France Musique. Dimanche 29 mars 2015, 20h30. Verdi : Le Trouvère. La tribune des critique s’intéresse à l’opéra le plus prenant et fantastique (scène de magie, feux évocatoires, meurtre d’enfants et vengeance irrésistible…) de Verdi : un chef d’œuvre au dramatise noir qui appartient à la maturité triomphale de Verdi, et qui curieusement est toujours taxé de complexité et de faiblesse à cause d’un livret « trop confus ». Or l’écoute précise de l’ouvrage révèle un drame fort, sauvage, aux contrastes incandescents (angélisme amoureux de Leonora, ivresse éperdue du Trouvère Manrico, diabolisme du Conte de Luna : soit la sublimation du trio vedette à l’opéra : soprano, ténor, baryton). Les critiques de France Musique sauront-ils discerner les qualités de l’ouvrage et distinguer les meilleurs interprètes ? Dont Callas dirigée par Karajan entre autres… L’opéra depuis a trouvé une nouvelle soprano de choc : Anna Netrebko (Berlin, 2013 ; Salzbourg, été 2014) : sensuelle, pure, lumineuse et ardente.
Créé à Rome en 1853, d’après El Trovador de Gutiérrez, 1836), Le Trouvère de Verdi saisit par sa fièvre dramatique, une cohérence et une caractérisation musicale indiscutable malgré la complexité romanesque de l’intrigue. L’action se déroule en Espagne, dans la Saragosse du XVème, où le conte de Luna est éconduit par la dame d’honneur de la princesse de Navarre, Leonora dont il est éperdument amoureux : la jeune femme lui préfère le troubadour Manrico. Dans le camps gitan, Azucena, la mère de Manrico, est obsédée par l’image de sa mère jetée dans les flammes d’un bûcher, et de son jeune frère, également consommé par le feu. Manrico décide de fuir avec Leonora. Mais il revient défier Luna car sa mère est condamnée à périr sur le bûcher elle aussi. Emprisonné par Luna avec sa mère, Manrico maudit Leonora qui semble s’être finalement donnée au Conte : elle a feint et s’est versée le poison pour faire libérer son aimé. En vain, Luna comprenant qu’il n’aura jamais celle qu’il aime (à présent morte), ordonne l’exécution par les flammes de Manrico. Au comble de l’horreur, Azucena lui avoue qu’il vient de tuer son propre frère : leur mère avait échanger les enfants sur le bûcher. De sorte que l’opéra s’achève sur la vengeance d’Azucena (elle a enfin vengé la mort de sa mère par Luna) et le sacrifice des deux amants (Leonora et Manrico). La mezzo apparemment démunie a manipulée le baryton jaloux, vengeur… aveuglé par sa haine.
Drame gothique tragique… Dans la production parisienne de l’ouvrage, Verdi ajoute un ballet selon le goût français du grand opéra (3ème partie : la Bohémienne). La violence de l’écriture, l’omniprésence des flammes dans la résolution du jeu dramatique, l’exacerbation des passions qui s’opposent (Luna contre Leonora et Manrico, l’apparente impuissance de la sorcière bohémienne Azucena…)…tout œuvre ici pour l’essor d’une tragédie gothique prenante, à l’expressivité progressive. D’après le roman gothique romantique de Gutiérrez, Verdi offre une remarquable caractérisation des rôles solistes : Manrico (ténor), Leonora (soprano), Luna (baryton), surtout Azucena (mezzo soprano) dont il fait une sorte d’autorité féminine sombre et lugubre (cf. le Miserere, chœur funèbre de la 4ème partie : intitulée ” Le Supplice”). Contemporain de La Traviata, Le Trouvère est une partition flamboyante, sur un prétexte emprunté au roman historique dont la vocalité très investie des 4 solistes frappe immédiatement : Verdi réussit un tour de force. Chaque air répond à la nécessité de l’action.
France Musique. Dimanche 29 mars 2015, 20h30. Verdi : Le Trouvère
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