériau de composition » , grâce en particulier aux ressources de l’électronique. Enfin ultime volet de ce triptyque prometteur, la partition la plus récente (conçue en 2023) : « Glass and stone », pour deux percussions, deux pianos et électronique ; elle s’annonce aussi atypique que le quatuor new-yorkais Yarn / Wire pour laquelle elle a été initialement composée. La partition présentée en création mondiale, rend hommage à sa mère…

(Photo grand format – Portrait de Clara Iannotta © Julia Wesely)

 

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Echo From Afar : Portrait Clara Iannotta
vendredi 11 octobre 2024, 20h
PARIS, Cité de la musique – Salle des concerts

RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’ENSEMBLE INTERCONTEMPORAIN :
https://www.ensembleintercontemporain.com/fr/concert/echo-from-afar-2024-10-11-20h00-paris/

Tarif : 20€

Distribution

Ensemble Intercontemporain
Nicolò Umberto Foron, direction
Clara Iannotta, électronique
Clément Marie, ingénieur du son

 

Programme

Avant-concert à 18h45 : rencontre avec Clara Iannotta, compositrice
Amphithéâtre, Cité de la musique – Entrée libre

 

Clara IANNOTTA

Echo from afar (ii), pour six musiciens et électronique
Création française

They left us grief-trees wailing at the wall,
pour neuf musiciens amplifiés

Glass and stone,
pour deux percussions, deux pianos et électronique
Création mondiale
Commande du Festival d’Automne à Paris

A stir among the stars, a making way, pour grand ensemble
Création française

 

 

TEASER VIDÉO Clara Iannotta / reportage janvier 2024

Reportage sur « Vacant Lot (Strange Bird) », nouvelle œuvre pour ensemble créée le 10 janvier 2024 à la Cité de la musique. En ondes et échos successives, la compositrice exprime la présence d’une force étrangère qui commande au corps, elle questionne cet espace autour du son en gommant toute direction préalable et pensée… Travail de la compositrice avec le chef pendant les répétitions préparatoires…

 

entretien

LIRE aussi notre entretien avec PIERRE BLEUSE à propos de la nouvelle saison 2024 – 2025 de l’Ensemble Intercontemporain / Centenaire Pierre Boulez, Michael Jarrell, Edgar Varèse… Portraits des compositeurs d’aujourd’hui : Clara Iannotta… : https://www.classiquenews.com/ensemble-intercontemporain-entretien-avec-pierre-bleuze-directeur-musical-a-propos-de-la-nouvelle-saison-2024-2025/

 

 

approfondir

VISITEZ le site de CLARA IANNOTTA : http://claraiannotta.com/

 

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METZ, Arsenal, le 11 oct 2024. TCHAIKOVSKY (Symphonie n°4). Orchestre National de Metz Grand-Est, Victor Julien-Laferrière (violoncelle), Lionel Bringuier (direction).

Composé en 2011 par la jeune compositrice Caroline Shaw – la plus jeune musicienne à recevoir le prix Pulitzer pour la musique -, « Entr’acte » transporte soudainement le spectateur de « l’autre côté du miroir d’Alice ». Un destin intriguant qui promet une expérience musicale inédite pour les spectateurs…

 

Rare au concert et pourtant d’une exceptionnelle profondeur, le Concerto pour violoncelle d’Elgar (1919), est incarné par le jeu du violoncelliste Victor Julien-Laferrière. Enfin superbe défi pour l’Orchestre National Metz Grand-Est, la Symphonie n°4 de Tchaïkovski (1878) conclut le programme : témoignage d’une existence éprouvante, où s’imposent sans ménagement le poids du fatum et la tristesse qu’il produit dans le cœur de ses victimes. Pour autant, le songe et le rêve permettent de s’en échapper, provisoirement car le Fatum revient toujours, source obsédante d’une insondable amertume… l’échec de son mariage, les angoisses d’un homme hypersensible et tourmenté transparaissent ici à demi mots… Tchaikovski s’en explique précisément dans une lettre à son « meilleur ami » (et dédicataire de cette symphonie opus 36) : la comtesse Nadejda Von Meck, sa protectrice et mécène. La mélancolie de l’Andantino, l’ivresse du Scherzo aux épisodes décousus (ivresse de moujiks, chanson de rue, marche militaire…) semblent se résoudre dans l’élan de l’Allegro (con fuoco) final, où le compositeur rassemble ses forces et veut croire dans le réconfort de bonheurs simples comme les résonances d’une fête populaire : « réjouis toi de la joie des autres. Il est possible quand même de vivre ».

 

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METZ, Arsenal, Grande Salle
Ven 11 oct 2024, 20h

RÉSERVEZ vos places directement sur la Cité musicale METZ : https://www.citemusicale-metz.fr/fr/programmation/saison-24-25/concert/la-symphonie-ndeg4-de-tchaikovski-1

Durée : 2h + entracte

 

 

Crédit photo © Lyodoh Kaneko

 

Programme
Caroline Shaw : Entr’acte
Edward Elgar : Concerto pour violoncelle
Piotr Ilitch Tchaïkovski : Symphonie n°4

 

à 19h : présentation / clés d’écoute (entrée libre)
Ouverture des portes et du bar à 19h
Début du concert à 20h
Placement numéroté, assis / Vestiaire disponible / Restauration sur place

 

 

distribution
Orchestre national de Metz Grand Est
Lionel Bringuier, direction
Victor Julien-Laferrière, violoncelle (ELGAR)

 

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CRITIQUE, concert. ANGERS (les 22 & 26), NANTES (les 24 & 25). C. ORFF : Carmina Burana. L. Dufy, J. Asiain, T. Varon, Orchestre National des Pays de la Loire, Chœurs de l’ONPL et Universitaire de Nantes, Sascha Goetzel (direction).

L’Orchestre National des Pays de la Loire – et son directeur Guillaume Lamas – ont vu grand pour leur concert d’ouverture de saison, en affichant les grandioses “Carmina Burana” de Carl Orff, sur deux soirées tant à Nantes qu’à Angers. Oui, cet ouvrage se prononce au pluriel, et l’on doit sire “les” Carmina burana ou « Chants de Beuren » – du nom du monastère de Haute-Bavière où ont été retrouvés les manuscrits des poèmes médiévaux sur lesquels Carl Orff composa la musique en 1936. 

 

Crédit photo © Emmanuel Andrieu

 

L’orchestre ligérien est dirigé par son directeur musical, Sascha Goetzel, avec une vigueur et un aplomb qui mettent particulièrement en valeur le caractère direct et chatoyant de l’orchestration. Le rythme, élément essentiel de la partition, est légitimement appuyé et lancinant. Quant au volume sonore, il est traité par le chef autrichien avec une dynamique très contrastée, passant du susurrement à peine audible des chœurs (conjugués de l’ONPL et Universitaire de Nantes, soutenus par la Maîtrise de la Perverie) à l’exubérance tonitruante des cuivres et des percussions. Les nombreux choristes se tirent avec tous les honneurs des difficultés posées par la prononciation du vieux français, des moyen et haut allemands, mais surtout du latin où les consonnes se détachent clairement. La soprano colorature Lila Dufy possède une voix claire, irréprochable dans l’aigu, et décoche quelques fort jolies notes dans Cour d’amours, tandis que le baryton (breton) Timothé Varon et le ténor navarrais Joaquin Asiain (avec une voix moins belle que son collègue…) se montrent à la hauteur de leur tâche. Le premier est même un peu la vedette de la soirée, car non seulement on ne perd pas une miette des paroles, mais il est à l’aise dans tous les registres, campant avec superbe un abbé aviné (“Ego sum abbas”), puis en négociant parfaitement la tessiture très étendue de “Dies, nox et omnia”.

La soirée avait débuté avec deux “mises en bouche” purement orchestrales, avec la rare “Ouverture festive” de Chostakovitch et la plus courante “Symphonie pour instruments à vents” de Stravinsky (révision de 1947) – dont la réalisation s’avère parfaite, qu’il s’agisse de la rythmique, des harmonies riches et serrées ou du mélange très réussi des timbres. La limpidité et l’évidence solaire de cette pièce fascinante sont ici parfaitement rendues.

A l’issue de la soirée, le public nantais ne boude pas son plaisir et fait un joli triomphe aux plus de 200 artistes réunis sur la vaste scène de la Cité des Congrès !

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CRITIQUE, concert. ANGERS (les 22 & 26), NANTES (les 24 & 25). C. ORFF : Carmina Burana. L. Dufy, J. Asiain, T. Varon, Orchestre National des Pays de la Loire, Chœurs de l’ONPL et Universitaire de Nantes, Sascha Goetzel (direction). 

 

VIDEO : Christian Macelaru dirige les « Carmina Burana » de Carl Orff 

 

CRITIQUE, opéra. MILAN, Teatro alla Scala, le 28 septembre 2024. CESTI : L’Orontea. S. D’Oustrac, C. Vistoli, S. Blanch, H. Cutting… Robert Carsen / Giovanni Antinoni.

La Scala de Milan avait donné, il y a plus de soixante ans, la première mise en scène moderne de ce chef-d’œuvre de l’opéra vénitien qu’est L’Orontea d’Antonio Cesti. L’ouvrage triomphe à nouveau in loco dans une mise en scène truculente et efficace de Robert Carsen, autour d’une distribution de très haute  tenue, et brillamment dirigée par Giovanni Antonini.

 

L’Orontea de Cesti au Teatro alla Scala © Vito Lorusso

 

Venise à la fashion week

C’est en effet à la Scala (mais dans la petite salle) que fut créée scéniquement L’Orontea en 1961, avec dans le rôle-titre rien moins que Teresa Berganza. Mais on était loin de l’interprétation « historiquement informée » que René Jacobs allait proposer pour son concert d’Innsbruck (ville chère à Cesti, qui y créa plusieurs opéras, dont cette Orontea en 1656) avant de l’enregistrer dans la foulée pour Harmonia Mundi. Depuis, l’œuvre qui reste rare à l’affiche, a tout de même bénéficié de plusieurs récentes productions – comme à Innsbruck en 2014, sous la direction de David Bates, et dans mise en scène de Stefano Vizioli, ou l’année suivante, à Francfort, basée sur une nouvelle édition de la partition, dirigée par Ivor Bolton qui l’enregistra dans la foulée pour le label Oehms Classics, et plus récemment encore à Sydney, en mai / juin 2022 (dans une production peu convaincante…).

La nouvelle production de Milan est un enchantement. La mise en scène ingénieuse de Robert Carsen transpose l’action dans une galerie d’art (milanaise, bien sûr) qui porte le nom de la reine d’Égypte. Les puristes pourront tiquer éventuellement devant l’incongruité d’une telle dénomination (Orontea n’a pas grand-chose à voir avec l’art pictural, Carsen en fait ici une femme d’affaire…), mais qu’importe ; elle n’a au fond d’égyptienne que le nom, et l’on sait que cet exotisme de bon aloi n’est là que comme support d’une action pleine de péripéties et de quiproquos sexuels, propres au répertoire vénitien du Seicento. Dommage que le prologue, un débat entre Philosophie et Amour, musicalement délectable, ait été supprimé. Mais le spectacle n’en garde que davantage sa cohérence, dont l’intrigue semble prendre le contrepied de celui de Poppée (la chaste Orontea finira par succomber au charme du jeune peintre Alidoro, dont on apprendra les origines royales permettant de justifier l’habituel lieto fine). Tous les ingrédients de l’opéra vénitien y sont réunis (les lamenti, la scène de sommeil, les airs de fureur, les quiproquos liés au changement d’identité – la vieille Aristea, normalement chantée par un ténor, ici par une alto, qui s’éprend de l’esclave Giacinta travestit en homme -, les personnages comiques, voire bouffons, l’ivrogne Gelone ou le valet Tibrino), gages de son immense succès, l’un des plus durables du siècle, avec la Dori du même Cesti ou Il Giasone de Cavalli.

 

« LOrontea est une sorte d’anti-Poppée,
qui multiplie d’ailleurs les clins d’œil
à l’ultime chef-d’œuvre de Monteverdi »

 

Sur scène donc, une galerie d’art qui pivote et laisse apparaître tour à tour un bureau avec divan et la skyline des gratte-ciels milanais, un mur doré qui évoque celui de la Fondation Prada, un sous-sol où l’esclave Giacinta jette les poubelles, et une bibliothèque remplie de livres d’art. La foule nombreuse venue assister à l’exposition témoigne de l’extraordinaire direction d’acteurs du metteur en scène, respectueux – c’est le plus important – de l’esprit de l’œuvre. Tout y est théâtralement efficace, grâce également aux lumières ad hoc de Carsen et Peter Van Praet et aux décors et costumes élégants de Gideon Davey.

