Fidèle à sa vision exigeante et exploratrice, l’excellent et très engagé Iaokovos Pappas emmène sa fabuleuse troupe d’Almazis sur des rives jubilatoires car elles mêlent avec un égal souci de perfection, texte et musique. Le claveciniste et chef d’orchestre nous offre de réestimer le verbe poétique et politique d’un auteur méconnu, Jean-Baptiste Rousseau.
Dans le livre disque édité chez Maguelone, son portrait par Largillière (vers 1710), fameux portraitiste (de Louis XIV entre autres), nous rappelle combien il fut estimé et célébré par ses pairs ; ainsi « le Grand Rousseau », selon Palissot et Laborde, fut considéré dans la première moitié du XVIIIe siècle comme le plus grand poète lyrique français ; auteur très inspiré d’épigrammes, surtout, somptueuse révélation du programme, créateur de la cantate française : Circé qui est bel et bien un chef-d’oeuvre dramatique et littéraire, source d’inspiration pour nombre de compositeurs au XVIIIe siècle et au-delà (ici à sa conception mise en musique par un autre Jean-Baptiste…Morin).
Iakovos Pappas rétablit un auteur dans son époque, assez valable semble-t-il pour répondre avec le compositeur Pancrace Royer (un autre auteur génial à réestimer d’urgence) à la commande du Dauphin Louis-Ferdinand, pour cette « Ode à la Fortune », créée en sept 1746 à Fontainebleau, devant la Reine ; c’est l’un des textes musicaux les plus essentiels, littéraire, politique, pacifiste, manifeste majeur célébrant, emblème des Lumières, le portrait d’un prince éclairé, … éclairé par ce qu’il incarne et diffuse en toute conscience, les lumières d’un bon gouvernement (cf la 9è strophe particulièrement).
Iakovos Pappas montre combien la musique de Royer et le texte inédit, singulier, juste de Rousseau composent ainsi un chef d’oeuvre inégalé.
En interprétant ses deux opus majeurs : la cantate Circé et l’Ode à la Fortune, deux prototypes mémorables, le programme s’impose comme l’un des enregistrements les plus captivants, manifestant un regain exemplaire pour le premier baroque des Lumières. Iakovos Pappas, premier défenseur de la musique française renoue ainsi avec les premiers chefs baroqueux, dans une justesse, un à propos exemplaire ; l’articulation et l’éloquence du texte (défendus par deux solistes superlatifs dont le baryton Guillaume Durand pour l’Ode) inspire une tenue instrumentale tout aussi ciselée, au diapason des enjeux des textes. Magistral.
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CD événement, annonce. JEAN-BAPTISTE ROUSSEAU (1671-1741) : poésies mises en musique. Ode à la Fortune (N Pancrace Royer), Circé (JB Morin), Seconde Ode (R Douard de Bousset) – Almazis, Iakovos Pappas (direction- – 1 livre cd Maguelone – enregistré en juillet 2020 – CLIC de CLASSIQUENEWS – critique complète à venir.
Plus d’infos sur le site de l’éditeur Maguelone : https://www.maguelone.fr/fr/home/183-rousseau-poesies-en-musique-3770003584278.html