vendredi 23 mai 2025

CRITIQUE, gala lyrique. TOURS, Grand-Théâtre, le 27 avril 2025. VERDI : Ouvertures, Arias et Duos. Solistes de l’Académie du Teatro alla Scala de Milan, Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire-Tours, Clelia Cafiero (direction)

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

L’Opéra de Tours a vibré aux accents verdiens sous la baguette inspirée de la jeune et brillante cheffe italienne Clelia Cafiero, qui dirigeait avec panache l’Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire/Tours. Portés par les voix prometteuses des jeunes talents de l’Académie de La Scala de Milan, le public tourangeau a vécu une soirée où le génie de Verdi a resplendi dans toute sa magnificence.

 

Peut-on prétendre connaître véritablement Verdi sans avoir goûté à l’interprétation de ceux que le temple milanais a formés ? Ce soir-là, le public du Grand-Théâtre de Tours a eu le privilège d’une révélation : une plongée dans les méandres moins fréquentés de l’œuvre du maître, avec des extraits de Luisa MillerIl Corsaro ou encore Attila. Une audace artistique qui a permis à ces chanteurs en devenir de s’approprier ces partitions avec une fraîcheur désarmante. Mais rassurez-vous, les incontournables étaient aussi de la fête : La Forza del DestinoNabuccoUn Ballo in maschera… avant que ne retentisse, dans un bis enivrant accompagné par les vivats de l’audience, le célèbre « Libiamo ne’ lieti calici » extrait de La Traviata, entonné par l’ensemble des voix avec une allégresse communicative.

Clelia Cafiero, Cheffe principale invitée de la maison tourangelle et souveraine dans ce répertoire lyrique italien, a conduit l’orchestre avec une rigueur élégante, sans jamais céder à l’emphase. Pourtant, sous sa direction, l’ouverture d’Attila a pris des allures de tempête passionnée. Les cordes, d’une souplesse envoûtante, ont dialogué avec les vents, dont les solos se sont distingués par leur expressivité. La harpe, quant à elle, a tissé des arabesques sonores d’une délicatesse exquise.

Côté voix, le baryton sud-coréen Wonjun Jo a ouvert le bal avec le fameux air « Eri tu » (Un Ballo in maschera) avec une aisance remarquable, déployant une voix au velours cuivré, portée par un legato d’une fluidité exemplaire. D’une sobriété théâtrale touchante, il a campé un chant d’une noblesse toute verdienne. La soprano basque María Martín Campos a séduit par un timbre diaphane et nuancé et des aigus d’une tenue irréprochable, qui ont illuminé l’aria de Nannetta (Falstaff) avec une poésie envoûtante. Dans un registre plus dramatique, Laura Lolita Perešivana a révélé une intensité bouleversante. Son médium, d’une richesse soyeuse, s’est épanoui en une gestuelle empreinte d’une émotion profonde. Son interprétation de l’air « Pace, pace mio Dio » (La Forza del destino), couronné par un aigu à la puissance déchirante, a soulevé l’ovation de la salle. Le ténor chinois Haiyang Guo a impressionné par sa maîtrise du spinto, déployant des aigus éclatants tout en sachant moduler son émission avec une finesse rare, d’abord dans « Quando le sere al placido » (Luisa Miller) puis « La Vita é inferno » (La Forzadel destino). Si sa technique force l’admiration, on aurait cependant souhaité plus de nuances expressives. Enfin, la basse chinoise Huanhong Li est la grande triomphatrice de la soirée à l’applaudimètre, aussi imposante par sa stature que par sa voix, et a fait trembler les murs dans les nuances forte tout en déployant des piani d’une rondeur exemplaire. Son interprétation de « Mentre gonfiarsi l’anima » (Attila), tour à tour hallucinée et vengeuse, puis son « O, tu Palermo » extrait des Vêpres siciliennes a emporté une adhésion aussi unanime qu’enthousiaste !

Comme à l’accoutumée, le concert a débuté par un rappel poignant du syndicat des artistes sur la précarité de l’orchestre, présenté comme le plus modestement doté de France. Pourtant, les musiciens, loin de se laisser abattre, ont choisi de transcender ces difficultés, offrant une performance rayonnante. Et la salle, comble, leur a rendu hommage par des applaudissements nourris. Ainsi, cette soirée ne fut pas seulement un concert, mais une célébration – de Verdi, du chant lyrique, et de la persévérance artistique contre vents et marées !

 

 

 

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CRITIQUE, gala lyrique. TOURS, Grand-Théâtre, le 27 avril 2025. VERDI : Ouvertures, Arias et Duos. Solistes de l’Académie du Teatro alla Scala de Milan, Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire-Tours, Clelia Cafiero (direction). Crédit photographique (c) Emmanuel Andrieu

 

 

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