samedi 10 mai 2025
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CRITIQUE, danse. GENÈVE, Bâtiments des Forces Motrices, le 14 mars 2025. Sasha WALTZ : Beethoven 7. Ballet Sasha Waltz & Guests.

Sasha Waltz, chorégraphe allemande aux multiples facettes, présente au Bâtiment des Forces Motrices de Genève une création qui résonne profondément avec les tumultes de notre époque. Inspirée par la Septième Symphonie de Beethoven et enrichie par les compositions électroniques de Diego Noguera, cette œuvre chorégraphique explore les thèmes de la désillusion, de la résistance et de la quête de liberté.

 

Le spectacle s’ouvre dans une atmosphère apocalyptique. Un nuage opaque envahit l’espace, évoquant une catastrophe nucléaire ou un monde en ruine. Des silhouettes émergent de cette brume, masquées et ankylosées, comme des survivants d’un désastre. Leur mouvements, saccadés et chaotiques, sont portés par les rythmes puissants et déstructurés de Diego Noguera. Les danseurs, tels des fantômes ou des êtres hybrides, semblent traverser un paysage dévasté, oscillant entre désespoir et résilience.

Puis, la musique de Beethoven prend le relais, apportant une dimension lyrique et introspective. La chorégraphie de Sasha Waltz épouse parfaitement les nuances de la symphonie, traduisant en mouvements fluides et expressifs les émotions contrastées qui traversent l’œuvre. Les danseurs, pieds nus, glissent sur scène avec une grâce presque surnaturelle, leurs gestes reflétant tour à tour la mélancolie, la révolte et l’espoir. Le célèbre Allegretto, avec son rythme lancinant et poignant, devient un moment de grâce collective, où les corps semblent se fondre dans la musique pour transcender la douleur.

 

 

Sasha Waltz ne se contente pas de danser sur Beethoven ; elle dialogue avec lui, interrogeant les idéaux brisés du compositeur et les confrontant aux défis contemporains. La juxtaposition de la symphonie classique et des sonorités électroniques de Noguera crée un contraste saisissant, soulignant la tension entre tradition et modernité, ordre et chaos.

Le spectacle culmine dans une scène où les danseurs, vêtus de robes légères, semblent incarner une renaissance. Leur énergie, d’abord contenue, éclate en une danse libératrice, symbolisant peut-être la possibilité de surmonter les épreuves. Un danseur afro-européen, en marcel blanc, émerge comme une figure rassembleuse, guidant les autres vers une forme de rédemption collective.

Avec Beethoven 7, Sasha Waltz confirme son statut de l’une des chorégraphes les plus visionnaires de notre temps. Son travail, à la fois rigoureux et émouvant, transcende les frontières entre danse, musique et théâtre, offrant une expérience artistique qui touche à l’universel. Ce spectacle, présenté à Genève jusqu’au 16 mars, est une invitation à réfléchir sur notre humanité, nos luttes et notre capacité à trouver la lumière dans l’obscurité.

 

 

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CRITIQUE, danse. GENÈVE, Bâtiments des Forces Motrices, le 14 mars 2025. Sasha WALTZ : Beethoven 7. Ballet Sasha Waltz & Guests. Crédit photographique © Sebastian Bolesch

CRITIQUE, concert. PARIS, Opéra Garnier, le 9 mars 2025.  » Voice of Nature  » : THE ANTHROPOCENE. Renée Fleming (soprano), Howard Watkins (piano)

Tout siècle connaît ses années d’incertitude. Le premier quart du 21ème siècle semble en proie à une série d’ondes de choc qui font frémir tous les domaines de l’humanité. Guerres, famines, catastrophes dévastatrices, rien ne semble épargner le quotidien. Et pourtant, dans ce ressac constant de questionnements gît le fragile espoir. C’est ce que semble nous apporter ce récital que Renée Fleming a conçu avec Yannick Nézet-Seguin durant la pandémie de la Covid-19. Mêlant à la fois des airs d’opéra, des mélodies, des « art songs » et de la chanson, Renée Fleming nous convie à un parcours planétaire avec la projection des sublimes images de la National Geographic Society créant un portrait émouvant de ce qui risque d’être perdu par la folie humaine. Des sommets de Yosemite, le Sequoia National Park, les déserts du Kalahari ou les profondeurs abyssales du Pacifique,… on est saisi par le silence du monde entre deux partitions que la soprano étasunienne ne manque pas de laisser flotter comme une question sans réponse. 

 

Mme Fleming excelle dans l’art de la Song étasunienne, dans les Mélodies de Maria Schneider ou la très belle mélodie de Kevin Puts. Cependant nous restons réservés sur l’interprétation de trois Mélodies de Reynaldo Hahn qui semblent un peu trop basses pour la tessiture de Renée Fleming, et tombent un peu à plat. Or Mme Fleming nous a conquis avec trois Mélodies d’Olivier Messiaen dont la difficulté technique n’est pas redire et dans les extraits des trop rares La Bohème de Leoncavallo et Adriana Lecouvreur de Cilea, deux bijoux incomparables. Le récital s’est parachevé avec trois Lieder de Richard Strauss qui nous a ravi par la beauté de chaque phrasé et la justesse des couleurs. 

Le pianiste Howard Watkins a été un allié de taille de Mme Fleming en apportant à chaque morceau un équilibre et une émotion significative. Nous avons particulièrement apprécié la justesse et l’impressionnante maîtrise technique de M. Watkins dans les Messiaen et les Strauss. 

Si d’aventure le siècle devait s’achever sous une pluie de feu, peut-être que la promesse que Renée Fleming a fait fleurir avec ce récital est, en paraphrasant la chanson de Burt Bacharach, élève de Martinu, ce dont le monde a besoin, de l’amour de la beauté simple qui peut se trouver partout, même dans l’inattendu.

 

 

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Opéra Garnier, le 9 mars 2025. VOICE OF NATURE : THE ANTHROPOCENE. Renée Fleming (soprano), Howard Watkins (piano). Crédit photo © Alice Blangero

 

VIDEO : Trailer du spectacle

 

CRITIQUE, danse. PARIS, Opéra Bastille, le 13 mars 2025. TCHAIKOVSKI : La Belle au bois dormant. Bleuenn Battistoni, Guillaume Diop. Rudolph Noureev (chorégraphie) / Vello Pähn (direction)

Créé à l’Opéra national de Paris en 1989, puis reprise constamment ensuite (la dernière reprise en 2014), La Belle au bois dormant de Piotr Illitch Tchaïkovski fait son retour à l’Opéra Bastille pour 29 représentations, dont plusieurs déjà complètes. Il faut donc réserver au plus vite pour avoir la chance d’assister à ce spectacle, le tout dernier chorégraphié par Rudolf Noureev en tant que directeur du Ballet de l’Opéra de Paris, entre 1983 et 1989.

 

Parmi les chefs d’oeuvre de Tchaïkovski, La Belle au bois dormant figure en bonne place, tant le compositeur russe montre une nouvelle fois son affinité avec les sortilèges du divertissement dansé. Ce deuxième ballet, composé en 1890 entre Le Lac des Cygnes (1877) et Casse-Noisette (1892), reste desservi par son argument très mince, mais bénéficie d’une inspiration musicale admirablement variée entre les actes, des effluves dramatiques du I aux atmosphères plus nocturnes du II, avant une dernière partie plus légère, dédiée à des raffinements délicatement ciselés, dont les recherches de sonorités font penser à son équivalent dans Casse-Noisette (voir la dernière reprise de la production de Noureev, en 2023).

Souvent invité à diriger le ballet à Bastille (voir notamment Le Lac des Cygnes en 2019), le chef estonien Vello Pähn cherche à éviter toute grandiloquence, en privilégiant couleurs et mise en place. A ce compte-là, il réussit mieux les deux derniers actes, là où le premier sonne trop extérieur. Quoi qu’il en soit, on savoure les sonorités enchanteresses de l’Orchestre de l’Opéra national de Paris, toujours très affuté en ce domaine, à l’image du premier violon (Frédéric Laroque) particulièrement sollicité au II, dans un passage concertant très exigeant.

On retrouve le spectacle imaginé par Rudolf Noureev avec des sentiments mêlés, même s’il faut évidemment recontextualiser ses apports, en 1989, pour l’apprécier pleinement. L’idée du Russe est avant tout de renforcer la présence masculine, à qui la chorégraphie initiale de Marius Petipa (1818-1910) avait laissé peu de place. Cette tradition du XIXème siècle a été remise en cause par de nombreux danseurs éminents du siècle suivant, Noureev en tête. Le rôle du Prince Désiré gagne ainsi en consistance, avec pas moins de quatre variations au lieu d’une, dont s’empare le danseur étoile Guillaume Diop (né en 2000) avec une grâce agile et féline. Applaudi dès son entrée en scène, comme l’autre étoile Bleuenn Battistoni (née en 1999), le jeune homme au regard lumineux fait déjà figure de star, lui qui vient de faire la couverture du magazine Télérama. On aime surtout sa capacité à incarner le Prince solitaire au début du II, entre fausse nonchalance et mélancolie. Son duo avec la délicate Bleuenn Battistoni fonctionne très bien, tant les partenaires semblent au diapason d’une complicité bienvenue. Les ports de bras et mouvements soyeux de Battistoni sont un pur ravissement, que l’on ne se lasse pas d’admirer. Il lui faut toutefois parvenir à donner ce supplément d’âme et de conviction qui font la marque des plus grandes, pour nous emporter plus encore. A leurs côtés, outre un duo de chats délicieux d’espièglerie, on se délecte du gracieux Chun-Wing Lam (L’Oiseau bleu), étourdissant de facilité dans ses pas aériens.

Noureev a précisément réduit la part accordée aux personnages des autres contes, présents dans la dernière partie, en supprimant les rôles du Petit chaperon rouge, du Petit Poucet et de Cendrillon. Si l’idée est de coller au plus près de l’original du conte de Perrault, en confiant le rôle de Carabosse à une femme (là où Petipa avait joué la fantaisie d’une interprétation par un travesti), le spectacle gagne en sérieux ce qu’il perd en variété. Aucun humour ne vient ainsi illuminer la première partie, ni dans les rôles minorés du maître de cérémonie Catalabutte ou de la fée Carabosse, ce que d’autres chorégraphes savent mettre bien davantage en valeur au même moment. On pense notamment à Márcia Haydée, dont le spectacle créé pour le ballet de Stuttgart en 1987 a été repris ensuite dans le monde entier, avec un grand succès. Le spectacle réglé par Noureev a pour lui ses costumes d’un luxe inouï, ainsi que ses innovations pour les mouvements étourdissants du corps de ballet dans les compositions d’ensemble, qui s’entrelacent en petits groupes sans cesse renouvelés, avec une attention portée aux mouvements des mains.

 

 

 

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CRITIQUE, danse. PARIS, Opéra Bastille, le 13 mars 2025. TCHAIKOVSKI : La Belle au bois dormant. Bleuenn Battistoni (Aurore), Guillaume Diop (Désiré), Katherine Higgins (Carabosse), Fanny Gorse (Fée des Lilas), Arthus Raveau (Le Duc), Eléonore Guérineau, Isaac Lopes Gomes (Les chats), Elizabeth Parthington, Chun-Wing Lam (L’Oiseau bleu), Ballet de l’Opéra national de Paris, Rudolph Noureev (chorégraphie) / Vello Pähn (direction). A l’affiche de l’Opéra Bastille jusqu’au 23 avril, puis du 27 juin au 12 juillet 2025 – et en direct dans les cinémas participants le 10 avril 2025. Crédit photo © Agathe Poupeney

OPÉRA DE MASSY. Les 5 et 6 avril 2025. MOZART : La Clémence de Titus, Opera Fuoco / David Stern

TITUS, le dernier seria de Mozart est un chef d’œuvre… Fidèle à son œuvre singulière et si juste, Mozart explore, comme aucun autre, la psychologie humaine et l’expression intime des sentiments. Il en révèle souvent la part intime, le cheminement de l’ombre à la lumière… Si l’empereur Titus trouve la voie de la sagesse (et de la clémence), son ennemie Vitellia, d’abord haineuse et conspiratrice, touchée par la dignité morale du souverain, se transforme profondément…

 

 

Vitellia, fille de l’ancien empereur déchu, est l’une des héroïnes les plus fascinantes de l’opéra du XVIIIe siècle. Femme blessée, jalouse du pouvoir de Titus, elle manipule ses proches (dont le favori de l’Empereur : Sextus) pour parvenir à ses fins. Toute la complexité de ce personnage nourrit véritablement l’histoire jusqu’à l’aveu de sa culpabilité.

La profondeur de l’œuvre, la variété des styles, la relation entre l’orchestre et les chanteurs – propre au dernier Mozart, celui de l’année de sa mort, 1791, se conjuguent pour construire un drame exceptionnel. Mozart lui-même, extrêmement heureux de son travail, aimait à dire qu’il avait fait de cette histoire, maintes fois exploitée dans l’opera seria, une nouvelle partition qui dépassait ce genre et transcendait les catégories, pour composer quelque chose de “vrai”.
L’Opéra de Massy affiche une nouvelle production événement qui réunit la compagnie lyrique Opera Fuoco, en résidence, ainsi que les artistes de l’Atelier Lyrique de l’Opéra de Massy mettant en avant de jeunes talents prometteurs. Un vent de jeunesse souffle sur l’ultime opéra de Mozart !

 

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OPÉRA DE MASSY. MOZART : La Clémence de Titus
Samedi 5 avril 2025, 20h
Dimanche 6 avril 2025, 16h
RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’OPÉRA DE MASSY : https://www.opera-massy.com/fr/la-clemence-de-titus.html?cmp_id=77&news_id=1109

 

Durée : 2h10 (dont 1 entracte)

Aller plus loin / conférence
Sam. 5 avril à 18h30, par David Stern (Gratuit sur inscription)

 

Distribution
Direction musicale : David Stern
Mise en scène : Héloïse Serazin
Scénographie : Léa Jézéquel
Lumières : Marc Delamézière
Costumes : Laurianne Scimemi del Francia
Vidéo : Yann Philippe
Solistes de l’Atelier Lyrique Opera Fuoco :
Titus : Vincent Guérin
Vitellia : Margaux Poguet
Sesto : Marion Vergez-Pascal
Servilia : Thaïs Raï-Westphal
Annio : Sophia Stern
Publio : Julien Ségol
Orchestre Opera Fuoco
Chœur : Atelier Lyrique de l’Opéra de Massy

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STREAMING, opéra. ROSSINI : Guillaume Tell – Opéravision le 21 mars 2025. Depuis TOKYO (NNTT). Yannis Kokkos, Kazushi Ono

TOKYO affiche ici  la création en français du dernier opéra de Rossini … Dans son ultime drame lyrique, GUILLAUME TELL, ROSSINI prend acte du désir d’indépendance des Suisses contre l’oppresseur Habsbourg. Un héros se rebelle et incarne la rébellion des Helvetes, combattant de la liberté dans la Suisse occupée par les Autrichiens. Le compositeur tout en élaborant un premier modèle pour le grand opéra à la française, soigne les ressorts de son drame : un gouverneur Habsbourg tyrannique ; la plus célèbre des pommes suisses ; une histoire d’amour qui dépasse les clivages nationaux. Passionné par l’histoire Suisse, Rossini, signe ainsi son dernier chef-d’œuvre amorcé par l’ouverture la plus célèbre du monde, avec celle de la Pie voleuse.

 

 

GUILLAUME TELL est son opéra le plus ambitieux, le plus avant-gardiste et le plus exigeant sur le plan vocal. Cri de ralliement de la révolution de 1830 en France, L’OPÉRA RÉVOLUTIONNE lui-même la scène lyrique.

Reprenant la légende du héros populaire, d’après la pièce de Schiller [écrivain germanique que Verdi après Rossini adaptera avec le même essor], Guillaume Tell est une ode grandiose à la liberté. L’histoire est aussi celle de l’amour entre le jeune suisse Arnold et la princesse Mathilde de Habsbourg. Au cours du final, soutenu depuis la fosse par deux harpes, les voix d’un chœur sublime transcendent cette histoire sanglante.
Pour la première de l’opéra dans sa langue originale au Japon, le New National Theatre Tokyo confie la mise en scène à Yannis Kokkos. Sous la direction musicale de son directeur artistique Kazushi Ono, le NNTT réunit une distribution bel canto, dont Gezim Myshketa dans le rôle-titre, René Barbera [Arnold] et Olga Peretyatko dans le rôle de la princesse Mathilde.

 

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VOIR Guillaume Tell de ROSSINI au Théâtre National de Tokyo (nov 2024) :
https://operavision.eu/fr/performance/guillaume-tell-1
Diffusé vendredi 21 mars 2025 à 19h CET
EN REPLAY jusqu’au 21 sept 2025 à 12h CET. – Enregistré le 20 nov 2024
Chanté en français
Sous-titres en japonais, français, anglais

 

 

CRITIQUE, festival. MONACO, 55ème Printemps des Arts de Monte-Carlo (Galerie Hauser & Wirth), le 12 mars 2025. STOCKHAUSEN : « Stimmung ». Neue Vocalsolisten

A Monaco, on est habitué au printemps. L’hiver, le plus souvent, est déjà un printemps. Mais lorsque, chaque année, arrive le Printemps des arts, la fête redouble. Ce festival est dirigé par une personnalité aussi brillante que prestigieuse, le compositeur Bruno Mantovani, membre de l’Institut de France. La manifestation se déroulera cette année jusqu’au 27 avril et rendra hommage, comme il se doit, à Pierre Boulez, pour les cent ans de sa naissance.

 

Le premier concert, auquel assistait la Princesse Caroline, indéfectible soutien de la vie culturelle monégasque, se déroulait en la Galerie d’art contemporain Hauser & Wirth. Au programme cette œuvre vocale fascinante de Karl-Heinz Stockhausen qu’est « Stimmung ». Une heure de murmures, de chuchotements et d’exclamations sur la note de Si bémol ! Une heure hors du temps, envoûtante, hypnotisante, magnétisante, bouleversante. Fantastique début de Printemps !

Au début, six chanteurs (trois hommes et trois femmes), en tuniques blanches, membres des excellents Neue Vocalsolisten de Stuttgart, montent cérémonieusement sur une estrade. On les voir s’asseoir en cercle, comme pour s’adonner à un rite sacré. Une voix entonne un premier son, le passe en relais à une autre. Peu à peu se constitue un murmure collectif. Toute la salle entre en vibration, les voix étant relayées par haut-parleurs. « Stimmung » veut dire accord. C’est en effet sur un accord basé sur la note Si bémol que tous les effets sonores se construisent, se font et se défont, s’amplifient ou disparaissent. Le chant s’effectue sur des voyelles mais aussi sur des souffles sur des « f » et des « ch ». Parfois se forment des mots entiers. On perçoit alors, dans le tourbillon des onomatopées, des noms de divinités, des noms de jours de la semaine, ou encore des bribes de phrases issues d’un poème écrit par Stockhausen (Il paraît que ce poème est érotique… mas rien ne permet sur place de le vérifier !…).  

Cette œuvre a une dimension mystique. Elle transforme le lieu en temple. Le public est en communion… presqu’en prière. La musique frémit à fleur de lèvre, à fleur d’oreille, à fleur de peau. La musique est l’art du temps. L’art du printemps…

 

 

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CRITIQUE, festival. MONACO, 55ème Printemps des Arts de Monte-Carlo (Galerie Hauser et Wirth), le 12 mars 2025. STOCKHAUSEN : « Stimmung ». Neue Vocalsolisten. Crédit photo © Alice Blangero

 

3ème FESTIVAL de PÂQUES de PERELADA : 17-20 avril 2025. 6 concerts événements pour la Semaine Sainte. Ann Hallenberg, Valer Sabadus, Marie Lys, Benjamin Appl, Pablo Ferrández, Cantoria, Il Pomo d’Oro…

Oriol Aguilà, directeur artistique du festival, a conçu une édition diverse et exigeante qui illustre l’essence du festival, depuis son lancement : partager une expérience musicale unique, en lien avec la beauté du site de Perelada et surtout l’église del Carme, entre recueillement et beauté spirituelle, soit une séquence idéal (et un séjour magicien) au moment de la Semaine Sainte.