La distribution réunie pour cette résurrection milanaise force le respect. Dans le rôle-titre, Stéphanie D’Oustrac déploie un timbre généreux excellemment projeté et compense une légère tendance à emphatiser le recitar cantando par une présence scénique époustouflante ; elle émeut à juste titre dans son air célèbre « Intorno all’idol mio ». Sa rivale Silandra est magnifiquement incarnée par Francesca Pia Vitale qui allie à la beauté de sa silhouette celle d’un timbre lumineux, à la déclamation parfaitement idoine (son « Addio Corindo », l’un des sommets de la partition restera gravé dans les mémoires), tandis que son amant malheureux et momentanément trahi, Corindo, trouve dans le contre-ténor Hugh Cutting un interprète au chant toujours juste, magnifié par une rondeur alliciante du timbre et une aisance roborative dans le registre aigu. Son duo avec Silandra, au début de l’opéra, fait merveille. Carlo Vistoli est le vrai triomphateur de la soirée. Il campe un Alidoro magistral, fait pleurer les pierres dans son lamento « Vieni, resta, no, sì ? », et montre de toute la gamme des affects quand il reçoit la lettre d’amour en conclusion du deuxième acte (« Care note amorose »), quand il rejette Silandra, apprenant qu’il pourra épouser une reine, ou quand, finalement rejetée par les deux rivales, il chante un air désabusé (« Il mondo così va ») du plus bel effet. S’il ne chante aucun air, le philosophe Creonte du toujours juste Mirco Palazzi prodigue des conseils aux antipodes de son prédécesseur Sénèque (L’Orontea est une sorte d’anti-Poppée, qui multiplie d’ailleurs les clins d’œil à l’ultime chef-d’œuvre de Monteverdi) avec une maîtrise du recitar cantando qui reste encore la forme musicale privilégiée de ce répertoire. Le couple comique Gelone et Tibrillo, respectivement défendu par la basse Luca Tittolo et la soprano au timbre juvénile Sara Blanch (espiègle et non moins attachante dans son bel air « Or se dir mi convien la verità »), représente la caution nécessaire à faire baisser la tension du drame (Corindo souhaite assassiner son rival) dans un contre-point qui frise le comique le plus débridé, irrésistible, quand Gelone fait l’éloge du vin – éloge assez fréquent dans l’opéra vénitien du XVIIe siècle – ou quand il se moque, avec Tibrillo, des aléas du sentiment amoureux. La vieille Aristea est campée par l’alto Marcela Rahal, registre inhabituel qui apparaît dans l’une des quatre partitions complètes de l’opéra, celle de Cambridge : son interprétation est d’une telle justesse qu’on la prend réellement pour un homme travesti en femme ! Enfin, Maria Nazarova joue magistralement le rôle travesti de Giacinta / Ismero harcelé par les avances libidineuses d’Aristea.

Dans la fosse, Giovanni Antonini dirige les forces du Teatro alla Scala (qui jouent sur instruments anciens) avec une maîtrise saisissante, un sens du théâtre inouï, constamment attentif aux moindres inflexions du livret génial de Cicognini et Apolloni. Ce faisant, il rappelle que, nonobstant la primauté du texte poétique qui renferme les affects des personnages, le théâtre est aussi dans ce dialogue incessant avec les personnages. Voilà sans doute ce qui constitue l’alchimie délicate et si fragile du théâtre musical vénitien qui continue à nous fasciner à près de quatre siècles de distance.    

 

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CRITIQUE, opéra. MILAN, Teatro alla Scala, le 28 septembre 2024. CESTI : L’Orontea. S. D’Oustrac, C. Vistoli, S. Blanch, H. Cutting… Robert Carsen / Giovanni Antinoni. Photos © Vito Lorusso.

 

VIDÉO : Trailer de « L’Orontea » de Cesti selon Robert Carsen au Teatro alla Scala

 

INVALIDES, le 10 oct 2024. Concert d’ouverture, BEETHOVEN : Symphonie n°5, Concerto pour piano n°1 (Mari Kodama), Le Cercle de l’Harmonie, Jérémie Rhorer (direction)

Concoctée par Christine Dana-Helfrich, responsable artistique de la musique au Musée de l’Armée, la 31ème Saison Musicale des INVALIDES à Paris est officiellement lancée ce 10 octobre 2024 par un concert prometteur qui célèbre le génie Beethovénien. Il réunit l’orchestre Le Cercle de l’Harmonie de Jérémie Rhorer (sur instruments d’époque, créé depuis 2005) et la pianiste Mari Kodama, dans le Concerto pour piano n°1. Le Premier Concerto pour piano de Beethoven est encore héritier de la grâce mozartienne et de l’équilibre formel hérité de son maître à Vienne, Joseph Haydn. Composée entre 1795 et 1798, la partition exprime la fougue et l’énergie du jeune Beethoven, prêt à révolutionner le langage musical européen à l’époque du romantisme. La création a eu lieu le 2 avril 1800, par Beethoven lui-même au clavier.

 

 

Jérémie Rhorer et ses instrumentistes jouent ensuite la Symphonie n°5 en ut mineur, opus 67 d’un Beethoven au sommet de son génie, alors symphoniste de premier plan, orchestrateur hors pair et architecte sublime de l’écriture orchestrale. Conçue entre 1805 et déc 1808 (année de sa création à Vienne, avec la 6ème « Pastorale »), la 5ème symphonie de Ludwig van Beethoven prolonge directement les audaces et la réussite de la 3ème « Eroica ». Elle porte une double dédicace, hommage aux deux protecteurs (entre autres) de Ludwig à Vienne, le Prince Lobkowitz et le duc Razumovsky ; ces derniers doivent à Beethoven d’être ainsi passés à la postérité.
ETA HOFFMANN, GOETHE et même BERLIOZ (lors d’un concert à Paris en 1834), expriment leur enthousiasme face au bouillonnement éruptif de l’écriture. Dès l’urgence rythmique qui ouvre le premier Allegro (con brio), l’esprit de conquête, l’appel à un nouvel ordre s’imposent à l’auditeur, dans l’intensité et une impérieuse nécessité. Tout prépare au Finale (Allegro en ut majeur), éclatant, triomphal dont le caractère n’est pas sans rappeler le message et la couleur de l’opéra « Fidelio », unique ouvrage lyrique de l’auteur qui le conçoit en parallèle à la 5ème. La détermination et l’ampleur de vue qui inspirent le cheminement et la construction de tout l’édifice orchestral, naissent de la répétition d’une cellule rythmique qui répétée, réalise la profonde et sublime cohésion organique de la 5ème symphonie, l’une des plus saisissantes de Beethoven.

 

 

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PARIS, INVALIDES, Cathédrale Saint-Louis
Jeudi 10 octobre 2024, 20h
BEETHOVEN : Concerto pour piano n°1, Symphonie n°5
Le Cercle de l’Harmonie, Jérémie Rhorer

RÉSERVEZ vos places directement sur le site des INVALIDES / Musée de l’Armée :
https://www.musee-armee.fr/au-programme/cette-semaine-au-musee/detail/beethoven-le-cercle-de-l-harmonie.html

 

 

Accès unique pour les concerts de 20h par le 129 rue de Grenelle (Face au pont Alexandre III).
Il est nécessaire d’acheter ses billets à la billetterie sur place de 10h à 17h30 ou en ligne sur la billetterie en ligne du Musée de l’Armée ici :
https://billetterie.musee-armee.fr/fr-FR/accueil?_gl=1*1lwp57u*_gcl_au*MTMyNDg3OTA1NS4xNzI3NjA4NzEx

 

COUPS de COEUR à CHANTILLY. LES TALENS LYRIQUES, les 12 et 13 octobre 2024. Haendel, Rameau, JS Bach (Dôme des Écuries, Galerie des peintures…), Christophe Rousset, direction

L’éloquent orchestre sur instruments d’époque, LES TALENS LYRIQUES, fondé en 1991 par Christophe Rousset, investit le site patrimonial exceptionnel du Château de Chantilly lors du week-end des 12 et 13 octobre. Le directeur artistique du festival « Les Coups de cœur à Chantilly » offre ainsi au maestro et son orchestre, une carte blanche… 3 concerts sont annoncés, sur le thème du règne floral et végétal – en liaison avec les Journées des Plantes qui se tiennent simultanément dans le domaine -, sous le spectaculaire dôme des Écuries, et dans la galerie des peintures du Château : « les lauriers de Haendel » (samedi 12, 18h), puis 2 programmes le dimanche 13 oct : « Faune entre Flavonius et Flore » (11h, Galerie de peintures), puis « Triomphez agréables fleurs » (17h, Dôme des Écuries).

 

 

Coups de cœur à Chantilly
Les Talens Lyriques à Chantilly
samedi 12 & dimanche 13 octobre 2024

 

 

 

HAENDEL : OMBRA MAI FU / Les Lauriers de Haendel
CHANTILLY, samedi 12 oct 2024, 18h
Haendel ouvre avec finesse et éclat ce week-end de festivités florales et musicales, autour de l’œuvre « Apollo e Dafne ». La cantate, inspirée des Métamorphoses d’Ovide, évoque Daphné, qui aimant un bouvier, veut échapper aux ardeurs d’Apollo ; elle est transformée en laurier, arbre d’honneur et de gloire, dont les feuilles restent toujours vertes. Haendel avant Richard Strauss (et son sublime opéra mythologique) aborde la figue de la nymphe insensible au bel Apollon. Pour compléter ce programme enchanteur, Christophe Rousset réunit en finesse et virtuosité, de ses musiciens, et plusieurs chanteurs pour offrir au public une sélection des plus beaux airs d’opéras de Haendel, sur le thème des fleurs et de la nature.

 

 

DIMANCHE 13 octobre 2024, 11h
« Faune entre Flavonius et Flore » : Rameau, Bach, Couperin, Forqueray
Focus exceptionnel sur la délicatesse et l’intimité du clavecin pour cette matinée dominicale. Christophe Rousset présente le jeune claveciniste et chef formé auprès de lui, Korneel Bernolet (né en 1989). Ce dernier (qui a participé entre autres à de nombreux programmes lyriques avec Scherzi Musicali de Nicolas Achten) interprète à Chantilly, entre autres, plusieurs arrangements de « Fleurs » extrait de la Suite des Indes Galantes de Rameau pour clavecin seul ; il est rejoint ensuite par Christophe Rousset pour une œuvre à quatre mains.

 

 

DIMANCHE 13 octobre 2024, 17h
LES INDES GALANTES : « Triomphez agréables fleurs «  : Rameau, Royer
Les Talens Lyriques en grand format et toute la verve et l’énergie de Christophe Rousset clôturent ainsi l’édition 2024 des Coups de Cœur à Chantilly. Ils présentent un programme dédié à l’inspiration florale et végétal, voire atmosphérique de l’immense Jean-Philippe Rameau, reprenant les Indes Galantes matinales, et leurs « Fête Persane » et « Fleurs », entre autres, pour en composer de grands bouquets musicaux, aux parfums mélodiques irrésistibles. plusieurs pièces virtuoses et rarement interprétées de Pancrace Royer complètent ce programme ; ils seront le feuillage de ce concert final, celui d’un week end placé sous le règne exubérant de Flore.

 

 

TOUTES LES INFOS des 3 concerts des TALENS LYRIQUES / Christophe Rousset, direction, à l’affiche des COUPS DE COEURS A CHANTILLY des 12 et 13 octobre 2024 : https://lescoupsdecoeurachantilly.com/programme-2024/

 

 

 

CRITIQUE, festival. 36ème Festival de quatuors à cordes en Pays de Fayence, Eglise de CALLIANS (Var), le 26 sept 2024. J. HAYDN / R. SCHUMANN. Quatuor Hagen.

Pour sa trente-sixième édition, le Festival de Quatuors à Cordes en pays de Fayence, dans le Var, nous a offert l’un des plus beaux concerts qu’on y ait entendus : celui du Quatuor Hagen.

 

Le Quatuor Hagen © IppertiC

 

Lorsque l’automne commence à dorer les forêts et les vignobles du Haut-Var, il faut venir profiter dans cette région du plaisir de ce qu’on appelle le « tourisme d’arrière saison ». Le Haut-Var a un charme particulier. Rien à voir avec le Var turbulent du littoral qui explose à Saint-Tropez en frasques tumultueuses ! Ici, la douceur remplace l’esbroufe, l’authenticité se substitue au clinquant. Les sommets des collines sont coiffés par une série de villages qu’on appelle « villages perchés », dont certaines ruelles pittoresques remontent au Moyen-Age. C’est dans ces villages situés autour de la commune de Fayence qu’un amateur fou de quatuors à cordes, Daniel Bizien, créa il y a trente-six ans un festival consacré à ce genre musical. Ce fut, en la matière, pendant plus de deux décennies, l’un des plus grands festivals en Europe. Puis, avec les années, la patience et les budgets des élus villageois se sont érodés. Le festival menaça disparition. Il a fallu tout le talent et le pouvoir de conviction d’un de nos vaillants violoncellistes français, Frédéric Audibert, pour sauver cette manifestation.

Même s’il a été réduit à un week-end cette année, le festival existe encore. On s’en réjouit. Et de quelle façon ! Nous y avons applaudi, à l’Eglise de Callians, l’un des meilleurs concerts qu’on y ait jamais entendus (et pourtant, il y en a eu de splendides!), celui du Quatuor Hagen. Oui, Frédéric Audibert a obtenu la présence des Hagen ! Il y a mis cinq ans pour y parvenir – et il y est arrivé. Inutile de dire que, ce soir-là, le village a été pris d’assaut par des mélomanes de toute la région. Il a fallu garer sa voiture à des kilomètres et finir à pied dans la nuit ! Mais on ne le regretta pas.

