CINÉMA. Il BOEMO de Petr Vaclav : le biopic choc sur la vie et les opéras du Tchèque Myslivecek – présentation et critique (sortie le 21 juin 2023)

A ne pas rater

 

 

Coup de cœur de la rédaction de CLASSIQUENEWS, le film Il Boemo de Petr Vaclav réussit le genre difficile du biopic musical, en particulier dédié à la figure d’un compositeur des Lumières (XVIIIème siècle).

 

Depuis « Amadeus », peu de fictions ont réussi à relever les défis du genre. Dans quel but restituer une époque révolue, une carrière qui relève du roman, d’autant plus concernant un compositeur oublié, même s’il fut de son vivant adulé comme une gloire européenne, et admiré par un certain Mozart ?… Comment exprimer le mystère de l’opéra, le trouble du chant lyrique, l’incarnation par les divas ? C’est pourtant ce que réussit à l’écran le réalisateur franco-tchèque Petr Vaclav. Voici quelques pistes pour mieux mesurer les qualités multiples de ce film remarquable qui lève le voile sur la personnalité attachante et la carrière exceptionnelle du tchèque « Giuseppe Myslivecek » en Italie…  (sortie le 21 juin 2023).

 

 

 

Le film dévoile la vie, la personnalité, l’œuvre de Josef MYSLIVEĆEK (1737-1781) – compositeur aujourd’hui bien oublié, alors qu’il a connu la gloire en Italie, à Naples et à Venise, à Milan, Pavie, Florence et Rome.. et jusqu’à Munich. Il fut même un auteur célébré dans toute l’Europe, en particulier sur la scène lyrique où il incarne un sommet de l’expression opératique dans les années 1770 – principalement dans le genre seria, le plus noble donc le plus convoité et méritoire. Myslivecek né en Bohême (actuelle République Tchèque) réussit un équilibre exceptionnel entre la pure virtuosité et la profondeur des sentiments exprimés : un défi que relèvent d’un bout à l’autre les chanteurs-acteurs du film. Et dans un enchaînement plutôt convaincant, servi par le scénario de Petr Vaclav, visiblement très inspiré par la carrière de son compatriote ; dans la construction de l’action, prend corps la cohérence d’une certaine vision du XVIIIè, entre le Baroque et l’esprit des Lumières. Se précise aussi un regard personnel sur la fragilité et la vérité du musicien, tels qu’ils perdurent malgré le passage des siècles. Plus de 250 ans après son ascension musicale exceptionnelle, le style de Myslivecek fascine toujours ; et à travers son évocation, au coeur du film, Petr Vaclav nous interroge sur le chanteur, le trouble et le mystère de son incarnation sur scène ; sur le chant, comme phénomène fascinant voire bouleversant. Sur les planches ainsi reconstituées, le chanteur exprime les sentiments de son personnage comme l’acteur devant la caméra ; ce parallèle interroge le jeu illusoire ; une émotion fabriquée peut y être plus saisissante encore que la réalité ; à travers la vérité du chant, le réalisateur semble questionner le mystère même du cinéma. C’est tout l’enjeu par exemple de la scène où la diva « Gabrielli » au San Carlo, arrive détruite sur scène, puis se reprenant réalise une incarnation prodigieuse (lire ci après) ; Petr Vaclav glisse aussi en filigrane des détails véridiques qui respectent les témoignages d’époque sur la diva. Femme difficile et en tension mais chant souverain, impérial, bouleversant.

 

 

UN CERTAIN XVIIIème siècle… Petr Vaclav qui rêverait aujourd’hui de monter un opéra du Boemo, a imaginé tout un monde : celui des Lumières, dans l’Italie des années 1760 et 1770. Pour restituer l’ambiance et la réalité visuelle comme quotidienne du XVIIIè de Myslevecek, il a d’abord beaucoup lu : mémoires, correspondances, théâtre, œuvres philosophiques, romans libertins, Rousseau, Madame d’Épinay, Vivant Denon, « Voyage en Italie » de Sade, la correspondance de Marie-Antoinette avec sa mère,.. en particulier « Histoire de ma vie » (1789) de Giacomo Casanova (1725-1798), « Voyage musical dans l’Europe des Lumières » du musicologue Charles Burney et aussi, les « Mémoires secrètes » de Gorani. Avec une faveur spécifique pour la Correspondance de Mozart, texte très important, « monumental » même, aussi méconnu que son jeune auteur est célèbre… En outre Wolfgang y a laissé la seule description psychologique de Josef Myslivecek. Autant de sources qui nourrissent la conception d’un XVIIIè à la fois proche et singulier.

