vendredi 4 octobre 2024

Compte rendu, opéra. Paris. Opéra Bastille. Verdi : La Traviata. Diana Damrau (Violetta), Francesco Demuro (Alfredo, Germont fils), Ludovic Tézier (Germont père), Anna Pennisi, Cornelia Oncioiu. Benoît Jacquot, mise en scène. Orchestre et chœur de l’Opéra national de Paris. Daniel Oren, direction.

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Paris, Opéra Bastille. La lumineuse Traviata de Diana Damrau… On se souvient de l’ancienne production en piste à Garnier, héritage de l’ère Mortier, entre décalage et misérabilisme atterrant (signé en 2007 par Christoph Marthaler qui imaginait alors une Traviata exténuée au pays des soviets usés, corrompus, exsangues). Voici venu le sang neuf du nouveau Benoît Jacquot, signature prometteuse depuis son Werther créé ici même en 2010 dans des tableaux épurés, gigantesques, économes, maniant le motif comme autant de symboles signifiants sur la scène. Car le théâtre, c’est aussi du sens ! On a trop souvent l’impression que cette évidence est écartée, oubliée, sacrifiée. C’est pourtant le motif d’une espérance ressuscitée pour chaque nouvelle production : qu’allons nous voir ? Qu’allons nous comprendre … et peut-être découvrir ?

Même grand vide suggestif ici traité en aplat de couleur/lumière, avec quelques pointes d’époque : comme le tableau de l’Olympia de Manet, hommage du peintre réaliste au nu féminin, au corps de la courtisane qui fait commerce de ses charmes. Pour le reste, pas de lecture ou d’idée conceptuelle qui architecture et structure une vision marquante. C’est joli, pas gênant – ce qui est déjà beaucoup. Le vrai enjeu de cette nouvelle production demeure le choix des voix choisies pour un spectacle qui s’est d’emblée affiché comme l’événement de la fin de saison de l’Opéra de Paris.

 

 

 

Lumineuse Violetta de Diana…

 

Sur le plateau immense de Bastille, règne la vocalité irréprochable des chanteurs réunis pour ce point d’orgue de la saison 13-14 qui s’achève : Diana Damrau (en Violetta), Ludovic Tézier et Francesco Demuro (nouveau venu dans l’auguste maison comme c’est le cas de sa consoeur allemande), respectivement dans les rôles des Germont, père et fils.
Elle, diva désormais adulée sur toutes les planches du monde ensorcelle de facto par sa voix déchirante, directe, musicalement très raffinée, en une incarnation aussi réussie que sa précédente prestation à La Scala de Milan pour son ouverture en décembre 2013. La lumière du timbre, sa grâce angélique, son intensité font mouche (au moment du sacrifice imposé au II, au moment de la mort sacrificielle au III). DU très (trop) beau chant… qui pourra laisser de marbre les admirateurs d’un chant plus corsé, incarné, expressif.
C’est exactement le cas du ténor wagnérien Klaus Florian Vogt chez Wagner : son Lohengrin ou son Parsifal souffrent d’une clarté lisse du timbre que beaucoup trouve inexpressive. Question de goût. Le beau chant et la qualité du timbre font quand même la différence… et notre admiration.

 

 

 

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Face à elle, le ténor sarde nouveau venu donc à Paris, Francesco Demuro peine parfois en un chant moins articulé, moins abouti dramatiquement. Dommage. Face aux jeunes, le Germont de Tézier s’impose là encore par la force souple du chant, un modèle de jaillissement intense et poétiquement juste. Quel baryton ! Une chance pour Paris décidément. L’orchestre habituellement parfait de finesse, de suggestion sous la direction de son directeur musical – divin mozartien, étonnant wagnérien, Philippe Jordan, semblait dépossédé de ses moyens sans la conduite de son pilote préféré. Le chef Daniel Oren navigue souvent à vue, sans architecture une lecture cohérente et claire.  Pour une fois que la fosse fait défaut, il nous fallait le signaler. Dans l’immensité de la salle de Bastille, le beau chant de Damrau continue encore de nous hanter, comme ce fut le cas à Milan en décembre dernier : pour nous aucun doute, Diana Damrau a bien choisi le moment de chanter sa Violetta : courrez à Bastille applaudir à ce grand moment. Damrau et Tézier valent largement le déplacement.

Paris. Opéra Bastille. Verdi : La Traviata. Diana Damrau (Violetta), Francesco Demuro (Alfredo, Germont fils), Ludovic Tézier (Germont père), Anna Pennisi, Cornelia Oncioiu. Benoît Jacquot, mise en scène. Orchestre et chœur de l’Opéra national de Paris. Daniel Oren, direction. A l’affiche de l’Opéra Bastille, jusqu’au 20 juin. Tél. : 08-92-89-90-90. De 5 € à 195 €. Operadeparis.frDiffusion sur France Musique le 7 juin, dans les cinémas UGC le 17 juin 2014.

 

 

 

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