samedi 26 avril 2025

CRITIQUE, concert. Paris, Auditorium de la Fondation Louis Vuitton, le 15 décembre 2023. SCHUMANN / RACHMANINOV. Yoav Levanon (piano).

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Dans le cadre de la série des récitals Piano Nouvelle Génération, la Fondation Louis Vuitton a accueilli – le vendredi 15 décembre 2023 et pour la deuxième fois -, le-très-jeune pianiste israélien Yoav Levanon, dans un programme Robert & Clara Schumann et Sergueï Rachmaninov. Logée à la lisière du Bois de Boulogne et du Jardin d’Acclimatation, la structure futuriste de la Fondation Louis Vuitton à Paris est dotée d’un Auditorium dont la programmation n’a rien à envier aux grandes salles de concerts parisiennes. En témoignent la récente présence en ces lieux du célébrissime pianiste chinois Lang Lang et la série de concerts intitulée Piano Nouvelle Génération qui, comme son nom l’indique, ambitionne de faire connaître de jeunes interprètes. 

 

C’est incontestablement le cas pour le récital de Yoav Levanon, 19 ans, dont c’est n’est pas la première apparition, puisqu’il s’y était déjà produit en 2021. C’est un programme à consonance romantique qui nous est proposé, car construit autour du couple Robert et Clara Schumann: les Variations sur un thème de Robert Schumann op.20, suivi des Etudes symphoniques op.13 de Robert Schumann puis, pour terminer, les Etudes-Tableaux op.39 de Sergueï Rachmaninov. Bonne idée -hélas, trop rare… – d’associer une œuvre de Clara Schumann à une contribution majeure de Robert pour le piano, ses fameuses Etudes symphoniques. C’est en 1853 qu’intervient la composition des Variations sur un thème de Robert Schumann, première pièce du récital. Elle est dédicacée « à mon époux bien-aimé, pour le 8 juin, ce nouvel et pauvre essai de sa vieille Clara, pour l’anniversaire de Robert Schumann, né le 8 juin 1810. Cette dédicace est d’autant plus émouvante que la pièce est composée alors que Robert subit les premiers symptômes de la maladie mentale qui le conduira à être interné l’année suivante, en 1854. Le thème en question, objet de ces variations, est extrait du recueil Bunte Blätter opus 99. C’est plus précisément le n°4 dudit recueil, l’Albumblatt en fa dièse mineur qu’a retenu la compositrice. Plutôt brève et comprenant sept variations, cette pièce n’est pas exempte de tendresse et de délicatesse, et elle est joliment restituée par Yoav Levanon.

Place ensuite aux Etudes Symphoniques opus 13. Changement de climat pour cette œuvre majeure de l’œuvre pour piano de Robert Schumann. Yaov Levanon est évidemment attendu au tournant de cette pièce redoutable qui est le cœur du récital. En forme de thème et variations, elle constitue en effet l’apogée du récital. On peut regretter qu’il ait choisi une version qui fait l’impasse sur deux études posthumes et sur celle réputée injouable que tous les pianistes jouent aujourd’hui. Sa digitalité fait merveille et elle peut parfois être stupéfiante. Il nous a semblé cependant que cette incontestable virtuosité l’était, parfois, au détriment de la musicalité. Son interprétation s’est avérée irréprochable techniquement, mais d’un son parfois un peu désincarné – et pour tout dire une interprétation qui nous a paru, de temps en temps, s’éloigner du romantisme schumannien.

Par contre, si l’on reste réservé quant à son approche de Schumann, on ne peut que constater que les Etudes-tableaux opus 39 de Sergueï Rachmaninov correspondent infiniment plus à son tempérament et à son approche de l’instrument. Furie, bourrasque, toute la palette « orchestrale » que déploie le compositeur russe ne lui est pas étrangère et lui permet de laisser libre cours à son art du clavier pour clore ce récital en feu d’artifice. On ne fera pas grief à Yoav Levanon de sa sobre présence scénique, ni de son jeu dépourvu de gestes spectaculaires. Par bonheur, il ignore les démonstrations – hélas trop fréquentes ! – de certains de ses collègues, pour lesquels la posture l’emporte sur la musique. En témoigne aussi la pause plutôt longue et réfléchie que ce jeune interprète s’impose, avant chaque pièce, comme pour se pénétrer de l’œuvre à venir et nous faire partager ce moment où un nécessaire silence précède la musique.

Enfin, ce jeune pianiste n’est pas avare de bis… car il nous en offre pas moins de trois, entrecoupés de commentaires – en anglais – plus ou moins compréhensibles ! Ce jeune pianiste, visiblement heureux de jouer à Paris et de retrouver un public visiblement conquis, met un terme à ce récital par une courte pièce de Franz Liszt, Mazeppa, puis par la Canzona serenata, extrait du recueil des Mélodies oubliées de Nikolaï Medtner, et enfin, concluant en une forme humoristique (clin d’oeil au dessin animé Tom et Jerry), la Rhapsodie hongroise no.2 de Franz Liszt.

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CRITIQUE, concert. Paris, Auditorium de la Fondation Louis Vuitton, le 15 décembre 2023. C. et R. Schumann / S. Rachmaninov. Yoav Levanon (piano). Photos (c) DR.

 

VIDEO :  Yoav Levanon interprète la Rhapsodie hongroise N°2 de Franz Liszt

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