lundi 20 janvier 2025

JUSTICE. PROCÈS JEAN TUBÉRY: Rebondissements et nouveaux éléments. En décidant de faire appel, le chef fondateur de l’ensemble La Fenice relance la machine judiciaire

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L’affaire Jean Tubéry est loin d’être close… sa décision de faire aujourd’hui appel relance le dossier, et permettra probablement de réexaminer la nature des accusations à son encontre comme la classification des faits. Pour en savoir davantage, nous avons rencontré le chef flûtiste et cornettiste, fondateur de son propre ensemble La Fenice, et de son émanation récente La Fenice aVenire.

 

Condamné à 6 mois d’emprisonnement avec sursis pour harcèlement sexuel en juin dernier au Palais de justice de Sens, le chef Jean Tubéry a fait appel de ce jugement. L’appel relance la machine judiciaire, et la condamnation contestée ne sera pas revêtue de l’autorité de chose jugée. La présomption d’innocence est donc rétablie à son encontre.
C’est un homme résolu et convaincu de son bon droit que nous avons rencontré, fermement décidé à prouver son innocence et à rétablir son honneur.
En amont du procès, Jean Tubéry avait porté plainte contre x pour diffamation en novembre 2022, suite à la rumeur de son exclusion provisoire du CNSMD de Lyon pour « harcèlement sexuel », motif diffusé alors sans fondement car ce n’était pas le cas (à ce sujet, les écrits de la direction du CNSMD de Lyon ont fait foi).  Jean Tubéry a fait par ailleurs l’objet de 4 enquêtes successives dont celle d’un cabinet extérieur, mandaté par le CNSMD de Lyon : sa conclusion (juin 2023) n’a pas retenu la classification de harcèlement sexuel. De son côté l’enquête décidée par la Mairie de Paris a pour sa part émis sa conclusion en décembre 2023 : les enquêteurs de la Ville de Paris ont conclu qu’aucun fait de harcèlement n’était établi à l’encontre de Mr Tubéry sur plus de 30 ans d’enseignement.
Au cours de notre rencontre, Jean Tubéry évoque les propos des deux plaignantes, deux anciennes élèves de la même promotion qui ont suivi ensemble son enseignement au CNSMD de Lyon, et qui ont depuis, co-fondé leur propre ensemble de musique ancienne, spécialisé dans la musique du XVIIème siècle.

 

« Les deux plaignantes sont deux anciennes étudiantes qui ont suivi certains de mes cours d’ensemble au Conservatoire, ou en projet extra-muros. Elles n’ont jamais apporté pour témoignage à leurs accusations que celui de l’une pour l’autre. Contrairement à la règle qui prévaut en matière de justice, elles n’ont jamais dû fournir de preuves de leurs dires : c’est à moi qu’il a été demandé lors de l’audience de juin 2024 de fournir la preuve en tant qu’accusé de l’inexactitude de leurs accusations ; à ce jeu de « parole contre parole », la mienne, celle d’un professeur ayant une certaine notoriété dans notre milieu professionnel, n’avait aucun poids dans le contexte actuel par rapport à celui de deux jeunes femmes étudiantes portant des accusations de harcèlement sexuel. Il est à préciser ici que 4 enquêtes (internes et externes) au sein des Conservatoires de Lyon et de Paris ont confirmé l’absence totale de harcèlement de ma part, et ce sur plus de 30 ans de carrière en tant qu’enseignant. Des compliments vestimentaires que j’ai pu faire autour de tenues de concert se sont alors transformés en « preuves irréfutables » de harcèlement ; il a aussi été prétendu que ces étudiantes craignaient de mauvaises notations de ma part, alors que je n’ai jamais eu à les noter de toute leur scolarité, aucune des deux n’ayant été étudiantes dans ma classe de cornet à bouquin : elles participaient librement et sans enjeu aux cours et projets d’ensemble du conservatoire » précise Jean Tubéry.

