mardi 19 mars 2024

Franck-Emmanuel COMTE : chantiers d’été, nouveaux programmes 20-21

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comte-franck-emmanuel-concert-hostel-dieu-portrait-classiquenews-baguette-marco-polo-classiquenews-582-300x210COMTE-FE-classiquenews-portrait-ENTRETIEN avec Franck-Emmanuel COMTE, directeur musical et fondateur de l’ensemble sur instruments d’époque, LE CONCERT DE L’HOSTEL DIEU. L’été 2020, malgré la crise de la covid 19, reste très actif pour le chef et les musiciens du Concert de l’Hostel Dieu. Porté par les métissages et les rencontres interdisciplinaires, Franck-Emmanuel Comte poursuit son exploration des genres et des répertoires en rétablissant la nature même du Baroque : un atelier perpétuel où la forme et les moyens artistiques se réinventent constamment. Généreux, ouvert, curieux, éclectique mais cohérent, le travail du chef fondateur du Concert de l’Hostel Dieu pose certainement les jalons du monde d’après : un sens créatif sans ornières qui élargit les horizons sonores au service d’un idéal esthétique toujours plus exigeant. Tour d’horizon des nouveaux programmes au carrefour de la musique et de la culture urbaine (beatbox, slam, danse hip hop) ; temps forts de la nouvelle saison 2020-2021 à Lyon, place de la vidéo, prochain cd à paraître en octobre… les chantiers sont nombreux. Ils témoignent d’une activité qui s’est maintenue coûte que coûte en dépit du contexte.

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CLASSIQUENEWS : Cet été, vous vous dédiez aux « Semaines LAB » ; retour au travail avec les musiciens, instrumentistes, chanteurs du CHD / Concert de l’Hostel Dieu, accompagné par un dispositif vidéo. 5 programmes en création sont ainsi concernés. Que souhaitez vous que la caméra exprime et mette en avant des séances de cet été ?

Franck-Emmanuel COMTE : D’abord, il s’agit de 5 programmes nouveaux dont j’aimerais que la caméra restitue à la fois la diversité et la spécificité de chacun. Certains programmes sont interactifs avec le public et adoptent une forme originale, d’autres relèvent davantage d’une approche musicologique et historique. Les formats vidéo seront variés : courts, ils pourront capter une émotion ; plus longs jusqu’à 3 mn, ils explorent la richesse des œuvres et des programmes abordés.

Ensuite, nous réaliseront des vidéos didactiques autours d’un thème ou d’une oeuvre présentée par un artiste, ou bien d’un instrument peu connu du grand public, tel que le collascione, la basse de violon, etc… Ces vidéos nous permettront de maintenir le lien avec le public tout en enrichissant le contenu de notre site web.

VOIR la première vidéo de cette nouvelle série :
https://youtu.be/Ixh0a3mA6j4

Enfin, il est primordial pour moi que chaque vidéo montre le dynamisme et la complicité qui nous unit, comme éléments fédérateurs du travail et du geste collectif. L’image du collectif en action doit primer davantage sur la figure souvent exacerbée du chef.

Parmi les 5 programmes, il y a « l’Affaire Bach » qui sera créé en mars 2021 ; il permet de faire découvrir plusieurs partitions faussement attribuées à JS Bach, en réalité composées par ses fils ou ses cousins. Le concert est conçu comme une enquête interactive avec le public, pilotée par un metteur en scène via une application sur smartphone qui saura exploiter les réactions du public lors du spectacle composé majoritairement des étudiants de l’Université Catholique de Lyon.
J’aimerai citer aussi notre programme intitulé « The French Connection » qui s’intéresse à l’influence française active à la Cour anglaise à la fin du XVIIè lors de la période de la Restauration. Avec la musicologue Rebecca Herissone de l’Université d’Oxford, nous avons composé un programme original d’oeuvres françaises et anglaises qui souligne les liens musicaux étroits entre la France et l’Angleterre.

 

 

 

CNC : Avec votre nouveau cycle « FugaCités », vous privilégiez toujours les métissages et les rencontres, le croisement des disciplines et les expériences avec des personnalités dont l’univers est hors du milieu baroque, comme pour mieux enrichir ce dernier; qu’attendez vous des artistes invités ?