On mesure la gloire de Myslevecek et sa propre vision des chanteurs et du drame lyrique car le film fait la part belle à ses opéras ;  l’action est celle de répétitions ou de séquences scéniques filmées en continu, et que réalisent les musiciens de l’ensemble tchèque Collegium 1704 – sous la direction de son fondateur et directeur musical, le chef lui aussi tchèque Vaclav Luks : de longs épisodes sont filmées au plus près du chanteur, tentent de transmettre ce qui se joue sur scène… La musique et ses enjeux psychologiques aussi sont abordés car Vaclav Luks a participé à l’élaboration du film dès le départ, lui-même très connaisseur de l’opéra tchèque au XVIIIè ; il a d’ailleurs dirigé et enregistré L’Olimpiade entre autres. Ce souci de vérité et de profondeur transparaît de façon manifeste. 

 

 

 

 

LE JEUNE MOZART…. Myslivecek rencontre à Bologne, en 1770, le jeune Wolfgang Mozart, alors adolescent piloté par son père et qui recherche la notoriété… Wolfgang est influencé par la sincérité du Maître tchèque, [comme en témoigne l’air « Ridente la calma, K152 »]. La scène que l’on voit dans le film évoque un fait tout aussi avéré : Mozart a travaillé sur l’ouverture de « La Nitteti » de Myslivecek (créé à Bologne en avril 1770) pour en faire l’ouverture de son premier opéra italien « Mitridate », premier sommet dans le genre seria, aux vertiges sentimentaux déjà romantiques (1774). Après la mort de Myslivecek, ses 2 oratorios seront attribués au jeune Mozart… 

ENTRE HISTOIRE ET FICTION… On aurait tort de comparer le biopic de Petr Vaclav avec celui de son ainé et compatriote, Milos Forman et son inoubliable Amadeus (1984) lequel de fait, reste comme le modèle du genre. Pourtant, il convient de reconnaître qu’en matière d’évocation autant historique que poétique, les deux Tchèques réussissent l’exercice. Ils relèvent même le niveau en fusionnant reconstitution aboutie et pertinence psychologique car Vaclav tout en renseignant comme un documentaire sur la vie intime et artistique de Myslivecek, évoque aussi avec une grande subtilité sa relation au chanteur, surtout aux chanteuses et sa quête de justesse comme de sincérité malgré le decorum opératique… 

L’arrière fond politique est également remarquablement traité. Le règne de Ferdinand IV (1751-1825), fils du roi d’Espagne, Charles III, est idéalement restitué ; Vaclav y intègre beaucoup de traits avérés, aussi précis que réalistes. Le jeune souverain y paraît comme un faux benêt déjanté, moins « fou » qu’il n’y paraît : il a la juste intuition de commander son premier opéra à Myslivecek : sa création est triomphal et le compositeur passe les 13 années qui suivent, dans les années 1770, sur les routes, entre deux nouvelles créations d’opéras.

 

MYSLIVECEK A L’ÉCRAN… Dans le rôle-titre, Vojtech DYK est formidable de sincérité,d’humanité ; musicien de formation, l’acteur dirige en réel l’orchestre dans plusieurs séquences dont de nombreuses où dirige la création de ses opéras ; la vision du personnage laisse perplexe : plus tendre, observateur, voire passif que réellement conquérant ; sa proximité et certainement la compréhension profonde qu’il semble éprouver vis à vis des chanteuses, explique son charme auprès des femmes, en particulier des patriciennes de Venise, ses protectrices. Cet aspect apporte beaucoup de justesse à son jeu qui au delà de l’évocation de Myslivecek nous semble développer un hymne particulier à la magie de l’opéra, et en particulier, à l’expérience du chanteur quand il chante… une situation qui s’approche de l’acteur quand il doit réaliser les défis de son rôle. 

