samedi 25 janvier 2025

Livres, annonce. Sylvie Bouissou : Jean Philippe Rameau (Fayard)

A lire aussi

Rameau_jean-philippe-rameau-biogaphie-fayard-sylvie-bouissoucouv-JP-RameauLivres. Sylvie Bouissou : Jean Philippe Rameau (Fayard)… Nous l’attendions avec impatience, d’autant plus pour l’année Rameau 2014, celle des 250 ans de la mort. Fayard avait déjà édité le dictionnaire Rameau de Philippe Beaussant, « Rameau de A à Z », lequel commençait à dater : 400 pages, mai 1983, publication pour les 300 ans de la naissance). Le nouveau volume complet et très documenté : plus de 1000 pages, – Fayard oblige-, répare donc une absence criante : il manquait de facto une biographie de référence sur Jean-Philippe Rameau (1683-1764). La voici signée Sylvie Bouissou. En couverture, le buste en terre cuite de Rameau, génie du baroque français tardif par «  Jean-Jacques » (… Caffieri et non Rousseau).  Tous les aspects et visages de Rameau le Grand sont ici passés au crible, détroussant pour les atténuer à leur juste vérité, les calomnies jalouses ; soulignant par les témoignages des admirateurs l’absolue grandeur d’un homme des Lumières qui n’eut de cesse de concevoir la musique comme un laboratoire permanent, la vitrine de ses propres idées visionnaires sur la musique et son organisation théorique, ses effets émotionnels. L’enfance et la formation, les charges d’organiste dans plusieurs cathédrales de province, les premières oeuvres comme compositeur (musique sacrée dont les Motets, avec et sans chœur) mais aussi la musique de chambre et les pièces pour clavecin (les Trois Suites) les cantates, … autant d’avatars et de premiers épisodes qui préparent à l’éclosion du génie lyrique en 1733, à 50 ans (!) avec son premier opéra, d’une violence poétique inouïe Hippolyte et Aricie, véritable choc esthétique. En fait les partitions théâtrales sont déjà nombreuses avant Hippolyte car Rameau compose pour les tréteaux de la Foire (collaboration avec Piron, 1723-1734), et il sait aussi s’attirer la faveurs de riches mécènes ayant plus ou moins pressenti l’ampleur du génie à l’œuvre : «  Du prince de Carignan à Alexandre Le Riche de La Pouplinière.

CLIC_macaron_2014Une grande partie du texte biographique se consacre à l’activité du Rameau « opérateur » à Paris (1733-1744), la collaboration avec Voltaire (malheureusement sans grands aboutissements concrets malgré des amorces prometteuses) ; déjà la pensée analytique et synthétique de Rameau se précise et se distingue parmi ses contemporains comme en témoigne le traité de dramaturgie des Indes Galantes (composé avec Fuzelier)… les grandes tragédies lyriques sont une à une minutieusement présentées, analysées, commentées : Castor et Pollux (où pointe l’influence de la franc-maçonnerie) ; Dardanus présenté en « naufrage » (à cause de son livret que Rameau reprendra lui-même);… l’auteure sait aussi consacrer un grand chapitre aux Fêtes d’Hébé, sommet du genre ballet ; mais aussi les ouvrages composés pour Versailles et le mariage du Dauphin (La Princesse de Navarre sur le livret de Voltaire, et évidemment l’inclassable Platée de 1745 et son délire envahissant, incarné par la Folie…). L’intérêt revient aux parties dévolues à la notion de crise artistique et compositionnelle, celle des années 1750 : qui touche toutes les oeuvres autour de ce cap chronologique, et qu’annonce la singularité de Naïs, « opéra pour la paix »… comme Zaïs (1748), Zoroastre (1749), Pygmalion… remous et tiraillements esthétiques qu’exacerbe la fameuse Querelle des Bouffons de 1752, confirmant dans le goût du public la place des Italiens et leur verve comique.

rameau jean_philippeParmi les révélations précieuses : l’activité du pédagogue (avec la liste de ses élèves connus !) et les dernières œuvres (« cabale, remaniements et défaveur ») qui portent le destin et le sens du genre tragique monarchique en ses dernières heures (Les Boréades, le dernier opéra laissé en 1764 à la mort imprévue de l’auteur)… Les derniers chapitres éclaircissent les principes du théoricien et démêlent les étapes de sa querelle longuement orchestrées avec les Encyclopédistes, lesquels rangés du côté de Rousseau, l’infatigable querelleur et polémiste, ont nourri le procès Rameau. En complément, l’auteure ajoute de nombreux documents très bénéfiques : synopsis chronologique des oeuvres de Rameau, des parodies des oeuvres dramatiques de Rameau. Lecture incontournable pour l’année des 250 ans. Rameau méritait bien après l’ouvrage de Beaussant, une texte exhaustif, défendant l’homme, le théoricien, le compositeur, l’immense poète du cœur humain. Les détracteurs sont toujours aussi tenaces, présentant un musicien intellectuel et abstrait, sophistiqué et artificiel : ils font à travers Rameau, le procès idéologique de l’opéra royal et de la machinerie tragique (cf les ouvrages de Catherine Kintzler qui n’a cessé de démonter et déprécier la valeur du théâtre ramélien). C’est oublier la vérité et la justesse d’une œuvre musicalement flamboyante et souvent inouïe dont la criante et profonde poésie exprime le mystère du sentiment, les vertiges délirants des passions humaines, inscrits dans le cycle des saisons et de la nature enchanteresse. Démonstration enfin réalisée ici. Lire notre grande critique dans le mag cd, dvd, livres de CLASSIQUENEWS.COM

Sylvie Bouissou : Jean-Philippe Rameau (Fayard). 1168 pages. Parution : 7 mai 2014.

Lire notre dossier Rameau 2014 notre sélection des opéras et productions à l’affiche pour l’année des 250 ans de la mort

Derniers articles

CRITIQUE, concert. PARIS, Salle Gaveau, le 23 janvier 2024. Récital d’Andreas Scholl

Andreas Scholl était de retour à la Salle Gaveau, hier soir, dans un programme de cantates, comme toujours judicieusement...

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img