Quelle ouverture flamboyante pour les Chorégies d’Orange 2025 ! Hier soir, sous les étoiles de l’Augustéen Théâtre Antique d’Orange, la 14ème édition de « Musiques en Fête » a offert une symphonie de bonheur pur, un magnifique voyage au cœur de la musique de cinéma et du spectacle vivant, porté par une pléiade d’artistes exceptionnels. Judith Chaîne et Cyril Féraud, guides élégants et chaleureux, ont su capturer la magie de ce lieu unique pour les téléspectateurs de France 3 et les auditeurs de France Musique… et les quelques 8000 spectateurs qui ont eu la chance de vivre l’événement in loco !
Dès les premières mesures enflammées de l’Ouverture de Carmen de Bizet par l’Orchestre National de Lyon (magnifiquement dirigé tour à tour par les chef.fe.s Ariane Matiakh, Didier Benetti, Pierre Bleuse et Yvan Cassar), le ton était donné : énergie, précision et passion. La puissance acoustique naturelle du théâtre a donné une dimension titanesque à chaque note, portée par la masse impressionnante et impeccable de l’ONL, de la Maîtrise des Bouches-du-Rhône, des Choeurs de l’Opéra de Parme et de l’Opéra national Montpellier Occitanie.
Le programme, savamment construit comme une fresque cinématographique sonore, fut un feu d’artifice constant. Côté lyrique, le ténor mexicain Arturo Chacón-Cruz a enflammé avec l’air « Di quella pira » (Le Trouvère de Verdi), d’une vaillance toute héroïque. La divine soprano albanaise Ermonela Jaho a offert un « Deh! Tu di un’umile preghiera » (Maria Stuarda de Donizetti) d’une intensité dramatique à couper le souffle, avant de briller à nouveau dans Thaïs (Massenet) aux côtés de Thomas Kumiega. Le ténor chilien Diego Godoy, tour à tour charmeur dans « l’air de la fleur » (Carmen de Bizet) puis tourmenté dans « Odio solo ed odio atroce » (I Due Foscari de Verdi), a montré une palette vocale impressionnante. La soprano franco-allemande Camille Schnoor, voix de cristal et de velours, a illuminé les airs « L’Heure exquise » (La Veuve joyeuse de Léhar) et « O soave fanciulla » (La Bohème de Puccini) aux côtés d’un Chacón-Cruz décidément en grande forme. La très prometteuse Lucie Peyramaure a déchiré les cœurs avec un « Pace, Pace mio Dio » (La Force du Destin de Verdi), d’une profondeur bouleversante. Le ténor français Kevin Amiel n’a fait qu’une bouchée de la Chanson napolitaine « Core ‘grato » de Salvatore Cardillo, tandis que son confrère Léo Vermot-Desroches a touché au coeur avec un poignant « Pourquoi me réveiller » extrait de Werther de Massenet, confirmant l’immense talent de la jeune génération. Citons encore la basse géorgienne Nika Guliashvili qui a apporté puissance et gravité, mais surtout beaucoup d’émotion, dans l’air de Philippe II « Ella giammai m’amo » (extrait de Don Carlo de Verdi)…
Les « relectures » ont ébloui, tel le duo improbable et génial de Neïma Naouri (voix) et Pierre Génisson (clarinette) dans « New York, New York« , qui a été un moment de pure magie jazzy et virtuose. De son côté, le pianiste français Alexandre Tharaud a sublimé « Les Moulins de mon cœur » (Legrand) avec une poésie pianistique envoûtante. La violoncelliste russe Anastasia Kobekina a électrisé le Finale du Concerto pour violoncelle de Dvořák par son jeu fougueux et captivant. Et les nombreux moments festifs ont transporté le public : les artistes lyriques en tutti dans « Torna a Surriento », « Brazil », « Funiculi Funicula »…, l’énergie contagieuse de « Fame » par Anne Sila et l’École de danse Le Studio d’Avignon, l’hommage pop et vibrant à Dalida par les jeunes pousses de « Pop the Opera », le groove irrésistible du « Mambo n°5 » de Pérez Prado, ou encore le clin d’œil dansant de la Danse de Rabbi Jacob (Vladimir Cosma) par la prodigieuse Jeanne Gollut à la flûte de pan. Parmi les autres moments qui ont fait vibrer les gradins millénaires, nous retiendrons celui où Neïma Naouri a donné des frissons avec « L’Extase de l’or » (Ennio Morricone), « La Marche Impériale » de John Williams qui a résonné avec une puissance digne d’une invasion galactique ! Et le final en apothéose avec le fameux « Libiamo » (La Traviata de Verdi), mené avec brio par Clément Lonca, qui a soulevé le public dans une ovation unanime et méritée.
Une nouvelle fois, la magie des Chorégies d’Orange et du Théâtre Antique ont opéré pleinement : « Musiques en Fête » 2025 restera comme une nuit inoubliable à Orange, où tout a concouru à créer une soirée d’exception, véritable célébration de la musique vivante sous toutes ses formes. Chapeau bas aux artistes, aux chefs, aux chœurs, à l’orchestre, aux organisateurs et à ce lieu mythique qui, une fois de plus, a prouvé qu’il était le plus bel écrin qui soit pour la musique !
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CRITIQUE, concert. ORANGE, Théâtre Antique, le 20 juin 2025. « Musiques en Fête ». E. Jaho, A. Matiakh, L. Vermot-Desroches, Orchestre national de Lyon, Y. Cassar, L. Peyramaure, A. Chacon-Cruz, A. Tharaud, P. Bleuse, D. Godoy…
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