Juin lyrique sur Mezzo. Pas moins de quatre productions incontournables dont la première diffusion est programmée chaque samedi à 20h45. Deux inédits: Fidelio de Beethoven dirigé par Böhm (1970) et Les Maîtres Chanteurs de Wagner avec José Van Dam dans le rôle de Hans Sachs (2003), sans omettre, L’Enlèvement au sérail de Mozart et à la fin du mois, enfin Elektra de Richard Strauss, avec Deborah Polaski dans le rôle-titre, en conflit terrifiant avec sa mère Clytemnestre (Felicity Palmer)! De quoi satisfaire vos appétits lyricophages…
Ludwig van Beethoven
Fidelio
Gwyneth Jones, Leonore
James King, Florestan
Chor und orchester
Deutschen oper Berlin
Karl Böhm, direction

Le 2 juin 2007 à 20h45
Le 3 juin 2007 à 13h45
Le 12 juin 2007 à 15h45
Le 14 juin 2007 à 3h55
Le 22 juin 2007 à 15h50
Opéra. Enregistré à l’Opéra de Berlin (1970, 1h53).
Vision implacable d’une netteté tranchante, affûtée mais aussi solaire. A la tête des effectifs de l’Opéra de Berlin, Böhm dirige en 1970, d’une main d’acier, un Fidelio qui inscrit aussi son chant incantatoire dans l’humanisme. La baguette est nerveuse, vive, allante: elle impose à l’orchestre sa motricité continue, du début à la fin, des sombres geôles où croupissent les parias et les prisonniers bannis, jusqu’à la libération finale, grâce à l’amour de Leonore pour Florestan. Dans les deux rôles Gwyneth Jones et James King s’imposent indiscutablement: musicalité, autorité, tendresse et véhémence de l’émission pour ces deux légendes straussiennes et wagnériennes qui d’ailleurs ont débuté tous deux plus graves, baryton et mezzo, et évolué vers l’aigu, ténor et soprano. La galloise et l’américain emportent toutes réserves car ils ont et l’humanisme des caractères et la violence irrépressible de leur personnage, dans cette fresque qui se déroule des souterrains à la rayonnante liberté. Dommage que la mauvaise synchronisation du playback gêne parfois l’acuité expressive de cette lecture cependant incontournable.
Approfondir: lire notre dossier Fidelio de Beethoven
Richard Wagner
Les Maîtres Chanteurs
de Nüremberg
José van Dam, Hans Sachs
Peter Seiffert, Walther
Petra-Maria Schnitzer, Eva
Choeurs et orchestre
de l’Opéra de Zürich
Franz Welser-Möst, direction

Samedi 9 juin 2007 à 20h45
Le 10 juin 2007 à 13h45
Le 19 juin 2007 à 15h45
Le 21 juin 2007 à 4h10
Le 29 juin 2007 à 16h
Opéra. Créé à Munich en 1868. Réalisation: Andy Sommer. Enregistré à l’Opéra de Zürich (2003, 2h49 mn)
Mise en scène : Nikolaus Lehnhoff.
Les Maîtres Chanteurs de Nüremberg est le seul opéra « léger »de Wagner. Composé comme une pause récréative après les langueurs de Tristan mais avant les deux dernières Journées du Ring (Siegfried et le Crépuscule des dieux), l’intrigue en est simple. Le jeune chevalier Walther von Stolzing tombe amoureux d’Eva, fille du bourgeois Polger. Mais pour l’épouser, il doit entrer dans la prestigieuse confrérie des Maîtres Chanteurs, fondée par les artisans de Nüremberg. Pour réussir, il devra non seulement, évincer le greffier Beckmesser, qui veut aussi épouser la jeune fille mais aussi, maîtriser l’art du chant. Heureusement, le cordonnier Hans Sachs l’aidera dans cette tâche. Bon père, âme noble, en somme un guide, Sachs délivre un message sans ambiguité: il faut s’incliner devant l’art inspiré par l’amour. Walther vaincra la réticences de ses juges conservateurs, la fourberie de son rival grâce à sa vertu amoureuse. Chanter vrai, c’est chanter avec son coeur. José Van Dam incarne le maître chanteur Hans Sachs qui est aussi cordonnier: le jeu économe (mais le feu intérieur du baryton, mystérieux et mesuré), secrêtement épris de la belle Eva, s’impose dans la mise en scène dépouillée, théâtrale de Lehnoff. Franz Welzer Most dirige le Chœur et l’Orchestre de l’Opéra de Zurich. Enregistré en 2003.
Wolfgang Amadeus Mozart
L’enlèvement au sérail
Klaus Maria Brandauer, Bassa Selim
Malin Hartelius, Konstanze
Patricia Petibon, Blonde
Piotr Beczala, Belmonte
Boguslav Bidzinski, Pedrillo
Alfred Muff, Osmin
Choeur et orchestre de l’Opéra de Zürich,
Franz Welzer Most, direction

