dimanche 8 décembre 2024

CD, critique. RAMEAU : Achante et Céphise. Les Ambassadeurs, Alexis Kossenko (2 cd Erato)

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CD, critique. RAMEAU : Achante et Céphise. Les Ambassadeurs, Alexis Kossenko (2 cd Erato). La restitution est légitime, et cette version, convaincante : Acanthe et Céphise est une partition de première main.Oubliée, méconnue voire dépréciée en raison de sa pseudo préciosité, fleurie, rococo, la partition ressuscite avec mordant et vivacité grâce aux Ambassadeurs dont l’entrain orchestral fait mouche. Jean-Philippe Rameau (1683-1764) – fêté en 2014 [250e anniversaire de la mort] compose en guise de commande dynastique, un manifeste musical débridé, en réalité expérimental qui était passé sous les radars ; Achante et Céphise, pastorale héroïque en trois actes célèbre en 1751, la naissance du duc de Bourgogne (Louis-Joseph-Xavier, petit-fils de Louis XV, héritier de la couronne, qui sera foudroyé 10 ans plus tard à 9 ans, d’une tuberculose osseuse).

En décembre 2020, le chef Alexis Kossenko porte la partition avec une intensité convaincante, jouant surtout sur les effets de contrastes et la caractérisation des personnages ; à ce titre c’est essentiellement le méchant Oroès génie aérien maléfique qui vole la vedette à ses partenaires chanteurs ; le baryton David Witczak éblouit de bout en bout ; mordant, vif, épatant, en rien caricatural d’une élégance délirante à laquelle se joint un souci d’intelligibilité exemplaire, cette dernière qualité le distinguant ici, devant tout autre.

L’histoire développée par le livret de Marmontel, proche de Voltaire qui a aussi collaboré avec Rameau (l’opéra perdu Sanson, Le temple de la gloire), évoque en lien avec la recherche du Rameau théoricien, cette faculté qu’ont certaines notes à vibrer naturellement par résonance ou « sympathie » ; ainsi en est-il du couple des amants Acanthe et Céphise qui grâce à leur protectrice (la fée), ressent à distance ce que l’autre éprouve. Magie de l’amour qui inspire à Rameau, une partition particulièrement raffinée. Voire hallucinante tant son travail sur l’orchestre manifeste le plus haut degré de raffinement comme d’audace.

Le génie de Rameau célébré…
Acanthe et Céphise (1749),
une œuvre inclassable et expérimentale

 

 

En particulier dès l’ouverture, véritable festival pétaradant et scintillant de couleurs (les cris de la foule, les coups de canons, les feux d’artifice… à l’annonce de la naissance royale / le choix de clarinettes dont le timbre inédit alors dans une œuvre française souligne la plasticité du style ramellien et ses innovations sans limites pour faire chanter et parler les instruments. Cf le quatuor pour clarinettes et cors pour un entracte au II). Avant Mozart, Rameau se passionne pour le timbre de la clarinette, découverte probablement avec la visite de musiciens de Bohême attestés à paris dans les années 1740.
Toute la partition exprime une invention unique au XVIII ème dont les singularités remarquables se retrouvent des Hippolyte et Aricie, premier opéra de 1733, ou dans Nais, opéra pour la paix, sans omettre Zoroastre de 1749 (qui utilise selon les possibilités hautbois ou clarinette); Castor et Pollux, le dernier opéra Les Boréades (1764) dont les alliance de timbres et la direction de l’écriture orchestrale restent inouïes pour l’époque … Autant de prouesses qui font de Rameau le plus grand compositeur français des Lumières. Un moderne inclassable en somme qui marque le génie musical hexagonal comme Berlioz et Ravel.
L’écriture d’Acanthe exprime aussi le divin chant de l’amour et le miracle qu’il permet : la Naissance ainsi célébrée. Et pour ciseler encore la couleur amoureuse Rameau ne conçoit les amants que dans des duos enivrés. Une union indéfectible contre laquelle les effets d’Oroès jaloux tombent les uns après les autres.

Alexis Kossenko fait briller et même claquer tous les accents d’un orchestre incroyablement magicien. Il en fait un manège exalté, tout du long, dans airs et récits (tous orchestrés), souvent survolté à la Dysney (style Fantasia) mais sans perdre un instant les enjeux de chaque situation. Il est évident ici que l’acteur principal est l’orchestre que complète avec style le choeur.