Les Hagen jouèrent deux Quatuors de Josef Haydn et le premier Quatuor de Robert Schumann. Ce ne sont pas quatre instruments qu’on entendit mais un seul : la cohésion de cet ensemble est quelque chose d’admirable. Souvent, quand un quatuor s’élance dans des traits virtuoses ou des grands crescendi on entend quatre instruments partir à l’assaut : ici c’était un seul réparti sous quatre archets. Et avec cela une sonorité de velours, une sorte de fondu et de douceur qui demeuraient dans les passages les plus énergiques. Ah cette grâce délicate dans les phrasés de Haydn… et ces emportements maîtrisés dans les élans schumanniens ! Les Hagen nous donnèrent une sorte d’idée de la perfection musicale. Et il fallait venir dans un village perché du Haut Var pour profiter de cela.

Saison après saison, ces dernières années, l’existence de ce festival est remise en question. Que les élus et responsables varois sachent préserver ce véritable joyau !

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CRITIQUE, festival. 36ème Festival de quatuors à cordes en Pays de Fayence, Eglise de CALLIANS (Var), le 26 sept 2024. HAYDN / SCHUMANN par le Quatuor Hagen. Photo © IppertiC.

 

CRITIQUE CD événement. Joachim RAFF : Samson, première mondiale. Magnus Vigilius, Samson / Olena Tokar, Delilah… / Berner Symphonieorchester, Philippe Bach (3 cd Schweizer Fonogramm, 2023)

L’ouvrage ici révélé est le fruit d’une réflexion personnelle sur les enjeux et la finalité de l’écriture lyrique. JOACHIM RAFF (1822 – 1882) s’impose par sa grande culture opératique ; assistant de Liszt à Weimar, il est au fait des dernières tendances esthétiques. Son Samson, jamais représenté de son vivant, ici révélé en première mondiale, porte en filigrane ses propres recherches théâtrales, dont évidemment son regard critique vis à vis des opéras de Wagner, en particulier Lohengrin (dont il a participé à la création à Weimar en 1850).

 

 

Le compositeur suisse fusionne ainsi Wagner et le grand opéra français (le ballet du V) ; maîtrisant parfaitement l’alliage de l’intime et du collectif, il analyse la pression des peuples et de l’aspiration de l’histoire sur un couple amoureux lequel s’inscrit hors des intrigues, des calculs, de la fatalité, de la haine. Leur origine devait les séparer voire les opposer ; mais l’amour vainc tout et le Danite, Samson, héros des Israélites, est foudroyé et sauvé par la belle Dalilah, fille du roi des Philistins… 

C’est une sorte de Roméo et Juliette à l’orientale mais l’écriture de RAFF ne s’épanche pas en un fantasme orientalisant et sensuel [comme Flaubert imagine Salambo ou Strauss sublime Salomé]. Direct et franc, réaliste et furieusement efficace, Joachim RAFF souligne les oppositions dramatiques, déploie une vision analytique d’un amour systématiquement détruit, nié, manipulé, mais vengeur et finalement vainqueur (la vengeance de Samson dans le temple de Dagon peut s’accomplir en fin d’action grâce à l’appui de Delilah).

La force du drame découle d’un antagonisme progressif entre la puissance barbare et guerrière des soldats [qu’ils soient d’Israël ou de Gaza] et le sentiment amoureux de plus en plus fort et partagé entre Delilah et Samson. 

Le livret de Joachim RAFF est très habile et très bien construit ; face à l’éclat du couple amoureux, de plus en plus admirable à mesure qu’il est éprouvé d’acte en acte, le compositeur librettiste n’oublie aucun des rôles qui contrepointe la figure des amants : ni le combattant jaloux de Samson, éconduit par Delilah (Micha) ; ni la figure du père de Dalilah [Abimelech], prêt à tout pour anéantir la force de Samson y compris à manipuler sa fille « pour son bien »… Le grand prêtre qui triomphe à partir de l’acte II est comme le grand inquisiteur dans le Don Carlo de Verdi : la seule autorité qui arbitre roi et héros, favorisant les haines ancestrales pour mieux manipuler. Le peuple suit comme un mouton y compris les Israélites qui a l’égard de leur propre sauveur Samson, ne manquent pas de lui être infidèles. 

C’est autant les protagonistes que le rôle de l’orchestre dans les nombreux passages assurant l’enchaînement des tableaux qui suscitent l’admiration.

Dramatique et spectaculaire [les fanfares épiques et tragiques], ou poétique, paysager et psychologique, l’orchestre de RAFF demeure de bout en bout, imaginatif et particulièrement suggestif, en cela aussi efficace et souvent saisissant que le travail du grand modèle, Wagner. 

Du reste, pour avoir autant admiré que critiqué l’auteur de Lohengrin, RAFF se montre aussi wagnérien qu’il sait demeuré original et personnel. 

En définitive et pour le dire autrement, de façon plus synthétique, ce que Wagner refusait dans Lohengrin à ses deux protagonistes (Lohengrin et Elsa que sépare une totale incompréhension), Joachim Raff le leur permet : ses héros magnifiques (Samson et Delilah) incarnent un idéal humain et spirituel : la rencontre de deux être d’exception que les épreuves dévoilent peu à peu ; renforcer leur amour réciproque et braver tous les obstacles pour la réalisation de leur union, autant amoureuse que spirituelle. C’est bien la force du livret et toute la conception musicale de ce SAMSON : creuser et développer la relation du guerrier Danite et de la fille d’Abimélech ; les fusionner comme une force unique, soudée dont chaque duo cristallise un peu plus, l’éblouissante sincérité : c’est bien l’enjeu de l’acte IV (3è partie), où Delilah retrouve Samson supplicié dans sa prison, lui déclarant une loyauté indéfectible et lui assurant sa complicité vengeresse, jusqu’à la mort. Le profil psychologique des deux amants est sublime et l’écriture de leurs airs alternés, aboutissant à un duo éperdu, est une indiscutable réussite. 

Le chef Philippe Bach veille au souffle comme à la caractérisation de chaque séquence ; sa direction, précise et affûtée y compris dans les éléments chorégraphiques (danse des enfants au début du V) articule et offre de superbes accents dramatiques, aux scènes chorales (puissantes et oxygénées) comme aux duos amoureux qui parcourent l’oeuvre ; le cheminement psychologique de l’orchestre, portant et explicitant la psyché de Samson et de Delilah s’en trouve grandement clarifié : Raff s’y dévoile ainsi fin connaisseur de l’âme humaine, conteur épique de premier plan. Les instrumentistes se délectent visiblement dans les intermèdes atmosphériques d’une somptueuse force suggestive (Prélude pastoral de l’acte III, au palais d’été d’Abimélech). 

Le cast réunit trois chanteurs très impliqués, innervant chacun de leurs airs avec la précision et l’épaisseur émotionnelle requises ; le Samson de Magnus Vigilius rappelle par la légèreté de son timbre la proximité que Raff a conçu entre son héros et le Lohengrin de Wagner : ténor héroïque et lumineux, de fait, habité par l’idéal de l’amour et de la réconciliation des nations entre Philistins et Israélites ; Olena Tokar incarne avec la même sincérité l’itinéraire de Delilah, amoureuse de Samson, manipulée par son père, peu à peu femme forte d’une loyauté admirable aux côtés du héros martyrisé ; et Robin Adams éclaire toute l’ambiguité du rôle d’un père aimant mais dépassé par la passion de la manipulation (cheminement de l’acte II, qui le mène de la figure royale à celle du politique déchu)… D’une façon générale, très exposés eux aussi, les chœurs sont magnifiquement préparés, restituant l’impact expressif de chaque groupe humain.

L’écoute du cd 2 (déroulement de l’acte III) est à ce titre très révélatrice : s’y affirme la fusion entre Samson et Delilah : airs séparés d’abord, puis effusion enivrée, où les 2 voix souples et naturelles s’avèrent totalement convaincantes (final de la scène 2 de l’acte III). Puis leur confrontation avec le choeur est grandiose sans grandiloquence ; la fanfare majestueuse, carillon d’un destin implacable ; grande scène aux dimensions du grand opéra français, avec le choeur des philistins qui scande la déclaration du grand prêtre, lequel (très convaincant Christian Immler) proclame l’aveuglement de Samson….. L’enchainement des scènes est passionnante. 

A l’heure où les enregistrements d’opéras sont de plus en plus rares et parfois ratés, ce SAMSON créée l’événement de cette rentrée lyrique et discographique 2024. La surprise est totale et la découverte majeure. L’opéra suisse peut être fier d’avoir ainsi retrouvé l’un de ses plus passionnants auteurs pour la scène. 

Saluons l’éditeur Schweizer Fonogramm d’avoir eu l’intuition si juste de dédier tant d’efforts à cette éblouissante récréation, celle d’un authentique chef d’œuvre du romantisme suisse. A quand une prochaine production scénique ?

 

 

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CRITIQUE CD événement. JOACHIM RAFF : Samson, première mondiale – 3 cd Schweizer Fonogramm – enregistré à BERN en septembre 2023 – CLIC de CLASSIQUENEWS automne 2024

 

 

 

approfondir

LIRE aussi notre annonce présentation du SAMSON de Joachim RAFF :

https://www.classiquenews.com/cd-evenement-annonce-joachim-raff-samson-1865-premiere-mondiale-3-cd-schweizer-fonogramm-editions-magnus-vigilius-samson-olena-tokar-delilah-berner-symphonieorchester-philippe-bach-di/

 

LIRE aussi notre REPORTAGE avec la productrice Graziella CONTRATTO à propos des coulisses de l’enregistrement du SAMSON de Joachim RAFF : https://www.classiquenews.com/redecouverte-majeure-le-samson-de-joachim-raff-ou-lopera-maudit-et-sa-redemption-1-2-lediteur-suisse-schweizer-fonogramm-ressuscite-un-joyau-lyrique-du-romantisme-helvetique/

REDÉCOUVERTE MAJEURE. Le SAMSON de Joachim Raff ou l’opéra maudit et sa rédemption (1 / 2). L’éditeur suisse Schweizer Fonogramm ressuscite un joyau lyrique du romantisme helvétique

(78) FESTIVAL : 28èmes « JOURNÉES RAVEL », 5 et 6 puis 12 et 13 octobre 2024. Quatuor Iberia, Quatuor Mirages, Gaëlle Arquez, Trio Philippe Cassard, Anne Gastinel, David Grimal, Cyprien Katsaris…

Le festival Les Journées Ravel célèbre depuis 30 ans le génie ravélien, à travers un cycle exceptionnel de concerts où brillent la musique de Maurice Ravel, celle de ses maîtres, de ses contemporains…

 

Le département des Yvelines (au-delà de la ville de Montfort l’Amaury), et la Région Île de France peuvent s’enorgueillir de pouvoir ainsi honorer la figure la plus importante de la musique française du XXè, et son héritage musical, connu dans le monde entier. Que serions nous en effet sans les 2 concertos pour piano, Ma Mère l’Oye, Daphnis et Chloé, La Valse, Boléro, Shéhérazade, le Trio pour violon, violoncelle et piano, sans compter toute sa musique pour piano… ?
Cette 28ème édition est d’autant plus incontournable qu’elle préfigure déjà l’année anniversaire : 2025, qui marquera les 150 de sa naissance !
Couleurs, féerie, raffinement inouï d’un orchestrateur fabuleux… l’œuvre de MAURICE RAVEL relève d’un miracle permanent.
Les Yvelines restent l’écrin privilégié où mieux comprendre la modernité visionnaire du compositeur, la complexité d’une écriture qui est l’une des plus accessibles et des plus populaires. A 45 ans, fatigué de la vie citadine, Maurice Ravel s’installe à Montfort l’Amaury dans les Yvelines, en bordure de la Forêt de Rambouillet… Sa maison « Le Belvédère » devient le miroir de sa personnalité, exigeante, scrupuleuse, pudique… Le Belvédère qui contient les secrets du Maître, est aujourd’hui un musée dont l’agencement est demeuré fidèle aux intentions de son résident. C’est aussi à Montfort l’Amaury qu’il compose son œuvre célébrissime, Boléro. Les Journées RAVEL se déroulent sur 2 week ends d’octobre : les 5 et 6 puis 12 et 13 octobre dans divers lieux des Yvelines, ceux là même que Ravel a investis…

 

Au programme de l’édition 2024 (28ème édition des Journées Ravel), carte blanche aux jeunes talents (les fameux concerts « PROM’S ») : samedi 5 octobre : Quatuor Iberia, Quatuor Mirages, les pianistes Tom Carré et William Winterstin… puis Récitals Anton Gerzenberg et Pierre Hantaï (dim 6 oct) ; Au programme du 2ème week end : le samedi 12 oct, récital de Gaëlle Arquez (mélodies de Ravel, Berlioz, Tailleferre, Fauré, avec la pianiste Mary Olivon) ; le Trio Philippe Cassard, Anne Gastinel, David Grimal (La Mare au Loup, 20h30 : le sublime Trio en la mineur) ; enfin dim 13 oct, Quatuor à cordes de Debussy et Ma Mère l’Oye de Ravel… par le Quatuor Voce, Juliette Hurel, Rémi Delangle… (11h), et pour clôture, récital du pianiste Cyprien Katsaris (16h30) : Sonatine, Menuet antique, Daphnis & Chloé… Incontournable.

