L’Orchestre National de Lille joue la symphonie de Chausson

BLOCH alexandre ON LILLE metamorphosesLILLE, ONL, le 14 janv 2021. Chausson : Symphonie. Alexandre Bloch nous offre un somptueux concert de musique française en faisant dialoguer deux Å“uvres importantes, la Symphonie du Romantique Ernest Chausson, et le Concert pour orgue de Thierry Escaich… (avec en soliste le compositeur lui-même) Alliage réussi entre romantisme et musique contemporaine. Après l’avoir enregistré au disque, L’Orchestre National de Lille et Alexandre Bloch (directeur musical) jouent la Symphonie de Chausson, sommet orchestral du compositeur romantique français, avec son diptyque éblouissant « Poème de l’amour et de la mer » opus 19.
Notre rédacteur Lucas Irom écrivait alors (au moment de la sortie du disque, en mars 2019) : « On y sent et le poison introspectif wagnérien et la subtile texture debussyste et même ravélienne dans un raffinement inouï de l’orchestration »…

 

 

Chausson : un symphonisme wagnérien…

Eblouissant symphonisme de Chauson« Même geste nuancé pour le flux de la Symphonie en si bémol majeur (1891) qui délivre le même sentiment d’irrépressible malédiction. Le premier mouvement saisit par son souffle tragique (tchaikovskien : on pense à la 4è symphonie) et évidemment l’immersion dans la psyché wagnérienne la plus sombre et la plus résigné (avant l’essor de l’Allegro vivo). Chausson est un grand romantique tragique qui cependant égale par son orchestration scintillante et colorée, ses éclairs rythmiques, les grands opus de Ravel comme de Debussy.
Voilà qui inscrit le compositeur fauché en 1899, – trop tôt, dans un sillon prestigieux, celui des grands symphonistes romantiques français : Berlioz, Lalo, évidemment Franck, mais aussi Dukas… Le « Très lent », volet central, s’immerge dans le pur désespoir, fier héritier des préludes de Tristan und Isolde de Wagner (même couleur d’une douleur foudroyée), là encore. Comme s’il reprenait son souffle et sa respiration avec difficulté (en un « effet » volontaire, maîtrisé), l’orchestre, clair et précis, fluide et ondulant, plonge en eaux profondes. Lamento de la douleur inénarrable, l’épisode de presque 9 mn, étire sa langueur désespérée que la parure orchestrale recharge et énergise cependant constamment : en cela, la direction du chef se montre très efficace : jamais épaisse, toujours transparente : elle fait respirer chaque pupitre. Dévoilant des trésors d’harmonies rares, et d’alliages de timbres… d’une ivresse géniale.
Alexandre Bloch et l’Orchestre National de Lille ouvrent de larges perspectives dont l’ampleur nous terrifie comme elle nous captive : faisant surgir les guirlandes mélodiques sur un nuage brumeux de plus en plus menaçant et létal (après le motif du « temps des lilas » au cor anglais, réminiscence de Tristan). Le III applique à la lettre le principe cyclique de son maître Franck, récapitulation des motifs précédents mais harmonisés différemment, et dans un climat d’agitation voire de panique au début primitif. Alexandre Bloch exprime l’énergie brute, comme à vif, comme incandescente, son ivresse primitive, sa noirceur large et enveloppante (wagnérienne), tout en se souciant de l’intelligibilité de la texture (bois, cordes, cuivres sont d’une couleur toute française). » 

chaussonLa puissante écriture de Chausson (1891), son absence de tout formalisme ni révérences, affirme un tempérament original, qui inscrit la partition de l’auteur comme un jalon dans la riche et mésestimée histoire de la symphonie romantique française, portée par de compositeurs innovants, tous marquants pour leur audace formelle : Cherubini (1815), Berlioz (Symphonie Fantastique, 1830), Bizet (1855), Lalo (Symphonie espagnole, 1875), Saint-Saëns (5 symphonies dont la n°2 avec orgue, 1886), D’Indy (Symphonie Cévenole, 1887), enfin Franck (Symphonie en ré, 1889) ou Gounod (Symphonie n°2, 1890).

