Plus habitué et occupé par l’écriture de polars, l’auteur plonge dans la tourmente domestique d’une vie malheureuse, celle de la diva Maria Callas, amoureuse finalement délaissée, dont les rares instants de bonheur sentimental s’épuisent face à la fatalité et un certain réalisme tragique.
On sait sa relation chaotique avec l’armateur milliardaire Aristote Onassis, rencontré à l’été 1959. La cantatrice arrête alors sa carrière de chanteuse pour ne se consacrer à son seul et unique amour… Pourtant Onassis qui aime collectionner les femmes finit par lui préférer Jackie Kennedy, la veuve du Président américain, qu’il épousera en octobre 1968. Dans un texte dense voire touffus, dont la matière littéraire épaissit la trame fictionnelle jusqu’à lui conférer l’illusion de la réalité, Christos Markogiannakis semble comprendre de l’intérieur les affects de sa compatriote grecque Maria Callas née Sophia Cecelia Kalogeropoulos. Onassis et Callas eurent bien un enfant, né le 30 mars 1960 mais déclaré mort quelques heures après sa naissance. Cet événement suscite un effondrement psychique dont le style recueille les soubresauts à la manière d’un sismographe ; qu’aurait-il pu penser s’il avait vécu ? Qu’aurait-il dit de ses parents et de leur relation tendue et fragile ?
En réalité dans ce récit à la première personne, où le fils, l’enfant interroge ce qu’il aurait pu être, c‘est à dire le sens même de son identité la plus profonde, s’exprime la quête intime de l’auteur lui-même, grec vivant à Paris. Vivre c’est choisir ; c’est avancer et souffrir, et parfois, trop rarement, jubiler. La plus grande diva du siècle n’a pas été heureuse… à l’image des héroïnes qu’elle n’a cessé d’incarner sur scène : Norma, Traviata, Tosca… toutes mortes d’amour ; trahies, abandonnées.
Dans le roman, Omero cherche, se perd ; réactive la dureté d’un monde labyrinthique, d’une saga familiale entre Athènes et New York, Rome et Paris… Comme son doctorat comme avocat pénaliste, interrogeant « la représentation du crime dans la peinture du XIXè », l’auteur croise le juridique et l’art ; une sensibilité qui au delà des affaires à élucider, apporte de la chair et une âme à la froide enquête ou à l’analyse objective du réel.
Dans la trame sensible de cette biographie romancée, le fantôme de l’enfant qui observe, réfléchit, s’interroge apporte en définitive un regard troublant sur la figure de la Callas, mère et femme toujours énigmatique, impénétrable. Le texte captive au delà de son sujet. Bientôt, Christos Markogiannakis publiera une nouvelle enquête qui en croisant Agatha Christie et André Malraux devrait se dérouler dans la Grèce antique. A suivre.
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CRITIQUE livre. Christos Markogiannakis : Omero, le fils caché – éditions Plon. 448 pages – prix indicatif : 21,90 €. Plus d’infos sur le site de l’éditeur PLON : https://www.lisez.com/livre-grand-format/omero-le-fils-cache/9782259316989
CENTENAIRE MARIA CALLAS 2023 (2 déco 2023)
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CRITIQUE LIVRE événement. Maria Callas par Jean-Jacques Groleau (Actes Sud)
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