 

TOUTES LES INFOS, le détail des concerts, les artistes invités des journées Ravel 2024 sur le site du festival les Journées Ravel :
https://www.lesjourneesravel.com/

 

 

 

 

TEASER VIDÉO – présentation des 27èmes Journées Ravel 2023 – retour

 

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CRITIQUE, opéra. PARIS, Palais Garnier, le 24 septembre 2024. OFFENBACH : Les Brigands. M. Beekman, M. Vidal, M. Perbost, L. Naouri, A. Dennefeld… Barrie Kosky / Stefano Montanari.

On l’aperçoit au loin, au fond de l’Avenue de l’Opéra, la façade du parangon du rêve du préfet Haussmann… et puis l’on entre sous le regard des Haendel, Gluck, Lully et Rameau; et l’on monte cet escalier iconique de bronze et de marbre à foison; et d’un coup on se trouve drapé de dorures et de soie écarlate sous les nuées multicolores de Marc Chagall. Le Palais Garnier est une mise en abyme en soi, une illusion dès son apparition furtive dans la ville, comme un mirage au cœur de la procession incessante des phares automobiles.  Une salle de spectacle, quelle qu’elle soit, n’est pas simplement le cadre des rêves en tableaux vivants, mais c’est aussi une tribune. Dès lors qu’un théâtre ou un opéra occupe l’espace public, il participe au tissu social. Rien n’est innocent dans l’art et encore moins dans un art vivant et public. Offenbach et ses librettistes étaient conscients de la nature éminemment politique de toute expression de leur talent réuni.

 

 

La somptueuse bonbonnière de Charles Garnier ouvre ses sortilèges avec Les Brigands de Jacques Offenbach. Composée sur un livret du duo génial de Meilhac et Halévy, cette satire politico-économique nous plonge malgré nous dans une intrigue qui semble prendre sa source dans l’actualité politique d’une France à la dérive depuis le mois de juin. Espace public s’il en est, le doux velours cramoisi des sièges de l’orchestre n’a pas amorti des commentaires acerbes de quelques spectatrices et spectateurs à l’entracte. Truffée de propos homophobes et parsemée d’intolérance, cette litanie au nouveau ministre de l’Intérieur nous a laissé pantois. Désormais les plateformes audiovisuelles ont envoyé leurs ambassades au cœur de ce qui demeure le refuge de la liberté de création. Certains propos nous ont tellement choqués que le cœur a chaviré et s’est brisé sans bruit sur l’épaisse moquette.

Et pourtant, le pari audacieux d’Alexander Neef de confier la mise en scène de cet opéra comique à Barrie Kosky fonctionne si bien et sort cette partition du placard du ringard. Le metteur en scène australien réussit si bien qu’il apporte une vision sans concessions digne du livret et de la partition. A l’égal de Thomas Jolly pour la fabuleuse cérémonie d’Ouverture des Jeux de Paris 2024, Barrie Kosky a décidé de montrer la diversité avec naturel et sans ambages. En abattant les murs que tant d’adorateurs de « l’ordre » ont dressés, le brillant metteur en scène et son équipe ont galvanisé la distribution et proposent une vision universelle et cosmopolite de notre propre reflet. Outre la beauté manifeste et désopilante de tous les tableaux, la nouvelle dramaturgie et les dialogues signés par Antonio Cuenca Ruiz apportent une fraîcheur vivifiante à ces Brigands.

La mise en scène de Barrie Kosky est conçue comme une fable qui nous confronte à notre côté « brigand ». Nous sommes toutes et tous des parias et des effrontés. Avec beaucoup de subtilité, malgré les apparences, ce spectacle rend un hommage appuyé à l’idiosyncrasie française, surtout à cette insolence proverbiale qui existe depuis l’épisode du vase de Soissons et se poursuit jusqu’à Bertrand Blier. On tend à l’oublier, assourdis par les aras médiatiques, la France n’est ni de droite ni de gauche, elle n’est pas simplement Marianne ou Jeanne d’Arc, elle est révolutionnaire dans toutes le fibres de sa quintessence. Les Brigands version Barrie Kosky sont une révolution et c’est sans doute pour cette raison qu’elle a suscité tellement de remous. Un miroir tendu est toujours une surprise, surtout quand on s’y rapproche.

Ici Falsacappa est une drag-queen qui apparaît dès l’ouverture dans le look enflammé de Divine / Babs Johnson dans le mythique Pink Flamingos de John Waters, maquillage et revolver à l’appui. Suivent des moments de haute voltige chorégraphique (Otto Pichler) et des costumes étincelants de Victoria Behr affublant la troupe de brigands de fripes 70’s à foison. L’arrivée des espagnols est iconique avec force Mater dolorosa et Christ en majesté. Sortis directement de la cour de Philippe IV et des tableaux de Velazquez, leur espagnol s’assimile davantage aux plus grands succès des radios de Marbella des années 2000. La cour de Mantoue fait référence directement au Neorealismo avec un clin d’œil à une scène légendaire du Roma de Fellini et son défilé de mode ecclésiastique. Chaque détail de cette mise en scène est pensé et fait appel à une large partie de la culture occidentale et ses avatars pop. Barrie Kosky a fait rentrer le Camp sur la scène de l’Académie nationale de Musique dont les dorures ne sont pas sans rappeler l’excès cher aux notes de Susan Sontag. N’en déplaise aux plus hiératiques amateurs d’opéra, l’art lyrique est le plus Camp de tous les arts. L’opéra est l’art du « more is less » et c’est ce qui le rend terriblement humain et fascinant.

Pour réussir un tel pari, l’Opéra de Paris a réuni une distribution fantastique. D’abord le Falsacappa de Marcel Beekman est extraordinaire ; c’est plus qu’un interprète, c’est un « perfomance artist ». A l’égal des drag-queens, il devient un personnage à part entière et nous emmène avec lui tout le long de son incarnation du brigand en chef qui s’inquiète de sa fille aux ambitions dangereusement bourgeoises. Marcel Beekman est le digne héritier de l’artiste total que fut Michel Sénéchal. Nous espérons l’entendre un jour en Ménélas dans la Belle Hélène ou d’autres rôles qui vont continuer à nous faire découvrir les différentes facettes de cet excellent artiste.

Et sa fille, l’intrépide Fiorella est idéalement incarnée par Marie Perbost. Avec une voix riche et d’une grande agilité, la soprano sait parfaitement naviguer dans le style offenbachien. En outre, elle nous montre toute sa palette histrionique à l’image d’une Giulietta Massina, elle peut être touchante et drôle, une leçon d’interprétation formidable. Vite qu’on la distribue dans un Donizetti! En passant de banquier à bandit, le passage n’est pas très difficile pour la formidable Antoinette Dennefeld. Nous l’avions entendue dans la recréation du Roi Carotte du même Offenbach à l’Opéra de Lyon, ici dans le rôle acrobatique de Fragoletto. Nous avons adoré son interprétation, à la fois touchante dans « Quand tu me fis l’insigne honneur » , puis débordante d’énergie sans faillir à la précision dans « Falsacappa voici ma prise » . Le duo du notaire avec Marie Perbost réinvente ce tube et le promet à un avenir éternel. Mathias Vidal montre que le style d’Offenbach n’a aucun secret pour lui dans le rôle du Prince de Mantoue. Il est à la fois maître du jeu sans tomber dans la caricature et musicalement il sait apporter aux dynamiques redoutables de la partition, une personnalité digne de plus grands interprètes. On espère le retrouver bientôt dans un Nemorino ou un Paolino du Matrimonio Segreto.

Un autre ténor incroyable est Philippe Talbot dans le rôle à poncif du Comte de Gloria-Cassis. Affublé de force fraise et perruque rousse du « Rey Planeta » , il débite l’air espagnol avec une très belle ligne vocale et des sauts dignes du cante jondo. Nous apprécions aussi un jeu à faire mourir de rire les spectateurs les plus ronchons. C’est un vrai plaisir d’entendre Yann Beuron dans le rôle du Baron de Campotasso. Nous avons toujours aimé la justesse vocale et histrionique dans ce répertoire. De même d’entendre et voir Laurent Naouri en Chef de Carabiniers. Leur duo de l’ambassade est iconique! Un autre duo de légende sont les déesses felliniennes Doris Lamprecht et Hélène Schneiderman qui chouchoutent le Prince de Mantoue.

Nous avons aussi remarqué la voix puissante et veloutée d’Adriana Bignagni Lesca dans le rôle « méninesque » de la Princesse de Grenade. Par ailleurs nous serions injustes de ne pas mentionner les artistes des Choeurs de l’Opéra national de Paris dont la diction, la justesse et la beauté dans les ensembles ont déroulé la partition avec soin. Saluons le travail remarquable de la cheffe des choeurs Cheng-Lien Wu.

Dans le rôle initial du caissier, la comédienne Sandrine Sarroche est une certaine ministre du budget de la principauté de Mantoue. Avec force veste Chanel pied-de-poule et brushing façon Oudéa-Castéra, Mme la ministre nous débite un soliloque d’actualité ciselé à l’arme blanche. Brillant monologue dont elle est l’autrice qui a choqué les uns et fait s’esclaffer les autres. Rompue au stand-up, Sandrine Sarroche réussit avec panache la tyrolienne vertigineuse du Caissier et nous rappelle que le plus grand voleur sévit peut-être sous les ors des allées du pouvoir.

Les musiciennes et musiciens de l’Orchestre de l’Opéra national de Paris, conduits par un Stefano Montanari enthousiasmant, se saisissent des milliers de croches d’Offenbach avec respect pour le style et une grande clarté dans les timbres et les dynamiques. Les attaques sont justes et précises, les pupitres excellent et la tension ne retombe jamais.

Après la grande fête de l’amnistie de Falsacappa et sa bande, serons-nous capables d’accepter aussi la différence ? Cette question soulevée, déjà par Thomas Jolly en juillet, a eu une réponse problématique. Allons-nous enfin réaliser que la véritable beauté est dans le contraste ? Le poing fermé de l’ordre sans objet détruit plus qu’il ne protège. Gageons que le message de ces Brigands va durer au-delà de la saison 24/25 et démontre l’importance essentielle du spectacle vivant dans nos temps troublés. A l’heure où le conformisme cherche à brider tous les élans, n’est-ce pas sur scène que naissent les révolutions ?

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CRITIQUE, opéra. PARIS, Palais Garnier, le 24 septembre 2024. OFFENBACH : Les Brigands. M. Beekman, M. Vidal, M. Perbost, L. Naouri, A. Dennefeld… Barrie Kosky / Stefano Montanari. Photos (c) Agathe Poupeney.

VIDÉO : extrait des « Brigands » selon Barrie Kosky au Palais Garnier

 
 

CRITIQUE, concert. MONTE-CARLO, Grimaldi Forum, le 22 sept 2024. Concert d’ouverture : 3ème Symphonie de Mahler. Gerhild Romberger, Chœur de femmes du CBSO Chorus, Chœur d’enfants de l’Académie Rainier III de Monaco, Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, Kazuki Yamada (direction).

Éloquence des silences, marqueterie des respirations, maîtrise inouïe des piani[ssimi], vibrations tenues, secrètes, ouvragées avec détail et naturel… le chef directeur musical du Philharmonique de Monte Carlo, Yakuzi Yamada assume un style impressionnant disposant de musiciens réactifs et unis pour une sonorité d’une souplesse expressive totalement bluffante. Ce concert d’ouverture annonce le meilleur pour cette nouvelle saison 2024 – 2025 de l’OPMC / Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo.

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Photo grand format ci-dessus © Jean-Louis Neveu

 

 

Sur scène plus de 100 musiciens et dans l’espace de la salle du Grimaldi Forum, un chant subtil et suspendu mais aussi subtilement contrasté qui peu à peu organise le bouillonnement du volcan orchestral dont la texture s’allège progressivement, s’ouvrant vers les cimes célestes… Déflagration tectoniennes et promesses d’une aube salvatrice éclatante, le cheminement proposé aux auditeurs compose une expérience musicale, surtout spirituelle d’une somptueuse et captivante intensité.
C’est évidemment le sens de l’épisode spatialisée [cor au lointain] qui dans le vaste 3ème mouvement, exprime la présence et la promesse d’un monde rêvé, qu’il est permis de penser ainsi [presque] accessible (nostalgie d’éternité, conscience d’une harmonie encore inatteignable…).
L’ivresse spirituelle nous saisit car cet après midi, la distribution est sans défaut : les 2 chœurs, de femmes, d’enfants, la soliste [phénoménale de justesse et de sobriété], l’Orchestre aussi souple qu’impliqué… Mahler ne pouvait compter troupe plus solidaire, inspirée, juste. Avec cette 3ème de Mahler, l’OPMC ouvre en noblesse et profondeur sa nouvelle saison 2024-2025 ; une récidive en réalité puisque la 2ème  » Résurrection  » du même Mahler, avait inauguré dans le même lieu, la saison précédente 2023 – 2024. Au grand événement, les grands rituels…

 

 

Mystérieux, fulgurant : le Mahler transcendant de l’OPMC
Orchestre Philharmonique de Monte Carlo,
Kazuki Yamada, monsieur pianissimi

 

Et ce concert ne déroge pas au principe, délivrant l’expérience mystique qu’a tissé un Mahler d’une sincérité bouleversante. Ainsi le Grimaldi Forum s’est fait cathédrale musicale plus impressionnante encore que toutes celles connues [y compris celle de Cologne qu’a célébré Robert Schumann dans sa propre 3ème].