 

L’édition 2025 comprend 6 propositions musicales exceptionnelles : la première espagnole de l’oratorio Sanctus Petrus et Sancta Maria Magdalena, chef-d’œuvre de Johann Adolf Hasse en ouverture jeudi 17 avril (concert inaugural, église del Carme ; avec Valer Sabadus, Marie LysVespres d’Arnadi, Dani Espasa, direction) ; les débuts très attendus du baryton Benjamin Appl dans un répertoire explorant le baroque allemand (vendredi Saint 18 avril, église del Carme : œuvres de JS Bach, Erlebach, Zelenka…) ; également le 18 avril, la création mondiale des Responsorios de Semana Santa de Bernat Vivancos par le Latvian Radio Chor et Sigvards Klava, direction ; lundi 19 avril, le récital du violoncelliste Pablo Ferrández, accompagné par le pianiste Luis del Valle – au programme : Max Bruch, Beethoven, Rachmaninov, Brahms ; puis le 19 avril toujours, l’interprétation émouvante de Membra Jesu Nostri de Buxtehude, par l’ensemble Cantoría / Jorge Losana, direction ; enfin mardi 20 avril en matinée, le concert de clôture intitulé « Salve Regina », avec Il Pomo d’Oro, qui célèbre la noblesse du baroque italien avec les cantatrices virtuoses : la soprano Mélissa Petit et la mezzo-soprano Ann Hallenberg : sont jouées les Salve Regina de Domenico Scarlatti et Leonardo Leo, puis en seconde partie plusieurs extraits d’opéras de Haendel, Porpora, Riccardo Broschi…

 

 

 

TOUTES LES INFOS, le détail des programmes, les artistes invités de l’édition 2025 du Festival de Pâques de Perelada : www.festivalperalada.com

 

 

Infos pratiques
Festival de Peralada
(+34) 935 038 646   –   
[email protected]
902 374 737
   –   [email protected]

ORCHESTRE LAMOUREUX, dim 30 mars 2025. DANS LE STYLE ANCIEN… Grieg, Kreisler, Britten, Lili Boulanger… Hugues Borsarello, direction et violon solo

Les plus grands compositeurs se sont inspirés des maîtres anciens : ce programme événement, défendu par les instrumentistes de l’Orchestre Lamoureux le soulignent en éloquence et pertinence. Un genre en particulier les a particulièrement séduits, hérité des génies baroques : la suite de danse.

 

 

Le norvégien Edvard Grieg, en hommage au dramaturge du XVIIIeme siècle Ludvig Holberg, compose ainsi « Du temps de Holberg, Suite dans le style ancien », suite de danses analogue qui rappelle et célèbre dans le même temps les suites baroques de Jean-Sébastien Bach. Puis au XXè, Benjamin Britten après sa découverte de la musique de Frank Bridge, compose la Simple Symphony, qui mêle subtilement néo-classicisme et humour, onirisme, nostalgie et recréation.

Le pastiche est aussi une forme d’hommage aux Anciens ; ainsi inventer des pièces écrites par les anciens, ou écrire comme s’il s’agissait d’une pièce ancienne (redécouverte ) est une autre forme d’hommage musical. C’est le cas du violoniste Fritz Kreisler dans son « Prélude et Allegro » attribué à Gaetano Pugnani, ou encore Ferdinand David et « la Chaconne de Tomaso Vitali ». Deux pièces devenues célèbres inspirées de l’époque baroque et revisitées par la haute virtuosité violonistique en vogue au XIXeme siècle après Paganini et l’émergence de l’école franco-belge du violon.

Perle inestimable et dernière offrande du programme : Lili Boulanger, disparue beaucoup trop jeune dont « D’un matin de printemps », pièce originale pour violon et piano, orchestrée par la compositrice et arrangée ici pour violon et orchestre à cordes, dévoile l’imaginaire flamboyant et raffiné que n’aurait pas renié Debussy ou Ravel.… c’est un écho à l’histoire des Concerts Lamoureux qui ont toujours joué différents opus de Lili Boulanger en collaboration avec sa sœur, l’incontournable Nadia Boulanger.

 

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ORCHESTRE LAMOUREUX / Dans le style ancien…
Dimanche 30 mars 2025 I 18h
PARIS, Salle Cortot
RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’ORCHESTRE LAMOUREUX : https://www.billetweb.fr/dans-le-style-ancien-orchestrelamoureux

 

Retrouvez aussi l’Orchestre Lamoureux en famille lors d’un Bébé Concert à 11h.

 

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programme

Edvard Grieg,
Du Temps de Holberg, suite pour cordes

Fritz Kreisler
Prélude et Allegro, dans le style de Pugnani

Tomaso Antonio Vitali
Chaconne

Benjamin Britten
Simple Symphony

Lili Boulanger
D’un matin de printemps

 

infos pratiques

01 47 63 47 48
www.sallecortot.com

Salle Cortot
78 rue Cardinet, 75017 Paris

Métro : Malesherbes (ligne 3)

 

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29 ème FESTIVAL « LES JOURNÉES RAVEL » : 28 septembre, 4-5 & 11-12 octobre 2025 – les 150 ans de Maurice Ravel célébrés à Montfort l’Amaury et alentours (78)

Pour le 150 ème anniversaire de la naissance de Maurice Ravel, le festival qui porte son nom et se déroule dans les lieux où vécut le compositeur [Montfort-L’Amaury ou il vécut dans sa maison Le Belvédère, et ses environs], présente une programmation particulièrement prometteuse qui s’inscrit dans le sillon artistique laissé par Ravel lui-même : sensibilité, subtilité, poésie…

 

 

Depuis près de 30 ans, le festival Les Journées Ravel se passionne pour la diffusion et la connaissance de Maurice Ravel ; interpréter l’œuvre du célèbre compositeur français, celle de ses maîtres ou de ses contemporains, sur les lieux mêmes de sa vie, là où fut imaginé Boléro, son Œuvre maîtresse la plus connue

Les Journées Ravel perpétuent la mémoire et l’esprit du célèbre compositeur français, d’autant plus en 2025, année anniversaire qui marque le 150e anniversaire de la naissance, mais aussi le centenaire de la création L’Enfant et les Sortilèges, des Chansons madécasses mais également le 150e anniversaire du pianiste et très cher ami de Maurice Ravel, Ricardo Viñes.

 

Dans plusieurs hauts lieux patrimoniaux des Yvelines(78), Les Journées Ravel accueilleront l’Orchestre National d’île-de-France en ouverture [le 28 septembre]. Puis, elles réuniront pendant deux week-ends d’octobre de jeunes talents prometteurs, lors des concerts « Prom’s », des spectacles jeune public, ainsi que des artistes reconnus tels que Philippe Bianconi dans une journée consacrée au piano, « Sempre Piano », au Château des Mesnuls ouvert exceptionnellement au public, Jean-Marc Luisada & Alexandra Matievskaya, Marie-Laure Garnier avec Célia Oneto Bensaid, Nina Pollet et Héloïse Luzzati, l’ensemble Musica Nigella dans une nouvelle transcription pour neuf instrumentistes de Takenori Nemoto de L’Enfant et les Sortilèges, les Quatuors Van Kuijk et Magenta ou encore François-Frédéric Guy. Festival incontournable de la rentrée 2025.

Plus d’infos, le détail de la programmation du festival Les journées Ravel / Montfort L’Amaury, du 28 sept au 12 oct 2025 :
https://www.lesjourneesravel.com/

 

 

VOIR le TEASER VIDEO de la 29 ème édition des Journées RAVEL 28 sept – 12 oct 2025 :

 

 

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CRITIQUE, opéra. OPÉRA DE SAINT-ÉTIENNE, le 11 mars 2025. MASCAGNI : Cavalleria Rusticana / LEONCAVALLO : I Pagliacci. Tadeusz Szlenkier, Julie Robard-Gendre, Valdis Jansons, Alexandra Marcellier… Christopher Franklin (direction) / Nicola Berloffa (mise en scène)

FUREUR, PASSION, CRIME… Rien ne manque chez Mascagni comme chez Leoncavallo ; le second semble même avoir tout absorbé du génie du premier … En programmant CAVALLERIA RUSTICANA (Rome, 1890) puis I PAGLIACCI (Milan,1892), deux opéras courts en une même soirée, Eric Blanc de la Naulte, directeur de l’opéra de Saint-Étienne, prolonge la réussite de Thaïs programmé en novembre dernier ; la nouvelle production réalise un sans faute qui est aussi avec le recul, un temps fort de cette saison lyrique 24 / 25 dans l’Hexagone. LIRE ici notre critique de THAÏS de Massenet (nov 2024 à l’Opéra de Saint-Étienne : https://www.classiquenews.com/opera-de-saint-etienne-massenet-nouvelle-production-de-thais-les-15-17-et-19-nov-2024-dans-la-mise-en-scene-de-pierre-emmanuel-rousseau-avec-jerome-boutillier-nathanael-et-ruth-iniesta-thais/)

Mascagni puis Leoncavallo livrent au début des années 1890 deux chefs d’œuvre absolus dont la tension voire la fureur tragique ont rarement été égalées à ce niveau. Le temps musical y fusionne avec l’urgence dramatique pour produire une flux cathartique continument saisissant. De l’un à l’autre drame : s’écoule une même lave orchestrale ; un même chant viscéral ; des contrastes volcaniques, une même exacerbation émotionnelle, une même instabilité psychique qui mène inéluctablement à la violence et au … meurtre.

 

 

Cavalleria Rusticana, I Pagliacci :
Sommets véristes
à l’Opéra de Saint-Étienne

Toutes les photos © Cyrille Cauvet – Opéra de Saint-Étienne 2025

 

 

Dans CAVALLERIA RUSTICANA, le metteur en scène NICOLA BERLOFFA, déjà venu à Saint-Étienne, évacue toute référence au milieu rural et villageois ; il opte pour le contexte ouvrier d’un vaste hangar industriel ; c’est une architecture grandiose dans son austérité (diaphane, lumineuse grâce aux somptueux éclairages de VALERIO TIBERI) dont l’espace démultiplié à la Piranese, souligne l’insignifiance humaine… Un splendide écrin pour contenir et exposer les passions les plus barbares ; où la population travailleuse défile ou se retrouve [pour l’air du vin chanté par Turiddu entre autres], avec de franches et très maîtrisées références au cinéma italien des années 1940 / 1950 [Lire à ce sujet notre entretien avec Nicola Berloffa : https://www.classiquenews.com/entretien-avec-nicola-berloffa-metteur-en-scene-a-propos-de-cavalleria-rusticana-et-i-pagliacci-a-lopera-de-saint-etienne/].

DES PASSIONS EXTRÊMES ET BARBARES… Dans un premier tableau pendant l’ouverture, on y voit Santuzza démunie, inquiète sur un lit de fortune, mise à l’écart… Quand toutes les filles du village se laissent littéralement submergées et conquises par le chant solaire du ténor en coulisse…Cette première image est aussi juste que somptueuse.
Ces êtres détruits ne se possèdent plus. Nicola Berloffa révèle une compréhension très fine de la charge passionnelle des deux ouvrages.
Esthétique [formidable travail des lumières], fulgurante toujours très juste, la mise en scène clarifie le parcours émotionnel de chaque protagoniste, comme l’enjeu de chaque confrontation ; ce qui les enferme définitivement dans une obsession asphyxiante qui devient criminelle : ici Turridu tout en n’arrivant plus à communiquer avec Santuzza, se soucie de son avenir [confession à sa mère] c’est bien toute l’ambivalence du personnage qui en haïssant celle qui l’aime, au point de la frapper, se soucie cependant de son avenir ; à l’inverse, Santuzza dont le personnage ne varie guère entre la fureur et le délire victimaire commet l’irréparable en dénonçant Turiddu, avec les conséquences fatales que l’on connaît ; puis chez Leoncavallo, Canio / Paillasse dévoré par la jalousie [habilement manipulé par Tonio – comme Otello par Iago chez Verdi] ne peut manifester sa haine impuissante… vis à vis de Nedda, sans la tuer sur scène.

 

 

Vaste écrin architectural où s’exposent les passions les plus barbares – Cavalleria Rusticana / Toutes les photos © Cyrille Cauvet – Opéra de Saint-Étienne 2025

 

 

Nicola Berloffa prend au pied de la lettre l’intention et l’adresse du présentateur imaginé par Leoncavallo [librettiste de son propre opéra] dans le prologue de PAGLIACCI : l’action est celle d’êtres de cœur et de sang ; ce qui se passe sur scène est bien réel. Cette ambiguïté qui joue tout le potentiel du réalisme scénique plonge au cœur de la magie théâtrale, son illusion structurante ; ce qui vaut au dernier acte de PAGLIACCI, une intensité dramatique redoublée dans la superposition des deux actions : la scène des bouffons (Colombine et Arlequin bientôt surpris par le mari de la première) d’une part ; le cheminement obsessionnel de Canio l’acteur, submergé par la passion jalouse…de l’autre ; Nicola Berloffa imagine alors un véritable ring de boxeurs ou 2 combattants se battent sans retenue [comme une mise en abîme de l’affrontement passionnel et amoureux qui se joue simultanément entre Nedda et Canio]. La brutalité et le sordide voire la barbarie dont parle Leoncavallo lui-même, sont ici magnifiquement représentés. Et c’est aussi un tour de force pour les choeurs présents tout autour de l’arène conflictuelle : Chœur lyrique Saint-Étienne Loire, Chœur de la Maîtrise de la Loire, de bout en bout impeccables, très astucieusement intégrés dans la mise en scène, dans une scénographique vraisemblable. Du très bel ouvrage.

 

 

 

TADEUSZ SZLENKIER
vériste accompli

L’exceptionnel Tadeusz Szlenkier dans le rôle de Turiddu puis (photo ci dessus), dans le rôle de Canio / Paillasse – Toutes les photos © Cyrille Cauvet – Opéra de Saint-Étienne 2025

 

Outre la violence qui s’expose sans complexe dans une fureur sauvage de l’un à l’autre drame, il revient aux chanteurs de relever les défis de cette conception si juste et si pertinente. En particulier le ténor polonais TADEUSZ SZLENKIER, véritable révélation de la soirée et pilier expressif des deux actions ; son mérite est d’autant plus convaincant et même impressionnant qu’il chante dans chaque action, le personnage le plus fort, le plus troublant aussi (Turiddu / Canio), auquel est réservé l’air le plus exigeant dramatiquement. Son tempérament d’acteur se double d’une endurance admirablement tenue.
TADEUSZ SZLENKIER n’a pas seulement la puissance et une technique extrêmement solide [chantant aujourd’hui tous les héros verdiens et pucciniens sans omettre l’Empereur de La femme sans ombre de Richard Strauss (!)], il est aussi un acteur tragique saisissant de justesse, sachant éviter tout dérapage (c’est à dire tout pathos exacerbé), délivrant ce vérisme mesuré, incarné, avec un sens naturel du texte. Conviction du jeu, entre équilibre et intensité, sobriété mais présence dramatique, aigus faciles, soutenus, naturels, … ses qualités sont superlatives.

Dans Cavalleria c’est moins sa confrontation avec Santuzza qui touche, que ses duos avec sa mère [Mama] en particulier le dernier où il dit adieu en sachant qu’il est condamné à mort ; puis face à Alfio, quand il avoue sa tendresse pour Santuzza et son inquiétude quand au destin de celle-ci, s’il vient à mourir… Confession bouleversante à laquelle le chanteur sait conférer toute la vérité requise. L’acteur ici égale la puissance et la justesse émotionnelle du chanteur ; son chant est éblouissant d’intelligence. Même engagement superlatif dans I PAGLIACCI ou son fameux air final au bord du ring de boxe (avant de tuer Nedda), est lui aussi franc, direct, d’une étonnante sincérité. De bout en bout sa prestation est époustouflante et ses deux personnages, bouleversants. En exprimant toutes leurs failles profondes, l’acteur-chanteur touche au cœur.

À ses côtés, aussi convaincants, le baryton letton VALDIS JANSONS qui fait d’abord un Alfio de grande classe dans Cavalleria ; puis dans Pagliacci, le chanteur assure deux incarnations non moins abouties : en monsieur loyal, fin et mordant ; en Tonio, diabolique et noir sans outrance. D’ailleurs chaque soliste défend sa partie avec intensité à commencer par la Santuzza de JULIE ROBARD-GENDRE, vocalement très intense et surtout, la délicieuse, suave mais aussi grave Nedda d’ALEXANDRA MARCELLIER. Sans omettre, la Lola, lumineuse, insouciante de MARION VERGEZ-PASCAL (l’antithèse absolue de Santuzza), ni le fin Beppe / Arlequin de MARC LARCHER

Au relief des caractères, aussi troublants que captivants, spécifiquement comme on l’a vu dans le cas des Turiddu et Canio de l’exceptionnel Tadeusz Szlankier, répond la baguette fine, sensible, nuancée du chef américain CHRISTOHER FRANKLIN. Aussi détaillé que dramatique, le maestro n’omet pas d’intégrer sa maîtrise de contrastes saisissants dans un flux marqué par l’urgence et la vérité psychologique.

Esthétique, cinématographique, sans omettre la beauté sobre dès décors, réalisation exemplaire des ateliers de l’Opéra de Saint-Étienne, la production est l’une des plus convaincantes vues depuis ce début d’année. Les directeurs d’opéra et de salles seraient inspirés de la reprendre tant elle convainc de façon magistrale. Il reste une dernière représentation jeudi 13 mars 2025 : https://www.classiquenews.com/opera-de-saint-etienne-cavalleria-rusticana-i-pagliacci-les-9-11-et-13-mars-2025-nicola-berloffa-mise-en-scene-christopher-franklin-direction/

I Pagliacci : la double action du dernier tableau ; les 2 boxeurs sur le ring et l’action des comédiens bouffons au devant – Toutes les photos © Cyrille Cauvet – Opéra de Saint-Étienne 2025

 

 

 

HOMAGE à JEAN-LOUIS PICHON… Après les saluts, tous les artistes restent sur scène et chantent le final de PAGLIACCI autour d »un grand portrait de Jean-Louis Pichon qui fut directeur des lieux pendant 25 ans [1983-2008]. L’homme de théâtre nous a quitté en ce début mars 2025 ; toute la salle se lève alors pour lui dédier un magnifique et légitime hommage.

 

 

 

 

 

à venir à l’Opéra de Saint-Étienne

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Prochaine production événement à l’Opéra de Saint-Étienne : Samson et Dalila de Saint-Saëns : les 9, 11 et 13 mai 2025, Grand Théâtre Massenet / Direction : Guillaume Tourniaire / mise en scène : Immo Karaman – Réservez vos places directement sur le site de l’Opéra de Saint-Étienne : https://opera.saint-etienne.fr/otse/saison-24-25-1/spectacles//type-lyrique/samson-et-dalila/s-800/

 

 

 

 

 

LIRE aussi

LIRE aussi notre ENTRETIEN avec ÉRIC BLANC DE LA NAULTE, directeur de l’Opéra de Saint-Étienne : https://www.classiquenews.com/entretien-avec-eric-blanc-de-la-naulte-directeur-generale-et-artistique-de-lopera-de-saint-etienne-a-propos-de-la-nouvelle-saison-2024-2025/

LIRE aussi notre présentation de Cavalleria Rusticana et I Pagliacci à l’Opéra de Saint-Étienne dans la mise en scène de Nicola Beloffa (9, 11, 13 mars 2025) : https://www.classiquenews.com/entretien-avec-nicola-berloffa-metteur-en-scene-a-propos-de-cavalleria-rusticana-et-i-pagliacci-a-lopera-de-saint-etienne/

 

 

Présentation de la saison 2024 – 2025 par Éric Blanc de la Naulte, directeur de l’Opéra de Saint-Étienne :

ENTRETIEN avec Éric BLANC DE LA NAULTE, directeur général et artistique de l’Opéra de Saint-Étienne, à propos de la nouvelle saison 2024-2025

 

 

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CD événement, annonce – Reynaldo HAHN : Le Dieu Bleu (musique du ballet, 1912) – Orch des Frivolités parisiennes – Dylan Corlay, direction / Live de concert,Soissons,sept 2023 (1 cd B RECORDS)

L’éditeur défricheur b records nous régale au printemps 2025 avec ce nouvel opus d’un ouvrage inédit créé au Châtelet en mai 1912 : la musique du ballet inconnu Le Dieu Bleu de Reynaldo Hahn, évocation magistrale d’un orient fantasmé (le Dieu bleu renvoie à la figuration du Shiva hindou), à la fois hautement dramatique et d’une orchestration luxueuse…

 

 

Dans une réalisation fidèle à la création historique, les 70 instrumentistes réunis dans ce live de sept 2023 (Soissons) ressuscite la matière foisonnante et fantastique, onirique et impétueuse du ballet Le Dieu Bleu que Diaghilev commande à Hahn pour renouveler le triomphe de Shéhérazade de 1910.
Parmi une série de séquences particulièrement caractérisées, l’auditeur se laisse bercer par les accents sinueux, envoûtant d’un orchestre très sollicité. Entre autres, séductions orchestrales, la 2è partie du 8 « Colère des prêtres », après le tumulte de la haine autoritaire, se répand une atmosphère brumeuse et inquiétante (introduite par le cor anglais) qui ouvre sur le très beau « Clair de lune » (9), un épisode onctueux (clarinette et cordes blanches et fantomatiques), avec fragmentation sonore, aérienne et liquide à la fois (grâce au piano cristallin)… certainement l’épisode le plus saisissant du ballet, mêlant sensualité, mystère, brume inquiétante… un parfum digne de la Padmavati de Roussel, et qui se déploie plus manifestement encore quand la déesse paraît (12), avant le tableau majeur dédié au Dieu bleu (danse et scène, 13). Une parure orchestrale digne du charisme de son créateur, le danseur légendaire Nijinsky dont l’imagerie a conservé son solo éblouissant lorsqu’il émerge du lotus primordial… Superbe révélation.