 

 

 

 

MYSLIVECEK ET LES FEMMES

La diva Gabrielli et la baronne Anna Manciniani…

 

 

Myslivecek et la Baronne Anna Manciniani

 

C’est le cas dans la superbe scène où la cantatrice romaine vedette, Catarina Gabrielli (1730 – 1796) pourtant humiliée et rabaissée juste avant, monte sur la scène de l’Opéra de Naples pour y chanter avec un trouble émotionnel assez bouleversant son air  tragique (pour soprano coloratoure) dans l’opéra Il Bellerofonte (créé en (janvier 1767) ; 

Catarina Gabrielli est incarnée par l’actrice Barbara RONCHI, laquelle est doublée à l’écran par la soprano Simona Saturova ; pour paraître plus crédible encore, comme une chanteuse de premier plan, Barbara Ronchi est conseillée et guidée par la mezzo-soprano Raffaella MILANESI (qui incarne aussi à la fin du film le castrat Marchesi dans le rôle trouble de Megacle, de l’opéra L’Olimpiade, créé à Naples aussi nov 1778). C’est une autre séquence où la vérité émotionnelle inscrite dans l’écriture de Myslivecek, transparaît grâce au jeu de la formidable chanteuse italienne (LIRE aussi notre entretien avec Raffaella Milanesi à propos de sa participation au film Il Boemo).

 

Barbara Ronchi dans le rôle de la cantatrice vedette Caterina Gabrielli

 

 

A l’époque où « La Gabrielli » chante pour Myslivecek, elle est mieux payée que lui ; c’est une star lyrique qui a chanté partout en Italie, à Venise (Antigona de Galuppi, 1754) mais aussi à Vienne (dans les opéras du Chevalier Gluck, le réformateur du genre seria dans les années 1750 : L’Innocenza giustificata, La Danza, Il Re pastore, Tetide, entre 1755 et 1760). A Naples, elle rencontre Myslivecek, y chante donc Bellerofonte (janv 1767), très applaudi. Elle obtient pour lui, la commande à nouveau royale d’un second opéra, qu’elle chantera à Turin. Rebelle, fougueuse, amoureuse, la « Gabrielli », aurait eu une idylle avec Myslivecek, comme le suggère Petr Vaclav. Naples scelle les noces de Myslivecek avec le succès : pas moins de 8 opéras séria seront créées sur la scène napolitaine (Il Bellerofonte donc, puis Farnace, Romolo ed Ersilia, Artaserse, Demofonte, La Calliroe, L’Olimpiade, Demetrio…).

 

Barbara Ronchi dans le rôle de la cantatrice vedette Caterina Gabrielli

 

 

Le duo pour voix et cor – montré à l’écran (« Palesar vorrei ») dans une séquence qui dévoile le compositeur et « son » interprète au travail, est resté célèbre : il indique clairement une écriture sensible et profonde taillée pour la voix de sa dédicataire. La scène est très juste aussi car elle éclaire la relation entre compositeur et diva, celle-ci imposant ses souhaits sans ménagement, afin de mieux faire valoir son chant. D’ailleurs, Myslivecek était apprécié par les chanteurs car il savait comprendre leurs souhaits et les exaucer dans la composition des airs.

Le film développe la relation spécifique de Mylivecek avec les femmes ; son intimité avec une patricienne de Venise (jouée par Elena Radonicichi), ses relations avec d’autres vénitiennes lui permettront de percer à Venise au début des années 1760… ; le travail avec « La Gabrielli » donc ; et aussi, surtout, dans la seconde partie du film, l’amitié quasi fusionnelle que le compositeur séducteur a noué avec la Baronne Anne Manciniani (impeccable Lana Vlady), relation dangereuse comme il est montré dans le film : jaloux et tyrannique, l’époux de la baronne se montre particulièrement violent et menaçant à l’égard de leur relation « inappropriée ». 

 

UN AUTODIDACTE QUI S’ÉLOIGNE DU FOYER PATERNEL… La relation au père est à peine évoquée ; elle rappelle en quelques minutes que le compositeur fils de Meuniers, quitte très vite le noyau familial pour réussir comme compositeur, ce à Venise dès 1765 (28 ans) ; grand bien en découle pour l’essor de l’opéra italien ; car Myslivecek en rejoignant la patrie de Monteverdi et Cavalli, va marquer de fait l’histoire de l’opéra italien en Italie. 