Dans la vision de KAZUKI YAMADA, directeur musical de l’OPMC (depuis 2016), Mahler s’affirme à nous ; tel un intercesseur, un visionnaire qui prophétise déjà la fin de l’humanité, révélant une nouvelle conscience, établissant une passerelle entre la terre et le ciel, n’omettant pas le souffle rédempteur de la sainte Nature, marche essentielle dans cette construction spirituelle si personnelle, et qui appelle un autre monde. La 3ème comme la 4ème qui suit et qui exprime tout autant le rêve de « La Vie Céleste » [si l’on se réfère au texte chanté] est comme cette dernière composée en connexion avec le milieu naturel et champêtre, en 1895 et 1896.

C’est le propre des symphonistes de génie et des auteurs lyriques aussi puissants que profonds : dévoiler dans ce cortex musical, l’idée d’une humanité meilleure ; dans la lignée du Wagner de Parsifal, de Bruckner, de l’unique symphonie de Franck également, Mahler s’inscrit parmi les créateurs les plus inspirés qui transmettent un témoignage bouleversant, tout en exprimant une conscience spirituelle à laquelle il reste difficile de demeurer insensible.
La soliste Gerhild Romberger, wagnérienne et malhérienne accomplie, déploie un mezzo somptueux, au timbre sombre et cuivré sans tension ni force, naturellement puissant [d’où son Erda aussi captivante dans l’actuel Ring, sur instruments d’époque, défendu par l’excellent Kent Nagano, cycle en cours dont classiquenews a déjà rendu compte depuis la Philharmonie de Cologne / L’Or du Rhin, Philharmonie de Cologne – août 2023]. La subtilité de la diseuse souligne combien le choix du texte (Nietzschéen) est crucial, convoquant dans la forge orchestral, l’intimité du lied, cadre si essentiel dans le laboratoire mahlérien.

Autant s’affirme la totale réussite du dernier mouvement déployant une soie des cordes en lévitation, autant avant le chant de la mezzo puis des chœurs, l’Orchestre a su composer comme un paysage spectaculaire, les vertiges saisissants produits par le rictus grimaçant  des cuivres et des bois, l’infinie tendresse d’un autre monde rêvé, l’appel rayonnant des cuivres, autant d’accents contrastés d’un 3ème mouvement foudroyant [noté  » Comodo. Scherzando. Ohne Hast « ] . Sa pleine réussite découle de l’architecture du geste ; Kazuki Yamada convainc immédiatement par la ciselure des nuances ; des piani et pianissimi désormais miraculeux de plénitude introspective, des respirations subtilement suggérées car la vision du chef sait être incisive et mordante autant qu’éperdue et mystérieusement allusive. Des nuances murmurées d’autant plus ineffables que les tutti sont d’une fureur cataclysmique.

Dans ces vertiges sonores, le temps musical se dilate et édifie dans la durée de la performance, ce cheminement spirituel où l’Orchestre chante et nous parle ; où les voix enchantent et transportent [on soulignera tout autant la candeur bouleversante du chœur d’enfants [chœur d’enfants de l’Académie Rainier III de Monaco] excellemment préparé par son directeur, Bruno Habert (la précision énergisée du célèbre  « Bimm, bamm, bimm, bamm…  »). Même entrain détaillé pour le Chœur de femmes du CBSO Chorus. Kazuki Yamada agrège instruments, soliste et chœurs avec une justesse continue.
La qualité du son de l’Orchestre, la grande finesse du chef réalisent ainsi un concert exceptionnel qui augure le meilleur pour les prochains concerts de la nouvelle saison 2024-2025.

 

Gerhild Romberger, Kazuki Yamada, les musiciens de l’OPMC © JL Neveu

 

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Le PROCHAIN CONCERT de l’OPMC sera lyrique, révélant la force dramatique d’un opéra que Saint-Saëns a créé à Monaco, en février 1906, L’Ancêtre… Un joyau incontournable à découvrir lors de votre prochain séjour sur le rocher monégasque : le 6 octobre 2024 / LIRE notre présentation de l’Opéra de Saint-Saëns (version de concert), avec Jennifer Holloway, Gaëlle Arquez… sous la direction de Kazuki Yamada (l’ouvrage sera l’objet d’un prochain enregistrement discographique) :
https://www.classiquenews.com/orchestre-philharmonique-de-monte-carlo-dim-6-oct-2024-saint-saens-lancetre-version-de-concert-jennifer-holloway-kazuki-yamada-direction/

 

diffusion

Concert Symphonie n°3 de Mahler au Grimaldi Forum, MONACO, diffusé sur Radio Classique le samedi 19 octobre à 20 heures.

 

 

 

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CRITIQUE, concert. AVIGNON, La FabricA, le 20 sept 2024. Concert d’ouverture : Garuta, Dvorak, Schumann. Victor Julien-Laferrière (violoncelle), Orchestre National Avignon Provence / ONAP. Débora Waldman, direction.

Somptueux concert d’ouverture de l’Orchestre National Avignon Provence [ONAP] qui récidive ainsi son premier concert de la saison à La FabricA, lieu emblématique du Festival d’Avignon, bel exemple de coopération entre partenaires culturels ; dans un geste d’ouverture, de décloisonnement, d’accessibilité totale du concert classique, le programme est organisé en impliquant les jeunes des quartiers alentour (Montclar), préalablement préparés au hip hop ; ils sont intégrés au concert lui même encadré par les danseurs hip hop des Pockemon Crew tandis qu’à l’issue d’un concours, 6 spectateurs de tout âge, ont gagné leur place dans l’orchestre, au milieu des pupitres. Voilà qui donne le ton d’une nouvelle saison 24 – 25 résolument ouverte, prête à réformer l’expérience du concert, à renouveler tous les codes du concert classique. Exemplaire conception.

 

 

À la puissance généreuse de l’Orchestre répond le chant immédiatement intérieur et inspiré du soliste Victor Julien-Laferrière [qui l’a joué au moins 30 fois déjà et depuis l’adolescence]. Dès le premier mouvement de son Concerto pour violoncelle, Dvorak affiche souffle et sensibilité pastorale d’une éloquente et profonde subtilité, ce que la direction vive, très affûtée et d’une inflexible tension continue de Débora Waldman sait cultiver, nourrir, admirablement gérer…
L’articulation, le jeu des nuances, la finesse des accents, le souci du détail, le raffinement des couleurs, ce jeu des timbres permanents qui fait dialoguer le violoncelle solo avec flûte, hautbois, clarinette, et même le premier violon (3ème mouvement), réalisent une partition flamboyante, qui en fait une symphonie avec violoncelle plutôt qu’un concerto basique, opposant en blocs compacts, chant du soliste et tutti orchestraux. La sensibilité de Dvorak fait voler en éclat telle confrontation en insérant constamment un jeu de dialogue entre instruments et soliste. Victor Julien-Laferrière déploie un jeu solide, tout en nuances, très investi, au pathos jamais excessif qui rayonne idéalement dans le second mouvement où en fusion émotionnel avec la cheffe, des joyaux d’opulence pudique, une plénitude d’une tendresse infinie qui répète et commente chaque thème, réalise la séquence la plus réussie de cette première partie de concert.

Composée en déc 1850 puis créée sous la baguette de l’auteur en février1851, la fabuleuse symphonie « Rhénane »   numérotée 3, est en réalité la 2ème dans l’ordre chronologie de conception. D’emblée un son puissant, épanoui et direct s’impose à l’auditeur sans jamais faillir, et sous la maîtrise de la cheffe comme galvanisée par la réussite de la première partie, les instrumentistes gardent l’allant d’un galop enfiévré, du début à la fin, de mouvement en mouvement, même si le public conquis, applaudit d’enthousiasme à l’issue de chacun. Le souffle de la nature, l’élan irrépressible d’un Schumann si amoureux [et admiratif] des bords du Rhin, jubilent sous la baguette à la fois impétueuse et détaillée de Débora Waldman.
La cohésion organique, le sentiment d’une urgence et même d’une ivresse comme exaspérée marquent ce flamboyant Vivace d’ouverture que la tonalité de mi bémol, conquérante, exaltée, exacerbe encore. D’emblée la grande cohérence et l’intensité du son global atteste de la réactivité des musiciens de l’Onap. Le Scherzo qui suit rayonne de la même précision bondissante dans le total respect de son caractère, à la fois naïf et populaire. La sobriété du court Andante convainc tout autant [respirations profondes et introspectives], avant que ne se déploie l’ampleur majestueuse du dernier mouvement [Maestoso], porté par le spectacle grandiose de la Cathédrale de Cologne joyau français sur les bords du Rhin… La pertinente maestra exprime sous l’énergie renouvelée,  l’esprit de verve heureuse et la clarté de l’architecture contrapuntique [qui cite directement Bach]… Le souffle, les nuances… que demander de plus ?

En préambule à ce concert d’ouverture très réussi, Débora Waldman a joué « Teika » de la compositrice post-romantique lettone Lucija Garuta, somptueuse mélodie sans paroles de 1926. Une offrande complémentaire à son travail dédié au matrimoine musical. D’ailleurs, la cheffe vient d’enregistrer les mélodies de Charlotte Sohy, compositrice passionnante elle aussi dont on se souvient de l’enregistrement des Symphonies avec le National de France… Ce soir comme unis en un souffle homogène, cheffe et orchestre ont capté et exprimé la splendide énergie schumanienne, dans sa profondeur intérieure, son impérieuse urgence, son scintillement instrumental.

 

L’Orchestre National Avignon Provence, Victor Julien-Laferrière, Débora Waldman © classiquenews 2024

 

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PROCHAIN CONCERT de l’ONAP sous la direction de Débora Waldman : les 22 et 23 novembre 2024. DESTIN / MOZART, TCHAÏKOVSKY… Débora Waldman comme un fil rouge tout le long de la nouvelle saison 24 – 25, joue une autre œuvre de Lucija Garuta (Meditàcija / Méditation) composée en 1934 ; puis le sublime concerto n°23 de Mozart (soliste : Shani Diluka, piano) ; enfin la 5è symphonie de Tchaïkovsky (1888), symphonie du destin… PLUS D’INFOS : https://www.orchestre-avignon.com/concerts/destin/

 

 

 

LIRE aussi notre présentation de la SAISON 2024 – 2025 de l’ONAP – Orchestre National Avignon Provence : https://www.classiquenews.com/orchestre-national-avignon-provence-onap-saison-2024-2025-debora-waldman-direction/

ORCHESTRE NATIONAL AVIGNON PROVENCE / ONAP, saison 2024 – 2025 (Débora Waldman, direction).

 

LIRE aussi notre PRÉSENTATION du concert d’ouverture («  Voyages « ) de l’ONAP Orchestre National Avignon Provence, dirigé par Débora Waldman, le 20 sept 2024 : https://www.classiquenews.com/orchestre-national-avignon-provence-concert-douverture-ven-20-sept-2024-voyages-dvorak-concerto-pour-violoncelle-r-schumann-symphonie-n3-rhenane-victor-julien-laferriere-de/

 

ORCHESTRE NATIONAL AVIGNON PROVENCE. Concert d’ouverture, ven 20 sept 2024. VOYAGES : Dvorak (Concerto pour violoncelle), R. Schumann (Symphonie n°3 Rhénane). Victor Julien-Laferrière, Débora Waldman

 

REDÉCOUVERTE MAJEURE. Le SAMSON de Joachim Raff ou l’opéra maudit et sa rédemption (1 /2). L’éditeur suisse Schweizer Fonogramm ressuscite un joyau lyrique du romantisme helvétique

La productrice (et aussi cheffe d’orchestre) Graziella Contratto dévoile les coulisses de l’enregistrement en première mondiale, réalisé par la société de production et d’édition SCHWEIZER FONOGRAMM qu’elle a fondé avec Frédéric Angleraux (directeur artistique du projet). Même en Suisse, tout n’est pas rose pour une aventure comme celle de l’enregistrement d’un opéra oublié, jamais créé du vivant de son auteur. Qui plus est, réunir 120 musiciens sur un même plateau réserve surprises et imprévus, autant de défis à surmonter que la haute qualité de la partition en question, au moment des premières sessions d’enregistrement, efface comme par magie : le SAMSON de Joachim Raff serait-il tout bonnement le chef d’œuvre oublié du romantisme suisse ? Avant les délices de la révélation, épreuves et mauvaises surprises, mais aussi conjonctions providentielles et heureux dénouement… les séances d’enregistrement se sont tenues avant la création publique sur la scène du Théâtre de BERN, le 8 septembre 2023. Ainsi était révélé un joyau lyrique suisse, contemporain des opéras de Wagner, Lohengrin et Tristan und Isolde. Récit d’une genèse chaotique semée d’embûches à répétition.
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Dans les coulisses d’un enregistrement
en première mondiale 1 / 2

 

 

UN OPÉRA MAUDIT ?

