Arte, Peau d’âne. Mercredi 24 décembre 2014, 20h50. Il est des joyaux inaltérables qui c’est le propre des chef d’œuvre, malgré leur inscription dans un style bien marqué, continuent de nous fasciner sans faillir. Mais très daté 1970 (année de sa sortie dans le salles), Peau d’âne version Demy et Legrand continuera longtemps de hanter nos souvenirs et de cultiver nos rêves d’enfance. Les robes éblouissantes de Catherine Deneuve en princesse masquée, la musique et les chansons de Michel Legrand (la recette que chante Peau d’âne dans sa maisonnette, du cake d’amour), la fée protectrice (sublime et si suave Delphine Seyrig en fée des lilas), tout cela recompose à chaque visionnage, la magie d’un film devenu culte car il fonctionne exactement comme les contes pour enfants : une source inépuisable de magie et de poésie. La beauté atemporelle de Catherine Deneuve rejoint les icônes de l’hyperféminité : troublante, ingénue, et pourtant si déterminée : une battante angélique, la sœur plus forte et aguerrie de Marylin, et la jumelle des sirènes blondes elles aussi des films de Hitchcock, grand amateur de plantes hypersexuées donc érotiques. C’est un conte cinématographique qui revisite le pouvoir d’enchantement de l’image et de la narration après Jean Cocteau. En offrant un nouveau chef d’œuvre visuel qui renouvelle aussi le genre de la comédie musicale, Jacques Demy dans la conception de Peau d’âne, ne rendrait-il pas allusivement hommage au film tout aussi envoûtant pas son climat magique et hypnotique, La belle et la bête ?
Comme tous les contes (et ceux de Charles Perrault regorgent de symboles interrogatifs-, le fonds onirique de Peau d’âne (au départ un conte pour… adultes) ne manque pas de nous troubler ; il se prête à diverses lectures psychnalytiques : quoi de plus inacceptable en préambule qu’un père désireux d’épouser sa propre fille ; la jeune victime a plus de bon sens que tout un chacun et s’enfuit à juste titre pour vivre sa propre vie loin de ce père abusif et possessif : revêtue de la peau d’âne qui efface sa naissance noble, Peau d’âne peut enfin être libre et découvrir le monde, surtout la société des hommes dont voici une critique acerbe et mordante. Saluons Arte de cultiver ses joujoux et de nous les réserver pour le réveillon le plus attendu de l’année… On ne se lasse pas de voir et écouter Peau d’âne. Etrange qu’aucun compositeur n’ait souhaité l’adapter en opéra : ce serait à n’en pas douter… un carton.
Arte, mercredi 24 décembre 2014, 20h50. Peau d’âne le film (Jacques Demy, 1970). Musique de Michel Legrand. Avec Catherine Deneuve, Jean Marais, Jacques Perrin, Micheline Presle, Delphine Seyrig et Fernand Ledoux).
Diffusion de la version restaurée. Durée : 1h25mn.