mercredi 12 février 2025

CRITIQUE, concert. MONACO, Auditorium Rainier III, le 1er octobre 2023. MAHLER / TCHAIKOVSKY. Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, Matthias Goerne (baryton), Nathalie Stutzmann (direction).

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Tout juste une semaine après une fabuleuse exécution de la monumentale Deuxième Symphonie de Mahler (dirigée par Kazuki Yamada), l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo brille à nouveau de 1000 feux, mais sous la battue de Nathalie Stutzmann cette fois. En quelques années, la célèbre contralto française est devenue l’une des baguettes les plus recherchées au monde, tant dans le domaine lyrique (elle vient de diriger au prestigieux Festival de Bayreuth cet été !) que symphonique (elle est directrice musicale des deux grandes formations américaines que sont les Orchestres Symphoniques de Philadelphie et d’Atlanta !). Elle est accompagnée ce soir par le non moins célèbre baryton allemand Matthias Goerne, à qui sont dévolus – en première partie de concert – quelques-un des plus beaux Lieder du vaste cycle que constitue “Des Knaben Wunderhorn” (“‘Le Cor merveilleux de l’enfant”) de Gustav Mahler.

 

 

Manifestement inspirés par l’ouvrage mahlérien, chanteur et cheffe distillent une atmosphère dépouillée mais ample, façonnent un climat délicat, évocateur et affirmé à la fois, élaborent de formidables ombres et saveurs toutes mahlériennes, entretiennent avec ferveur et précision tant de sentiments et situations abordées avec douceur ou fermeté par les textes eux-mêmes – ainsi que par un Matthias Goerne en état de grâce. A la fois héroïque, lyrique ou fantasque, le baryton s’adapte avec ductilité aux changements imposés par chacun des textes retenus, tandis que l’OPMC s’impose en brodant sa splendide partie orchestrale, totalement indispensable à l’établissement de la magie Mahler. Du monde de la frivolité à celui de la mort, de la comptine à la légende, du drame au comique, tant le soliste que la cheffe suggèrent à merveille chaque situation avec un profond dépouillement et un tempérament mémorable. Le public monégasque fait un triomphe légitime à ces deux immenses artistes.

 

En seconde partie de concert, place à la finalement assez rare Quatrième Symphonie de Piotr Illitch Tchaïkovsky, généralement délaissée au profit des plus célèbres “Pathétique” ou 5ème. Irréprochable de bout en bout, la phalange monégasque est un allié de choix dans cette interprétation éminemment romantique et lyrique, sous la battue de Nathalie Stutzmann, qui préfère l’hédonisme à l’âpreté de certaines lectures (notamment slaves). Ouvert par la fanfare de cuivres, on apprécie, dans l’Andante sostenuto initial, le lyrisme et le legato des cordes tandis que les cuivres entretiennent un sentiment d’urgence, de péril et d’accablement. La cheffe utilise les masses orchestrales pour appuyer le climat de menace sourde, sans sacrifier la clarté du discours, ni l’équilibre entre les pupitres. L’Andantino apporte un moment plus apaisé et insouciant, riche en nuances et variations rythmiques, sur un tempo assez lent où se distinguent plus particulièrement hautbois et bassons. Célèbre et très attendu, le Scherzo affiche une belle dynamique, particulièrement jouissive, entretenue par des pizzicati possédant tout le tranchant ici requis, faisant contraste avec les stridences des bois. Le Finale, très théâtral, parvient avec beaucoup d’à-propos à entretenir un climat d’inquiétude – avant la cavalcade finale, ardente et enflammée, ponctuée par les sonneries du destin…

 

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CRITIQUE, concert. MONACO, Auditorium Rainier III, le 1er octobre 2023. MAHLER : Des Knaben Wunderhorn. TCHAIKOVSKY : Quatrième Symphonie. Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo, Matthias Goerne (baryton), Nathalie Stutzmann (direction). Photos © Jean-Louis Neveu & Emmanuel Andrieu.

 

VIDEO : Nathalie Stutzmann dirige la Cinquième Symphonie de Tchaïkovsky (Bucarest, 2018).

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