Pour accréditer encore la présente lecture, un soin particulier s’est concentré sur l’instrumentation… Qui entend restituer la balance sonore et la palette instrumentale de l’Orchestre de Rameau tel qu’il en disposait à l’académie royale de musique. De fait la puissance des violoncelles (ici 9 quand le chef Bruno Procopio en a osé jusqu’à 11dans un récent concert événement inaugurant son propre orchestre JOR JEUNE ORCHESTRE RAMEAU à Mazan, Var, le 31 oct 2201, avec même 2 clavecins) remodèle les équilibres sonores faisant surgir par la souplesse et l’énergie du pupitre de basses ainsi recomposé, la naissance de l’Orchestre moderne. RAMEAU PREMIER SYMPHONIQUE FRANÇAIS, on en supputait l’idée sans penser que cette option se confirmerait aujourd’hui avec pertinence.
Voilà que se dessine sous un jour nouveau une nouvelle approche de Rameau, instrumentalement argumentée et de plus en plus « authentique ». Avec des voix mieux choisies et surtout intelligibles, un chef comme ici engagé, fiévreux, détaillé… Les surprises et nouveaux accomplissement sont à venir. Déjà est annoncé en 2022, une nouvelle version de Zoroastre, celle de la création scandaleuse de 1749, plutôt que celle de 1756, davantage connue (et enregistrée), après une recherche aussi argumentée que cet Acanthe… On l’attend avec impatience en souhaitant que les voix soient plus attentives à l’articulation du texte, vraie faiblesse de cet enregistrement pourtant des plus délectables.

 

 

 

 

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CD, critique. RAMEAU : Achante et Céphise. Sabine Devieilhe (Céphise), Cyrille Dubois (Achante), David Witczak (le génie Oroès), Judith Van Wanroij (Zirphile). Les Ambassadeurs, La Grande Écurie. Direction : Alexis Kossenko. Les Chantres du Centre de musique baroque de Versailles. 2 cd Erato

 

 

 

 

 

 

Rameau sur CLASSIQUENEWS

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D’autres réalisations RAMEAU à connaître absolument,
critiqués sur CLASSIQUENEWS :

Le Temple de la gloire par Nicholas McGegan, 2017 : un vent nouveau ramélien venu des Amériques, depuis Berkeley en Californie…
CD, critique. RAMEAU : Le Temple de la Gloire (McGegan, Berkeley, 2017 – 2 cd Philharmonia Baroque Orchestra). Concernant un précédent enregistrement haendélien celui-là, et réalisé en 2005 (Atalanta), nous avions déjà souligné la saisissante activité dont était capable la direction de Nicholas McGegan : un vent de renouveau semblant souffler sur les œuvres baroques françaises et européennes, dont l’activité, l’expressivité, le frémissement spontané… contrastaient nettement avec ses homologues français en particulier.
D’emblée ce qui frappe dans cette lecture du Temple de la Gloire, c’est l’éloquente naïveté et la fraîcheur qui sonnent comme improvisées et donnent l’impression délectable que la musique qui s’écoule, se fait au moment de la représentation…
D’autant qu’il s’agit d’un live, saisi sur le vif avec les applaudissements du public américain, et ses réactions en cours de spectacle. La sensibilité intacte du chef britannique porte tout l’édifice. Cette candeur qui s’efforce à chaque mesure, restitue l’étonnante vitalité suggestive d’une musique qui est poétique de la tendresse et de la sensualité ; qui s’exprime à part, essentiellement instrumentalement, quand Rameau, génie de l’orchestration, diffuse sa mystique de la danse… là où les français cérébralisent, se figent, voire se pétrifient souvent dans une raideur mécanique, – trait remarqué chez beaucoup de chefs actuels, ou se cantonnent à un paraître rigide et corseté.
https://www.classiquenews.com/cd-critique-rameau-le-temple-de-la-gloire-mcgegan-berkeley-2017-2-cd-philharmonia-baroque-orchestra/

 

 

 

 

Le concert inaugural du JOR JEUNE ORCHESTRE ATLANTIQUE fondé et dirigé par Bruno Procopio / l’orchestre tel que Rameau l’a dirigé au XVIIIè / La FORGE ORCHESTRALE DES LUMIERES A L’ORIGINE DE L’ORCHESTRE MODERNE : critique du concert à Mazan, le 31 oct 2021 :
CRITIQUE, concert. MAZAN, dim 31 oct 2021. RAMEAU : Suite symphonique « Guerre et Paix » (création), JOR Jeune Orchestre Rameau, Brun Procopio, direction. Il est né le divin JOR ! De concert et dans une entente toute en complicité, le chef franco-bréslien Bruno Procopio et la musicologue Sylvie Bouissou ont conçu un programme éminemment symphonique qui sélectionne plusieurs extraits d’opéras de Jean-Philippe Rameau : ouvertures, danses, intermèdes divers (tempête,…), mais avec la cohérence d’une dramaturgie dont le titre éclaire les caractères successifs « guerre et paix ». Ce diptyque est un vrai défi pour les instrumentistes réunis sous la baguette du maestro, fondateur ainsi de son propre orchestre : le JOR pour Jeune Orchestre Rameau : une nouvelle phalange dédiée uniquement à l’interprétation des œuvres du Dijonais et qui ce dimanche 31 octobre vit son baptême officiel.