Samedi 23 juin 2007 à 20h45
Le 24 juin 2007 à 13h45
Opéra. Réalisation: Chloé Perlemuter. Enregistré à l’Opéra de Zürich (2005, 2h23)
Mise en scène : Jonathan Miller ; décors : Isabella Bywater ; lumières : Hans-Rudolf Kunz
Quand Mozart entreprend en 1781 la composition de « l’Enlèvement au Sérail », le jeune compositeur alors installé à Vienne depuis peu, s’attèle à l’oeuvre qui le passionne, donner le modèle d’un opéra chanté en allemand. Le 1er aout 1781, il écrit ses mots a son père Leopold : « Avant-hier, on m’a remis un livret pour que j’en compose la musique. Le livret est très intéressant. Le sujet est turc. » C’est l’empereur Joseph II qui aurait fait la commande. La création de l’œuvre était initialement prévue pour la visite d’Etat du Grand Duc Paul Petrovich de Russie. La première eut finalement lieu le 16 juillet 1782 au Burgtheater de Vienne, sous les applaudissements impériaux. Dans la mise en scène de Chloé Perlemuter à qui l’on doit aussi un documentaire sur l’opéra Cardillac de Paul Hindemith, produit sur le scène de l’Opéra Bastille en 2006, les chanteurs sont filmés en coulisse avant leur entrée sur scène. Filmé à la façon d’un marivaudage, le document souligne les confrontations, les enjeux sentimentaux d’autant que la distribution vocale est très cohérente. Excellent spectacle.
Approfondir: lire notre critique de L’Enlèvement au sérail de Mozart à l’Opéra de Zurich (1 dvd Bel Air classiques)
Richard Strauss
Elektra, 1909
Deborah Polaski, Elektra
Anne Schwanewilms, Chrysotémis
Felicity Palmer, Clytemnestre
Robert Brubaker, Egisto
Alfred Walker, Oreste
Orchestre et choeur de la Scala
Semyon Bichkov, direction

A partir du 30 juin 2007 à 20h45
Opéra. Enregistré à Milan. (2005, 52 mn).
La présente production a été filmée en 2005, au Teatro degli Arcimboldi à Milan, volet de la saison musicale de la Scala de Milan.Complément visuel à l’enregistrement paru chez Hänssler (Elektra, Semyon Bichkov, Hänssler, 2004), qui nous avait totalement convaincu et qui réunit le même trio féminin, la mise en scène de Luca Ronconi et les décors de Gae Aulenti apportent leur supplément de noirs vertiges et de sanguinité écoeurante, au chant proche de l’idéal de la distribution milanaise. Deborah Polaski se montre à la hauteur du rôle: dévorée par le désir de haine matricide, invoquant la loi du sang pour venger son père Agamemnon… Sa soeur, Anne Schwanewilms a ce timbre tendre et clair de celle qui veut tourner la page et se défaire de la spirale de l’obsession: « plutôt mourir que vivre sans vivre », et Felicity Palmer se révèle hors des sentiers baroques où l’on avait plus l’habitude de l’entendre et de l’applaudir. En elle se précise, une troisième nuance féminine: monstre avide de sacrifices, insomniaque manipulant, séduisant, fausse implorante dévorée par le souvenir du meurtre de son époux qu’elle a commis avec son amant Egiste… Le portrait des trois individualités suffirait déjà à recommander la production. Dans le fosse, Bychkov, en maître des climats symphoniques, assène vertiges, sauvagerie, déluge et déflagration d’une partition marquée par l’hallucination et l’horreur. Le tableau de la confrontation entre la mère et la fille, Clytemnestre et Elektra, dans la chambre de la Reine, pareille à une salle d’écarrissage (dépouilles des bêtes, boeufs et chevaux écorchés, suspendus aux murs) est à ce titre éloquent, dans la suffocation et la suggestion de la perversité. Très convaincant.
Approfondir: lire notre dossier Elektra de Richard Strauss
Crédits photographiques
Karl Böhm (DR)
José Van Dam (DR)
Barbara Kraft, portrait posthume de Mozart
Deborah Polaski (DR)