FE C :  » FugaCités  » est un projet qui réunit 3 formes légères, mobiles et interdisciplinaires. Les 3 plateaux répondent au même principe : le métissage entre un répertoire baroque peu connu (musiques de Westhoff, Barrière, Playford,…) et 3 disciplines appartenant à la culture urbaine contemporaine : beatbox, slam, danse hip hop. Dans le cas de la forme dansée, que nous réalisons avec le chorégraphe Mourad Merzouki, c’est déjà le 3è projet que nous portons ensemble. Son approche m’est devenu familière ; Je crois pouvoir dire que nous avons trouvé une réelle complicité. Dans ce nouveau projet, les spectateurs retrouveront ce qui a fait la réussite de « Folia » : la combinaison de musique populaire improvisée et de musique savante avec le hip hop mais ici dans une forme plus réduite (1 danseur, 3 musiciens). Les proportions sont certes plus modestes mais l’émotion née de la rencontre de nos univers n’en est pas moins intense. C’est une formule que nous avons destiné aux petites salles, aux halls, cours et jardins, contexte sanitaire oblige. Mourad a ce don de s’accommoder de toute contrainte en préservant toujours l’émergence de la poésie, toujours avec le souci d’une très haute exigence artistique. Pour les instrumentistes, l’engagement doit être total : ils interagissent avec le danseur et jouent par cœur. La polyvalence est la clé du spectacle. C’est un concert chorégraphique ou un ballet instrumental… l’équilibre et la fusion entre les deux disciplines sont cruciaux.
Avec le danseur Jérôme Oussou, le courant passe parfaitement et nous cherchons à développer la complicité pour que la danse s’accorde idéalement à la musique ; il est important que le danseur s’approprie chaque séquence instrumentale. Là aussi, il faut toucher un public large et nous privilégions des musiques dont l’inventivité de l’écriture et l’originalité des harmonies puisse poser le cadre d’un univers sonore intemporel et surprenant. A ce titre, les sonates pour violon et continuo de Westhoff sont fascinantes. Nous avons donc largement puisé dans son oeuvre pour composer la playlist des trois plateaux.

De son côté, la musique a besoin d’éléments interprétatifs et d’arrangements pour coller à la danse ; ceci tient à la nécessité de structurer un spectacle dans son déroulement le plus cohérent. Il s’’agit aussi de retrouver le bon tempo ; la danse fait partie intégrante du baroque : la majorité des partitions instrumentales des XVIIè et XVIIIè sont des danses. Il convient donc pour être dansées, de ne pas les jouer trop vite (comme c’est souvent le cas, quand lorsqu’on les coupe de leur essence chorégraphique ; ce qui les rend indansables). Le mouvement du danseur, ses capacités propres, son rythme naturel, sa respiration enrichissent la réalisation instrumentale. Il nous apporte sa grammaire contemporaine.
Même rencontre enrichissante avec le beat boxeur Tiko : notre projet croise nos propositions musicales avec son univers sonore, un univers contemporain et incroyablement riche. Avec le slameur Mehdi Krüger, nous retrouvons ce que nous avions réalisé dans notre projet « Marco Polo » où la présence du texte souligne la poésie de notre répertoire, la rythmicité des syllabes, la musique des assonances. Il est essentiel que le texte et la musique fusionnés soient compréhensibles de tout le monde. L’impact de chaque mot fait sens. Il s’agit d’un texte écrit pendant le confinement, sur les espoirs et les attentes qu’a fait naître le jour d’après. C’est le témoignage du temps présent. A la fois crépusculaire et lumineux. Là encore le choix de la musique est crucial afin d’assurer un déroulement cohérent, tout en s’accordant au texte lui-même.

Plus d’infos sur FugaCités : http://www.concert-hosteldieu.com/programmes/fugacites/

 

 

 

CNC : Pouvez-vous nous préciser plusieurs temps forts de votre prochaine saison lyonnaise ? Une saison spéciale qui comporte de nombreux événements retransmis en live streaming.

FE C : l’ouverture a lieu le 15 octobre 2020 ; c’est une note d’espoir, une célébration festive avec le programme « Dolce Follia ». Nous reprenons sans les danseurs, le programme musical de Folia, avec de nouvelles partitions. Tout est joué par coeur. Ce qui favorise le geste, la liberté des mouvements, la place du corps du musicien sur la scène; ce qui nous permettra de développer un nouveau projet : la captation Live de nos concerts. Le spectacle se prête idéalement à une captation live : la caméra peut y détecter et suivre son dynamisme ; capter des instants vécus, des coulisses à la scène (à la façon des concerts de rock) ; nous envisageons aussi des contenus ajoutés au live (comme par exemple une présentation des instruments). La conception de nos live est portée par une collaboration privilégiée avec notre partenaire Lyon capitale TV. Il s’agira pour chaque édition d’un direct sur la chaine Youtube et Facebook du Concert de l’Hostel Dieu.