 

 

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CD événement, annonce – Reynaldo HAHN : Le Dieu Bleu (musique du ballet, 1912) – Orch des Frivolités parisiennes – Dylan Corlay, direction / Live de concert enregistré à Soissons en sept 2023 (1 cd B RECORDS) – CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2025.
PLUS D’INFOS sur le site de l’éditeur B RECORDS : https://www.b-records.fr/#portfolio

 

 

 

CRITIQUE, opéra. GENEVE, La Cité Bleue, le 8 mars 2025. PIAZZOLLA : Maria de Buenos Aires. Sol Garcia (Maria), Diego Valentin Flores (El Gorrion), Sebastian Rossi (El Duende). Amélie Parias (mise en espace), William Sabatier (Bandonéon et direction artistique)

À La Cité Bleue de Genève, dirigé par le multi-cartes Leonardo Garcia Alarcon, un événement musical exceptionnel a vu le bandonéoniste William Sabatier s’attacher à restituer l’intégrité originelle de María de Buenos Aires, l’operita emblématique d’Astor Piazzolla et Horacio Ferrer. Cette œuvre, dont l’authenticité avait été altérée par les contraintes de l’industrie du disque à l’époque de sa création, retrouve ici sa forme initiale, grâce à une reconstitution minutieuse. Sabatier, entouré d’un ensemble de onze musiciens, propose une interprétation qui renoue avec la version de 1968, réintégrant notamment deux morceaux coupés lors de l’enregistrement original : La Fábula de la rosa en el asfalto et Esquerzo yumba de las tres de la mañana.

 

Cette recréation, présentée à la Cité Bleue de Genève, se distingue par son énergie brute et sa fièvre expressive, contrastant avec les versions plus policées qui ont suivi, comme celle arrangée par Leonid Desyatnikov pour Gidon Kremer. Sabatier, au bandonéon, insuffle une urgence et une passion qui captivent l’auditoire, soutenu par un orchestre vibrant où se mêlent flûte, guitare électrique et quatuor à cordes (le remarquable Quatuor Terpsychordes). Les transitions sonores, enrichies de bruits urbains et de voix enregistrées, plongent le public dans l’atmosphère envoûtante de Buenos Aires.

Sur scène, un trio vocal exceptionnel incarne les personnages centraux de cette fable poétique. Sol García, dans le rôle de María, déploie une voix mélancolique et puissante, ressuscitant avec grâce cette héroïne à la fois humaine et allégorique, symbole de l’âme du tango. Diego Valentín Flores, interprétant Gorrión, apporte une émotion profonde à travers ses interventions chantées, tandis que Sebastián Rossi, en Duende, incarne avec une présence magnétique l’esprit narrateur de l’œuvre. Sa diction rythmée et expressive, teintée d’une poésie surréaliste, captive autant qu’elle déroute.

 

 

Cependant, cette production ambitieuse se heurte à un écueil majeur : l’absence de surtitrage. Bien que Sabatier insiste sur l’importance du texte de Ferrer, considéré comme une composante essentielle de la partition, le public non hispanophone se retrouve souvent perdu dans les méandres du livret, truffé de références au lunfardo (l’argot « portègne »). La mise en espace d’Amélie Parias, bien que sobre et évocatrice, peine à compenser cette lacune, laissant les spectateurs démunis face à la complexité narrative de l’œuvre.

Malgré cette difficulté, la force musicale de cette María de Buenos Aires genevoise est indéniable. Les instrumentistes, placés au cœur de l’action, tissent une tapisserie sonore riche et envoûtante, où le bandonéon de Sabatier occupe une place centrale. Les mélodies déchirantes et les rythmes syncopés de Piazzolla, interprétés avec une intensité remarquable, emportent l’adhésion du public, comme en témoignent les acclamations nourries à la fin de la représentation.

 

 

 

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CRITIQUE, opéra. GENEVE, La Cité Bleue, les 6/7/8 mars 2025. PIAZZOLLA : Maria de Buenos Aires. Sol Garcia (Maria), Diego Valentin Flores (El Gorrion), Sebastian Rossi (El Duende). Amélie Parias (mise en espace), William Sabatier (Bandonéon et direction artistique). Toutes les photos © Giulia Charbit

CHORÉGIES D’ORANGE 2025 : du 13 juin au 25 juillet 2025. VERDI : Il Trovatore, La Forza del destino, Anna Netrebko, Anna Pirozzi… Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, Orchestre National de Lyon, Daniele Rustioni, Xavier de Maistre…

Pour les amateurs d’art lyrique, de symphonique, de danse aussi, la programmation des Chorégies d’Orange 2025 s’annonce à nouveau spectaculaire sous le ciel étoilé de Provence ; les 35 000 spectateurs de l’édition 2024 peuvent en témoigner : grâce au site patrimonial qui les accueille, le Théâtre Antique et la statue colossale de l’Empereur Auguste, les Chorégies sont un site architectural et historique dont la majesté impressionne ; c’est un cadre qui déjà est un must absolu.

 

Dans les faits, les amoureux de chant et de belle voix seront comblés : Jean-Louis Grinda, directeur des Chorégies, nous promet le grand frisson en affichant « le chant dans tous ses états » (9 soirées lyriques sur 13) ; en témoignent entre autres, les 2 opéras de VERDI, parmi ses plus dramatiques et passionnés : IL TROVATORE et LA FORZA DEL DESTINO (en version de concert). Depuis l’époque romaine, le son y est exceptionnel, et la musique, choyée, sublimée comme nul part ailleurs.

Du 13 juin au 25 juillet 2025,13 soirées magiciennes vous attendent à Orange. Nouveau partenariat cette année avec le Festival d’Art Lyrique d’Aix-en-Provence pour deux programmes : « la grande scène émergente », jeudi 17 juillet, avec les solistes de l’Académie du Festival aixois, avec l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée sous la direction d’Evan Rogister, et la représentation de La Forza du destino, dim 20 juillet défendue par les effectifs de l’Opéra de Lyon (lire plus loin)…

 

TOUTES les infos, le détail des programmes, … sur le site des Chorégies d’Orange 2025 : https://www.choregies.fr/?lang=fr

 

 

 

A NE PAS MANQUER en 2025… L’équilibre, l’excellence, la diversité sont à nouveau au rendez-vous ; parmi les temps forts, à ne pas manquer : dès le 13 juin, « Pop the Opera », ven 13 juin, 21h30, spectacle de musique et de danse (cette dernière discipline est une nouveauté 2025) en création, avec collégiens et lycéens sur scène (sur une idée originale de Jean-Louis Grinda ) ; le Requiem de Mozart samedi 28 juin (21h30), sous la direction de Diego Ceretta (avec Jessica Pratt, Aya Wakizono, Dmitry Korchak, Inho Jeong, l’Orchestre philharmonique de Monte-Carlo, Singverein de Vienne) : l’unique représentation du TROVATORE de VERDI (1853) dimanche 6 juillet (21h30) avec Anna Netrebko (dans le rôle de Leonora, un rôle qui lui va comme un gant et qu’elle a chanté de Salzbourg à New York…), Marie-Nicole Lemieux (Azucena), Aleksei Isaev (Luna), Yusif Eyvazov (Manrico), avec l’Orchestre philharmonique de Marseille, les Chœurs des Chorégies et de l’Opéra Grand Avignon ; les 26 danseurs du Lac des cygnes chorégraphié par Angelin Preljocaj (samedi 12 juillet, 21h30) ; LA FORZA DEL DESTINO (également en version de concert, dim 20 juillet, 21h30) sous la direction de Daniele Rustioni, avec Anna Pirozzi (Leonora), Brian Jagde (Don Alvaro), Michel Pertuis (Calatrava et Cadre Guardiano), Ekaterina Semenchuk (Preziosilla), l’Orchestre et les Choeurs de l’Opéra de Lyon ; sans omettre, le tremplin ou scène émergente réservée le 15 juillet (21h) aux jeunes chanteurs, les tempéraments de la nouvelle génération dont les sopranos Chloé Chaume, Juliette Tacchino, les ténors Kaëlig Boché et Julien Henric, avec le piano de Kira Parfeevets …

 

Programme
Soirées magiques aux Chorégies d’Orange 2025 au cœur du Théâtre antique et sous la voûte étoilée…

Vendredi 13 juin à 21h30 : Pop the Opera

Mardi 24 juin à 21h30 : Johny Symphonique (annulé)

Samedi 28 juin à 21h30 : Mozart Requiem

En juin (date à définir) à 21h : Musiques en fête

Samedi 5 juillet à 21h30 :
Concert symphonique
(avec la participation du harpiste Xavier de Maistre)

Dimanche 6 juillet à 21h30
Il Trovatore / Verdi (version concert)

Mercredi 9 juillet à 21h30 : Récital Renaud Capuçon

Samedi 12 juillet à 21h30
Ballet Preljocaj / Le Lac des Cygnes

Mardi 15 juillet à 21h :
Récital scène émergente (au Palais des Princes)

Jeudi 17 juillet à 21h30 :
Grande scène émergente

Dimanche 20 juillet à 21h30 :
La Forza del Destino / Verdi (version concert)

Mardi 22 juillet à 21h30
Fantasia Disney (ciné-concert)

Vendredi 25 juillet à 21h30
Liverpool Oratorio / Paul McCartney

 

La billetterie des Chorégies d’Orange 2025

La billetterie des Chorégies d’Orange 2025 ouvre ses portes le 10 mars 2025 à 10h.

 

Les tarifs des Chorégies d’Orange 2025
Il Trovatore / La Forza del Destino : de 19€ à 250€
Johny Symphonique / Requiem / Liverpool Oratorio : de 24€ à 135€
Le Lac des Cygnes : de 18€ à 100€
Concert symphonique : de 15€ à 85€
Récital Renaud Capuçon : de 15€ à 50€
Pop The Opera / Grande scène émergente / Ciné-concert Fantasia : de 8 à 35€

 

Des formules avantageuses pour tous les mélomanes
Profitez de formules d’abonnement pour vivre pleinement cette édition 2025 :
Abonnement Opéra :
-20% sur le duo magique « Il Trovatore + La Forza del Destino »

Abonnement Jeunes Pousses :
-20% pour découvrir les talents de demain (dès 2 spectacles parmi Pop the Opera,
Grande Scène Émergente et Récital)

Abonnement Liberté :
-15% à partir de 3 spectacles sur toute la saison (hors Johnny Symphonique)

Pack VIP : vivez une expérience unique
Prolongez la magie après le spectacle avec le Pack VIP (50€/personne en supplément du billet) :
Accès exclusif au cocktail en présence des artistes ;
Une expérience privilégiée au cœur du festival ;
Réservation simple lors de l’achat de votre billet en ligne ou sur le bulletin papier.

 

 

Les performances des Chorégies d’Orange se déroulent au sein du Théâtre Antique d’Orange, situé à l’adresse Rue Madeleine Roch.

Venir en voiture
Via l’autoroute A7 : Sortie n°22 « Orange sud » ou n°21 « Orange centre. »
Via l’autoroute A9 : Direction « Orange centre » (sortie n°21).
 Option éco-responsable : Pensez au covoiturage via Blablacar ou Carpooling.

Venir en train 
Gare d’Orange : une agréable balade de 15 minutes à pied jusqu’au théâtre.
Gare d’Avignon : à 45 minutes de la Ville d’Orange en navette.

Venir en bus
Descendez à l’arrêt « Pôle multimodal de la gare d’Orange. »

 

 


Théâtre Antique – Orange
84100 Orange
Contacts :
04 90 34 24 24

[email protected]

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CRITIQUE, concert. BOULOGNE-BILLANCOURT, La Seine Musicale, le 9 mars 2025. Ersnt von Dohnanyi, Mulsant, Debussy (La Mer, 1908). ORCHESTRE COLONNE, Sora Elisabeth Lee (direction)

Ce dimanche après midi à la Seine musicale est un excellent moyen de mesurer l’actuel niveau de l’Orchestre Colonne, dans un programme particulièrement riche et divers. Un programme d’autant plus représentatif que l’œuvre principale à l’affiche, est liée à l’histoire de l’Orchestre.

 

En ouverture, l’orchestration foisonnante, grandiloquente et inattendue d’après le Prélude opus 3 n°2 de Rachmaninov, originellement pour piano et qu’Henry Wood, fondateur des Proms de Londres, réorchestre ici avec tout le panache et le sens des effets attendus. De quoi chauffer les instrumentistes sous la baguette de la cheffe Sora Elisabeth LEE qui remplace le directeur musical de l’Orchestre Colonne (Marc Korovitch). Soit un lever de rideau des plus pétaradants.

La pièce qui suit, (- illustrant la séquence « invitation au voyage ») est une adresse en forme d’énigme aux auditeurs : à eux d’en reconnaître l’auteur non dévoilé au moment du concert). Le choix rappelle combien l’Orchestre Colonne sait défricher et surprendre : au piano Juliette Journaux entame la fantaisie pour clavier et orchestre, après des accords fracassants alla Brahms (un condensé de l’ouverture originelle des Variations qui dure en réalité plus longtemps) : les premières mesures de l’air « Ah vous dirai-je maman, ce qui cause de mon tourment… » de Mozart, crée la surprise en contraste, puis repris, ornementé de divers façons par l’orchestre et la soliste, dans un jeu qui mêle en toute liberté, humour (à la Saint-Saëns), haut romantisme (à la Liszt et Tchaikovski) sans omettre dans sa dernière partie, un somptueux épisode où le piano avec cor chante sur un tapis orchestral aussi dense et raffiné qu’un opéra de Richard Strauss… !
La réponse viendra du public mais après un temps d’hésitations (et plusieurs erreurs) : l’inattendu Ernst Von Donanyi (né à Budapest en 1877 et mort à New York en 1960, père du fameux chef Christoph). Pleine de facétie mordante, d’expressionnisme âpre et de citations à foisons, l’œuvre éclectique et délirante date de 1914. Les esprits sont eux ainsi chauffés, mis en alerte et tout à fait prêts pour aborder ensuite la seconde partie du programme.

Après l’entracte, en création parisienne, les musiciens jouent une pièce de la compositrice Florentine Mulsant (présente dans le public) ; l’élégance radieuse de son Concerto pour Piccolo et orchestre (2017) retient immédiatement l’attention ; la partition est pleine de couleurs et aussi d’espièglerie active et solaire dont le 2è et dernier mouvement en particulier, qui déploie tout un jeu de cache-cache entre l’instrument soliste et l’effectif orchestral. Fluide, aérien, en connivence avec l’orchestre (et souvent en dialogue ou doublé avec cor, clarinette ou hautbois), le piccolo de la soliste invitée, Anaïs BENOIT, charme par sa flexibilité expressive.

 

L’Orchestre COLONNE au grand complet pour La Mer de Claude Debussy, qu’il a créé en 1908 © classiquenews 25

 

Enfin cerise sur le gâteau et objet réel de notre présence, La Mer de Debussy, dans la version « intercalaire » de 1908, crée par l’Orchestre Colonne sous la direction du compositeur, avant la version définitive de 1909. Cette version est toujours contenue dans les archives de l’Orchestre ; certaines pages en sont présentées pendant l’entracte…
La direction de la cheffe invitée ne manque ni d’énergie ni de précision ; offrant surtout une lecture aux contrastes décuplés, faisant miroiter l’opulente texture d’un Debussy plus conquérant que véritablement raffiné ; la cheffe joue moins sur la transparence comme la fragmentation sensorielle de la matière musicale que sur l’affirmation de crescendos qui culminent dans des tutti explosifs (au risque de perdre le fil de cette pulvérisation sonore qui fait la clé de la première séquence). Pour autant les couleurs et la matière atmosphérique du I (« De l’aube à midi sur la mer ») composent une belle entrée en matière ; « Jeux de vagues » (II) déploie ses rythmes de danses (la valse ivre fameuse), … avec une fin évaporée réussie ; enfin « Dialogue du vent et de la mer » (III) débute dans cette urgence instable et inquiète requise, ce mouvement orageux des éléments contrariés qui crée une arène conflictuelle, où perce au fur et à mesure de la houle sinueuse, contrariée, la plainte languissante des flûtes, agents du vent tempétueux soudainement implorant qui cependant sera triomphal (grâce à la claque finale des cuivres). L’engagement des instrumentistes, leur acuité expressive sont constants, s’inscrivant alors avec conviction et autorité dans la grande histoire qui relie la partition à l’Orchestre. Par son ambition et l’énergie déployée, le concert à la Seine Musicale convainc particulièrement, il a offert un bain symphonique à la hauteur de nos attentes.

 

 

 

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CRITIQUE, concert. BOULOGNE-BILL.,La Seine Musicale, le 9 mars 2025. Ersnt von Dohnanyi, Mulsant, Debussy (La Mer, 1908). ORCHESTRE COLONNE, Sora Elisabeth Lee (direction).

 

 

 

agenda

PROCHAIN INCONTOURNABLE – Prochain concert de l’Orchestre Colonne à ne pas manquer : « La Force de l’amour », dim 11 mai 2025, PARIS, Salle Gaveau – Au programme : TCHAÏKOVSKY ⸱ Roméo et Juliette / WAGNER ⸱ Tristan et Iseult – Prélude et Liebestod / SAINT-SAËNS ⸱ Danse Macabre ; La cloche ; Souvenances / MANOUKIAN ⸱ Aristeides and Lyra (création mondiale) : https://www.orchestrecolonne.fr/agenda/saison-2024-25/symphonique/la-force-de-lamour/

 

La Force de l’Amour

 

 

CRITIQUE, opéra. ZURICH, Opernhaus, le 4 mars 2025. LEHAR : La Veuve joyeuse… Barrie Kosky / Ben Glassberg

Créée l’an passé à l’Opéra de Zurich, la production de La Veuve joyeuse imaginée par Barrie Kosky fait son retour avec un plateau vocal renouvelé pour les rôles principaux. Au-delà de la réussite visuelle du spectacle, le mélange d’énergie débridée et de mélancolie donne une profondeur inattendue au chef d’œuvre de Franz Lehar, qui crépite de mille feux sous la baguette inventive de Ben Glassberg. A savourer sans modération !

 

L’ancien directeur de la Komishe Oper de Berlin frappe encore un grand coup dans le domaine de l’opérette, lui qui a redonné ses lettres de noblesse à ce genre, en le dépoussiérant de tout statisme. D’emblée, le spectacle surprend en modifiant la première scène, dévolue à une Hanna plus âgée qui se remémore ses belles années : assise au piano, elle écoute un arrangement de La Veuve joyeuse au piano, interprété par Franz Lehar lui-même. Une mise en abîme évidemment saisissante, à la conclusion déchirante en fin de soirée, lorsque Hanna contemple le portrait du regretté Danilo, pour affronter un second veuvage.

Le happy-end ainsi refusé donne davantage de relief au destin tourmenté de l’héroïne, jadis entouré de prétendants ivres de sa beauté, comme de sa fortune : deux moteurs d’une farce haute en couleurs, qui moque les travers de la haute société, entre cupidité et faux-semblants. L’originalité du livret tient dans le refus têtu de Danilo de céder aux avances de son ancienne promise Hanna : Kosky transcende leurs différents duos d’une sensualité chorégraphique touchante et subtile, comme un jeu du chat et de la souris, délicieusement facétieux. Le minimalisme des décors bénéficie d’une direction d’acteurs étourdissante, où chaque personnage secondaire semble vivre d’une personnalité propre, à chaque fois rehaussée par l’énergie inépuisable des danseurs, très présents tout du long. On aime aussi la transposition dans les années 1920, qui permet à Kosky d’exhiber des costumes grandioses, à même de figurer l’insouciance de la période d’avant-guerre. Chaque tableau, de l’ambassade aux appartements de l’héritière, avant l’évocation des grisettes parisiennes, montre la qualité du travail en la matière, qui laisse à penser que la confection des costumes a bénéficié d’un budget illimité. L’autre grande réussite de la soirée vient de la direction aussi pétillante que du champagne, de Ben Glassberg, qui fait des débuts réussis à Zurich. La variété de l’inspiration de Lehar, entre l’énergie rythmique des premiers tableaux, jusqu’aux élans plus folkloriques au II, sait aussi trouver le chemin des scènes plus intimes, qui lorgnent vers Puccini.