 
VIDEO reportage exlcusif : le JOR Jeune Orchestre Rameau 1ère session oct 2021 :
 

 

 

 

 

VIDEO clip : le JOR Jeune Orchestre Rameau joue les Indes Galantes / Chaconne :
 

 
 

 
 

 

Le Temple de la gloire par Guy Van Waas – 2016
CD, compte rendu critique. Rameau (1683-1764) : Le Temple de la Gloire (Guy van Waas, 2 cd Ricercar RIC 363). Voici le Rameau officiel qui colle à son sujet : c’est bien en 1745, le musicien le plus célébré, compositeur atitré à Versailles (nommé en cette même année de reconnaissance, “compositeur de la musique du Cabinet”) qui s’affirme ici, à croire que le héros finalement glorifié serait bien Rameau lui-même. En tout cas sa musique est l’une des plus fastueuses, flamboyantes, diversifiées. C’est l’année des prodiges pour le compositeur : Platée, La Princesse de Navarre et donc Le Temple de la Gloire : universel, génie imaginatif, Rameau imagine dans le ballet héroïque, trois opéras en un. Bacchanale pour la première entrée (Bélus), bacchanale pour la seconde entrée (Bacchus), tragédie pour la troisième entrée (Trajan). Même le Prologue est l’un des plus raffinés et aboutis, suscitant dans le personnage de l’Envie trépignant aux abords du Temple, l’un des personnages graves et tragiques, accompagné par les bassons, parmi les plus saisissants conçus par Rameau.
https://www.classiquenews.com/cd-compte-rendu-critique-rameau-1683-1764-le-temple-de-la-gloire-guy-van-waas-2-cd-ricercar-ric-363/

 

 

 

CD critique. RAMEAU : Dardanus, 1744 (Orfeo Orchestra, Vashegyi, 2 cd Glossa, 2020) — Enregistré au MÜPA, le principal centre de concerts de Budapest, en mars 2020, cette nouvelle lecture de Dardanus de Rameau, opéra héroïque et fantastique du génie Baroque français (créé en nov 1739 avec le légendaire Jélyotte dans le rôle-titre, futur créateur de Platée en 1745…), confirme évidemment le souffle dramatique du chef György Vasgeyi dont classiquenews suit pas à pas les réalisations discographiques : aucun doute le maestro maîtrise la veine ardente, noble, expressive de Rameau sans omettre son sens premier de l’orchestre, son goût des timbres instrumentaux, surtout la vitalité organique des divertissements et des ballets qui leur sont associés : lourre, rigaudons, menuets, tambourins des Phrygiens qui occupent et ferment l’action du III / menuet, musette, contredanse enfin chaconne finale, dans la tradition de Lully depuis le XVIIè, qui concluent le V…);
http://www.classiquenews.com/cd-critique-rameau-dardanus-1744-orfeo-orchestra-vashegyi-2-cd-glossa-2020/

 

 

 

CD, critique. Rameau : Les Boréades (Cachet, Weynants, Kristjánsson… Luks, 3 cd Château de Versailles, janv 2020). Pour célébrer la fin de la guerre de Sept ans en 1763, victoire de Louis XV, Rameau, compositeur officiel compose son dernier ouvrage Les Boréades, sans pouvoir accompagner jusqu’à sa création, ce chef d’oeuvre du XVIIIè, car il meurt en répétitions (sept 1764). Jamais l’ouvrage ne sera créé sur la scène de l’Académie royale. Les dernières recherches ont montré que l’opéra était achevé en réalité dès juin 1763 devant être créé à Choisy. Le livret de Cahusac trop subversif (osant même montrer l’arbitraire cruel d’un souverain : torture et nouveau supplice d’Alphise par Borée le dieu des vents nordiques) ; héritier des Lumières, Rameau octogénaire dénonce alors la torture. Audacieuse et visionnaire intelligence propre aux philosophes français.
La redoutable difficulté des récits accompagnés, la tenue de l’orchestre où brillent les timbres instrumentaux d’une manière inédite (cors et clarinettes dès le début), exprimant cet imaginaire sans équivalent d’un Rameau, génial orchestrateur. Le Praguois Václav Luks et son Collegium 1704 aborde la partition avec un appétit rafraîchissant, une vivacité régulière qui cependant manque de la séduction élégantissime d’un Christie (Opéra de Paris, 2003) ou d’un McGegan
http://www.classiquenews.com/cd-evenement-critique-rameau-les-boreales-luks-3-cd-chateau-de-versailles-janv-2020/

 

 

 

CD critique. RAMEAU : Une nouvelle Symphonie / Les Musiciens du Louvre / Marc Minkowski (1 cd Château de Versailles Spectacles, sept 2022): … la Chaconne finale a autant de chien que de tension, et comme les morceaux précédents, saisie par un sentiment d’urgence et de nécessité, décuplés, comme chauffés à blanc. Voici le morceau le plus réussi de notre point de vue : motricité électrisée et abandon aux vents (flûtes), habile posture entre tension et détente…. https://www.classiquenews.com/critique-cd-rameau-nouvelle-symphonie-les-musiciens-du-louvre-m-minkowski-1-cd-chateau-de-versailles-spectacles-janv-2021/

 

 

 

 

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