 

 

 

 

LIBERTINAGE ET SYPHILIS… La réalisateur n’omet pas d’évoquer la sexualité libre des milieux dans lesquels évolue le jeune compositeur ; en particulier à Venise dans les années 1760… il contracte d’ailleurs la syphilis (dite alors « le mal de Naples »), probablement attrapée à Padoue en 1775 ; la maladie se développe et ronge toute une partie du visage ; c’est d’ailleurs ainsi, masqué, aux abois, profondément atteint, misérable, endetté que Myslivecek paraît d’abord au début du film.  Triste et effrayante vision qui rappelle combien un thème transparait toujours et traverse tout le film de Vaclav : la sublime fragilité de la vie. C’est elle qui fonde aussi la vérité d’une écriture musicale aussi subtile que sincère. Myslivecek meurt à 44 ans à Rome, totalement ruiné. Génie fauché comme tant d’autres dont l’élégance de l’œuvre nous permet aujourd’hui à travers les images de Vaclav, de célébrer l’âme même de l’opéra baroque tardif, déjà romantique, et du chant italien du XVIIIè. Grâce à l’oeil du réalisateur Tchèque, c’est la vérité profonde et intime de ce XVIIIè qui s’exprime directement à l’écran et qui nous saisit totalement. 

 

 

 

 

 

____________________________

 

 

 

 

Il Boemo de Petr VACLAV

Mozart l’admirait, l’histoire l’a oublié… 
République Tchèque, Italie, Slovaquie – 2022 – VOSTF – Durée : 2h20 

Les acteurs principaux

VOJTĚCH DYK, Josef / Giuseppe Myslivecek
BARBARA RONCHI, Caterina Gabrielli
LANA VLADY, Baronne Anna Fracassari-Manciniani
ELENA RADONICICH, patricienne de Venise

ALBERTO CRACCO, Conte Finocchietti
FEDERICA VECCHIO, Cornelia
PIETRO TAMMARO, Impresario Santoro
ANTONIO DE MATTEO, Baron Manciniani, Mari d’Anna 

DARIO LUBATTI, Frère d’Anna Carlo Fracassati 

FABRIZIO PARENTI, Père de Cornelia 

ACHILLE BRUGNINI, Noble Falier
DIEGO PAGOTTO, Impresario Orfeo Crispi
PHILIP HAHN, Wolfgang Mozart
CHRISTIAN DIETERLE, Leopold Mozart
CHIARA CELOTTO, Servante napolitaine 

 

 

 

Les chanteurs classiques, ayant participé au film Il Boemo de Petr VACLAV : 

 

RAFFAELA MILANESI  – Reconnue mondialement pour sa vocalité particulière et ses capacités d’interprétation, elle parcourt depuis des années avec brio le répertoire baroque et classique, en s’appuyant sur d’importantes collaborations musicales avec notamment Václav Luks, Christophe Rousset, Giovanni Antonini, Fabio Biondi et tant d’autres. Parmi ses succès : Alcina au Festival baroque de Shanghai, Sifare dans Mitridate re di Ponto de Mozart au Festival d’opéra de Drottningholm sous la direction de David Stern, La Contessa d’Almaviva avec Theodor Currentzis, L’Olimpiade de Mislyvecek avec Václav Luks et le Collegium 1704 et, dans son importante discographie, le Diapason d’Or avec La clemenza di Tito de Gluck et le Grammy Award pour Il Teuzzone avec J. Savall. 

EMÖKE BARATH  – Soprano hongroise qui attire rapidement l’attention du monde musical à ses débuts en devenant lauréate de plusieurs concours prestigieux – notamment le Premier Prix du Concours Cesti d’Innsbruck ou le Grand Prix de l’Académie du Verbier Festival. Elle reçoit également le Prix Junio Prima Primissima en Hongrie. Elle est très prisée comme interprète de musique Baroque. 

 

SIMONA ŠATUROVA  – Soprano d’origine slovaque qui a acquis une renommée internationale par ses interprétations de Mozart. Elle promeut et interprète la musique de Mysliveček depuis de nombreuses années. 