Le plateau vocal réuni pour cette reprise ne se situe malheureusement pas au même niveau d’excellence, tout en assurant l’essentiel. On est surtout déçu par le pâle Andrew Owens (Camille de Rosillon), qui peine à passer la rampe par rapport à sa partenaire Anastasiya Taratorkina (Valencienne), d’une belle rondeur d’émission. Malgré un timbre fatigué dans l’aigu, Martin Gantner compose un Danilo saisissant de vérité, d’une grande finesse théâtrale. Également parfaite en ce domaine, Vida Miknevičiūtė (Hanna) montre une solidité technique sans faille, qui ne parvient pas à faire oublier un aigu peu harmonieux. On préfère la truculence roborative des seconds rôles, souvent désopilants à l’image des parfaits Michael Kraus (Mirko Zeta) et Barbara Grimm (Njegus).

 

 

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CRITIQUE, opéra. ZURICH, Opernhaus, le 4 mars 2025. LEHAR : La Veuve joyeuse. Michael Kraus (Baron Mirko Zeta), Anastasiya Taratorkina (Valencienne), Martin Gantner (Graf Danilo Danilowitsch), Vida Miknevičiūtė (Hanna Glawari), Andrew Owens (Camille de Rosillon), Omer Kobiljak (Vicomte Cascada), Nathan Haller (Raoul de Saint-Brioche), Valeriy Murga (Bogdanowitsch), Maria Stella Maurizi (Sylviane), Chao Deng (Kromow), Flavia Stricker (Olga), Brent Michael Smith (Pritschitsch), Liliana Nikiteanu (Praskowia), Barbara Grimm (Njegus), Philharmonia Zürich, Chor der Oper Zürich, Statistenverein am Opernhaus Zürich, Barrie Kosky (mise en scène) / Ben Glassberg (direction musicale). A l’affiche de l’Opéra de Zurich jusqu’au 26 mars 2025. Photo : Monika Rittershaus

 

 

 

 

VIDEO : Entretien avec Barrie Kosky et Klaus Grünberg

 

COMPIEGNE, Théâtre Impérial. SONDHEIM : COMPANY (1970), les 15 et 16 mars 2025. Gaétan Borg, Jasmine Roy, Jeanne Jerosme, Neïma Naouri… Larry Blank, direction / James Bonas,mise en scène

Perle de Broadway jamais présentée en France, COMPANY de Stephen Sondheim (1970) qui brosse un portrait décapant, jubilatoire de la classe moyenne new yorkaise était très attendue en ce mois de mars 2025. Première à l’Opéra de Massy, totalement réussie et donc convaincante (LIRE ici notre critique de COMPANY de Sondheim, en création française à l’Opéra de Massy). Après Massy, ce joyau superbement réalisé (James Bonas signe la mise en scène, réunit une équipe de chanteurs, acteurs, danseurs épatants qui font escale à présent au Théâtre Impérial de Compiègne, ces 15 et 16 mars prochains.

 

 

A partir d’une fête d’anniversaire, celle du célibataire convaincu Bobby (35 ans), l’action met en scène 5 couples au quotidien, ses invités très proches, dont chaque saynète révèle les failles et le secret de leur entente… Face à eux, Robert / Bobby questionne son célibat, évoque ses nombreuses aventures (avec surtout April l’hôtesse de l’air délicieusement idiote). Le swing est sur la scène grâce à de nombreux ensembles magnifiquement synchronisés ; le bonheur vient aussi de la fosse, trépidante, furieusement rythmique sous la conduite d’un expert de la comédie musicale américaine et de Stephen Sondheim en particulier, Larry Blank. Incontournable.

 

 

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COMPANY de Stephen Sondheim
Compiègne, Théâtre Impérial
15 mars 2025, 20h
16 mars 2025, 16h

RÉSERVEZ vos places directement sur le site du Théâtre Impérial de Compiègne : https://www.theatresdecompiegne.com/company-524

 

 

 

 

 

STEPHEN SONDHEIM, Musique et chansons
GEORGE FURTH, Livret
STÉPHANE LAPORTE, Traduction française du livret
LARRY BLANK (direction musicale) – JAMES BONAS (mise en scène)
Company à Compiègne : l’association des deux mots sonne comme une belle promesse, celle d’une splendide comédie musicale de Stephen Sondheim. Musique, chant, danse, théâtre, folies et surprises réunies, voici le Broadway impérial ! …

 

Créé le 26 avril 1970 au Alvin Theatre de Broadway

Avec
Robert : Gaétan Borg
Joanne : Jasmine Roy
Larry : Scott Emerson
Amy : Jeanne Jerosme
Paul : Sinan Bertrand
Sarah : Marion Preite
Harry : Arnaud Masclet
Susan : Lucille Cazenave
Peter : Joseph de Cange
Jenny : Eva Gentili
David : Loïc Suberville
April : Camille Nicolas
Marta : Neima Naouri
Kathy : Myriana Hatchi

Orchestre national d’Île-de-France

 

 

 

 

 

 

 

critique

LIRE aussi notre critique de COMPANY de Stephen Sondheim, création française à l’Opéra de Massy, les 8 et 9 mars 2025 : https://www.classiquenews.com/critique-comedie-musicale-opera-de-massy-les-8-et-9-mars-2025-stephen-sondheim-company-gaetan-borg-jasmine-roy-jeanne-jerosme-neima-naouri-orchestre-national-dile-de-fran/

La soirée s’annonçait flamboyante, énergique voire pétillante : elle est tout cela voire plus encore. « COMPANY » c’est d’abord un portrait décapant de la société américaine, précisément new-yorkaise des années 1970 : fumette facile, sexe libre, sociabilité favorisée à tous les étages. Stephen Sondheim met tout cela en musique avec brio, un panache orchestral qui s’inscrit dans les pas du meilleur Bernstein et qui, tout en absorbant la rythmique et la grâce mélodique de Broadway, sait aussi renouveler le principe d’une narration musicale.
 

 

CRITIQUE, comédie musicale. Opéra de Massy, les 8 et 9 mars 2025. Stephen Sondheim : COMPANY. Gaétan Borg, Jasmine Roy, Jeanne Jerosme, Neïma Naouri, … Orchestre National d’Île-de-France. Larry Blank, direction / James Bonas,mise en scène

 

 

 

CLERMONT-FERRAND. 28ème CONCOURS INTERNATIONAL DE CHANT, du 8 au 12 avril 2025. Dido & Aeneas de Purcell, Le Messie de Haendel, lieder et mélodies françaises…

Le 28ème CONCOURS INTERNATIONAL DE CHANT DE CLERMONT-FERRAND accueille une centaine d’artistes du monde entier réunie pour une semaine d’exception. Depuis sa création en 1985 par le ténor Bernard Plantey, le Concours International de Chant de Clermont-Ferrand est devenu une référence incontournable sur la scène mondiale.

 

Sa particularité : offrir, en plus de prix spéciaux, des engagements pour les oeuvres auditionnées. Soit une opportunité de se faire un nom pour tout lauréat ainsi couronné : être distingué mais aussi engagé dans une production scénique. De quoi encourager les tempéraments les plus convaincants et aussi leur permettre de se perfectionner encore… La 28ème édition du Concours International de Chant de Clermont-Ferrand met à l’honneur en 2025, Dido andÆneas de Purcell (production de l’ensemble baroque Les Surprises), l’oratorio le plus célèbre de Haendel, « Der Messias / Le Messie », nouvelle production de l’Opéra de Limoges, ainsi qu’un duo Piano – Voix comprenant lieder et mélodies françaises qui bénéficiera, notamment, d’une résidence à la Fondation Royaumont.

Sur près de 350 candidatures reçues du monde entier, une centaine seulement a été retenue pour participer aux épreuves. Le public très friand de ce rendez-vous (toutes les auditions sont publiques), est invité chaque année à découvrir les artistes et participer aux différentes étapes du concours (accès libre et gratuit pour les auditions, à l’exception de la finale qui est payante).

 

 

28ème CONCOURS international de CHANT
de CLERMONT-FERRAND

Du 8 au 12 avril 2025 :

Éliminatoires : Mardi 8 et merc. 9 avril 2025
14h et 20h ( Entrée libre)

Demi-finales : Jeu. 10 avril 2025
14h et 20h (Entrée libre)

Finale : Sam. 12 avril 2025
15h (12 à 25euros)

OPÉRA-THÉÂTRE CLERMONT-FERRAND

Toutes les infos sur le site de l’Opéra-Théâtre de Clermont-Ferrand :
https://clermont-auvergne-opera.com/

 

 

REPORTAGE VIDEO 2015 : le 25è Concours international de chant de Clermont-Ferrand 2025 (qui couronne entre autres la soprano ELSA DREISIG lors d’audition d’airs du Barbier de Séville de Rossini

CRITIQUE, concert. STRASBOURG, Salle Erasme, le 6 mars 2025. SIBELIUS / SCHUMANN. Simone Lamsma (violon), Oksana Lyniv (direction)

Après un concert dirigé par le chef allemand Michael Sanderling aux côtés de la violoniste bulgare Liya Petrova, en février, c’était au tour de la très médiatique cheffe ukrainienne Oksana Lyniv (accompagnée par la violoniste néerlandaise Simone Lamsma) de diriger l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg dans ses murs de la Salle Erasme à Strasbourg

 

En guise de mise en bouche (mais quel tour de chauffe !), rien moins que l’Ouverture de Parsifal puisque Oksana Lyniv, on le sait, a désormais ses entrées au prestigieux Festival de Bayreuth. Elle en livre une lecture pétrie d’élégance et finement nuancée, notamment les cordes qui tissent des unissons puissants. Puis c’est la violoniste hollandaise Simone Lamsma de faire son entrée, pour délivrer le célèbre Concerto pour violon de Jean Sibelius. Dès les premières mesures, dans un son mystérieux, pianissimo et lointain, la cheffe et sa soliste ont trouvé un parfait accord qui s’est amplifié tout au long de leur majestueuse interprétation. Si la première fait tonner l’orchestre, elle obtient également des nuances d’une grande subtilité, laissant les solistes instrumentaux s’exprimer, toujours en mettant en valeur le jeu de la violoniste néerlandaise qui, avec une grande délicatesse, participe à cette fête. Sa sonorité personnelle est pleine, pure et délicatement nuancée, les phrasés sont amples et la virtuosité crânement maîtrisée. Les pianissimi planent haut comme dans le plus pur belcanto, mais les accents peuvent se vivifier et monter en puissance, comme par exemple dans certaines doubles cordes. La délicate violoniste va revenir plusieurs fois saluer en réponse aux acclamations du public et offre au public alsacien deux bis, le premier en duo avec son ami Violoncelle solo de l’OPS, le très court “Water droplets” du même Sibelius, puis en solo les incroyables “Furies” extraites de la Sonate pour violon seul n°2 d’Eugène Ysaye, vivement acclamées par une audience médusée !

En seconde partie de soirée, l’énergie de la première partie continue de rayonner, portée par une Deuxième Symphonie de Robert Schumann riche en nuances et d’une fluidité remarquable, bien qu’elle puisse parfois sembler un peu trop impétueuse. Son lyrisme exubérant évoque presque l’opéra verdien, ajoutant une dimension théâtrale à l’œuvre. L’Allegro maestoso, solidement construit et mélodieux, est suivi d’un Scherzo d’une vitalité irrésistible. L’Adagio espressivo est exécuté tout de lumière et profondeur mystérieuse, tandis que la densité orchestrale se fait peut-être trop sentir dans le mouvement extrême qu’est le Finale – une tendance qui peut rappeler certaines limites de la direction à l’opéra. Malgré cela, la performance reste d’un niveau exceptionnel, avec un orchestre parfaitement maîtrisé. Et la directrice musicale du Teatro comunale de Bologne confirme qu’elle excelle bien au-delà du simple rôle de cheffe d’orchestre d’opéra !

 

 

 

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CRITIQUE, concert. STRASBOURG, Salle Erasme, le 6 mars 2025. SIBELIUS / SCHUMANN. Simone Lamsma (violon), Oksana Lyniv (direction). Crédit photos © Grégory Massat

 

CD événement, annonce. HOWARD SHORE Anthology – The Paris Concerts (The Hobbit,… 2 cd, Deutsche Grammophon 2023)

Le compositeur canadien multi primé Howard Shore est le sujet flamboyant de ce nouveau double cd édité par Deutsche Grammophon. Hautement dramatique, musicalement dense et contrastée, la musique de Shore a honoré plus d’une centaine de films et lui a valu une belle série de disticntions dont 3 Oscars, 3 Golden Globes, 4 Grammys (The Hobbit, …). Le compositeur a également écrit pour l’opéra, le ballet, le concert.

 

 

Enregistrée lors du « Week-End Howard Shore » de Radio France en 2023, l’anthologie publiée par Deutsche Gramophon, reflète la riche variété des productions de Shore : l’auditeur cinéphile ou pas retrouve un échantillon emblématique de musiques diverses, pour le cinéma : The Fly, Naked Lunch, Ed Wood, Crash, Esther Kahn, Eastern Promises et, bien sûr, Le Seigneur des Anneaux et Le Hobbit, ainsi que la pièce pour piano solo non cinématographique « Catania ». Deux phalanges françaises assurent la réalisation artistique de cette somme discographique, célébration opportune à l’un des compositeurs les mieux inspirés pour le grand écran. L’Orchestre Philharmonique de Radio France est dirigé par Ludwig Wicki et Bastien Stil, tandis que Mike Schäperclaus dirige Le Balcon dans les œuvres de chambre. Album événement annoncé le 21 mars 2025.

 

 

 

CD événement : Howard Shore : Anthology – The Paris Concerts / 2 cd Deutsche Grammophon /   –  Date de sortie : 21 mars 2025  –   (2 cd Deutsche Grammophon, 2023) Article Number: 512020000

PLUS D’INFOS sur le site de l’éditeur DG Deutsche Grammophon https://store.deutschegrammophon.com/en/products/howard-shore-anthology-the-paris-concerts-1

 

 

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Présentation en ANGLAIS : Howard Shore: Anthology – The Paris Concerts
Explore the colourful cinematic universe of the award-winning Canadian composer Howard Shore in this new double album from Deutsche Grammophon. Shore’s music has graced over a hundred films and won him a string of awards, including 3 Oscars, 3 Golden Globes and 4 Grammys. He has also written for opera, ballet and the concert hall.
Recorded during Radio France’s 2023 “Week-End Howard Shore”, this generous anthology reflects the rich variety of Shore’s output. It presents highlights from such diverse soundtracks as The Fly, Naked Lunch, Ed Wood, Crash, Esther Kahn, Eastern Promises and, of course, The Lord of the Rings and The Hobbit, as well as the non-cinematic solo piano piece Catania. The Orchestre Philharmonique de Radio France is conducted by Ludwig Wicki and Bastien Stil, while Mike Schäperclaus conducts Le Balcon in the chamber works. The album will be released in all formats on 21 March.

 

 

Tracklist

CD1

The Hobbit
1. The Noble Wood (I Roderyn)
Lord of the Rings: The Fellow
ship of the Ring Movement I
2. Where the Shadows Lie
3. The History of the Ring
4. A Long-Expected Party
5. The Seduction of the Ring
6. A Black Shadow
Lord of the Rings: The Fellowship of the Ring Movement II
7. Last Homely House
8. Turning Southwards
9. The Road Under the Mountain
10. The Halls of Durin
11. Durin’s Bane
12. The Golden Wood
13. Gandalf’s Lament
14. Beyond Lothlórien
15. The Anduin
16. The White Hand
17. The Passing of Boromir
18. The Fate of the Bearer
19. In Dreams
Catania
20. Catania
Esther Kahn
21. Esther Kahn (Paris Suite)
Concertino from Eastern Promises
22. Eastern Promises
23. Tatiana / Trans-Siberian Diary

CD2
The Fly Suite
1. Main Title
2. Plasma Pool
3. Stathis Enters
4. The Stairs
5. The Jump
6. Finale

Naked Lunch Suite
7. Naked Lunch
8. Fadela’s Coven / Dr. Benway
Ed Wood Suite
9. Main Title (Transcr. for Theremin and Orchestra)
10. Grave Robbers (Transcr. for Theremin and Orchestra)
11. This Is the One (Transcr. for Theremin and Orchestra)
Crash Suite
12. Crash
13. CineTerra
14. Mechanism Of Occupant Ejection
15. Mirror Image
16. Where’s the Car?
17. Sexual Logic
18. Road Research Laboratory
19. Chromium Bower
20. Triton
21. Prophecy Is Dirty and Ragged

CRITIQUE, comédie musicale. Opéra de Massy, les 8 et 9 mars 2025. Stephen Sondheim : COMPANY. Gaétan Borg, Jasmine Roy, Jeanne Jerosme, Neïma Naouri, … Orchestre National d’Île-de-France. Larry Blank, direction / James Bonas,mise en scène

La soirée s’annonçait flamboyante, énergique voire pétillante : elle est tout cela voire plus encore. « COMPANY » c’est d’abord un portrait décapant de la société américaine, précisément new-yorkaise des années 1970 : fumette facile, sexe libre, sociabilité favorisée à tous les étages. Stephen Sondheim met tout cela en musique avec brio, un panache orchestral qui s’inscrit dans les pas du meilleur Bernstein et qui, tout en absorbant la rythmique et la grâce mélodique de Broadway, sait aussi renouveler le principe d’une narration musicale.

 

 

Le flux dramatique, son séquençage relèvent déjà d’une construction cinématographique, qui mêle les actions simultanées, permettent à un personnage de commenter une scène, sans qu’il soit lui-même intégrer réellement à celle-ci ; tout part de la fête d’anniversaire de Bobby, célibataire endurci de 35 ans qui tout en faisant la joie de ses amis, les inquiète tout autant par son célibat inexpliqué… il en découle une maîtrise incroyable des ensembles et des discours étagés, simultanés ; un sens jubilatoire de l’action, d’autant qu’elle est servie par une chorégraphie collective, elle aussi millimétrée. Ce sens du rythme, de la synchronicité, rehaussé par la direction nerveuse et pleine d’énergie d’un professionnel du genre, Larry Blank soi-même (qui a travaillé avec Sondheim), s’affirme littéralement saisissant du début à la fin.

 

 

Une perle de Broadway
en création à l’Opéra de Massy

Propre au roman réaliste américain, on y parle beaucoup, sous forme de saynètes parlées (en français ; quand les mélodies elles sont chantées dans la langue de Sondheim, en américain) : tranches de vie des New Yorkais dans leur milieu, en situation : repas entre amis qui sont au régime sec (sans alcool ni sucre) ; fumette psychédélique ; retrouvailles sur la terrasse d’un appartement type ; rencontre fortuite (avec Marta) dans le métro, … ou aveu final en forme de discussion dans un parc.

Le sujet interroge l’idée même de compagnie (d’où le titre) : quelle compagnie choisir ? Vivre à New York la trépidante, la ville qui ne dort jamais, c’est faire société, rencontrer une multitude, mais pour quelle finalité ? Bobby rencontre certes de jeunes femmes (April l’hôtesse de l’air, délicieusement idiote, ou Marta, créature 100% newyorkaise dont l’air « Another hundred People »… célèbre l’euphorie collective que produit les déplacements incessants des habitants, dans les trains, les avions, sur les quais des métros… Mais qu’en reste-t-il ?

L’humour est de la partie, dans des numéros qui sont théâtralement parfaitement réalisés, ainsi entre autres, le tableau des noces d’Amy (aussi délirante que Marta): synthèse d’une femme rangée, petite bourgeoise, qui bien que pas encore mariée, exprime tout le désespoir d’une femme au foyer dépressive, aux abois (parfaite desperate housewife). Il faut un abattage expert pour réussir son air des plus virtuoses (« Getting married today »)… ce que réussit avec facétie et naturel Jeanne Jerosme.

L’autre personnage délirant et également très juste dans son incarnation est celui de la richissime désabusée qui en est à son 3è mariage : Joanne, qui avec ses faux airs à la Shirley McLaine, commente dans un détachement décalé plusieurs tableaux dont elle est témoin, avant d’épingler le désœuvrement des femmes mûres délaissées (« The ladies who lunch… »), là encore évocation au scalpel d’une société qui aime s’exposer et se raconter ; le rôle demande une interprète solide ; il exige une vocalité à la fois puissante et précise : défi relevé et avec quelle finesse (et aussi une autodérision tragique) par Jasmine Roy.

Dans le rôle-titre, Gaétan Borg campe un Robert / Bobby toujours affable et souriant et qui à l’occasion de ses 35 ans, questionne le sens de sa vie. Peu à peu, le célibataire mesure le bonheur de pouvoir partager une vie à deux, c’est tout le sel de sa trajectoire en cours de soirée, qui permet la lente transformation du personnage ; de « Someone is waiting », puis « Marry me a little » à l’acte I ; jusqu’à la révélation de sa propre quête « Being alive » … il aura fallu ce regard rétrospectif sur les 5 couples différents qui forment ses amis, – et aussi les 3 jeunes femmes, (aventures d’un soir comme l’hôtesse de l’air April, un temps pressentie) pour que le héros mesure l’étendue de sa solitude et la vérité du manque qui désormais, en fin d’action, lui saute aux yeux. Le ténor donne de l’épaisseur au rôle-titre et affirme un tempérament convaincant car il déploie pendant toute la soirée, une très solide technique vocale : longueur du souffle, justesse et soutien des aigus jamais tendus, timbre des plus séduisants. Épatante incarnation.