 

CONTEXTE… Le « contexte actuel » évoqué par le prévenu est bien évidemment une référence au mouvement de libération de la parole sur les faits de violences et harcèlements sexuels désigné comme le mouvement #MeToo, qui s’est développé sur les réseaux sociaux à compter de l’année 2017. Ce mouvement a permis de lever l’omerta qui existait sur ces comportements, comme il a permis une meilleure prise en compte de la parole des femmes victimes. Un certain nombre de voix se sont également faites entendre pour souligner les risques que ce mouvement soit instrumentalisé dans « une logique de vengeance justicière, [pour] livrer des hommes à la vindicte populaire »  (Éditorial du Canard Enchaîné du 18 octobre 2017). Plus récemment, la journaliste Caroline Fourest, dans son livre paru à la rentrée 2024 (« Le vertige Me Too », éditions Grasset), déplore qu’au nom d’une idéologie, des personnes mises en cause soient sacrifiées, et que leur cas soit déjà fixé avant tout contradictoire. Dans le cas présent, certains titres de presse et les réseaux sociaux se sont faits l’écho des accusations portées contre le professeur avant toute décision de justice sur sa culpabilité, jetant l’opprobre sur sa personne, entraînant sa mise à l’écart et celle de de son ensemble, La Fenice, par la grande majorité de ses partenaires.
On a malheureusement souvent constaté que le tribunal médiatique et l’opinion publique s’invitaient systématiquement à ce sujet ; qu’il avait, hors des débats au sein du prétoire, une regrettable tendance à accuser, condamner, et à s’acharner en dehors de toute raison, allant parfois jusqu’à l’hystérie et au déferlement de haine.
Or chaque cas est unique et mérite d’être examiné au cas par cas, détail par détail. Il mérite au regard des enjeux humains que toute l’attention nécessaire soit accordée pour établir la vérité. Aujourd’hui le professeur et musicien conteste plus que jamais les faits qui lui sont reprochés ; des propos qu’il estime sortis de leur contexte, et des accusations de gestes déplacés qu’il qualifie de mensongères et calomnieuses.

 

« Ces 2 anciennes étudiantes avaient été entendues suite à leur plainte en interne au Conservatoire (début 2022). Certains propos et gestes ont alors été qualifiés par la direction de « familiarités », reproche que je peux entendre ; mais aussi de « gestes à connotation sexuelle », ce que je conteste. Par exemple, il m’est reproché d’avoir mis une tête de flûte dans ma poche de pantalon, pour la réchauffer afin d’en éviter la condensation – ce que je fais régulièrement encore de nos jours en concert et qui est une pratique partagée par beaucoup de mes confrères professionnels. Ce geste banal pour un flûtiste à bec est devenu une description de geste obscène lors de la déposition au commissariat en 2023, geste mimé par l’avocate de la partie civile lors du procès en public, devant des dizaines de témoins au tribunal de Sens…
D’autres propos ont été tout à fait sortis de leur contexte et se sont vus donner une intention qui n’était pas la mienne. On m’a reproché par exemple d’avoir dit « bière brune ou bière ambrée ? » à l’une des 2 plaignantes, alors que nous étions attablés à un café après un concert d’élèves… question qui a été interprétée comme des propos de séduction voire de harcèlement sexuel.
Au cours d’une leçon d’ensemble, j’ai saisi un téléphone portable prêt à tomber de la poche de l’autre plaignante, jouant alors assise de son instrument ; ce geste a été transformé et reformulé en « agression sexuelle »… La même personne a également prétendu que je lui aurais dit après un concert « Ton rouge à lèvre va bien avec Ma veste rouge »… alors que je n’ai jamais porté de veste rouge de ma vie ! Tout cela m’a été reproché par le Tribunal qui a donc considéré que ces propos et gestes créaient une situation « intimidante, hostile ou offensante », me condamnant à une peine de prison avec sursis pour des propos répréhensibles que je n’ai pas tenus, et des gestes déplacés que je n’ai pas commis ».

 

Puis Jean Tubéry souligne les conséquences que l’affaire n’a pas manqué de produire à son encontre dans sa vie et dans la continuité de son activité artistique.

« Aujourd’hui, ma carrière est anéantie, la vie qui était la mienne est détruite… tout cela à cause de situations parfaitement anodines lorsqu’elles ne sont pas purement imaginaires, qui ont fait de moi un individu infréquentable, musicien que les organisateurs ne souhaitent pas ou n’osent pas programmer dans le contexte actuel, par peur de représailles sur les réseaux sociaux ou de leurs tutelles d’état. J’ai donc décidé de faire appel de ce jugement que je considère inique et aberrant dans sa sévérité, pour des faits et des gestes que je récuse, afin d’être définitivement lavé des accusations diffamatoires portées à mon encontre ».

 

Aujourd’hui, Jean Tubéry, plus déterminé que jamais, attend la tenue d’un nouveau procès.

A suivre…

 

 

Photo : © La Fenice aVenire 2024

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