JUAN SANCHO  – Tenor espagnol très à l’aise avec le répertoire baroque qui se concentre particulièrement sur Bach, Haendel et Monteverdi. 

KRYSTIAN ADAM – Tenor polonais avec un grand répertoire – Monteverdi, Purcell, Haendel, Mozart, Haydn, Gluck et Schubert. 

SOPHIE HARMSEN  – Mezzo-soprano d’originale allemande mondialement reconnue et respectée. 

et la courte apparition du contre-ténor PHILIPPE JAROUSSKY 

 

 

 

IL BOEMO
Ecrit et réalisé par PETR VACLAV

Scénario écrit avec la participation de GILLES TAURAND
et les conseilleurs historiques : 
DANIEL E. FREEMAN, STANISLAV BOHADLO et MELANIE TRAVERSIER
Image : DIEGO ROMERO SUAREZ LLANOS

Chef d’orchestre : VÁCLAV LUKS
Orchestre : COLLEGIUM 1704

Solistes : EMÖKE BARÁTH, RAFFAELLA MILANESI, SIMONA ŠATUROVÁ, JUAN SANCHO, KRYSTIAN ADAM, SOPHIE HARMSEN…

Décors : IRENA HRADECKÁ, LUCA SERVINO
Costumes : ANDREA CAVALLETTO

Sortie France : 21 juin 2023

 

 

 

 

Approfondir

LIRE aussi notre entretien exclusif avec la mezzo soprano Raffaella Milanesi et sa collaboration au film de Petr Vaclav, Il Boemo : https://www.classiquenews.com/entretien-raffaella-milanesi-dans-il-boemo-de-petr-vaclav-incarner-marchesi-chanter-face-a-la-camera/

 

CONSULTEZ aussi le site du distributeur NOUR FIlms : https://www.nourfilms.com/cinema-independant/il-boemo/

 

 

Liste des principaux opéras de Josef / Giuseppe Myslivecek

Semiramide (Metastasio), été 1766 – BERGAME, Teatro di Citadella

Il Bellerofonte (Bonecchi), janv 1767 – NAPLES, San Carlo
Farnace (Lucchini), nov 1767 – NAPLES, San Carlo
Il Trionfo di Clelia (Metastasio), déc 1767 – TURIN, Teatro Regio
Demofonte (Metastasio), Jan 1769 – VENISE, Teatro San Benedetto
L’Ipermestra (Metastasio), mars 1769 – FLORENCE, Pergola
La Nitteti (Mestastasio), avril 1770 – BOLOGNE, Nuovo Publico
Motezuma (Cigna-Santi), jan 1771 – FLORENCE, Pergola
Il gran Tamerlano (Piovene), déc 1771 – MILAN, Regio ducale
Demetrio V1 (Metastasio), mai 1773 – PAVIE, Nuovo
Romolo ed Ersilia (Metastasio), août 1773 – NAPLES, San Carlo
Antigona (Roccaforte), déc 1773 – TURIN, Teatro Regio
La Clemenza di Tito (Metastasio), fev 1774 – VENISE, Teatro San Benedetto
Artaserse (Metastasio), août 1774 – NAPLES, San Carlo
Demofonte V2 (Metastasio), janv 1775 – NAPLES, San Carlo
Adriano in Siria (Metastasio), sept 1776 – FLORENCE, Teatro del Cocomero
Ezio V2 (Metastasio), 1777 – MUNICH, Hoftheater
La Calliroe (Verazi), mai 1778 – NAPLES, San Carlo
L’Olimpiade (Metastasio), nov 1778 – NAPLES, San Carlo
La Circe (Perelli), mai 1779 – VENISE, San Benedetto
Demetrio V2 (Metastasio), août 1779, NAPLES, San Carlo
Armida (Migliavacca d’après Quinault), déc 1779 – MILAN, Scala
Medonte (Gamerra), janv 1780 – ROME, Argentina
Antigono (Metastasio), avril 1780 – ROME, Teatro delle Dame.