D’une façon générale, les 14 chanteurs, acteurs, danseurs sont tous percutants ; d’autant plus expressifs qu’ils peuvent s’appuyer sur une fosse trépidante pour les ensembles (impeccable tableau qui est aussi repris en bis : « Side by side / What would we do without you ») ; nuancée, incisive voire mordante pour chaque air plus psychologique.

Le spectacle est total, d’une réjouissante et exquise énergie. Pour sa création française, « COMPANY » de Stephen Sondheim ne pouvait compter sur meilleur collectif ; et c’est à l’Opéra de Massy d’en assurer la première : une création jubilatoire qui tournera en France (Avignon, Bordeaux, Compiègne, Limoges, Nice, Clermont-Ferrand, enfin au Châtelet à Paris) et en Suisse jusqu’en … 2027. Must absolu.

 

 

Photo © classiquenews / 2025

 

 

 

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CRITIQUE, comédie musicale. Opéra de Massy, les 8 et 9 mars 2025. Stephen Sondheim : COMPANY. Gaétan Borg, Jasmine Roy, Jeanne Jerosme, Neïma Naouri, … Orchestre National d’Île-de-France. Larry Blank, direction / James Bonas,mise en scène – PLUS d’infos, LIRE aussi notre présentation de COMPANY de Stephen Sondheim, création française à l’Opéra de Massy :  https://www.classiquenews.com/opera-de-massy-stephen-sondheim-company-sam-8-mars-dim-9-mars-2025-creation-francaise/

 

OPÉRA DE MASSY. Stephen SONDHEIM : COMPANY. Sam 8 mars et dim 9 mars 2025. Création française

 

 

 

prochaines dates

COMPANY de Stephen SONDHEIM poursuit sa tournée en France avec une escale au Théâtre Impériale de Compiègne et son excellente acoustique, les 15 et 16 mars 2025 : https://www.theatresdecompiegne.com/company-524 – incontournable.

 

 

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ENTRETIEN avec Nicola BERLOFFA, metteur en scène à propos de Cavalleria Rusticana et I Pagliacci à l’Opéra de Saint Etienne, les 9, 11, 13 mars 2025

Chefs d’œuvre du vérisme italien, Cavalleria Rusticana et I Pagliacci, respectivement de Mascagni et de Leoncavallo sont à l’affiche de l’Opéra de Saint-Étienne, les 9, 11 et 13 mars prochains. Le défi de les programmer lors d’une même soirée s’impose à chaque metteur en scène soucieux de révéler leur intensité propre comme le sens de la fulgurance qui les rassemble… A Saint-Étienne, le metteur en scène italien NICOLA BERLOFFA retrouve la scène stéphanoise pour ce doublé inspirant…

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CLASSIQUENEWS : Comment s’inscrit cette production nouvelle présentée à Saint-Etienne, en comparaison avec vos autres mises en scène ? Permet-elle de prolonger ou d’approfondir certains sujets ou thèmes déjà abordés auparavant ?

NICOLA BERLOFFA : Chaque metteur en scène a son propre système esthétique qui s’adapte et se transforme selon le nouveau matériel sur lequel il travaille ; les options viennent en conséquence du sujet et de la dramaturgie de l’œuvre abordée ; on ne peut pas travailler de la même façon pour les Noces de Figaro ou pour Cavalleria rusticana ; cela détermine aussi le jeu demandé aux chanteurs, il faut être capable de modifier l’approche selon le répertoire.

 

 

 

 

CLASSIQUENEWS : Que mettez-vous en lumière visuellement et sur scène, dans Cavalleria Rusticana, puis dans I Pagliacci ?

NICOLA BERLOFFA : Le défi est de relire chaque ouvrage, en éliminant une série de clichés traditionnels et en retrouvant l’essence purement dramatique des deux drames. D’où mon idée de passer du vérisme à un néoréalisme social, inspiré par une série de films des années 1940 et 50 se déroulant dans le nord de l’Italie, et qui rend hommage aux cinéastes presque oubliés, tels Mario soldati, Lattuada, Maselli, jusqu’à de véritables légendes comme Ossessione et Rocco di Visconti. Un autre défi a été d’éliminer le naturalisme de la mode en se dirigeant vers une abstraction de l’espace, plus suspendue pour Cavallaria, et plus dense pour les clowns d’I Pagliacci.

 

 

CLASSIQUENEWS : Y a t il des éléments communs entre les deux drames ? Que permet de réaliser la succession des deux actions ?

NICOLA BERLOFFA : Oui, il y a des éléments communs : le déroulement de l’action du drame en quelques heures ; un même univers dans lequel gravitent de pauvres gens ; le crescendo dramatique qui conduit à la violence et au meurtre final. Ces éléments peuvent justifier l’idée de réaliser les deux œuvres dans la même soirée, même si ce sont deux actions accomplies, avec une telle force spectaculaire justifierait que chacune soit représentée seule.

 

 

CLASSIQUENEWS : Que nous disent les deux drames ? Que révèlent-ils des deux compositeurs, Mascagni et Leoncavallo ? Par ses effets cinématographiques, le vérisme aide-t-il le metteur en scène ?

NICOLA BERLOFFA : Comme dans d’autres œuvres nées dans la même période, il suffit de penser à Puccini, il y a une grande force cinématographique et musicale, une notion du temps et de l’action dont les rythmes sont construits comme s’ils avaient été écrits pour être filmés par une caméra. En plus de la rapidité de l’action elle-même, il y a un temps de narration presque réel. Il est clair que ce sont des cadeaux pour un metteur en scène et pour un soliste qui interprète de tels rôles. Dans le cas des 2 opéras, la récitation, la clarté du chant, est fondamentale ; elle doit être très naturelle pour pouvoir émerger du magma orchestral.

 

Propos recueillis en mars 2025
Photo : portrait de Nicola Berloffa DR

 

 

 

 

 

Présentation

LIRE aussi notre présentation annonce de la production de CAVALLERIA RUSTICANA de Mascagni / I PAGLIACCI de Leoncavallo à l’affiche de l’Opéra de Saint-Étienne, les 9, 11 et 13 mars 2025 : https://www.classiquenews.com/opera-de-saint-etienne-cavalleria-rusticana-i-pagliacci-les-9-11-et-13-mars-2025-nicola-berloffa-mise-en-scene-christopher-franklin-direction/

 

 

 

OPÉRA DE SAINT-ÉTIENNE. CAVALLERIA RUSTICANA / I PAGLIACCI (les 9, 11 et 13 mars 2025). Nicola Berloffa, mise en scène / Christopher Franklin, direction

 

 

 

critique

LIRE notre CRITIQUE, opéra. OPÉRA DE SAINT-ÉTIENNE, le 11 mars 2025. MASCAGNI : Cavalleria Rusticana / LEONCAVALLO : I Pagliacci. Tadeusz Szlenkier, Julie Robard-Gendre, Valdis Jansons, Alexandra Marcellier… Christopher Franklin (direction) / Nicola Berloffa (mise en scène) : https://www.classiquenews.com/critique-opera-opera-de-saint-etienne-le-11-mars-2025-mascagni-cavalleria-rusticana-leoncavallo-i-pagliacci-tadeusz-szlenkier-julie-robard-gendre-valdis-jansons-alexandra-marcellier/

 

 

CRITIQUE, opéra. OPÉRA DE SAINT-ÉTIENNE, le 11 mars 2025. MASCAGNI : Cavalleria Rusticana / LEONCAVALLO : I Pagliacci. Tadeusz Szlenkier, Julie Robard-Gendre, Valdis Jansons, Alexandra Marcellier… Christopher Franklin (direction) / Nicola Berloffa (mise en scène)

 

CRITIQUE, concert. PARIS, Le Bataclan, le 5 mars 2025. Concert Misa Criolla – El Latin Jazz Project. Emiliano Gonzalez Toro (ténor), Alain Pérez (voix), Thomas Enhco (piano et arrangements), The Amazing Keystone Big Band (orchestre)

Après un disque hommage à Violeta Parra, Violeta y el jazz, qui lui tenait particulièrement à cœur, le ténor Emiliano Gonzalez Toro se lance dans un nouveau défi musical audacieux : habiller d’une parure de salsa et jazz la « Misa Criolla » de l’argentin Ariel Ramirez. Et pour ce faire, il a embarqué des comparses de longue date sur ce projet, en premier lieu le musicien cubain Alain Pérez, bassiste, chanteur, haute figure de la timba, et de la salsa cubaine contemporaine. Avec la pugnacité qu’on lui connait, Emiliano Gonzalez Toro a également convaincu du bien fondé de cette aventure le pianiste Thomas Enhco, qui face à tant d’arguments passionnés, s’est attelé, in fine, à la délicate mission de transformer la messe Créole en musique cubaine de braise, et ce en mettant à contribution les cuivres de The Amazing Keystone Big Band.

 

Emiliano Gonzalez Toro n’a jamais caché sa grande passion pour le jazz. Il nous avait par ailleurs confié, lors d’une interview, que la musique du XVIIe, qu’il habite avec talent, « était comparable au jazz, en ce qu’elle permet de librement improviser, à condition évidemment que l’on maîtrise les codes de l’harmonie et du rythme de ce répertoire ». Du Baroque au jazz cubain mâtiné de salsa, il n’y aurait donc qu’un pas que l’artiste a franchi avec aisance mercredi soir au Bataclan.

A la « Misa Criolla » dans ses habits jazzy, telle que présentée en cette soirée, a été adjoint fort pertinemment la « Navidad Nuestra », série de tableaux célébrant La Nativité sur des textes de l’auteur argentin Felix Luna qui nous plonge dès les premières notes dans une allégresse revigorante. En l’espace de quelques secondes, on est transportés en plein cœur palpitant de Cuba. Le résultat est bluffant comme si ces deux œuvres avaient été créées pour se côtoyer. Les arrangements de Thomas Enhco insufflent un groove irrésistible pétri de swing, de salsa et de timba, et portent également les ondes aussi émouvantes qu’exaltantes du gospel, restituant ainsi toute la dimension spirituelle de la « Misa Criolla ». L’Amazing Keystone Big Band qui remplace ici le chœur original, fait feu de tout bois, les cuivres sonnant comme mille voix à l’unisson. Sur le plan vocal, Emiliano Gonzalez Toro et Alain Perez ont rivalisé de talent dans une fluidité confondante où les voix se mêlent dans une alchimie de timbres. 

Mais cette messe revisitée n’est pas que dansante, elle se veut également intimiste comme ce superbe « Agnus Dei » en mode piano/voix, sublimée par le touché caressant de Thomas Enhco et le velours de la voix lyrique de Gonzalez Toro. Une parenthèse à pas feutré sur laquelle se terminera d’ailleurs le concert, avant que les artistes ne se relancent de plus belle dans une démonstration de rythmes endiablés pour des Encore survitaminés. En ces temps tissés sur le fil de nos inquiétudes, ce concert revitalisant donné mercredi soir au Bataclan tombe à point nommé comme une parenthèse de répit salvateur. Il nous tarde maintenant donc de pouvoir savourer l’album à paraître le 18 avril prochain !

 

 

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Le Bataclan, le 5 mars 2025. Concert Misa Criolla – El Latin Jazz Project. Emiliano Gonzalez Toro (ténor), Alain Pérez (voix), Thomas Enhco (piano et arrangements), The Amazing Keystone Big Band (orchestre). Crédit photo © Brigitte Maroillat

CRITIQUE CD événement. JAN LISIECKI, piano. Préludes : JS Bach, Gorecki, Messiaen, Chopin (24 Préludes) – 1 cd Deutsche Grammophon

Un tempérament qui aime les défis et prend un plaisir à les relever. C’est l’impression que laisse ce nouveau récital plutôt ambitieux ; quand d’aucun préfère dédier aux seuls 24 Préludes de Chopin un disque entier, le pianiste canadien, quasi trentenaire (né en mars 1995), JAN LISIECKI quant à lui en prépare l’écoute et la sensible compréhension par une série de pièces précédentes (également Préludes) aussi diverses qu’exigeantes. Le thème et la forme du Prélude offre à l’interprète une zone de confort et de défis parfaitement maîtrisée. Ce préambule en 12 pièces préalables (de Bach à Gorecki, de Messiaen à Rachmaninov) offre le moyen de mesurer les resources et qualités d’un jeu charpenté et nuancé qui s’affirme en particulier chez Messiaen (3 Préludes) où se construit et s’épanche un climat suspendu à la fois secret et fluide, entre mystère des révélations et jaillissement sonore primitif au chant continu très inspiré…

 

L’architecture et le souffle de Rachmaninov (3) s’affirme avec une assiduité à la fatalité éperdue (à notre goût ici trop appuyée) ; avant que la syncope paniquée de Goreki (2 Préludes, 9 et 10), assument et orchestrent un déconstruction en règle, celle d’une mécanique de plus en plus déglinguée qui permet d’enchainer merveilleusement avec le Prélude de JS BACH (11, BWV 847) à très vive allure, comme brûlé en une urgence sans respiration. Puis que l’on aime ensuite, l’ample respiration du second Prélude plein de noblesse large de Rachmaninov, aux traits incandescents, aux morsures, aux fulgurances somptueusement maîtrisés. Du bien bel ouvrage.

 

Les 24 Préludes de Chopin sont de la même eau : intenses, vives, hautement investies, palpitantes même. La solide technique du pianiste, la clarté de son approche permettent un parcours captivant, toujours intelligemment renouvelé selon les épisodes, d’une belle évanescence (n°2 – Lento) dont le flux ténu sombre dans l’autre monde, aux piani d’une poésie qui s’estompe ; la fugacité coulante enivre dans les n°5 et 7 – notés allegro molto et andantino, aussi courts que précis et qui passent comme un songe ; le n°6 (18) captive par son climat suspendu, étiré, interrogatif, comme les n°9 (Largo) et 15 (Sostenuto) où s’affirment vélocité, souplesse, rondeur et souffle… le n° 16 (Presto con fuoco) exprime toutes les épreuves, les obstacles d’une ascension de la montagne, surmontés par une irrésistible énergie. Enfin le n°20 (Largo) dessine un portique impressionnant qui saisit lui aussi par la profondeur de ses nuances pianissimi.

Cependant que le 24è (plage 36) enivre par sa vitalité sans effets et un sens de la progression dramatique qui séduit immédiatement. Ce disque est pour le pianiste assurément un jalon dans la maturité : le jeu solide, la clarté et l’éloquence d’une virtuosité sans dilution, cet équilibre permanent entre détails, nuances et accents dans le drame, mais sans effets creux ni épanchement douteux, font la valeur du programme ainsi réussi.

 

 

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CRITIQUE CD événement. JAN LISIECKI, piano. Préludes : JS Bach, Gorecki, Messiaen, Chopin (24 Préludes) – enregistré à Belrin en fév 2024 –
PLUS D’INFOS sur le site de l’éditeur DG Deutsche Grammophon / Jan Lisiecki, Préludes (JS BACH, RACHMANINOV, CHOPIN…) :
https://www.deutschegrammophon.com/en/catalogue/products/preludes-jan-lisiecki-13653

OPÉRA GRAND AVIGNON. FRANCESCHINI : ALICE (création). Les 29 et 30 mars 2025. David Greilsammer (direction), Caroline Leboutte (mise en scène)

La fable d’Alice nous l’enseigne clairement : les adultes sont véritablement fous, et seuls les enfants disposent de la lucidité nécessaire pour appréhender le monde ! La fraîcheur de leur regard, affranchi de toute morale comme de toutes conventions, n’est-elle pas la seule capable de révéler les incohérences de nos comportements ?

 

Dans son nouvel opéra, nouvelle adaptation des aventures d’Alice au pays des merveilles, où le chat de Cheshire, le Chapelier Toqué et la Reine de Cœur investiront bientôt l’espace de leur frénésie et de leurs extravagances, le compositeur italien MATTEO FRANCESCHINI renoue avec le principe actif des fantaisies originelles de Lewis Carroll. De surprise en surprise, de péripéties en situations loufoques, dans une créativité à la fois ludique et profonde, la nouvelle pièce révèle à travers les yeux francs de la jeunesse, tout ce que notre quotidien peut avoir de terrifiant, d’incohérent ou d’absurde.

Le spectacle musical familial aux multiples facettes, saturé de magie, d’humour et de féerie, est porté par la complicité de Matteo Franceschini et de la metteure en scène Caroline Leboutte ; leur travail sublime avec une infinie richesse esthétique, l’inquiétante étrangeté que les enfants sont tôt ou tard amenés à interroger.
Ils nous enjoignent également à cultiver cet esprit inquisiteur et rebelle dont Alice est l’emblème ; à ne jamais cesser de remettre en question les normes établies. A l’heure où notre monde court à sa perte, c’est peut-être dans la mise en doute de nos certitudes que réside notre salut : « où la désobéissance se transforme en courage, la candeur en sagesse, et le réel en éternel miracle ». Création événement.

 

 

 

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Matteo Franceschini : ALICE, création
Samedi 29 mars 2025, 20h
Dimanche 30 mars 2025
RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’Opéra grand Avignon : https://www.operagrandavignon.fr/alice-franceschini
Durée : 1h

 

Livret de Edouard Signolet
d’après Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll

Direction musicale : David Greilsammer
Mise en scène : Caroline Leboutte
Décor et costumes : Aurélie Borremans
Lumières : Nicolas Olivier
Chorégraphie : Isabelle Lamouline
Études musicales : Amandine Duchène
Responsable de la Maîtrise : Florence Goyon-Pogemberg

Alice, Elise Chauvin
Narration, la sœur d’Alice, la chenille, le chapelier fou, un laquais, Kate Combault
Narration, la fausse tortue, la cuisinière, le lièvre de mars, la reine de cœur, Sarah Laulan
Narration, le lapin blanc, l’enfant-porc, le loir, un laquais, Rémy Poulakis
Narration, la duchesse, le chat, le roi, Jean-Baptiste Dumora

Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre national Avignon-Provence

 

 

PARIS, Sainte-Chapelle. 3ème Festival OPÉRA, LYRIC & CO :  » MIROIRS  » du 30 mars au 1er mai 2025. Myriam Ould-Braham, Arielle Dombasle, Marine Chagnon, Jeanne Gérard, Elsa Dreisig, Marie-Laure Garnier, Axelle Saint-Cirel, Karine Deshayes, Fabrice Di Falco, Jeanne Mendoche, Académie de l’Opéra national de Paris, Cyril Auvity, Fabienne Conrad…

ÉCRIN ARCHITECTURAL, PERLES MUSICALES… A nouveau à partir du 30 mars (et jusqu’au 1er mai 2025), le producteur Yann Harleaux nous régale : son sens des associations heureuses rehausse la sublime architecture de la sainte-Chapelle en y programmant un cycle de concerts des plus aboutis. Cette année le Festival OPÉRA, LYRIC & CO a pour sous-titre « Miroirs » : une déclaration d’intention qui met en vibration, au cœur du Paris historique, architecture et musique. Pour chaque programme, l’accord entre l’écrin gothique et la musique qui s’y déploie, y produit une expérience mémorable que le spectateur chérit, désireux de le revivre de concert en concert… « Musique et architecture structurent l’espace et le temps, définissant chaque époque en transgressant ses codes. Elles entretiennent un dialogue constant, partageant une même vision du monde à travers formes et sons », précise Yann Harleaux.

 

 

La Sainte-Chapelle de Paris,
l’écrin musical incontournable

 

Correspondances secrètes, complémentarité enchantée, … des filiations se précisent : « Le baroque se traduit par le mouvement et l’ornementation : les églises jouent avec la lumière et l’accumulation des détails, tandis que la musique baroque s’appuie sur expressivité et virtuosité. De même, la verticalité des cathédrales gothiques résonne avec les polyphonies grégoriennes, et le classicisme trouve son équilibre parfait entre Mozart et l’architecture de Versailles ou du Panthéon. Chaque monument dialogue avec son époque et sa musique. La
tour Eiffel incarne une prouesse technique contemporaine de Debussy et Ravel, tandis que Saint-Germain des Prés fait résonner Bach to Saint-Germain. La Sainte-Chapelle, écrin lumineux, accueille les voix et pianistes qui ont façonné le son de Paris. » Ainsi tout est dit.
Plus jamais on ne pourra imaginer l’harmonie de la Sainte-Chapelle sans la musique.
Pour preuve, ce nouveau cycle musical « MIROIRS », conçu en 5 actes jusqu’au jeudi 1er mai 2025.