GRAZIELLA CONTRATTO : Quand on regarde le destin de l’opéra SAMSON dans la perspective historique de sa composition, il s’agit véritablement d’un narratif incroyable voire tragique : Joachim Raff n’a jamais pu écouter son œuvre de son vivant – pendant les répétitions de la création prévue pour Darmstadt, aucune chanteuse ne semble avoir eu les compétences nécessaires pour chanter le rôle de Delilah (Dalilah), la première n’a pas vu le jour… Ensuite, Franz Liszt (ami et doyen du jeune Raff) qui dirigeait l’Opéra de Weimar à l’époque, a du quitter son poste et SAMSON fut déprogrammé. Quand le premier Tristan de l’histoire, Ludwig Schnorr von Carolsfeld, s’est enthousiasmé pour le rôle principal de SAMSON, sa mort soudaine à seulement 29 ans, en 1865, a anéanti cette dernière opportunité. Raff, découragé, s’est concentré alors, et avec succès, sur le répertoire symphonique et les opéras-comédies…

Quant au processus de notre enregistrement de SAMSON, nous avons aussi une collection d’anecdotes à offrir… au point de penser que la partition comme à son époque, était maudite et qu’il fallait rompre le cercle vicieux par tous les moyens.
Tout d’abord, un autre orchestre avec son chef principal s’étaient intéressés à faire ce disque avec notre label Schweizer Fonogramm. Après une année de préparation (casting complet des rôles solistes, chœur, salle, concerts….), l’orchestre s’est désisté pour des raisons probablement financières et il a fallu très vite trouver une solution ; afin de pouvoir garder une grande partie des solistes soigneusement sélectionnés, je me suis précipitée pour rechercher un orchestre disponible à la même période – et j’ai réussi, coup de chance incroyable, à convaincre Florian Scholz, directeur de Bühnen Bern, pour qu’il coopère avec nous à ce projet de folie ; ce dernier comprenait la participation de 120 artistes, la location d’une salle pour deux semaines et un concert public après les sessions d’enregistrement de studio (pratique rarissime puisque la plupart des enregistrements d’opéra sont des captations ‘live’ avec séances de correction….). Portrait de Joachim RAFF (DR)

 

LA PARTICIPATION INOPINÉE de l’ORCHESTRE et du CHŒUR BÜHNEN BERN

Heureusement, l’agenda de l’orchestre (et du chœur) de Bühnen Bern – était libre pour notre projet et nous avons pu garder une partie importante de la distribution déjà engagée comme solistes. Philippe Bach, expert du répertoire lyrique du 19e et un très bon ami qui avait déjà enregistré un disque avec notre directeur artistique, Frédéric Angleraux, a accepté de diriger SAMSON – donc, tout semblait se développer à merveille !
Mais il fallait encore trouver une salle. Le Stadttheater Bern a été rénové il y a quelques années et nous avons décidé d’installer toute la production sur le plateau de l’opéra bernois. Or, la fosse a été couverte pour optimiser l’espace des solistes, du chœur et de l’orchestre sur scène.

 

 

En plus, il nous fallait une coque acoustique couvrant le plafond et trois côtés du plateau. La coque n’était transportable qu’avec trois camions extra-longs d’une société spécialisée et l’installation s’est faite avec l’aide de 20 techniciens en deux jours…
Puis, nouvelle sonnette d’alarme : le rideau anti-feu avec son poids de plusieurs tonnes aurait dû être rabaissé tous les soirs pour des mesures d’anti-incendie dans ce bâtiment historique ; le Théâtre comprend de magnifiques décorations en bois doré….. Problème : les câbles des microphones placés parmi les cordes, devant le rideau, auraient pu être cassés par le poids du rideau. Il a fallu donc organiser une réunion avec le responsable de sécurité de l’assurance officielle du théâtre, le chef technique, Frédéric et moi-même pour trouver une solution. Heureusement, le responsable de la sécurité a bien voulu accepter que le rideau s’arrête à quelques centimètres du sol, préservant ainsi les câbles et évitant de débrancher tous les soirs les microphones à lampe utilisés par Frédéric. C’est toujours délicat l’électronique…
La mise en place du matériel pour le plateau principal et – côté jardin – d’une fanfare de scène était un défi particulier pour le directeur artistique puisque la coque et la réponse de l’espace du théâtre côté public, n’avaient jamais été expérimentées lors d’un enregistrement studio.
Comme d’habitude, Frédéric a assumé au moins quatre rôles différents : conception et installation du matériel (54 micros en tout et la plupart ont été utilisés au mixage), direction artistique et gestion de l’enregistrement au niveau qualité, temps, ambiance, contact social sans parler des mois d’éditing et de co-création sonore du triple CD.

 

Frédéric Angleraux, directeur artistique pendant l’enregistrement © Schweizer Fonogramm

 

 

TROUVER UN NOUVEL ABIMELECH…

Petit complément : deux jours avant le début de l’enregistrement, l’interprète prévu pour le rôle important d’Abimelech s’est désisté pour raisons de santé ; il nous fallait choisir un autre excellent chanteur, qui devait être un déchiffreur de premier plan… Une fois de plus, nous avons eu une chance énorme : Robin Adams qui effectivement a une capacité de prima vista fantastique, a accepté au pied levé d’intégrer l’aventure ; entre son rôle de Saint François d’Assise (pour le Grand Théâtre de Genève) et sa participation au Grand Macabre à Paris, il lui restait exactement le temps pour enregistrer ce rôle avec nous.

Au moment de la première séance d’enregistrement, tout le monde – orchestre, chanteurs, technique, management, production – a senti que tous ces mois de préparation et de fragilité en valaient vraiment la peine. Cet opéra nous gâtait avec son énergie, ses mélodies, son orchestration et sa dramaturgie fascinantes dès les premières mesures. Immédiatement, l’engagement total de tous les participants face aux microphones était palpable et nous a comblés. Personnellement, je pense que l’enregistrement témoigne de cette sensation et la fait vivre aux auditeurs. SAMSON a été sauvé, à plusieurs niveaux…. (Photo : Robin Adams dans le rôle protagoniste d’Abimelech, le père de Delilah / DR)

 

Graziella Contratto, Productrice Schweizer Fonogramm

 

 

PHOTOS : images de la coque, de la régie, du plateau et de Robin Adams.
© Schweizer Fonogramm

 

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CD événement, annonce. Joachim RAFF : Samson (1865), première mondiale (3 cd Schweizer Fonogramm éditions). Magnus Vigilius, Samson / Olena Tokar, Delilah… / Berner Symphonieorchester, Philippe Bach (direction). 3 cd SCHWEIZER FONOGRAMM éditions

 

 

 

 

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Prochain feuilleton : Résurrection du SAMSON de Joachim RAFF – l’édition, l’artistique, les solistes et la conception musicale… (2 / 2)

 

 

 

présentation

LIRE aussi notre annonce présentation du cd SAMSON de Joachim RAFF, une perle lyrique du romantisme suisse oublié, mieux que le « Lohengrin » de Wagner ? ( 3 cd Schweizer Fonogramm éditions): https://www.classiquenews.com/cd-evenement-annonce-joachim-raff-samson-1865-premiere-mondiale-3-cd-schweizer-fonogramm-editions-magnus-vigilius-samson-olena-tokar-delilah-berner-symphonieorchester-philippe-bach-di/

CD événement, annonce. Joachim RAFF : Samson (1865), première mondiale (3 cd Schweizer Fonogramm éditions). Magnus Vigilius, Samson / Olena Tokar, Delilah… / Berner Symphonieorchester, Philippe Bach (direction)

29ème festival TOULOUSE LES ORGUES : du 2 au 13 octobre 2024. Chœur Archipels, Éliane Radigue, Emmanuel Arakélian, Paul Goussot et La Fontaine, Battle à Saint-Sernin, Yves Rechsteiner…

Cette année, Toulouse les Orgues  (TLO) joue la carte de la diversité, de la richesse, et de l’éclectisme proposant un très large spectre musical, du baroque à la musique drone, en passant par le classique et le jazz. C’est aussi une opportunité exceptionnelle de (re)découvrir le très riche patrimoine sacré de la ville rose et ses orgues historiques d’une variété inégalée en Europe : basilique Saint-Sernin, église du Gesu, Notre-dame de la Dalbade, Notre-dame de la Daurade, ancienne abbatiale de Saint-Savin, Temple du Salin, Cathédrale Saint-Étienne, église Saint-Nicolas, église Saint-Pierre des Chartreux, église Saint-Exupère, Chapelle Sainte-Anne…

La transmission et les passerelles intergénérationnelles soulignent encore davantage l’ouverture de la scène artistique cette année : ainsi la présence des organistes de renommée internationale (en plus du Jury du Concours, qui pour la plupart jouent au Festival) et une mise en avant de la nouvelle génération avec les organistes étudiant(e)s, issues de nombreux conservatoires européens.

 

Aux festivaliers, une large gamme d’offres et d’événements est à disposition : concerts gratuits, une conférence, un atelier, un orgue en libre-accès, un spectacle jeune public, des séances de yoga spécifique (« yorga »)…

 

 

 

5 temps forts et concerts incontournables
de cette 29ème édition 2024
:

 

Les grands romantiques allemands
Orgue et ensemble vocal féminin
Jeudi 3 octobre 2024 à 20h
Basilique Notre-Dame de la Daurade

Rencontre entre le Chœur féminin et toulousain Archipels -qui fait partie du chœur Les Éléments, et Martin Schmeding (titulaire de l’orgue de l’église St Louis de Fribourg), accompagné par Angela Ede à l’orgue de chœur, nouvelle étudiante au conservatoire d’orgue de Toulouse. Musique vocale et pour orgue de Mendelssohn et Brahms

 

 

 

 

Nuit du Gesu • OCCAM XXV
Jeudi 3 Octobre 2024, 22h30
Église du Gesu

Hommage à une pionnière de la musique drone des années 60, Éliane Radigue (née en 1932). Frédéric Blondy y jouera la retranscription d’OCCAM XXV à l’orgue (performance à la Philharmonie de Paris : https://www.youtube.com/watch?v=4jdHIHzvhkQ). C’est également le concert ouverture du festival riverrun, du GMEA d’Albi : https://www.gmea.net/activites/article/riverrun

 

 

 

« Récit • Viole et orgue »
samedi 5 octobre 2024, 17h
Église Saint-Pierre des Chartreux

Concert du duo ayant déjà produit un CD du même nom : Emmanuel Arakélian, cotitulaire du Grand-Orgue de la Basilique du Couvent Royal de Saint-Maximin la Sainte-Baume) et la violiste Salomé Gasselin (Victoire de la musique classique 2024).

Récit est un dialogue musical entre l’orgue et la viole, où les pièces de l’un sont reprises ou transcrites par l’autre, avec la voix comme modèle commun pour émouvoir et faire vibrer le public.

 

 

Fables en Musique / La Fontaine improvisé
9 octobre 2024, 20h
Église Saint-Pierre des Chartreux
Les Fables enchantées et morales de Jean de la Fontaine, dites par Pierre-Alain Clerc avec l’organiste Paul Goussot, jeune improvisateur parmi les plus captivants de la jeune génération française de l’orgue, face aux tableaux du XVIIè, exposés dans la nef des moines …

 

 

 

La Nuit des Duels
Battle autour d’une Toccata
samedi 12 octobre 2024 à 21h
Basilique Saint-Sernin

BATTLE A SAINT-SERNIN… Toulouse les Orgues renomme et redynamise sa « Nuit de l’Orgue », coup de projecteur sur deux organistes célèbres (Vincent Thévenaz et Yves Rechsteiner) et trois autres organistes (Virgile MoninGiulio TostiLoriane Llorca). Chacun redonne vie à BACH, à leur façon : geste baroque, symphonique, disco, pop ou minimaliste minimaliste selon sa sensibilité…

Cinq organistes livrent une Battle musicale sur l’orgue de la Basilique St-Sernin. Chacun[e] propose sa version de la fameuse Toccata de Bach, en mode baroque, symphonique, minimaliste ou pop avant de présenter une variété de compositeurs, allant de Bach, Telemann jusqu’à ABBA ou les Bee Gees….
Éclectisme des formes, variété des œuvres et des programmes… Audace et risques assumés, Toulouse les orgues se renouvelle avec éclat.

