vendredi 17 janvier 2025

CRITIQUE, concert. TOULOUSE, Halle aux grains, le 12 janvier 2024. FAURE, BARTOK, SAINT-SAËNS. Orchestre National du Capitole de Toulouse / Timothy Ridout (Alto) / Kazuki Yamada (direction).

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Directeur de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo depuis 2016, le chef japonais Kazuki Yamada est un habitué de la phalange toulousaine qu’il a dirigée à de nombreuses reprises, et c’est en “ami” qu’il est invité à la Halle aux grains de Toulouse pour le premier concert symphonique de l’année 2024 – qui met à l’affiche des ouvrages de Fauré, Bartok et Saint-Saëns

 

Le premier compositeur est illustré ici au travers de sa célèbre Suite d’orchestre “Masques et bergamasques” (1919), au demeurant rarement jouée, les huit pièces regroupées par Fauré survivant encore mais comme d’habitude amputées de leurs trois pages vocales et de la fameuse Pavane (la Suite ne regroupant ainsi que 4 des 8 pièces d’origine…). Jamais pris en défaut d’authenticité, Kuzuki Yamada fait un sort à cette musique – qui tient souvent du pastiche -, mais en penchant plutôt vers un Stravinsky décapant (Pulcinella), c’est-à-dire sans minauderies faussement dix-huitiémistes, mais une direction dépouillée (dans la Pastorale) ou à l’inverse dense (dans la Gavotte). Le jeune altiste britannique Timothy Ridout – Lauréat de la BBC New Generation Artist – fait ensuite son entrée pour une exécution de l’à peine moins rare Concerto n°2 pour Alto de Béla Bartok (1945). La sonorité à la fois fragile et lumineuse du jeune instrumentiste fait merveille dans le second mouvement (“Adagio religioso”), tandis que son tempérament visiblement frondeur le pousse à souligner le trait grotesque – sans cesse au bord du gouffre  – du 3ème et dernier mouvement (“Allegro vivace”). Le public toulousain lui adresse une belle ovation et il lui offre, en bis, un extrait d’une Sonate de Paul Hindemith, exécutée avec une alacrité toute démoniaque !

 

Après la pause, place à la monumentale 3ème Symphonie avec orgue de Camille Saint-Saëns. Créée à Londres en 1886 puis à Paris en 1887, dédié à l’immense Liszt qui venait de mourir (et qui a tant fait pour la reconnaissance de Saint-Saëns dont en particulier son opéra Samson et Dalila), la Symphonie avec orgue frappe et saisit par l’ampleur et la clarté de sa construction : les cordes du poco adagio déroule des vagues magnifiques en opulence et couleurs, répondant en cela à l’orgue au lyrisme monumental. La gravité sereine qui s’y déverse sans limites atteint un superbe équilibre sous la direction aérée et nerveuse du chef japonais. Dès le début l’Adagio préliminaire, la réverbération naturelle du lieu enveloppe les timbres historiques avec beaucoup d’ampleur et de vivacité. Les flûtes, les cuivres prennent ici un relief inédit, enrichissant encore le spectre instrumental. Stylistiquement très fouillée, l’approche de Yamada accuse des couleurs sombres, voire tragiques, l’énergie débordante du début de l’opus 78, avant la noblesse souveraine du poco adagio et de son orgue apollinien. Puis, l’Allegro moderato déploie une activité profonde, tellurique, d’une architecture parfaitement mesurée et construite, qui soulève bien légitimement l’enthousiasme des auditeurs…

Bref, le courant est encore passé entre Kazuki Yamada et l’Orchestre national du Capitole de Toulouse !

 

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CRITIQUE, concert. TOULOUSE, Halle aux grains, le 12 janvier 2024. FAURE, BARTOK, SAINT-SAËNS. Orchestre National du Capitole de Toulouse / Timothy Ridout (Alto) / Kazuki Yamada (direction). Photos (c) DR.

 

VIDEO : Kazuki Yamada dirige un extrait de la 3ème Symphonie de Mahler à la tête de l’Orchestre National du Capitole de Toulouse

 

 

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