 

En mars, après une ouverture surprenante, programme « Let’s dance » qui fusionne instruments et danse (dim 30 mars, avec Myriam Ould-Braham, Etoile de l’Opéra national de Paris, et Mickaël Lafon, Sujet), l’acte I invite la marraine de cette session, Arielle Dombasle (lun 31mars), puis le Festival Opera, lyric & co propose une succession de voix d’opéra parmi les plus convaincantes : Bel canto, acte II : Marine Chagnon et Jeanne Gérard (sam 5 avril) ; Romantisme, acte III avec la soprano Elsa Dreisig (dim 6 avril), une échappée Carmen, carte blanche à Marie-Laure Garnier (lun 7 avril) ; pour l’entracte, place aux Noces de Figaro de Mozart par l’Ensemble Vox 21 (jeu 10 avril).

L’acte IV déroule le tapis à la soprano révélée par nos JO 2024, la voix de Marianne chantant la Marseillaise (depuis la toiture du Grand Palais), Axelle Saint-Cirel (ven 11 avril) ; vous ne manquerez pas non plus l’Académie de l’Opéra National de Paris (Nuits d’été, dim 13 avril) ; le duo de choc pour un acte V électrisant avec Karine Deshayes et Fabrice di Falco (programme Baroque, sacré et profane, avec entre autres la Stabat Mater de Pergolesi, ven 18 avril) ; les plus beaux airs d’opéras signés Haendel par les chanteurs de l’Académie de l’Opéra National de Paris (sam 26 avril), Orfeo de Monteverdi (avec Cyril Auvity, lun 28 avril) ; enfin dernier rv d’un cycle enchanteur, le récital de la soprano Fabienne Conrad, de Monteverdi à l’Hymne à l’Amour (concert de clôture – Back to the future, jeu 1er mai 2025).

 

Diversité des formes, des tempéraments artistiques, des styles, des époques et des genres, le Festival Opera, Lyric & co est l’événement incontournable à Paris, un cycle spectaculaire et passionnant qui accompagne opportunément l’avènement du printemps.

 

 

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TOUS LES PROGRAMMES, le détail des artistes invités et des œuvres programmées sur le site : euromusicproductions.fr
Téléphone : 01 42 77 65 65
Prix des places 60 euros – étudiants, chômeurs : 20 euros
10 euros pour les moins de 10 ans.
Billetterie : fnac.com et sur place le jour du concert à partir de 10h

 

 

 

 

STREAMING opéra. VERDI : Giovanni d’Arco, ven 7 mars 2025, 19h (depuis le Teatro Regio di Parma, Italie, production de janvier 2025).

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France, 1429. En pleine guerre de cent ans qui oppose anglais contre français, Giovanna (Jeanne) apparaît comme l’ange providentiel, une figure prophétique. Après un rêve, le Roi Carlo près de Rouen, rencontre Giovanna, qui prédit la fin des souffrances de la France. Son père, Giacomo, la croyant possédée, tente de la livrer aux Anglais (!).

 

Après sa capture, Giacomo se rend compte de son erreur et la libère. Giovanna mène les Français à la victoire, mais en paiera le prix ultime. Giovanna d’Arco, dont la création a eu lieu à la Scala en 1845, suscite un succès populaire immédiat. On dit que quelques semaines après la première, les mélodies de Giovanna étaient jouées sur les orgues de Barbarie dans les rues de Milan (dont certainement les chœurs de l’opéra). Le Teatro Regio di Parma présente cette nouvelle production mise en scène par Emma Dante, avec Nino Machaidze dans le rôle-titre…

 

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VOIR sur operaVision : GIOVANNA D’ARCO de Giuseppe VERDI (1845) : https://operavision.eu/fr/performance/giovanna-darco
Diffusé le 7 mars 2025 à 19h CET
EN REPLAY jusqu’au 07.09.2025 à 12h CET
Enregistré le 24 janvier 2025

 

 

 

distribution
Carlo : Luciano Ganci
Giovanna : Nino Machaidze
Giacomo : Ariunbaatar Ganbaatar
Talbot : Kryztof Baczyk
Deli : Francesco Congiu

Filarmonica Arturo Toscanini
Choeur du Teatro Regio di Parma

Michele Gamba, direction
Emma Dante, mise en scène

 

 

 

contenus vidéos

Voir les vidéos (avant-goût, en coulisses, rencontre avec le chef d’orchestre… https://operavision.eu/fr/performance/giovanna-darco?utm_source=OperaVision&utm_campaign=120672362a-giovanna-2025-fr&utm_medium=email&utm_term=0_be53dc455e-120672362a-100559298#paragraph-22398

 

 

STREAMING, concert. Pierre Boulez dirige l’Oiseau de feu, mar 25 mars 2025, 21h (Culturebox et france.tv)

CULTUREBOX et FRANCE TV fêtent le centenaire Pierre Boulez 2025 en diffusant l’un de ses concerts parisiens fameux… Compositeur et chef d’orchestre Pierre Boulez s’est taillé une réputation légitime pour ses interprétations claires, transparentes, raffinées, à l’opéra ou au concert, entre autres des classiques du XXe siècle (de Berg, Schoenberg, Bartok à Debussy ou Ravel…) ; c’est vrai aussi de Stravinsky comme dans ce concert de 2008 filmé sous la pyramide du Louvre… La clarté, la précision, l’agilité rythmique, le respect des intentions, telles qu’elles sont notées (Boulez le comprend d’autant mieux qu’il est lui aussi compositeur) sont emblématiques de sa direction.

 

 

Cette représentation en direct, sous la pyramide du musée du Louvre, a été le point culminant d’un « cycle Boulez » au Louvre. Un public de 2000 mélomanes a assisté à cette représentation de L’Oiseau de feu de Stravinsky, premier volet de la fameuse trilogie révolutionnaire du compositeur russe à Paris (pour les Ballets Russes de Diaghilev). En effet l’Oiseau de feu encore riche des lueurs crépitantes de la légende russe post romantique, cède la place au 2è ballet « Petrouchka », saisissante fresque féerique et fantastique ; enfin c’est Le Sacre du printemps dont l’audace et la modernité sont à l’image de la chorégraphie (moderne et post antique d’un Nijinski révolutionnaire,1913). Ce soir, L’Oiseau de feu est interprété par les instrumentistes de l’Orchestre de Paris dans un cadre minéral, historique, spectaculaire, sous la Pyramide du musée le plus visité au monde…

 

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VOIR Pierre Boulez dirige Stravinsky – L’oiseau de feu du Louvre – Mardi 25 mars à 21h sur Culturebox et sur france.tv : https://www.france.tv/spectacles-et-culture/967409-pierre-boulez-dirige-l-oiseau-de-feu-de-stravinsky-au-louvre.html

 

 

 

PROGRAMME de l’Oiseau de feu

Tableau I
– Le Jardin enchanté de Kastchei
– Apparition de l’Oiseau de Feu, poursuivi par Ivan Tsarévitch
– Danse de l’Oiseau de Feu
– Capture de l’Oiseau de Feu par Ivan Tsarévitch
– Supplications de l’Oiseau de Feu
– Apparition des treize princesses enchantées
– Jeu des princesses avec les pommes d’or (Scherzo)
– Brusque apparition d’Ivan Tsarévitch
– Khorovod (Ronde) des princesses
– Lever du jour
– Ivan Tsarévitch pénètre dans le palais de Kastchei
– Carillon féérique, apparition des monstres-gardiens de Kastchei et capture d’Ivan Tsarévitch
– Arrivée de Kastchei l’Immortel
– Dialogue de Kastchei avec Ivan Tsarévitch
– Intercession des princesses
– Apparition de l’Oiseau de Feu
– Danse de la suite de Kastchei enchantée par l’Oiseau de Feu
– Danse infernale de tous les sujets de Kastchei
– Berceuse (l’Oiseau de Feu)
– Réveil de Kastchei
– Mort de Kastchei
Profondes ténèbres
Tableau II
– Disparition du palais et des sortilèges de Kastchei, animation des chevaliers pétrifiés, allégresse générale

 

Avec l’Orchestre de l’Opéra national de Paris. Capté au Musée du Louvre de Paris, en décembre 2008

 

 

 

 

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En illustration, le coffret événement PIERRE BOULEZ the composer édité par DEUTSCHE GRAMMOPHON / LIRE ici notre critique du coffret CD PIERRE BOULEZ THE COMPOSER, publié en février pour le centenaire Pierre Boulez 2025 : https://www.classiquenews.com/coffret-cd-evenement-pierre-boulez-the-composer-13-cd-deutsche-grammophon/

COFFRET CD événement. PIERRE BOULEZ the composer (13 cd Deutsche Grammophon)

 

GRAND THÉÂTRE DE LUXEMBOURG. HOFESH SHECHTER : Theatre of dreams, les 27, 28, 29 mars 2025

Le chorégraphe israélo-britannique Hofesh Shechter revient à Luxembourg avec son nouveau spectacle « Theatre of dreams » ; il emmène le public dans une plongée sauvage, tête en avant, dans les rêves et met en valeur la physicalité et la complexité de son travail chorégraphique ; le suivent dans cette immersion radicale, ses inimitables danseurs et danseuses que porte toujours une indéfectible énergie.

 

 

 

A Paris (création au Théâtre de la Ville), le chorégraphe faisait jouer un danseur unique dès le début avec le rideau de scène, pour s’y engouffrer, comme une invitation à découvrir et explorer d’autres mondes, invisibles, proches, présents… Créée dans le cadre des Jeux Olympiques de Paris 2024, la pièce explore le monde de la fantaisie et du subconscient, révélant peurs, espoirs, désirs et une myriade d’émotions qui pénètrent non seulement l’esprit rêveur, mais aussi les pensées éveillées. Si certains ont regretté le manque d’ossature dans un spectacle certes total mais trop feuilletonné, la magie que produisent les tableaux collectifs, réglés comme peu savent le faire, laisse sans voix : la maîtrise de Shechter tient à une fusion personnelle du clubbing et du lâcher-prise Gaga (appris auprès d’Ohad Naharin). L’unité mouvante, la cohésion du groupe grâce à 13 danseurs virtuoses et magnifiquement synchronisés, assurent à l’ensemble, sa séduction immédiate.
De surcroît, pour créer un espace puissant et sculptural dans un paysage onirique, Hofesh Shechter s’est associé à l’éclairagiste Tom Visser. Comme par le passé, il prévoit d’offrir des ateliers de danse et de chorégraphie dans le cadre de sa venue à Luxembourg.

 

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DANSE au Grand Théâtre
Grande Salle – Durée : 1h30 (sans entracte)
Jeudi 27 mars 2025, 20h
Vendredi 28 mars 2025, 20h
Samedi 29 mars 2025, 20h
RÉSERVEZ vos places directement sur le site des théâtres de la ville de LUXEMBOURG : https://theatres.lu/fr/theatreofdreams
Vous pouvez également réserver par
[email protected]
+352 4796 3901

Hofesh Shechter : Theatre of Dreams
Avec 13 danseurs.ses de la Hofesh Shechter Company

Photos © Tom Visser

 

ENGLISH : Hofesh Shechter’s creations are nothing if not visually stunning and sonically pulsating. The Théâtres de la Ville have had a longterm collaboration with the internationally acclaimed choreographer, whose company was last seen at the Grand Théâtre with Double Murder in 2022. This time, Hofesh Shechter arrives with a new production for his company premiering as part of the Paris 2024 Olympic Games cultural programme, with the promise of drawing us into a poetic, powerful exploration of our deepest conscious and subconscious emotions. Shechter’s own cinematic sound-score and Tom Visser’s electrifying lightning designs accompany an ensemble of dancers and musicians as they breathe life into this dreamscape where reality and fantasy intimately converge. True to the company’s dedication to transmit and engage with community using Shechter’s unique movement language, workshops for professionals and non-professionals are also scheduled in connection with the performance week.

 

 

LIRE aussi notre précédente critique DANSE au Grand Théâtre de LUXEMBOURG : JILL CROSIER : GRAND FINALE, fév 2025 : https://www.classiquenews.com/critique-danse-luxembourg-grand-theatre-le-14-fev-2025-game-grand-finale-de-jill-crovisier-creation/

CRITIQUE CD. RAVEL L’ALCHIMISTE. Concerto pour piano en sol (M83), Ma Mère l’Oye (M60), Le Tombeau de Couperin (M68a), Pavane pour un Infante défunte (M19) – Orchestre de chambre Nouvelle Aquitaine. Jean-François Heisser (1 cd Mirare)

Superbe réalisation qui vient à poings nommés célébrer les 150 ans de Maurice Ravel ce 7 mars 2025 ! L’élégance onirique avec laquelle le pianiste et chef d’orchestre Jean-François Heisser aborde les univers oniriques et magiques du sorcier Ravel relève d’un prodige rare… ce n’est pas tant l’intelligence des détails, la clarté et la mesure des alliages de timbres, tous d’un fini et d’un naturel …miraculeux, que la compréhension intuitive et idéalement ciselée dont sont capables chef et instrumentistes, qui captive de bout en bout. Éloquence de l’intime, surgissement de l’ineffable, souffle onirique, respirations secrètes, intimisme et humour aussi… Ce Ravel est infiniment suggestif, porteur de mondes invisibles, aussi raffinés que furtifs.

 

Le Concerto pour piano joué, dirigé par JF Heisser court, aérien, fluide, scintillant, avec un Adagio assai suspendu, dont la caresse intime plonge dans l’insouciance enchantée de l’enfance… Les 5 Pièces enfantines de Ma Mère L’Oye font résonner la même sensibilité délicate où c’est bien la pure poésie qui se déploie, colorant à chaque tableau, d’infinis prodiges poétiques ; les seuls instruments en sont les solistes enivrés, grâce aussi à une prise de son particulièrement parfaite : détaillée, qui respire et enveloppe. La Belle, Poucet,… tissent un hommage juste aux anciens, dans ce regard néo antique, néo baroque (Perrault et Couperin y sont célébrés avec une exquise drôlerie) que Ravel sublime par sa propre sensibilité à la fois incisive et transparente. Laideronne et le jardin sont des prodiges de scintillement orchestral : une leçon de symphonisme ravélien, grâce à la subtilité enivrée des musiciens de l’OCNA / Orchestre de chambre Nouvelle Aquitaine, véritable forge enchantée.

Même agilité nostalgique dès le début du Tombeau de Couperin, où la vivacité de l’évocation saisit par son intensité idéalement millimétrée (les bois sont d’une espièglerie jubilatoire… cf secret et souplesse de la Forlane). Ce sens de la broderie scintillante, la respiration des cordes, l’enveloppe des accents collectifs, l’intelligence là encore des détails et des équilibres entre pupitres sont superlatifs. La Pavane offre un autre suprême degré dans l’art indicible de la nostalgie musicale : l’Orchestre plonge dans un passé évocatoire, puissant et filigrané (exactement comme la parure du Menuet du Tombeau précédent) : il en déduit la texture d’un songe hypnotique. Si Ravel est un alchimiste, Jean-François Heisser s’y révèle aussi magicien, aussi inspiré que fut prestidigitateur le compositeur lui-même.

 

L’album compose le plus bel hommage à l’art ravélien : raffiné mais touchant… jamais sophistiqué et toujours bouleversant de sincérité. Certainement la réalisation que nous attendions pour l’anniversaire Ravel : un programme superlatif, opportun pour les 150 ans de Ravel en mars 2025. Le cd porte bien son titre : « RAVEL L’ALCHIMISTE ».

 

 

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CRITIQUE CD. RAVEL L’ALCHIMISTE. Concerto pour piano en sol (M83), Ma Mère l’Oye (M60), Le Tombeau de Couperin (M68a), Pavane pour un Infante défunte (M19) – Orchestre de chambre Nouvelle Aquitaine. Jean-François Heisser, piano et direction (enregistré en déc 2020 et janv 20201 au TAP de Poitiers). CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2025 – 1 cd MIRARE (MIR582) – Plus d’infos sur le site de l’éditeur MIRARE : https://www.mirare.fr/albums/ravel-lalchimiste/

TOULOUSE, OPÉRA NATIONAL DU CAPITOLE. BELLINI : Norma. Du 26 mars au 6 avril 2025. Karine Deshayes… José Miguel Pérez-Sierra (direction musicale), Anne Delbée (mise en scène)

Norma est de retour au Capitole : Anne Delbée, femme de théâtre et de tragédie, reprend sa mise en scène, six ans après sa création en 2019, et se met au service de deux distributions renouvelées, à l’exception d’une interprète, Karine Deshayes : Adalgisa en 2019, elle sera désormais Norma, relevant le défi des pas moins de 11 contre-ut (avec reprise de la cabalette) et surtout le finale de l’acte II qui expose la chanteuse continument pendant 30 mn ; sans omettre outre la folie qui verse un moment dans l’infanticide, la prière éthérée de « Casta diva », à chanter pianissimo, comme le précise Bellini sur le manuscrit… ; et c’est Chiara Amarù qui sera Adalgisa à ses côtés.

 

Claudia Pavone, Traviata remarquée en 2023 à Toulouse, incarnera en alternance sa première Norma, quelques semaines après Cléopâtre dans Jules César. Elle donnera la réplique à l’Adalgisa d’Eugénie Joneau, « Révélation, artiste lyrique » des Victoires de la Musique Classique 2022. Ce plateau prometteur est dirigé par le chef espagnol José Miguel Pérez-Sierra qui fait ainsi ses débuts dans la fosse de l’Opéra national du Capitole.

Encouragé par le succès de ses 4 opéras précédents, Il Pirata, (son 3è ouvrage lyrique en 1827), puis La Straniera en 1829, enfin I Capuleti e i Montecchi en 1830 et
La Sonnambula en mars 1831, Bellini, la trentaine conquérante, connaît avec Norma, présentée en décembre 1831 à La Scala, son premier revers.
Avec Felice Romani, son fidèle librettiste depuis Il Pirata, Bellini choisit d’adapter une pièce contemporaine française (de Louis Antoine Soumet), créée en avril 1831 à L’Odéon de Paris. Pourtant si l’héroïne de Soumet devient infanticide, plongeant du romantisme volcanique dans les eaux de la passion terrifiante, Bellini mesure, tempère et ne franchit jamais le cercle de l’horreur ; Norma, prêtresse gauloise, et amante passionnée, druidesse altière et amoureuse détruite, demeure digne malgré la trahison qu’elle subit ; icône sacrificielle, elle entre dans le martyre. Bellini en fait une héroïne d’un nouveau type : déterminée, maîtresse de son destin, Norma certes mourra mais du fait de sa volonté et par choix. Ce qui la rend d’autant plus admirable. Le compositeur peut compter sur le talent de celle qui incarna avant Norma, la Sonnambula, Giuditta Pasta. L’insuccès ne dura pas. Et dès la 4è représentation, la modernité du sujet et l’audace de sa forme (airs enchaînés, ampleur nouvelle des chœurs et de la parure orchestrale,…) suscitent l’enthousiasme du public, produisant ensuite 35 représentations suivantes. Wagner grand admirateur de Bellini, appréciait particulièrement dans Norma, outre sa veine mélodique, « la plus profonde réalité, (…) la passion intérieure ».

 

 

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BELLINI : Norma
8 représentations
Les 26, 28*, 29 mars et 1er, 2*, 4 avril à 20h
30* mars et 6 mars à 15h

Représentation supplémentaire : samedi 5 avril,20h

 

RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’Opéra national du CAPITOLE de TOULOUSE : https://opera.toulouse.fr/norma-2064056/

Tragedia lirica en deux actes
Livret de Felice Romani
Créé le 26 décembre 1831 au Teatro alla Scala de Milan
Production Opéra national du Capitole (2019)

 

 

Théâtre du Capitole
José Miguel Pérez-Sierra, direction musicale
Anne Delbé, mise en scène

Karine Deshayes, Claudia Pavone* : Norma
Chiara Amarù, Eugénie Joneau* : Adalgisa
Luciano Ganci, Mikheil Sheshaberidze* : Pollione
Roberto Scandiuzzi, Adolfo Corrado* : Oroveso
Anna Oniani : Clotilda
Léo Vermot-Desroches : Flavio
Emmanuel Barrouyer : Le Grand Cerf blanc

Orchestre national du Capitole
Chœur de l’Opéra national du Capitole
Gabriel Bourgoin, chef du choeur

Tarifs : 10 à 125 € – Durée : 3h10 avec entracte
Chanté en italien, surtitré en français
opera.toulouse.fr
+33 (0)5 61 63 13 13

 

 

synopsis

Après avoir eu deux enfants de sa relation secrète avec la prêtresse gauloise Norma, le proconsul romain Pollione la délaisse pour aimer la servante de cette dernière, Adalgisa. Alors que le clan des gaulois attend de la prêtresse, le signal de la révolte et de l’insoumission à Rome, Norma, femme trahie, choisit la dignité et le sacrifice plutôt que l’infanticide et la haine…

 

 

 

CRITIQUE, récital lyrique. MONTPELLIER, Opéra Comédie, le 4 mars 2025. « Il Teatro Sant’Angelo ». Ensemble Le Consort, Adèle CHARVET (mezzo)

L’Opéra Comédie de Montpellier, rempli à craquer, a accueilli une enfant du pays (« C’est bon de chanter à la maison ! » s’exprimera t’elle avant d’interpréter son premier bis »…) : la mezzo-soprano Adèle Charvet, ici accompagnée par les musiciens de l’ensemble Le Consort. Le programme, centré sur l’opéra vénitien de l’époque d’Antonio Vivaldi, a transporté le public dans l’univers du Teatro Sant’Angelo, théâtre vénitien aujourd’hui disparu, mais dont l’esprit a été ravivé grâce à des œuvres tirées du CD « Teatro Sant’Angelo » publié chez Alpha Classics (que nous avions chroniqué dans ces colonnes). Vivaldi, figure centrale du concert, était représenté par cinq extraits d’opéras, souvent méconnus – tandis que Théotime Langlois de Swarte (violon) puis Justin Taylor (clavecin), les deux maîtres de cérémonie de la soirée, ont exprimé tour à tout leur enthousiasme pour ces découvertes et leur partage avec le public.