 

 

 

 

 

MYSLIVECEK sur CLASSIQUENEWS :

 

Opéra, recréation – Myslivecek : l’Olimpiade, 1778. Vaclav Luks, recréation – Caen, les 14 et 15 mai 2013. Nouvelle production / https://www.classiquenews.com/myslivecek-lolimpiade-1778-vaclav-luks-recrationcaen-les-14-et-15-mai-2013-nouvelle-production/

Caen accueille à nouveau une nouvelle production en provenance du Théâtre de Prague où cette Olimpiade de 1778composé par Myslivecek a été début mai dernier … L’ensemble pragois Collegium 1704 sous la direction de Vaclav Luks défend le classsicisme d’une oeuvre mozartienne : Wolfgang devait lui-même reconnaître avoir été frappé par l’écriture de son confrère et aîné (qu’il rencontre en 1770) et s’être même inspiré de certains de ses opéras. Prague rend hommage à l’un de ses génies lyriques les plus vénérés de son vivant et passablement oublié depuis ; au Théâtre de Caen avant Dijon, revient le mérite d’accueillir la création française de l’opéra Olimpiade, pièce maîtresse de l’opéra européen qui prolonge dans le genre seria ce que réussit magistralement le jeune Mozart dans Lucio Silla (1774) au rythme et vertige goéthéen déjà préromantique.

 

 

 

CD. Myslivecek : Medonte (Ehrhardt, 2010) : https://www.classiquenews.com/cd-myslivecek-medonte-ehrhardt-2010/

Le choix du visuel de couverture se défend. Mars par David correspond à l’esthétique de Myslivecek: ce néoclassicisme qui dans le sillon tracé par Gluck réoriente toutes les démarches lyriques des années 1780. A la rigueur parfois ascétique du sujet antique répond une nouvelle inflexion dramatique qui favorise l’émergence du sentiment (préromantique?). A l’époque de sa découverte en 1928, la partition de Medonte fut attribuée comme un oratorio oublié de Mozart, à l’instar de l’ouvrage autographe de La Betulia Liberata, oratorio du jeune Wolfgang sur le thème de la geste de Judith; il est vrai que le style néoclassique, sa coupe nerveuse et dramatique n’est pas sans rappeler Mitridate et Lucio Silla mais Myslivecek appartient bien encore à l’élégance haendélienne et aux derniers feux de l’opéra seria napolitain tel que fixé par les Jommelli ou Traetta. Ceci n’ôte rien à la valeur de cette première mondiale, fruit d’une captation live réalisée à Leverkusen, en décembre 2010. Gravure heureuse et opportunément publiée par DHM dont l’intérêt revivifie le catalogue du label dédié aux perles baroques oubliées dans le giron de Sony classical.

 

 

 

 

 

 

ENTRETIEN

______________________________

ENTRETIEN avec PETR VACLAV, réalisateur du film événement IL BOEMO (sortie le 21 juin 2023) – Petr VACLAV répond à nos questions. Portrait véritable de la diva la plus célèbre à l’époque de Myslivecek et qui lui doit sa célébrité, la Gabrielli ; itinéraire d’un compositeur passionné d’opéra ; travail pour le film avec la cantatrice italienne Raffaella Milanesi dont l’engagement et la sincérité fusionne avec l’écriture même du réalisateur pour la vérité de son œuvre filmique…
_________________________________________________

 

 

CLASSIQUENEWS : Plusieurs scènes évoquent le travail des chanteurs à l’époque de Myslivecek. En particulier quand paraît la diva Gabrielli sur la scène du San Carlo. Quel est votre regard sur l’une des chanteuses les plus célèbres en Italie à l’époque de Myslivecek ?
PETR VACLAV : Caterina Gabrielli me fascinait dès le premier moment. Les sources historiques – qui sont d’ailleurs incroyablement minces pour une vedette pareille – la présente comme une hystérique coléreuse, comme une hydre arrogante aux mœurs dissolues qui ruinait ses amants. On disait qu’elle était imprévisible, têtue et déloyale comme chanteuse. On aimait rapporter ses drôles de saillies. J’ai toujours pensé que ce regard était conditionné par le machisme ambiant des époques révolues qui nous donnent une image erronée d’elle. J’ai instinctivement cru, dix avant MeeToo, que l’on avait abusé de cette fille d’un pauvre cuisinier ; et que son caractère difficile est en réalité une révolte contre les maîtres. Il est certain qu’elle devait avoir un comportement assez ambigu : elle avait besoin d’être admirée par la noblesse, mais en même temps elle détestait les privilèges de cette caste, fondés sur l’hérédité et non sur le talent et sur le travail. Malgré sa valeur comme cantatrice, sa qualité de roturière la condamnait au statut de la maîtresse illicite, de chanteuse riche et célèbre mais toujours au service de la classe dominante, sommée de chanter à l’occasion de sauteries privées. Je sens une prémisse de féminisme et de révolte sociale dans son attitude.