 

 

 

 

 

boutonreservationLILLE, Auditorium du Nouveau Siècle
Jeudi 14 janvier 2021, 20h
1h sans entracte

ESCAICH
Concerto pour orgue et orchestre n°1
CHAUSSON
Symphonie
Alexandre Bloch, direction
Thierry Escaich, orgue
Orchestre National de Lille

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RÉSERVEZ VOTRE PLACE
https://www.onlille.com/saison_20-21/concert/la-symphonie-de-chausson/

 

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Approfondir
LIRE notre critique complète du cd CD événement, critique. ERNEST CHAUSSON : Poème de l’amour et de la Mer, Symphonie opus 20 (Orchestre National de Lille, Alexandre Bloch / Véronique Gens – 1 cd Alpha 2018) / CLIC de CLASSIQUENEWS de mars 2019 :
http://www.classiquenews.com/cd-evenement-critique-ernest-chausson-poeme-de-lamour-et-de-la-mer-symphonie-opus-20-orchestre-national-de-lille-alexandre-bloch-veronique-gens-1-cd-alpha-2018/
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ON LILLE Orchestre National de Lille, saison 20 / 21 : concerts d’ouverture

SAISON 2020 2021 de l'Orchestre National de LILLEON LILLE : saison 2020 – 2021 / ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE. A partir des 24 et 25 sept prochains, l’Orchestre National de Lille fait sa rentrée… Somptueux éclectisme qui grâce à plusieurs fils rouges approfondit encore ce geste désormais caractérisé, acquis sous la direction du chef Alexandre Bloch, directeur musical depuis 2016. La saison dernière, l‘épopée mahlérienne (Symphonies de Mahler) a ciselé un son et une articulation passionnante à suivre, dont classiquenews s’est fait l’écho (reportage spécial Symphonie n°8 de Mahler). Sur le thème générique du HÉROS, l’Orchestre lillois interroge la fabuleuse odyssée des compositeurs « héroïques », de Berlioz (Symphonie Fantastique, le 18 fév 2021) à Richard Strauss (Ein Heldenleben / une vie de héros, 11 et 12 février 2021)… de Beethoven (Eroica par Alexandre Bloch, le 18 nov ; 5è symph par JC Casadesus, les 20 et 21 avril 2021) à Poulenc et Bartok… hymne flamboyant exprimant comme en miroir les mystères de l’être humain – vertiges et espoirs, tout en permettant à la formidable forge orchestrale de se dévoiler…
Le violoniste énergique et charismatique Nemanja Radulovic inaugure une résidence au sein de l’orchestre, promesse de futurs accomplissements à suivre aussi (concert d’ouverture les 24 et 25 sept puis récital piano et violon le 15 oct).
Lui-même laboratoire de nouvelles formes musicales, l’ON LILLE Orchestre national de Lille prend soin de renouveler le déroulement et l’expérience du concert : il diversifie son offre et pense au plus large public possible ; notons deux figures du jazz contemporain qui paraissent cette saison, sources de nouveaux métissages (Erik Truffaz le 10 déc, et Chilly Gonzales le 5 février 2021 ; côté ciné-concerts, deux rendez-vous sont tout autant immanquables (week end Hitchcock : Psychose, le 30 oct et Vertigo le 31 oct ; et Mary Poppins, les 6 et 7 mai 2021).

Les tempéraments solistes ne manquent pas ; ils émaillent la saison de leur sensibilités volontaires : le pianiste (et compositeur) Kit Armstrong, les 12 et 13 nov 2020 ; la violoniste Patricia Kopatchinskayja (Concerto de Tchaikovski, les 3 et 5 déc 2020) ; le claveciniste Justin Taylor (15-22 mai 2021), …
Alexandre Bloch poursuit son travail en profondeur comme en diversité sur les répertoires : promettant plusieurs grands moments de musique française (entre autres) : Fauré, Escaich (Concerto pour orgue n°1, Symphonie de Chausson, le 14 janv 2021 ; Prélude à l’après midi d’un faune,, tout en soulignant l’acuité sensible de la violoniste Veronika Eberle dans le Concerto n°1 de Prokofiev, le 18 fév 2021 ; …