 

La soirée a débuté avec l’ouverture de L’Olimpiade de Vivaldi, mettant en valeur la sonorité riche et équilibrée de l’ensemble orchestral, dirigé avec précision par Théotime Langlois de Swarte. Les cordes baroques, soutenues par un continuo composé d’un clavecin, d’un théorbe, d’un violoncelle et d’un alto, ont créé une atmosphère envoûtante. Justin Taylor, au clavecin, a capturé avec brio l’énergie caractéristique de Vivaldi. Le programme a ensuite enchaîné avec des airs, dont le poignant « Il mio crudele amor » de Michelangelo Casparini, interprété avec une grâce et une finesse remarquables par Adèle Charvet. Sa voix, d’un registre mezzo chaleureux et raffiné, a su traduire avec naturel et souplesse les émotions complexes de tous ces textes exigeants.

D’autres compositeurs, moins connus mais tout aussi talentueux, comme Giovanni Ristori et Fortunato Chelleri, ont été mis à l’honneur, révélant une rhétorique musicale typique de l’époque vénitienne. La mezzo montpelliéraine, en parfaite harmonie avec les musiciens, a captivé l’auditoire par son interprétation expressive, plongeant dans les excès et les passions de cette musique baroque, avec l’engagement artistique qu’on lui connaît. Le concert s’est achevé en apothéose avec deux extraits d’Andromeda liberata et de La fida ninfa, tous deux nés sous la plume d’Antonio Vivaldi. En bis, Adèle Charvet a interprété avec une profonde émotion « Lascia ch’io pianga » de Haendel, un clin d’œil à l’héritage du Drama in musica italien, avant de reprendre le renversant « Alma opressa« , extrait de La Fida Ninfa précitée.

Ce concert a été une célébration vibrante de l’opéra vénitien, un hommage à son héritage et une invitation à redécouvrir ses joyaux oubliés.

 

 

 

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CRITIQUE, récital lyrique. MONTPELLIER, Opéra Comédie, le 4 mars 2025. « Il Teatro Sant’Angelo ». Ensemble Le Consort, Adèle CHARVET (mezzo). Crédit photo © OONM

MONTPELLIER. 40ème Festival Radio-France Occitanie Montpellier. Du 6 au 19 juillet 2025. Yuja Wang, Marianne Crebassa, Chloé Dufresne, Julie Roset, Daniel Harding, Hervé Niquet, Cristian Macelaru, Bertrand Chamayou…

Du 6 au 19 juillet se déroulera la 40ème édition du Festival Radio-France Occitanie Montpellier. Pour marquer cet anniversaire, les temps forts de musique classique, de jazz et d’électro s’entremêlent dans divers lieux à Montpellier, ainsi que dans 30 communes de l’Hérault.

 

Grâce à la décentralisation, les 40 ans du Festival Radio-France Occitanie Montpellier ont été balisés de riches heures, de Mstislav Rostropovitch (1985) dans la cour Jacques Cœur jusqu’à la foudroyante Elektra de Strauss avec Hildegard Behrens (1995), sans oublier le fabuleux plateau participant à l’exhumation de Fervaal de d’Indy (2019) au Corum. Et des générations d’auditeurs ont découvert la musique de chambre et le jazz contemporain pendant quelques décennies, bénéficiant de la gratuité.

Sous la direction de Michel Orier, cette édition 2025 suit toujours les voies de l’éclectisme, plus haut signalé et élargit les lieux montpelliérains de diffusion, notamment dans la salle Soulages du Musée Fabre ou au Temple de la rue Maguelone. Elle enregistre la venue de solistes prestigieux de toute génération, de la pianiste Yuja Wang à la mezzo-soprano Marianne Crebassa, ainsi que de chefs chevronnés, de Daniel Harding à William Christie, sans omettre la jeune lituanienne Mirga Gražinytė-Tyla. Sous la pléiade de baguettes, les deux orchestres de Radio-France, le Mahler Chamber Orchestra, Le Concert Spirituel, Les Arts Florissants et les deux orchestres nationaux en Occitanie – Toulouse et Montpellier – se succéderont sur le plateau de l’Opéra Berlioz (Corum). Si d’aucuns regrettent la programmation d’exhumation d’opéras, les publics de 2025 découvriront l’Actéon d’Emmanuelle da Costa, une commande de Radio-France (création en 2024) destinée au jeune public. En sus de ces événements payants, la trentaine de concerts chambristes dans les communes héraultaises maintient la gratuité.

Selon les mots du maire de Montpellier (Michaël Delafosse) et de la vice-présidente de la Région Occitanie, plus que jamais, il s’agit de maintenir l’action publique en faveur de la culture. Aussi dix-sept concerts du Festival occitan seront retransmis en direct sur France Musique et les radios publiques européennes. 

 

 

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MONTPELLIER. 40ème Festival Radio-France Occitanie Montpellier. Du 6 au 19 juillet 2025. Yuja Wang, Marianne Crebassa, Chloé Dufresne, Julie Roset, Daniel Harding, Hervé Niquet, Cristian Macelaru, Bertrand Chamayou…

 

Tout le programme : https://lefestival.eu/

(Ouverture de la location : 13 mars – hormis pour les concerts actuellement en prévente)

 

Pour le lectorat de ClassiqueNews, retenons les dates suivantes :

. 6 juillet : ouverture du Festival avec le concert de musiques de film, en accès gratuit sur la place de l’Europe : Orchestre national de Montpellier, dir. Chloé Dufresne

. 7 juillet : concert symphonique Beethoven, Chopin, Tchaïkovski, Stravinsky avec la pianiste et cheffe Yuja Wang, à la tête du Mahler Chamber Orchestra

. 8 juillet : Il Trionfo del tempo e del disinganno de G. F. Händel par Les Arts florissants dirigés William Christie. Parmi les solistes, la soprano Julie Roset, nommée Révélation artiste lyrique aux Victoires de la musique 2025

. 9 juillet : récital Ravel par le pianiste Bertrand Chamayou

. 10 juillet : Symphonie Résurrection de G. Mahler avec l’Orchestre national de Toulouse, dir. Tarmo Peltokoski, avec Marianne Crebassa (alto), Rachel Willis-Sørensson (soprano)

. 11 juillet : concert symphonique Debussy, Britten, Saint-Saëns, Adès avec l’Orchestre philharmonique de radio-France, dir. Mirga Gražinytė-Tyla

. 15 juillet : Messe à 40 voix d’Alessandro Striggio, avec le Concert Spirituel, dir. Hervé Niquet

. 17 juillet : Concerto pour piano et orchestre nº 3 de S. Rachmaninov, Une vie de héros de R. Strauss, avec l’Orchestre philharmonique de Radio-France, dir. Daniel Harding

.18 juillet :   Chant du destin de Brahms, le Concerto pour piano et orchestre de Schumann et la Symphonie n°9 de Dvořák avec l’Orchestre national et le Chœur de l’Opéra de Montpellier, dir. Roderick Cox

. 19 juillet : concert symphonique Sohy, Saint-Saëns, Ravel avec l’Orchestre national de France, dir. Cristian Măcelaru

COFFRET CD événement. KIRI TE KANAWA : a celebration – Complete recital recordings for Decca and Philips (23 cd DECCA classics)

23 cd brossent ici le portrait musical de la soprano vedette de l’écurie Decca (entre autres, en particulier à l’époque où le label s’était fait une spécialité en étant l’éditeur des plus grandes voix lyriques), star incontestée de l’opéra, du récital et aussi de programmes mixtes, « cross over » : la néo-zélandaise, d’origine maori, Kiri te Kanawa (née en 1944) ; son style aristocratique, la finesse et l’intelligence des nuances, son legato souverain, la tendresse comme l’éclat du timbre font de la cantatrice un must absolu en matière de chant mozartien.

 

 

A la sensualité très raffinée du timbre se mêle aussi un élégance so british que les 600 millions de téléspectateurs ont pu mesuré et apprécié lors de sa prestation éblouissante pour les noces du Prince Charles et de Diana en 1981. Les 23 enregistrements, à l’origine pour Philips, Decca et DG, confirment évidemment l’inégalable et légendaire mozartienne : ainsi le cd 1 d’airs de concert sous la conduite du chef György Fischer en 1980 ; mais aussi le cd d’Arias avec Jeffrey Tate 7 ans plus tard (1987) où la soprano ose avec la même maîtrise des personnages qu’elle n’a pas chantés sur la scène lyrique : Donna Anna de Don Giovanni – quand elle chante plutôt sur les planches Elvira ; surtout Konstanze de L’Enlèvement au sérail et les coloratoure redoutables de l’air déterminé « Martern aller Arten » , d’un aplomb engagé confondant et de fait très convaincant.

MOZARTIENNE LÉGENDAIRE… Deux autres cd mozartiens avec Colin Davis complètent la collection des airs lyriques (dont la Comtesse des Noces de Figaro, un rôle qu’elle chanta à Covent Garden dès 1971, et qu’elle incarne avec la profondeur et la grâce des plus grandes mozartiennes ; mais aussi Pamina dans La Flûte enchantée, 1982) ; surtout celui plus ancien, enregistré en 1971, et dédié aux airs sacrés avec l’orchestre et les choeurs du LSO dans les Vêpres du confesseur KV 339 (Laudate Dominum suspendu, angélique) et dont l’Exsultate, jubilate KV 165 reste un accomplissement anthologique.

Le coffret souligne ensuite l’autre compositeur que la diva a servi avec un art accompli de la profondeur et de l’extrême raffinement : Haendel. C’est d’ailleurs son air « « Let the Bright Seraphim » qu’elle chanta pour le mariage princier précédemment évoqué. Avec Christopher Hogwood (et son Academy of Ancient Music), en 1992, la diva convainc dans un programme composé pour elle (cd6), un pasticcio signé Marshall Pynkoski (« The Sorceress », dont le film a conforté le grand succès, révélant l’ampleur du tempérament dramatique de la diva, en divinité magicienne humaine et fantasque à la fois, d’une indiscutable présence).

On oubliera son incursion chez Richard Strauss : les lieder gravés en 1990 avec Solti puis avec les Wiener Philharmoniker (Quatre derniers) laissent réservés par leur distanciation émotionnelle qui peut s’apparenter à de l’exquise froideur.


Plus convaincants les Chants d’Auvergne de Canteloube (avec Jeffrey Tate, 1981-1982) sont en revanche indiscutables, son legato infini produisant l’effet d’un enivrement constant, auquel la dignité du style confère une noblesse ciselée (pourtant étranger à toute accentuation dialectique ou rustique). Ce n’est pas que la diva ne s’intéresse pas au texte, mais sa diction aristocratique et son style princier l’écarte de toute compromission vernaculaire…C’est le constat que suscitent les Nuits d’été de Berlioz (avec l’Orchestre de Paris et leur chef de l’heure,Daniel Barenboim) ou les Mélodies populaires grecques de Ravel (avec Roger Vignoles au piano).

REINE DU CROSS OVER… En complément Decca ajoute ses deux incursion dans le massif mahlérien pour la 4ème Symphonie (l’une avec Ozawa, l’autre avec Solti) ; complétant la palette lyrique, Verdi et Strauss se révèlent défendus avec un engagement mémorable : ainsi sa Desdémone chez Verdi, son Arabella ou sa Comtesse de Capriccio chez Richard Strauss … Enfin volet où la diva sut briller avec un feu égal, celui des programmes aux genres mêlés ou cross-over dont les plus réussis, révèlent une maestrià au geste communicatif : ainsi le programme réalisé avec le Mormon Tabernacle Choir (« Songs of Inspiration », avec l’Utah Symphony Orchestra et Julius Rudel, 1989) ; l’album « Christmas with Kiri », avec le Philharmonia et Carl Davis (1985); au même titre que les albums associant jazz et du musical (dont celui avec André Previn au piano), affichant une intensité lumineuse qui profite aussi au West side story de et dirigé par Bernstein, version opératique si réussie validé par l’auteur lui-même et à laquelle apportent leur immense vitalité José Carreras et Tatiana Troyanos… Même engouement face à la réussite de My Fair Lady, accomplissement londonien au style irrésistible entre swing et élégance grâce au chef expert de ce répertoire (John Mauceri), où Kiri / Eliza profite de la complicité exquise des comédiens, Jeremy Irons et John Gielgud.

 

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CRITIQUE Coffret CD événement. « Kiri Te Kanawa, A celebration ». Decca, 23 cd. PLUS D’INFOS : https://www.deccaclassics.com/en/catalogue/products/a-celebration-kiri-te-kanawa-13364

CRITIQUE, opéra. SAINT-GALL, Theater, le 3 mars 2025. HUMPERDINCK : Hänsel und Gretel. J. Panara, K. Hardwick, L. Sokolowski, V. Neri, R. Botta, A. Mahon… Guta Rau / Yi-Chen Lin

Parmi les nouvelles productions présentées en fin d’année dernière au Théâtre de Saint-Gall (en Suisse), le chef d’oeuvre féérique d’Engelbert Humperdinck, Hansel et Gretel, a permis à la metteuse en scène Guta Rau de s’illustrer une nouvelle fois in loco, après La Flûte enchantée de Mozart en 2021 et La Chauve-Souris de Strauss en 2022. La metteure en scène Allemande propose un spectacle d’une fantaisie lumineuse, en grande partie tournée vers le jeune public, qui peut aussi être apprécié par les plus chevronnés. 

 

Située entre Zurich et le lac de Constance, Saint-Gall peut s’enorgueillir de la présence  en plein centre-ville de son abbaye fondatrice, dont la bibliothèque au riche décor baroque lui a valu une inscription au patrimoine mondial de l’Unesco en 1983. A l’occasion de la visite de la huitième ville de Suisse, les mélomanes ne peuvent manquer de visiter son Théâtre, dédié en grande partie à l’opéra et à la danse, dont l’architecture figure parmi les exemples les plus réussis de la période brutaliste. Construite en 1968, la salle principale de 742 places impressionne par ses volumes volontairement déstructurés, offrant une visibilité et une proximité idéale avec l’immense scène. Les splendides luminaires du grand escalier évoquent plusieurs flocons de neige entremêlés, que l’on ne se lasse pas d’admirer sous tous les angles.

Dans cet écrin idéal, le spectacle imaginé par Guta Rau colle au plus près des différentes péripéties, en insistant tout d’abord sur les chamailleries entre les enfants, avant que l’irruption plus sonore des parents ne viennent sonner le glas de la malice ambiante. Le décor années 1950, volontairement resserré au plus près des spectateurs, permet de figurer la pauvreté, autant qu’il sert d’opportune caisse de résonance pour les interprètes. L’arrivée du père par les hauteurs de la salle apporte un effet saisissant, à même de pousser le trait de son ébriété avancée, aussi tonitruante que parfaitement projetée. 

Le récit de la légende de la sorcière lance véritablement le spectacle par son originalité prononcée, en projetant en arrière-scène des images animées en forme de théâtre d’ombres, d’une tonalité naïve et espiègle qui rappelle l’art de Michel Ocelot (le créateur de Kirikou). Plus tard, l’évocation poétique des esprits de la forêt conserve des contours volontairement simplifiés, en un esprit bon enfant et ludique, qui s’oppose aux couleurs criardes d’une sorcière délicieusement grotesque dans son costume extravagant. En dehors de l’utilisation de la vidéo, la direction d’acteur est l’un des points forts du spectacle, en multipliant les traits comiques, sans jamais forcer le trait. La complicité entre les enfants est également bien suggérée, tout du long.

Jennifer Panara (Hänsel) et Kali Hardwick (Gretel) se montrent tous deux réjouissants, autant par la fraîcheur de leur timbre que la qualité de leur articulation. On aime aussi la Gertrud chaleureuse de Libby Sokolowski, de même que le Peter plus tonitruant de Vincenzo Neri. Enfin, Riccardo Botta joue davantage la carte de la séduction sonore que de la fantaisie débridée, en un sens des équilibres judicieusement dosé. La chef taïwanaise Yi-Chen Lin met un peu de temps à chauffer l’orchestre local, d’un bon niveau global, autour de tempi assez lents. Sa battue s’anime peu à peu pour trouver le ton juste, sans affectation excessive, d’une narration souple et naturelle.

 

 

 

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CRITIQUE, opéra. SAINT-GALL, Konzert und Theater, le 3 mars 2025. HUMPERDINCK : Hänsel und Gretel. Jennifer Panara (Hänsel), Kali Hardwick (Gretel), Libby Sokolowski (Gertrud), Vincenzo Neri (Peter), Riccardo Botta (Die Knusperhexe), Anna Mahon (Sandmännchen, Taumännchen). Kinderchor des Theaters St.Gallen, Sinfonieorchester St.Gallen, Guta Rau (mise en scène) / Yi-Chen Lin*, Jamie Phillips (direction musicale). A l’affiche du Konzert und Theater St.Gallen, jusqu’au 5 mars 2025. Crédit photo : Ludwig Olah.

CHÂTEAU DE VERSAILLES, Opéra royal, du 4 au 12 avril 2025. DONIZETTI : La Fille du régiment. Gwendoline Blondeel, Patrick Kabongo… Gaétan Jarry (direction) / Jean-Romain Vesperini (mise en scène) /

Le premier opéra en français de Donizetti,  » La Fille du Régiment  » créé à Paris en 1840 est un triomphe : alors que Louis Philippe, roi des Français, décide la réouverture de Versailles comme musée dédié « à toutes les gloires de la France », le compositeur italien semble suivre le sillon tracé par son prédécesseur Rossini, et devenir à Paris, la coqueluche de la scène lyrique française.

 

Voulu par un monarque éclairé, le nouveau Versailles célèbre surtout Napoléon, plus honoré que Louis XIV, quand la France prépare avec ferveur le retour des cendres de l’Empereur. Le patriotisme bat son plein, et La Fille du régiment s’inscrit dans cette fièvre collective. Donizetti imagine les amours de la vivandière Marie, orpheline du Tyrol devenue fille adoptive d’un régiment français, et le jeune paysan Tonio qui a sauvé la jeune femme et rejoint l’armée napoléonienne (air « Ah mes amis… ») ; mais Marie est reconnue comme la nièce de la marquise de Birkenfeld, détachée aussitôt du régiment français et éduquée comme une aristocrate… le compositeur Donizetti se dépasse dans la composition d’airs et de chœurs patriotiques, dans le pur style bel canto (que n’aurait pas renié Belini lui-même), sans omettre le fameux air de Tonio, « Everest de l’Art Lyrique » aux neuf contre-uts !…

Contexte oblige et virtuosité maîtrisée, l’opéra de Donizetti s’impose sur la scène française ; elle totalisait déjà 500 représentations en 1871 à l’Opéra-Comique ; et la millième représentation est atteinte en 1914 à Paris. Lors des représentations de décembre 1940 au Metropolitan Opera de New York, Lily Pons, après un étourdissant « Salut à la France » entonna La Marseillaise qui devint un symbole de liberté en pleine guerre.

Au printemps 2025, l‘Opéra Royal de Versailles relève autant de défis artistique et affiche l’ouvrage en regroupant une distribution prometteuse dont Gwendoline Blondeel et Patrick Kabongo, accompagnés par le Chœur de l’Armée française, mais aussi plusieurs jeuens chanteurs de sa propre Académie, qui vont transporter le public vers le cœur battant de la patrie !