 

 

CLASSIQUENEWS : Qu’elle était le rapport de Myslivecek avec la Gabrielli ?
PETR VACLAV : Caterina Gabrielli est déjà très célèbre quand elle chante à Naples dans le premier opéra du débutant Myslivecek. Et comme leur collaboration est un succès et qu’ils s’apprécient, elle l’impose au théâtre de Turin où ils feront ensemble leur prochain opéra.  Elle dira : « personne n’écrivait aussi bien pour moi que le Boemo ». À l’époque, les compositeurs n’écrivaient pas des airs idéaux pour des voix idéales. Ils composaient toujours pour une production précise et pour les chanteurs qu’ils avaient à disposition. Le compositeur devait alors exploiter au mieux leur tessiture, leur points forts et tout faire pour cacher leurs éventuelles faiblesses. Le succès et les commandes futures du compositeur dépendaient du rapport qu’il avait avec les vedettes. La rencontre avec Caterina Gabrielli devait être essentielle pour Josef Myslivecek. Gabrielli est sans doute la clé de son succès.

 

 

CLASSIQUENEWS : Comment s’est passé le travail avec Raffaella Milanesi ?
PETR VACLAV : Nous nous sommes connus en 2013 lors des répétions de L’Olimpiade, l’un de plus beaux opéras de Myslivecek que Vaclav Luks donnait au théâtre National de Prague, au théâtre de Dijon, Caen et Luxembourg. J’ai profité des répétitions pour filmer ce qui est devenu mon documentaire Confessions d’un disparu dédié à Myslivecek. Raffaella est une chanteuse exceptionnelle dont les principales qualités sont la sincérité et la profondeur. Dans le travail et dans la vie. Il y a une verve émotionnelle chez elle, une capacité à exprimer les conflits d’âme et une justesse qui nous saisissent immédiatement lorsqu’elle chante. Elle est intense et vraie. J’ai été également très chanceux de pouvoir travailler avec Philippe Jaroussky. J’avais le projet de mettre beaucoup de musique dans mon film. Je me suis cependant rendu compte en salle de montage que mon projet ne tenait pas. Pour garder la fluidité du récit, il a fallu que je  « tue mes chéris », comme disait William Faulkner. J’ai dû mettre de côté une partie de Philippe Jaroussky. C’est vraiment dommage car le matériel était d’une grande qualité, mais finalement, c’est le propre de l’exigence d’un film, la prévalence du rythme et de la fluidité narrative. Rien n’est cependant perdu : les airs de Philippe Jaroussky, de Raffaella Milanesi et d’Emöke Barath qui ont été écartés du montage ou raccourcis, seront publiés dans leur intégralité sur le bonus du DVD.

 

 

CLASSIQUENEWS : Quelle est votre conception du personnage de Myslivecek ?
PETR VACLAV : C’est un homme qui a voulu aller jusqu’au bout de son désir : être compositeur. Il devait être très ferme et très décidé, ambitieux dans le meilleur sens du terme. En ce qui concerne sa vie privée, c’est une autre histoire. Il fait ce qu’il peut, la vie est un courant puissant qui le porte et qui finit par l’emporter. A travers lui, c’est aussi une peinture de l’Italie du XVIII siècle que j’ai voulu esquisser. Son faste et ses dérélictions. La scène et l’envers du décor.

Propos recueillis en juin 2023

 

- Sponsorisé -
- Sponsorisé -
Derniers articles

CRITIQUE, opéra. PARIS, Théâtre des Champs-Elysées, le 26 mars 2024. LULLY : Atys (version de concert). Les Ambassadeurs-La Grande Ecurie / Alexis Kossenko (direction).

Fruit de nombreuses années de recherches musicologiques, la nouvelle version d’Atys (1676) de Jean-Baptiste Lully proposée par le Centre...
- Espace publicitaire -spot_img

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img