Avec le programme « Médée(s) », nous abordons plusieurs facettes du mythe, selon le style la vision de Marc Antoine Charpentier et de Georg Friedrich Handel. A travers un choix d’airs extraits de leurs opéras respectifs, Médée pour le Français ; Teseo pour le Saxon. Ce sera l’occasion d’une première collaboration avec une nouvelle venue au Concert de l’Hostel Dieu : la mezzo soprano Lila Hajosi. Entre les deux écritures, se précisent des différences passionnantes : la Médée de Charpentier est moins sombre, plus noble et lumineuse presque sans noirceur. Handel a composé son ouvrage 20 ans après Charpentier ; le Saxon en maître des passions humaines privilégie plutôt une immersion dans les ténèbres ; le portrait qu’il fait de Médée est noir, quasi cinématographique. Notre lecture envisage des flashbacks pour mieux exprimer la construction du personnage. Concerts à partir du 12 nov 2020.
Le programme « Pergolesi, Missa Romana » quant à lui prolonge notre recherche spécifique sur le fonds musical de la Bibliothèque de Lyon. C’est un ouvrage méconnu, monumental pour double choeur et double orchestre, nécessitant pas moins de 60 musiciens. Un défi. Concerts à partir du 12 décembre 2020.

Plus d’infos sur la saison lyonnaise du CHD : http://www.concert-hosteldieu.com/saison-concerts-lyon/saison-2020-2021/

 

 

 

CNC : Quels sont les enjeux de La Francesina dont le cd est annoncé le 15 octobre prochain ?

Révélation baroque : Connaissez vous La Francesina ?FE C : Le cd propose le portrait d’une cantatrice que Handel appréciait particulièrement, Élisabeth Duparc, dite « La Francesina » (la « petite française ») à travers les personnages qu’elle a chantés et les caractéristiques de sa voix. Le « rossignol de Handel » avait une voix agile et chanta principalement des rôles légers mais pas uniquement. Mais ce qui frappe c’est la diversité des personnages qu’elle a su incarner, au moment où Handel abandonne l’opéra italien pour se consacrer au nouveau genre de l’oratorio anglais (Semele, Hercules, Saul.)… Pour ce projet nous accueillons la soprano Sophie Junker dont la mission est de souligner le large répertoire et l’étendue des talents d’Elisabeth Duparc : Sophie éclaire ce en quoi la légèreté et les coloratures n’empêchent ni la profondeur ni l’épaisseur des caractères. La période est charnière dans l’écriture de Handel ; en laissant l’opéra italien au profit de l’oratorio, Handel écrit une musique grave et variée, et sans doutes plus personnelle ; il s’affranchit aussi des codes lyriques pour mieux ciseler la puissance dramatique des situations.

VOIR le clip sur le projet Francesina :
https://www.youtube.com/watch?v=Mr7LeEXlIdQ&feature=emb_logo

 

 

 

AGENDA : La Francesina en concert. Les 18 sept (Froville), 26 septembre (Souvigny), le 3 décembre (Théâtre de Gray), le 4 décembre 2020 à Lyon – Sortie discographique chez le label Aparté est prévue le 16 octobre 2020.

Propos recueillis en juillet 2020

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PROCHAINS CONCERTS du Concert de L’HOSTEL DIEU
Cet été, FUGACITÉS dans le cadre du Festival 1001 NOTES, les 15 ans (LIMOUSIN), lundi 3 et mardi 4 août 2020 :
https://www.classiquenews.com/lon-lille-orchestre-national-de-lille-en-direct-pour-la-fete-de-la-musique/

 

 

 

Retrouvez la présentation de la saison 2020 – 2021 du CONCERT DE L’HOSTE DIEU et tous les programmes évoqués dans notre entretien sur le site du CONCERT DE L’HOSTEL DIEU :
http://www.concert-hosteldieu.com

 

 

 
 

 

 

 

 

 

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