Hector Berlioz est à la fête à Nantes ! Au lendemain d’une superbe exécution de son oratorio « L’Enfance du Christ », et trois mois après celle de sa « Symphonie fantastique », c’est « Lélio, ou le retour à la vie » (que le compositeur isérois avait conçu comme une suite et un complément à sa Symphonie) que l’Orchestre National des Pays de la Loire, placée sous la direction de la jeune cheffe italienne Clelia Cafiero, défend cette fois.
Avant Lélio, deux pièces sont données à entendre, la courte Ouverture Le Carnaval romain et la plus développée Cantate « La Mort de Cléopâtre ». On pourrait s’étonner du couplage, mais cela serait oublier que des thèmes de Lélio sont réutilisés à partir de ces mêmes deux ouvrages, car à l’instar de son collègue Gioacchino Rossini, Berlioz aimait à réutiliser des passages d’anciennes œuvres. Avouons que l’on reste sur sa faim avec la première pièce, qui ne revêt pas ici tout l’éclat et la rutilance qu’elle appelle. La faute en incombe à la jeune cheffe qui ne semble pas encore avoir bien intégrer les exigences berlioziennes, ce qui se confirme dans la Cantate qui suit, la fureur nerveuse de l’introduction passant ici à la trappe ; c’est ainsi sur la superbe mezzo (nantaise) Julie Robard-Gendre que repose le soin de conférer à ce morceau toute la grandeur tragique qu’elle contient. De toute évidence, la pièce de Berlioz est pour la chanteuse davantage une cantate qu’un fragment d’opéra où il s’agirait d’incarner éperdument, en vingt minutes, une héroïne que son destin pousse au suicide. Sa Cléopâtre, malgré les différents états d’âme qu’exprime son personnage, est toujours une reine qui chante, même si son humanité n’est pas obérée, et qu’elle incarne aussi une victime qui souffre, s’interroge ou se révolte, portée par une voix superbe, aux aigus royaux.
Quant au « plat de résistance », il souffre de la même carence de ferveur passionnée, même si les instruments solistes brillent dans certains passages qui leur sont attribués (à commencer par les flûtes et la harpe). On applaudit également à deux mains la prestation du jeune ténor malgache Sahy Ratia, qui intervient dans « La Balade du pêcheur » et dans « Le Chant du bonheur ». Sa voix chaude et aérienne confère naïveté et sincérité dans sa première romance, et distille un chant tout élégiaque dans la deuxième pièce. Son collègue Philippe Nicolas-Martin offre, de son côté, une prestation sans complexe dans « La Chanson de brigands ». Les Chœurs d’Angers Nantes Opéras, placés dans les loges d’avant-scène, ne sont pas en reste, et font un sort à leurs trois interventions, notamment dans la « Fantaisie sur La Tempête » finale. Enfin, le comédien Maxime Le Gall avait la lourde tâche d’incarner le Récitant, c’est-à-dire Berlioz lui-même ! Il dit son texte avec feu, sans chercher à en gommer les prétendues outrances ou naïvetés, et parvient à faire corps tant avec les solistes vocaux que les instrumentistes de l’ONPL. Seule petite remarque, l’utilisation d’un micro était-elle nécessaire dans une salle d’opéra à taille humaine comme l’est le Théâtre Graslin ?…
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CRITIQUE, concert. NANTES, Théâtre Graslin, le 15 déc 2022. BERLIOZ : Lélio, ou le retour à la vie… Orch National des Pays de la Loire / Clelia Cafiero. Photo © Emmanuel Andrieu
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BERLIOZ : La mort de Cléopâtre (The Death of Cleopatra)1.Allegro vivace con impeto – Récit. C’en est donc fait! –2.Lento cantabile. Ah! qu’ils sont loin ces jours, …