 

 

 

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DONIZETTI : La Fille du Régiment, 1840
RÉSERVEZ vos places
directement sur le site de Château de Versailles Spectacles : https://www.operaroyal-versailles.fr/event/donizetti-la-fille-du-regiment/
Durée : 2h40 mn

 

Gwendoline Blondeel : Marie
Patrick Kabongo : Tonio
Jean-François Lapointe : Sulpice
Éléonore Pancrazi : La Marquise de Berkenfield
Jean-Gabriel Saint-Martin : Hortensius
Flore Royer* : La Duchesse de Crakentorp
Attila Varga-Tóth* : Un paysan, Un notaire
Jérémie Delvert** : Un caporal
*Membres de l’Académie de l’Opéra Royal
**Membre du Chœur de l’Armée française
Chœur de l’Armée française
Chœur de l’Opéra Royal
Orchestre de l’Opéra Royal
Gaétan Jarry, direction
Jean-Romain Vesperini, Mise en scène
Christian Lacroix : Costumes
Roland Fontaine :Décors
Étienne Guiol : Vidéo
Christophe Chaupin : Lumières
Laurence Couture : Maquillage et coiffure
Julie Berce : Accessoires
Claire Manjarrès : Assistante mise en scène

 

Production Opéra Royal / Château de Versailles Spectacles.
Ce concert est présenté avec le soutien exceptionnel de l’ADOR – les Amis de l’Opéra Royal.
Le programme sera enregistré en CD à paraître au label Château de Versailles Spectacles. Représentations du 10 et 12 avril filmées.

 

Déroulement de la soirée / Programme
Première partie : 1h15
Entracte
Deuxième partie : 45 minutes
Avant propos  / « 15 minutes avec »
Vendredi 4 avril à 19h30, partagez un moment d’échange exclusif avec un ou plusieurs artistes du spectacle (sous réserve)

Sur présentation de votre billet pour le soir-même et dans la limite des places disponibles.

OPÉRA DE NICE. Ballet Nice Méditerranée, du 2 au 8 avril 2025 – Forsythe / Brumachon / Van Manen / Ekman … Quatuor à cordes de l’Orchestre Philharmonique de Nice

En avril 2025, l’émotion prend corps à l’Opéra de Nice ! Le programme chorégraphique présenté à Nice affiche quatre ballets conçus par 4 créateurs de rêve, parmi les plus grands chorégraphes internationaux : la virtuosité fulgurante de Forsythe, l’intensité brute de Brumachon, l’élégance raffinée de van Manen, l’humour décapant, percutant d’Ekman… Un cycle incontournable.

 

Danse à l’Opéra de Nice Côte d’Azur
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8 représentations événements
2 avr. 2025 à 20h
3 avr. 2025 à 20h
4 avr. 2025 à 20h
5 avr. 2025 à 15h puis à 20h
6 avr. 2025 à 15h puis à 20h
8 avr. 2025 à 20h
RÉSERVEZ vos places directement sur le site de l’Opéra de Nice Côte d’Azur :
https://www.opera-nice.org/fr/evenement/1196/forsythe-brumachon-van-manen-ekman
Opéra Nice Côte d’Azur
Durée : 1h15 avec entracte

Quatre pièces chorégraphiques signées William Forsythe , Claude Brumachon ,Hans van Manen, Alexander Ekman

Avec le Ballet Nice Méditerranée
et le Quatuor à cordes de l’Orchestre Philharmonique de Nice

 

 

Présentation des 4 ballets à l’affiche de l’Opéra de Nice Côte d’Azur

 

THE VERTIGINOUS THRILL OF EXACTITUDE
Chorégraphie : William Forsythe
Musique : Franz Schubert

Certes des tutus, des pointes, une technique classique infaillible… mais aussi tellement de modernité dans cette pièce pour 5 danseurs, imaginée par William Forsythe. Le chorégraphe entre humour, finesse, élégance, joue avec les codes d’une main de maître ; il régale nos sens dans ce vibrant hommage à la danse classique qui est aussi tourbillon de virtuosité alliant précision et vitesse vertigineuses. Une performance exaltante qui repousse les limites du corps et de l’espace.

 

 

LES INDOMPTÉS
Chorégraphie : Claude Brumachon
Musique : Wim Mertens

Ce duo aura fait le tour du monde et des scènes internationales… C’est un pur moment de complicité qui a fait de ces « Indomptés », créés en 1992, un hymne fusionnel et affronté à deux corps qui est un véritable bijou. Intensité maximale des émotions, équilibre parfait entre les séquences brusques et apaisées… La beauté du duo dans l’écrin conçu par Claude Brumachon est devenu un standard planétaire. Le duo intense et instinctif, se réinvente constamment dans une danse brute, viscérale, empreinte d’émotions à l’état pur.

 

 

TROIS GNOSSIENNES
Chorégraphie : Hans Van Manen
Musique : Erik Satie
Piano : Roberto Galfione

Les 3 Gnossiennes de Satie, aux mélodies envoûtantes, inspire au chorégraphe Hans van Manen, une manière d’épure poétique, une esquisse chorégraphique d’une délicatesse incomparable ; l’écriture du chorégraphe engendre un pas de deux d’une élégance rare, où chaque mouvement traduit la délicatesse et la profondeur des sentiments humains. Elle révèle un art du dessin qui est la signature d’Hans van Manen, art qu’il a brillamment enseigné à la Sommer Akademie des Tanzes de Cologne où nombre de jeunes chorégraphes se sont pressés pour recueillir et comprendre son art des équilibres et de la grâce…

 

 

CACTI
Chorégraphie : Alexander Ekman
Musique : Franz Schubert, Joseph Haydn, Ludwig Van Beethoven

Avec Cacti, Alexander Ekman propose un dialogue jubilatoire et espiègle entre 16 danseurs et 4 instrumentistes. Entre humour et virtuosité, son style décalé, provocateur, – plien d’humour et de piquants (à l’image des cactus présents sur scène, et qui donnent le titre de la pièce) lui permet de briller sur la scène par ses trouvailles irrésistibles entre théâtre, danse, délire loufoque.

Crédits photos : Artistes du Houston Ballet dans Cacti d’Alexander Ekman / Photo de Amitava Sarkar (2016) Avec l’aimable autorisation du Houston Ballet.
Symphony in D Minor / “Death and the Maiden” : IV Presto – By Franz Schubert arranged and orchestrated by Andy Stein

 

 

Viens avec tes parents

Pendant que vous assistez au spectacle, confiez-nous vos enfants (5-10 ans) pour un atelier artistique encadré par des professionnels. Tarif 5 € – Dimanche 6 avril 2025 à 15h
Informations et réservations à la billetterie, dans la limite des places disponibles

 

 

CRITIQUE CD événement. ALDO CICCOLINI, piano : RACHMANINOV, Concert pour piano n°3 – Variations sur un thème de Paganini (1 cd Forlane, réédition 1964, 1966)

Né à Naples en 1925, le pianiste Aldo Ciccolini reçoit au Conservatoire de Parme, la grande leçon de Busoni et de… Liszt. Ce qui lui permet, grâce à ses qualités propres, en 1949 de remporter le Concours Long Thibaud en 1949… à 24 ans. Pour les 10 ans de sa disparition (1er février 2015 à Asnières sur Seine), l’association « les amis d’Aldo Ciccolini » publie chez Forlane la prise live du Concerto pour piano n°3 (qui vient ainsi compléter son enregistrement du n°2 (en 1957, Emi). La passion et l’éloquence que le pianiste déploie rappellent ses défrichements visionnaires chez Liszt, son engagement mémorable pour la musique française dont il fut un ardent défenseur (de Chabrier et Satie à Massenet et Debussy).

 

 

 

Le Concerto n°3 est porté par un compositeur pianiste qui n’a pas hésité à défendre son œuvre en tournée dans le contexte de sa création à New York le 28 nov 1909. Il rejouera ainsi la partition en janvier 1910 sous la direction de… Gustav Mahler.

Aldo Ciccolini y redouble de virtuose facétie, de généreuse expressivité dans l’un des Concertos les plus denses, et les plus ambitieux de Rachma dont il souligne avec malice entre autres, les mille références harmoniques à Wagner… Le soliste caresse avec de superbes respirations l’élan mélodique du premier Allegro (ma non troppo) en particulier quand il est doublé par le cor… sans omettre de marquer avec autorité les points structurants de ce premier mouvement, autant d’appuis pour nourrir la vitalité lyrique et comme éperdu du chant pianistique.
Le mouvement lent (Intermezzo noté adagio, en ré mineur) s’inscrit dans le sillon du mouvement lent du Concerto n°2 : Aldo Ciccolini l’aborde comme une rêverie mitigée, ambivalente à la fois ferme et précise et portée par une humeur évanescente dont l’accord avec les cordes s’avère le plus bel hymne à l’extase ; son entrain est d’autant plus communicatif qu’il est enchaîné au final, amène à l’apothéose conclusive, au caractère libre, rhapsodique, et même hollywoodien.

Composée pour lui-même (et créée en 1934 à Baltimore sous la direction de Leopold Stokowski) comme une fantaisie libre mais passionnément pianistique, la Rhapsodie sur un thème de Paganini développe ce goût premier pour la métamorphose ; à partir du 24è Caprice (1817), Rachmaninov réinvente à sa façon le développement mélodique à travers 24 séquences enchaînées dont la 7è ajoute au thème de départ, le motif du Dies Irae. Le pianiste souligne et décrypte chaque option d’un compositeur facétieux, dramaturge, fin orchestrateur aussi qui sans pause, ne cesse de réécrire constamment le dialogue entre piano et orchestre.

 

 

 

 

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CRITIQUE CD. ALDO CICCOLINI, piano. RACHMANINOV : Concert pour piano n°3, Rhapsodie sur un thème de Paganini. Orchestre de la Radio Télé Luxembourg, Louis de Froment (lives enregistrés en 1964 et 1966) – 1 cd Forlane pour les 10 ans de la disparition d’Aldo Ciccolini.

 

 

 

CRITIQUE CD. MOZART : Die Zauberflöte K 620 (1791). Bastian Kohl, Manuel Walser… Orkester Nord, Vox Nidrosiensis. Martin Wahlberg, direction (3 cd Aparté)

Comme une épure, jouant sur l’éclat scintillant, percutant, métallique de chaque timbre instrumental comme de chaque voix soliste, le chef fondateur d’ORKESTER NORD, Martin Wahlberg défend une conception fortement dégraissée, voire essentiellement structurelle de La Flûte Enchantée de Mozart. Une vision réduite à l’ossature de la partition ; son squelette primordial.

 

 

Ce parti de la décantation, s’inscrit d’abord dans le choix de voix blanches, droites, sans vibrato (ou le moins possible sauf quand cela est déterminé par un effet expressif…) ; ainsi le cas des chanteuses Pauline Texier (La Reine de la nuit) qui malgré son agilité manque de précision dans les coloratoures ; surtout de Ruth Williams dans le rôle de Pamina dont la juvénilité plus enfantine qu’adolescente et d’une clarté acidulée, primitive, au timbre proche d’un garçon qui n’aurait pas mué, inscrit la fiancée de Pamino hors de toute tradition lyrique écoutée jusque là. Certes les archives indiquent que la créatrice du rôle Anna Gottlieb n’avait que 17 ans mais rien ne précise qu’elle avait une tel soprano acide et aiguë…

Ce chant instrumental souvent dépourvu de toute charge émotionnelle laisse parfois décontenancé ; ainsi le trio avec les 3 garçons au poli glacial ; ou encore son duo avec Monostatos laisse… froid. Même le chant des hommes armés aux abords du Temple, sonne distancié, comme lointain et désimpliqué, – comme le feraient des jouets mécanisés qui chantent et occupent une fonction, plutôt qu’ils ne campent un personnage.

Pourtant ce chant sans vibrato (ou si peu) est comme contredit par le ténor Angelo Pollak (Pamino) qui lui en use et abuse à l’excès. Les deux chanteurs forment un couple d’élus bien mal assortis au final.

On reste beaucoup plus convaincus par les voix graves : comme l’indiquent clairement le tempérament et la style plus naturel de Papageno (Manuel Walser) et surtout l’excellent Bastian Kohl, voix ample, riche, aux harmoniques naturelles qui incarne toute l’épaisseur humaine et fraternelle du sage Sarastro.

Le chef inscrit sa lecture dans la tradition des opéras comiques de Grétry et Dalayrac (si prisés à Vienne à l’époque de Mozart). Il souligne aussi la parenté de la Flûte Enchantée avec les ouvrages spectaculaires et philosophiques (l’anneau de pouvoir, la pierre philosophale), drames encyclopédiques et magiques, que représente et conçoit Shikaneder, le librettiste et directeur du théâtre populaire aux der Wieden. Cette double activité de l’opéra, à la fois conte magique et rite philosophique (voire maçonnique) est en revanche parfaitement exprimé.

Orchestralement et musicalement, l’approche ne manque pas d’attraits : variations libres avec ornementations quasi improvisées, équilibre sonore plutôt chambriste avec focalisation sur les bois et les vents (la fameuse colonne maçonnique), nuances des cordes, – parties historiques avérées ici dévoilées (comme la fantaisie pour flûte de Tamino pendant l’épreuve du silence…), mais aussi effets sonores propre à l’imaginaire du conte (oiseaux, tonnerre, instrument magique de Papageno…) … tout œuvre pour l’enchantement et l’accomplissement d’un parcours qui en forme d’épreuves, doit révéler les personnages à eux mêmes. Tout ce qui les fait passer de rôles à individus (on aurait souhaité que cette métamorphoses soit littéralement plus audible).

Ajoutons des choix de tempo parfois très (trop) lents qui creusent davantage la profondeur spirituelle, le sens caché de certains épisodes (ou souvent la portée des choeurs abordés très justement comme les chorals de Bach). La dimension théâtrale est d’autant plus manifeste que l’intégralité des dialogues parlés est restituée. Sauf les réserves dans le choix des voix, la lecture ne manque pas d’arguments. Elle permet même de nuancer notre compréhension de la partition, d’envisager un autre dispositif d’après ce que nous savons des conditions de la création en 1791.

 

 

 

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MOZART : Die Zauberflöte K 620 (1791). Bastian Kohl, Manuel WalserOrkester Nord, Vox Nidrosiensis. Martin Wahlberg, direction (3 cd Aparté) – enregistré en 2023

 

 

 

Décès de Jean-Louis Pichon, directeur de l’Opéra de Saint-Etienne le 4 mars 2025

Dans un communiqué élogieux, le Maire de Saint-Étienne, Gaël Perdriau a tenu à exprimer son émotion suite à la mort de l’homme de théâtre et ancien directeur de l’Opéra de Saint-Étienne [1983-2008], Jean-Louis Pichon, stéphanois de cœur et grand ambassadeur de la ville, survenu le 4 mars 2025.

Communiqué de Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne, président de Saint-Etienne Métropole.

 

 

« C’est avec une très grande tristesse que je viens d’apprendre le décès de Jean-Louis Pichon.
Directeur de l’Opéra de Saint-Etienne pendant 25 ans, de 1983 à 2008, il consacra sa vie à l’art lyrique.
Fondateur de la Biennale Massenet, metteur en scène renommé, comédien, membre du jury du concours de voix de Placido Domingo [Operalia], Jean-Louis Pichon excellait dans tout ce qu’il créait et entreprenait. Son travail et son talent étaient reconnus bien au-delà de nos frontières. Il aura joué et fait jouer dans le monde entier en restant plus que jamais attaché à sa ville de naissance.
L’Opéra de Saint-Etienne, sa ville qu’il aimait tant, lui doit beaucoup. Son rôle fut primordial dans l’existence et le renommée de notre opéra. Pour beaucoup, ayant eu la chance de le côtoyer, Jean-Louis Pichon et l’Opéra de Saint-Etienne ne faisaient qu’un. Je pense particulièrement à eux en ce moment difficile et douloureux.
Souhaitant faire partager sa passion pour l’art lyrique qui ne l’aura jamais quittée, il venait de créer l’Arbre deux vies, une association destinée à soutenir les jeunes artistes lyriques ou chanteurs confirmés.
Homme de culture, Jean-Louis Pichon avait cette sensibilité et cette sincérité qui faisaient de lui une personne particulièrement attachante et rare.
Je n’oublie pas non plus son engagement à mes côtés, sans discontinuer.
Jean-Louis Pichon va nous manquer. Saint-Etienne perd l’un de ses plus brillants ambassadeurs.
J’adresse, en tant que maire de Saint-Etienne, au nom des élus du conseil municipal, de toutes les Stéphanoises et de tous les Stéphanois, à sa famille, à ses proches, aux équipes d’agents ayant travaillé avec lui, mes sincères condoléances et l’assurance de toute ma sympathie ».

 

Gaël Perdriau
Maire de Saint-Etienne
Président de Saint-Etienne Métropole

 

 

 

Jean-Louis Pichon

Copyright photo : Jérôme Abou / ville de Saint-Etienne

 

 

 

VIDÉO – Hommage à Jean-Louis Pichon

CRITIQUE CD. JEAN-CHARLES GANDRILLE: 4 Trios pour piano / Piano Trios (1 cd PARATY)

A la suite de Bach, de Brahms ou de Bartok, le compositeur français Jean-Charles Gandrille (2ème Prix du Concours de composition pour orchestre Onesong de Taïwan, remis le 15 février dernier) célèbre sans sourciller la vitalité qu’apporte l’incursion des musiques populaires dans les partitions classiques : … enrichissement, renouvellement, fertilisation vivante… De fait, les 4 Trios pour piano ici enregistrés par le label Paraty témoignent avec brio et tonicité, de sa maîtrise au carrefour des sources musicales.

 

 

« Parfois, Ravel s’est aventuré dans le domaine du jazz.C’était une façon d’atteindre d’autres publics, un moyen de renouvellement, un élargissement du spectre des émotions, une libération du corps et de l’âme, et de les mettre en mouvement par la danse. Combiner les plaisirs sensoriels du dionysien avec l’apollonien », précise Jean-Charles Gandrille. Tout en avouant être aussi influencé par Steve Reich ou Philip Glass, le compositeur n’hésite pas à utiliser la rythmique spécifique des danses, surtout « cette « musique à base de groove », qui atteint son apogée d’expression dans la musique techno, (…) déjà présente d’une certaine façon dans l’ouverture du Christmas Oratorio de Bach ou des Quatre saisons de Vivaldi, en particulier le Concerto pour l’hiver… ».
Les quatre compositions de ce programme manifestent ce talent des plus actifs (l’auteur parle alors d’ « effeverscence créative ») qui alterne avec équilibre les climats les plus contrastés.

Le Trio n°1 ou « Nox-Trio », double évocation nocturne, est d’abord nostalgique et contemplatif (Cantus), puis d’une détermination contrapuntique conquérante jusqu’à l’ivresse et l’exténuation (contrapunctus). Au début puis à la fin, le compositeur pianiste ouvre et referme un fabuleux livre d’émotions (certainement très personnelles).

Amorcé par le chant du violoncelle le Trio n°2 (« Pop-Trio ») est d’une forme plus libre, mais aussi dense et affirmée que le précédent, d’une énergie volontaire, autodéterminée, exprimée, comme portée par un violon funambule, comme enivré, au jaillissement continu. « Calme » en est le mouvement suspendu, d’une douceur tranquille, presque heureuse…

Plus âpre, d’un souffle impétueux, le Trio n°3 (« Triads ») s’inscrit dans une énergie suractive (aux airs pulsés et aux harmonies proche de la Pop music), alternant parties du piano et des cordes aux accents répétitifs (à la Philip Glass), quand son mouvement central « Auschwitz impressions » plonge dans le son de la douleur, du deuil, déployant une intense et grave déploration, vécue in situ lors d’une visite du camp de l’horreur à l’hiver 2016.

Le dernier Trio (n°4 « An angel ») verse dans l’onirique et une tendresse inédite (premier mouvement « An angel foretold » / littéralement « Un ange a prédit »), aux réminiscences ravéliennes dans le double chant du violon et du violoncelle ; la partition réalise comme une sorte de révélation par jalons; chacun ouvrant des paysages totalement différents qui sont d’abord ponctués et amorcés par le piano, comme un passeur vers l’ineffable ; une progression qui tend finalement vers une sorte de jubilation finale ; L’ampleur de ce mouvement (12 mn) aurait pu suffire ; le compositeur ajoute la danse de l’ange (« Angel Dance »), frénétique, libre… une dernière ponctuation dans la frénésie assumée. Les 3 instrumentistes complices semblent y prendre à leur compte ce qu’affirme avec raison le compositeur pour lequel « la formation trio avec piano (me) semble à la fois parfaite pour la musique de chambre et idéale pou le contrepoint, le chant , l’harmonie ». Le jeu à trois se fait de plus en plus libre, permettant aux partenaires du pianiste, le violoniste David Galoustov et le violoncelliste Grégoire Korniluk, d’alterner naturellement chacun leur partie dans un surenchère articulée, trépidante, amoureuse, soit un geste en partage qui se fait véritable danse de jubilation. Grisant et stimulant.

 

 

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CD critique. JEAN-CHARLES GANDRILLE : 4 Trios pour piano / Piano Trios JEAN-CHARLES GANDRILLE, piano. DAVID GALOUSTOV, violon. GRÉGOIRE KORNILUK, violoncelle. (1 cd PARATY – Enregistré en juillet 2023).

 

 

 

PLUS D’INFOS sur le site de l’éditeur PARATY : http://paraty.fr/en/portfolio/gandrille-piano-trios-2/
VISITEZ le site du compositeur Jean-Charles Gandrille : https://jeancharlesgandrille.com/