L’Orchestre National de Lille soucieux de la parité, invite de nombreuses cheffes d’orchestre : Alevtina Ioffe (30 sept / 1er oct), Elena Schwarz (18 nov), Elim Chan (8 avril 2021), Anna Rakitina (18 mai), Kristina Poska (20 mai)…
Enfin l’opéra est de la partie, rendez vous installé à présent depuis les précédents Pêcheurs de perles de Bizet, premier opéra réalisé sous la baguette d’Alexandre Bloch, puis Carmen… cette saison, place aux vertiges d’une femme blessée : La voix humaine avec Véronique Gens (le 28 janv 2021 – le concert prolonge ainsi l’enregistrement de l’automne 2020)… avant le rendez vous de l’été (annoncé les 7, 8 et 10 juillet 2021 (l’ouvrage mystère, bientôt démasqué, concilie voyage en Crête et jeu de l’oie…). Autre temps fort : Thamos, Roi d’Egypte de Mozart (David Reiland, direction, le 15 avril 2021). Les wagnériens pourront se délecter de deux programmes : Hartmut Haenchen, direction / le 4 fév 2021 puis Kazushi Ono, direction / les 31 mars et 1er avril 2021 … L’ONL saura-t-il tisser dans ses diaprures et résonances spirituelles complexes, la somptueuse soie wagnérienne ?

De sept à nov 2020, les concerts prennent en compte les mesures sanitaires (formations et audiences réduites, programmes joués sans entracte…). De quoi sécuriser l’expérience musicale au Nouveau Siècle dont l’Auditorium est devenu l’écrin des grandes réalisations de l’Orchestre National de Lille.
A l’extrémité de la saison, le concert de clôture (les 24 et 25 juin 2021) affiche d’ultimes délices et promet de nouveaux sommets : création française de « Triumph to Exist » de Lindberg (œuvre chorale sur le texte de la poétesse Edith Södergran) et comme une apothéose, Symphonie n°9 de Beethoven sous la direction d’Alexandre Bloch.

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sélection

11 concerts majeurs

de l’Orchestre National de Lille
/ saison 2020 – 2021/

Quelques temps forts à ne pas manquer :

 

 

Jeudi 24, Ven 25 sept 2020 – concert d’ouverture
HAYDN : Concerto pour violoncelle n°1 / Edgar Moreau, violoncelle
Bartok : Divertimento pour cordes
Alexandre Bloch, direction

 

 

Mer 7, Jeudi 8 oct 2020
Tchaikovski : Variations sur un thème Rococo (Mischa Maisky, violoncelle)
R. Strauss : Métamorphoses
Alexandre Bloch, direction

 

 

Jeudi 22, Dim 25 oct 2020
Ravel : Pavane pour une infante défunte
Hindemith : Trauermusik
Henri Casadesus : Concerto pour alto
Beethoven : Symphonie n°1
Jean-Claude Casadesus, direction

 

 

Jeudi 12 nov 2020
BEETHOVEN : Concerto pour piano n°2 (Kit Armstrong, piano)
Symphonie n°4
Jan Willem de Vriend, direction

 

 

Jeudi 14 janvier 2021
Escaich : Concerto pour orgue n°1 (Thierry Escaich, orgue)
Chausson : Symphonie
Alexandre Bloch, direction

 

 

Jeudi 28 janvier 2021
POULENC : La voix humaine (Véronique Gens, soprano)
Alexandre Bloch, direction

 

 

Jeudi 11, Ven 12 fév 2021
R. Strauss : Une vie de héros / Ein Heldenleben
Michael Schonwandt, direction

 

 

Mer 31 mars, Jeudi 1er avril 2021
WAGNER : Parsifal, extraits
R. Strauss : Quatre dernier lieder / Ver Letzte Lieder (Ingela Brimberg, soprano)
Chostakovitch : Symphonie n°6
Kazushi Ono, direction