 

 

 

 

 

TOUTES LES INFOS, le détail des programmes, les artistes invités, toutes les activités destinées aux festivaliers, la billetterie… sur le site du FESTIVAL TOULOUSE LES ORGUES 2024 : https://toulouse-les-orgues.org/

 

 

entretien

LIRE aussi notre entretien avec YVES RECHSTEINER, directeur artistique du Festival Toulouse les Orgues, à propos de la 29è édition 2024 : https://www.classiquenews.com/toulouse-les-orgues-entretien-avec-yves-rechsteiner-directeur-artistique-a-propos-de-ledition-2024/

 

TOULOUSE LES ORGUES – ENTRETIEN avec YVES RECHSTEINER, directeur artistique, à propos de la 29ème édition 2024 (2 > 13 octobre 2024)

 

CRITIQUE, théâtre musical. PARIS, Théâtre du Châtelet, le 22 septembre 2024 : « Krush ». Trio de Percussions SR9 / Shani Diluka (direction) / Olivier Fredj (mise en scène).

C’est avec « KRUSH » que le metteur en scène Olivier Fredj a achevé, au Théâtre du Châtelet, les 19 et 22 septembre derniers, un triptyque inauguré par « WATCH » (le Temps) en 2022, poursuivi par « FLOUZ » (l’Argent) en 2023. Il explique que lorsque l’opportunité lui a été offerte par l’Orchestre de Chambre de Paris de travailler en milieu carcéral, il lui est venu l’idée de concevoir des œuvres en faisant appel à des publics amateurs.

 

 

C’est très exactement « Krush », le sous-titre  «Carnet de correspondances» ayant toute son importance, car il donne la clef du processus créatif : le spectacle se présente comme un croisement de textes – authentiques – d’enfants, de personnes en situation de précarité sociale ou mentale, de détenus ou d’anciens détenus. Il y a donc les  « enfermés », souvent aussi les « oubliés »,  ceux de la prison, de l’hôpital, mais aussi qui sont atteints par la précarité sociale ;  il y a aussi le regard – et la parole – des enfants et des anciens, la nostalgie de leurs souvenirs, la solitude, la douleur des uns et des autres. Toutes ces voix incarnent une polyphonie portée par des amateurs et quelques comédiens qui nous font passer du rire aux larmes.

Le dessein de donner la parole à ceux qui ne l’ont pas, ou peu, est atteint : ces paroles, parfois chantées, sont délivrées en plusieurs tableaux successifs…  « Couple », « Parents », « Aimer » etc. Elles nous font parcourir un voyage émotionnel (le récit de l’accident ou le message à la mère atteinte de la maladie d’Alzheimer…) porté par la musique de  JS Bach et CPE BachD’exceptionnels solistes assurent la partie musicale du spectacle : la pianiste Shani Diluka – également directrice musicale de l’ensemble instrumental – et le Trio de percussions SR9 (composé de Paul Changarnier, Nicolas Cousin et Alexandre Esperet). Et, bien sûr, Matias Aguayo pour la musique électronique. Présents et actifs sur scène, du début jusqu’à la fin du spectacle, les musiciens animent un continuo musical qui accompagne textes et tableaux animés.

La musique est le contrepoint  indissociable de « Krush » et porte les paroles qui n’ont de cesse d’aspirer à un monde meilleur. Toutefois, elle court le risque de n’être parfois qu’un fond illustratif. Elle mérite mieux qu’un fond sonore, certes de qualité, mais qui n’en reste pas moins marginal. Mais n’est-ce pas le format et la conception même de l’œuvre qui impliquent cette marginalité parfois subie par la musique, telle une musique de scène ? Toutefois, on aura pu regretter qu’elle ne soit pas plus identifiée : titre de l’œuvre en fond musical… alors que les textes interprétés, chantés, racontés, joués… le sont.

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CRITIQUE, théâtre musical. PARIS, Théâtre du Châtelet, le 22 septembre 2024 : « Krush ». Trio de Percussions SR9 / Shani Diluka (direction) / Olivier Fredj (mise en scène).

 

 

DÉCOUVERTE. Un trio pour cordes inédit exhumé à Leipzig et attribué au jeune Mozart.

La nouvelle édition du catalogue KÖCHEL publie une courte pièce attribuée à Wolfgang Amadeus Mozart, probablement composée par le jeune Wolfgang, récente découverte par les bibliothèques de Leipzig (cité musicale de première importance en Europe, où la présence de Mendelssohn, Wagner, surtout JS BACH est particulièrement célébrée).

 

 

La partition de Leipzig comprend les 7 mouvements d’un trio à cordes d’une durée totale d’environ 12 minutes, écrite entre 1765 et 1770, par un Mozart âgé d’une dizaine d’années.
Le document découvert est une copie ou une transcription réalisée vers1780. Non signé, utilisant de l’encre brune et du papier à la cuve blanc, le document d’époque, n’est donc pas de la main de Mozart. Elle témoignerait du style d’avant la premier voyage en Italie.

Dénommée « Ganz kleine Nachtmusik » (« Toute petite musique de nuit »), en complément à la plus tardive et plus connue « Ein Klein nachtmusik » de Mozart, la partition est désormais numérotée KV 648.

L’œuvre vient d’être jouée / recréée jeudi dernier 19 septembre en public par un trio à cordes à Salzbourg, ville natale de Mozart puis reprise samedi 21 à l’opéra de Leipzig par un trio composé de Vincent Geer (violon), David Geer (violon) et Elisabeth Zimmermann (violoncelle) de l’école de musique Johann Sebastian Bach. Cette découverte comble les musicologues, à la fête aussi par la récente découverte d’une Sonate de Vivaldi, exhumée, jouée, enregistrée par l’ensemble espagnol SCARAMUCCIA, au printemps 2024.

Pour Ulrich Leisinger, directeur scientifique de la Fondation Mozarteum de Salzburg, la partition enrichit notre connaissance du jeune Wolfgang, alors connu principalement comme compositeur de musique pour piano, d’arias et de symphonies. Ses œuvres de musique de chambre attestées dès la prime jeunesse par son père Leopold, étaient demeurées perdues. Selon les dernières pistes de recherche, le K648 pourrait être l’œuvre du très précoce Wolfgang, reprenant / s’inspirant d’un modèle légué par sa sœur aînée Nannerl, qui souhaitait ainsi dans une copie de sa main, garder la trace de l’inspiration lumineuse de son jeune frère…

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DÉCOUVERTE. Un trio pour cordes inédit exhumé à Leipzig et attribué au jeune Mozart.

CRITIQUE, festival. Festival de Royaumont, Abbaye de Royaumont, les 14 & 15 septembre 2024. Alain Planés, Stéphane Degout, Philippe Herreweghe, Orchestre des Champs-Elysées, Vincent Dumestre, Le Poème Harmonique…

C’est rien moins que son 60ème anniversaire que le Festival de Royaumont fête en ce moment (depuis le 7 septembre et jusqu’au 6 octobre 2024). Le week-end musical des 14 & 15 septembre, sis dans la somptueuse Abbaye Royale de Royaumont commence avec un concert-promenade dans les magnifiques espaces du lieu. Très pertinemment intitulé « Airs de cour aux marches du palais », le concert est le fruit d’une formation musicale avec le chef d’orchestre Vincent Dumestre, pour qui l’abbaye est une deuxième maison.

 

 

La déambulation en musique commence dans les vestiges de l’église abbatiale, avec la soprano Jeanne Bernier accompagnée d’un quatuor de violes de gambes. Elle interprète des airs de cour du 17e siècle avec beaucoup d’émotion et d’expressivité, « mélismatique « à souhait. L’intermède purement instrumental par Juliette Guichard, Maylis Moreau, Mireia Penalver et Lukas Schneider aux violes est un agrément sympathique et rythmique. Nous avons ensuite le formidable privilège de nous aventurer aux marches du palais abbatial adjacent, logis élégant d’inspiration italienne du dernier abbé de Royaumont, signé Louis Le Masson et achevé en 1789, mais qui n’appartient pas à la Fondation Royaumont. Ici, place au luth de Yuli Bayeul et un merveilleux trio de chanteurs composé de l’alto Ariane Le Fournis, le baryton Imanol Iraola et le jeune ténor Cyrille Escoffier, remplaçant au pied levé son collègue programmé, mais annoncé souffrant. Un moment fort de théâtre musical a lieu dans les marches du palais au moment de l’air en espagnol pour trois voix d’Étienne Moulinié « Ojos », excellemment chanté et interprété par tous les artistes. Le plaisir qu’ils ont à jouer ensemble est évident ; ils incarnent parfaitement l’harmonie heureuse et chaleureuse, voire humoristique de l’air qu’ils campent avec panache et brio. Le style vocal est impeccable et fort remarquable du début à la fin. L’interprétation de l’alto Ariane Le Fournis est une révélation, tout simplement. La manifestation se termine à l’intérieur de l’abbaye, dans le très beau réfectoire des convers, où Matthieu Franchin au clavecin rejoigne les autres, pour une fin en toute beauté, vivace et dynamique à souhait : l’air À la fin de cette bergère d’Antoine Boësset. Mention très spéciale du Ballet des fées purement instrumental du même compositeur, glorieusement interprété par tous les instrumentistes.

Les fêtes baroques continuent et se terminent la nuit dans le merveilleux réfectoire des moines avec un concert-pastiche inédit par le chœur et l’orchestre du Poème Harmonique dirigé par son chef Vincent Dumestre, avec un superbe quintette de chanteurs solistes composé de la soprano Ana Quintans, la mezzo Isabelle Druet, le décoiffant haute-contre David Tricou, le ténor Serge Goubioud ainsi que le baryton Viktor Snapovalov. Intitulé « Les noces royales de Louis XIV », le programme s’inspire de la célèbre année nuptiale de Louis XIV et de l’infante Marie-Thérèse, fille du roi d’Espagne. Une réussite fantastique dès l’étonnante entrée des trompettes qui ouvre le concert, jusqu’au ballet des nations et réjouissances après les entrées et le mariage ! Les compositions de Lully et Cavalli sont à l’honneur, mais accompagnées de découvertes musicales tout à fait impressionnantes, telles que « L’Hymne O filii e filiae » de Jean Veillot, le sorte de mélodrame avant son temps d’André de Rosiers « Après une si longue guerre », délicieusement joué par le ténor et le baryton accompagnés des vents, et le morceau de résistance qui clôt le concert : « Dos zagalas venian » de Juan Hidalgo. Nous avons l’honneur d’avoir deux bis à la fin du concert, un très beau « Agnus dei » de Charpentier, et l’incroyable « La chacona » de Juan Arañes.

 

 

Le dimanche commence tôt avec un récital bouleversant de beauté par le baryton Stéphane Degout et le pianiste Alain Planès, dans l’impressionnante salle des charpentes de l’abbaye. « Rêvons, c’est l’heure » met à l’honneur les plus belles Mélodies et Lieder de Fauré, Brahms et Schumann. La qualité poétique des textes de Verlaine, Gautier et Heiner, entre autres, a inspiré des plus belles mélodies du 19e siècle, et ces merveilleuses compositions inspirent visiblement le baryton qui les interprète avec soin et émotion. Comme d’habitude, le si bel instrument de Stéphane Degout, riche de qualités comme son timbre velouté et sa projection dynamique et nuancée, se marie admirablement avec son art inégalé de la prosodie et son indéniable talent d’acteur… Plus de 25 Mélodies où s’exprime magistralement un grand éventail de sentiments romantiques, parfois lumineux, parfois dramatiques, tourmentés souvent ! Dans « Le secret » de Fauré la symbiose entre la voix et le piano est particulièrement saisissante, ainsi que dans les très belles et célèbres « Au bord de l’eau » et « Après un rêve » du même compositeur. Les compositions allemandes donnent au pianiste Alain Planès l’occasion d’exprimer davantage les richesses et complexités de l’instrument, et au baryton l’opportunité d’élargir la palette d’expression, avec par exemple l’étonnant « Warte, warte wilder Schiffmann » de Schumann, presque… martial ! Un récital inoubliable, tout simplement.

La journée romantique se termine avec la colossale version originale de la Symphonie n°8 du compositeur wagnérien Anton Bruckner, interprétée par le fabuleux Orchestre des Champs-Élysées sous la direction du maestro Philippe Herreweghe. Dans une rencontre précédant le concert, le chef exprime son désir de « jouer Bruckner comme du Schubert », et tend à rassurer l’auditoire par rapport au niveau de décibels. C’est une remarque intéressante, non seulement parce que le talent de Bruckner se nourrit aux sources de la symphonie beethovénienne qu’il amplifie en y infusant un chromatisme carrément titanesque, mais aussi parce que l’adagio de la symphonie s’inspire directement de la célèbre Fantaisie en ut majeur de Schubert. Très joué outre-Rhin, où l’opus brucknérien a toujours été populaire, notamment en ce qui concerne la musique religieuse (c’est un organiste et fervent croyant du catholicisme), son œuvre purement symphonique a un côté grandiose, éclatant, puissant, avec un usage habile de la répétition et des développements immenses… L’aspect monumental est là dès le premier mouvement, et nous sommes agréablement surpris par le son plutôt transparent. Le deuxième mouvement est le Scherzo le plus long de toutes ses symphonies, et un moment musical très fort, pompier, ma non troppo, où les cuivres, les vents et les cordes sont habités de la musique qu’ils interprètent parfaitement. Au troisième mouvement, lent, nous pouvons constater davantage ce que cela fait de jouer Bruckner comme du Schubert. C’est un moment diaphane, éthéré, mystique presque, mais libre du fardeau du pathos plutôt typique en concert et aux enregistrements. Le dernier mouvement est une sorte de pastiche savant, ma non tanto, qui évolue progressivement vers une fin solennelle mais surtout fière et exaltée… Un tour de force !

 

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CRITIQUE, festival. Festival de Royaumont, Abbaye de Royaumont, les 14 & 15 septembre 2024. Alain Planés, Stéphane Degout, Philippe Herreweghe, Orchestre des Champs-Elysées, Vincent Dumestre, Le Poème Harmonique…

CRITIQUE, opéra. PARIS. Opéra Comique, 20 septembre 2024. AUBER : Le Domino noir. A. C. Gillet, C. Dubois, V. Brunel, L. Vermot-Desroches… Valérie Lesort & Christian Hecq / Louis Langrée.

Contre les idées noires, voici à l’Opéra Comique, un spectacle plein de bonne humeur, léger, entraînant, bien chanté, tout en gaieté et… en couleurs :  le Domino noir.

 

Le Domino noir : un spectacle tout en couleurs !

 

 

Auber est certainement, sans qu’on en ait conscience, le compositeur le plus connu à Paris : il a une station de R.E.R. à son nom ! Il vivait au XIXème siècle. Il avait de l’esprit jusque dans son prénom : il s’appelait Daniel-François-Esprit Auber. Il en a fait usage dans son Domino noir. L’oeuvre, plaisante comme un vaudeville, présente tous les poncifs du genre. On peut, de nos jours, trouver cela dépassé mais les metteurs en scène Valérie Lesort et Christian Hecq ont rivalisé d’imagination pour la revivifier et la rendre délirante. En voilà deux qui ne broient pas du noir ! 

Au début, on voit cinq danseurs déguisés en jeu de dominos. C’est malin ! C’est pour nous égarer.  Car le domino de cette histoire n’a rien à voir avec le jeu. C’est le masque que l’on porte lors des bals. Les soirs de spectacle, les ouvreuses de l’Opéra Comique en mettent pour nous mettre dans l’ambiance. L’histoire est celle d’une aristocrate, Angèle, qui se voile le visage pour aller une dernière fois au bal avant d’entrer au couvent.

Dans leur délire, les metteurs en scène habillent les hommes en plumes de paon, transforment en ailes d’oiseau les cornettes des bonnes sœurs, font entendre des bouffées de musique rock lorsque la porte s’ouvre sur la salle de bal, font descendre des statues de leur piédestal, font chanter la tête d’un cochon rôti qui, dans son plat, est destiné au festin du soir (tout est bon dans le cochon !).

La distribution vocale est excellente. Anne Catherine Gillet (Angèle) domine le spectacle de sa voix et sa prestance. Le ténor Cyrille Dubois (son soupirant) nous enchante de sa voix légère et bien timbrée – mais davantage comme chanteur que comédien, hystérisant trop certaines répliques. La mezzo Victoire Brunel (l’amie d’Angèle) est ravissante de voix et d’allure. On applaudit l’excellent jeune ténor Léo Vermot-Desroches (Juliano) ainsi que la basse imposante de Jean-Fernand Setti (le concierge du couvent). Quant à Marie Lenormand (l’Aubergiste), sa présence est irrésistible. Deux comédiens font partie du spectacle : Laurent Montel qui force son accent anglais pour caricaturer un Lord, et Sylvia Bergé, célèbre Sociétaire de la Comédie Française, qui prête au personnage d’une nonne sa voix bien posée. 

Louis Langrée, qui est dans sa maison à l’Opéra Comique puisqu’il la dirige depuis 2021, fait sonner à plaisir l’Orchestre de chambre de Paris – ainsi que le Choeur « Les Eléments ».

Ca y est, le spectacle est fini. On reprend le métro. Dans la tête continue à tourner l’air « La belle Ines fait florès ». C’est alors que le haut parleur du wagon annonce : « Auber ». Décidément, on n’en sort pas !…

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CRITIQUE, opéra. PARIS. Opéra Comique, 20 septembre 2024. AUBER : Le Domino noir. A. C. Gillet, C. Dubois, V. Brunel, L. Vermot-Desroches… Valérie Lesort & Christian Hecq / Louis Langrée.

 

VIDEO : Trailer du « Domino noir » d’Auber à l’Opéra Comique

 

CONCOURS BELLINI 2024 / Auditions ITALIE du 6 octobre 2024 : appel à candidatures, dépôt jusqu’au 24 septembre 2024.

Le CONCOURS INTERNATIONAL de BELCANTO VINCENZO BELLINI, fondé en 2010, est la plus importante compétition sélectionnant les voix belcantistes (et belliniennes) les plus prometteuses du moment… Les prochaines auditions de sélection ITALIE des candidat[e]s du 13ème Concours International de Belcanto Vincenzo Bellini 2024, auront lieu dimanche 6 octobre prochain, à TRIESTE, Teatro dell’Angelo.

 

PARTICIPEZ aux AUDITIONS
13ème CONCOURS INTERNATIONAL VINCENZO BELLINI
Auditions à TRIESTE, ITALIE
dimanche 6 octobre 2024

 

 

Les demandes d’inscription pour participer à ces auditions  sont ouvertes jusqu’au 24 septembre  2024, avec l’envoi d’un court CV à :  [email protected] 

Le prochain concours aura lieu les 6 et 7 décembre 2024  à Vendôme  [France]

Ne tardez pas à présenter vos candidatures.

Les places sont limitées

 

TOUTES les infos sur le site du Concours international Vincenzo Bellini :
https://www.bellinibelcanto-internationalcompetition.com/

 

 

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Cité de la musique, le 13 sept 2024. MAHLER [Elsa Benoît] / JARRELL, Ensemble Intercontemporain,  Pierre Bleuse [direction] 

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Pas moins de 2 créations ce soir pour ce programme d’ouverture de la nouvelle saison de l’EIC / Ensemble Intercontemporain, avec en faiseur principal, le compositeur suisse Michael Jarrell dont l’EIC promet d’ailleurs la réalisation d’autres œuvres (aux côtés du Centenaire Boulez), au cours de cette saison 2024-2025.

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Crédits photos : © Elise Grosbois

 

 

D’abord, en première partie, son Concerto pour piano porte bien son titre : « Reflections II ». La pièce qui fait suite immédiatement à son opéra Bérénice (créé à l’Opéra Garnier à l’automne 2018) déploie une texture très riche et colorée, comme s’il s’agissait d’exprimer une distanciation poétique sur le sujet  ; timbres, étoffe harmonique, longueur des vagues sonores, danse des résonances,… déroulent et nourrissent ainsi comme un halo rétrospectif qui de fait, rend hommage à un ami disparu, le compositeur Éric Daubresse.

 

Le piano en dessine le parcours, un cheminement qui va crescendo tout au long du premier mouvement, puis s’assagit plus poétique, après un effet de clochettes, dans un épisode central, plus contemplatif, conçu comme un canon ; percussif, enivré, le piano s’intègre constamment au groupe orchestral sans jamais l’affronter directement ; le sentiment de s’y fondre et parfois de la stimuler, se confirme progressivement pour réaliser un ensemble organiquement unitaire et cohérent du début à la fin. La personnalité de Jarrell se manifeste dans cette texture à la fois sombre et lumineuse, opaque et transparente où le piano propose des clés directionnelles, sans jamais heurter le groupe orchestral. Il s’agit ici d’une version spécifique de son concerto symphonique ; reconnaissons que dans cette réduction orthodoxe, l’essence même l’œuvre n’a été en rien altérée ; sa force originelle, intacte dans ce dispositif. Elle aurait même gagné une intensité et une concentration renouvelées. La tenue du soliste [Hidéki Nagano] s’affirme tout en poésie et écoute intérieure dans un mouvement central assez envoûtant.

 

Elsa Benoît chante le dernier mouvement de la 4ème de Mahler © Elise Grosbois

 

Plus intéressant encore, la transcription de la 4ème Symphonie de Mahler, réalisée par Jarrell pour les instrumentistes de l’EIC dont il fait une véritable tapisserie sonore intimiste, rétablissant, ce que nous avons particulièrement apprécié ce soir, son caractère essentiel et intime du lied, et aussi son immersion profonde, calibrée, dans le motif naturel : Mahler au bord du Wörthersee (lac de Carinthie) s’immerge en pleine nature pour éprouver, ressentir, composer. La 4ème est conçue dans ce rapport intime, panthéiste, durant les étés 1899 et 1900.

Pierre Bleuse joue manifestement sur la transparence d’une orchestration qui a bien saisi les enjeux des textures allégées, lesquelles semblent justement innerver toute la construction de l’œuvre en 4 mouvements dans un pastoralisme continu et rentré qui affleure constamment dans cette lecture millimétrée. Le mordant aigre, les convulsions du héros face au destin s’effacent ici, sans pour autant jouer la neutralité fade, bien au contraire, la partie du violon solo écrite un ton plus haut que l’original, souligne dans le 2ème mouvement, un discours clairvoyant, vif, très aiguisé. Et pour le coup d’une individualisation assumée.
Bien sûr les puristes regretteront l’ampleur sensuel d’un vrai pupitre de cordes, pilier si essentiel chez Mahler… Cette soie fluide éthérée qui illumine ses mouvements lents… Mais heureuses surprises d’une transcription originale, Jarrell est plus qu’un traducteur respectueux ; il ose distribuer sans une logique attendue les parties réduites avec une grande liberté, en particulier pour les cordes qui jouent des séquences différentes de leur pupitre ; avec aussi l’apport ample du trombone lequel dialogue, soutient les autres instruments dans une grande maîtrise des timbres et des couleurs. De ce point de vue, le troisième mouvement (Ruhevoll) est par son souffle plus unitaire et son geste global, naturel partagé, éminemment convaincant.

Toute la version Jarrell semble préparer à l’explicitation finale ; la quête d’équilibre et de pacification trouve son sommet dans  le 4ème mouvement, chanté dont la voix idéale, lumineuse et sensuelle d’Elsa Benoît exprime la féerie et l’enchantement. Nous sommes aux antipodes des doubles lectures et délire parodique si présents dans les autres symphonies malhériennes. Le texte de  » La Vie céleste  » [extrait du Cor merveilleux de l’enfant] donne la clé et le caractère de cet édifice fragile parfois furieux, toujours enivré ; tout prépare aux visions des délices célestes et sous la baguette de Pierre Bleuse constamment attentif aux équilibres, à la transparence comme aux nuances, les solistes de l’EIC paraissent comme les spectateurs avoir franchi chaque étape d’une lente, sûre et progressive ascension pour une belle lévitation finale. Passionnant.

 

Les saluts finaux avec Elsa Benoît et Pierre Bleuse © classiquenews studio

 

 

Approfondir

APPROFONDIR (d’autres articles de l’EIC / Ensemble Intercontemporain saison 2024 – 2025 sur CLASSIQUENEWS) :

 

LIRE aussi notre annonce / présentation du concert Michael JARRELL / Gustav MAHLER, EIC Ensemble Intercontemporain / Pierre Bleuse, concert d’ouverture du 13 sept 2024 : https://www.classiquenews.com/ensemble-intercontemporain-jarrell-mahler-ven-13-sept-2024-reflections-nouvel-arrangement-de-la-symphonie-n4-de-mahler-pierre-bleuse-direction/

ENSEMBLE INTERCONTEMPORAIN. JARRELL / MAHLER, ven 13 sept 2024. 2 créations mondiales de Michael JARRELL : Reflections II, nouvel arrangement de la Symphonie n°4 de Mahler (Pierre Bleuse, direction)

 

LIRE aussi notre présentation de la saison 2024 – 2025 de l’EIC Ensemble intercontemporain : https://www.classiquenews.com/ensemble-intercontemporain-nouvelle-saison-2024-2025-temps-forts-centenaire-pierre-boulez-edgard-varese-rebecca-saunders-clara-iannotta-francesco-filidei-sofia-avramidou-bastien-david-mic/

 

ENSEMBLE INTERCONTEMPORAIN, nouvelle saison 2024 – 2025. Temps forts : Centenaire Pierre Boulez, Edgard Varèse, Rebecca Saunders, Clara Iannotta, Francesco Filidei, Sofia Avramidou, Bastien David, Michael Jarrell… 

 

LIRE aussi notre ENTRETIEN avec PIERRE BLEUSE, directeur  musical, à propos de la nouvelle saison 2024 – 2025 de l’EIC Ensemble Intercontemporain : https://www.classiquenews.com/ensemble-intercontemporain-entretien-avec-pierre-bleuze-directeur-musical-a-propos-de-la-nouvelle-saison-2024-2025/

 

Entretien avec Pierre BLEUSE, directeur musical de l’Ensemble Intercontemporain, à propos de la nouvelle saison 2024-2025. Centenaire Pierre Boulez, Michael Jarrell, Edgar Varèse…