 

 

Jeudi 18 fév 2021
Debussy : Prélude à l’après midi d’un faune
Berlioz : Symphonie fantastique
Prokofiev : Concertopour violon n°1 (Veronika Eberle, violon)
Alexandre Bloch, direction

 

 

Jeudi 15 avril 2021
MOZART : Thamos, roi d’Egypte
Concerto pour piano n°20 (Marie-Ange Nguci, piano)
David Reiland, direction

 

 

jeudi 24, Ven 25 juin 2021
Lindberg : Triumph to Exist
BEETHOVEN : Symphonie n°9
Alexandre Bloch, direction

 

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CONSULTER TOUS LES CONCERTS de la saison 2020 – 2021 de l’ON LILLE
ORCHESTRE NATIONAL DE LILLE:
https://www.onlille.com/saison_20-21/

 

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CD, événement, critique. CHAUSSON le littéraire / Musica Nigella : Chanson perpétuelle, La Tempête, Concert opus 21 (1 cd Klarthe records)

klarthe-records-CHAUSSON-la-tempete-cd-critique-classiquenews_takenori-nemoto-ensemble-musica-nigella-chausson-le-litteraire-2020CD, événement, critique. CHAUSSON le littéraire / Musica Nigella : Chanson perpétuelle, La Tempête, Concert opus 21 (1 cd Klarthe records)   –   On ne soulignera jamais assez le génie d’Ernest Chausson, étoile du romantisme français, fauché trop tôt (à 44 ans). Ses Å“uvres, certes peu nombreuses témoignent aux côtés des germaniques Liszt, Schumann, Brahms…, d’une aisance singulière à l’époque du wagnérisme général, d’un tempérament unique et inclassable que le programme du disque édité par Klarthe éclaire avec raison. Comme Schumann entre autres, Chausson est grand lecteur et amateur de poésie (d’où le titre « Chausson littéraire »). Il fréquente auteurs et écrivains, dont Maurice Bouchor qui fournit le livret des Poèmes de l’amour et de la mer, cycle emblématique désormais de la mélodie française.

Au menu de ce recueil opportun, 3 partitions, non des moindres : Chanson perpétuelle opus 37, ultime pièce de Chausson inspiré par le texte de Charles Cros ; les musiques de scène pour La Tempête (d’après Shakespeare) et le Concert pour violon, piano et quatuor à cordes opus 21, composé simultanément à son opéra Le Roi Arthus, et dont le prétexte réalise une nouvelle de Tourgueniev. En petit effectif, l’ensemble Musica Nigella perpétue un certain art du chambrisme à la française : dans les équilibres des plans sonores, le relief caractérisé des timbres instrumentaux auxquels se joint les deux voix (dans la Tempête, associées dans le duo de Junon et Cérès), se définit avec franchise, la forte sensibilité d’un Chausson, wagnérien proclamé qui cependant reste un tempérament hexagonal, résolument tourné vers la clarté et la transparence. La prise live ajoute à l’excellente caractérisation du geste collectif, ce dans chaque séquence.

D’emblée la riche texture des cordes imprime à Chanson Perpétuelle sa densité expressive, son ampleur orchestrale (Chauson n’a pas reçu pour rien l’enseignement de Massenet puis surtout la révélation de la spiritualité Franckiste) ; et dans le sillon wagnérien, la lyre des cordes diffuse son caractère de malédiction tenace, de poison évanescent, comme en écho à la douleur tragique de l’héroïne du poème de Cros. C’est la langueur perpétuelle et infinie d’une blessure à jamais ouverte, tel Amfortas alangui, figé dans son extase meurtrie. Le timbre sombre et cuivré de la soliste (Eléonore Pancrazi), à la fois sombre et relativement intelligible éclaire idéalement cette lumière des ténèbres qui rayonne d’un bout à l’autre.

La Tempête impose immédiatement son flux dramatique et une narrativité éloquente en lien avec le texte passionné et naturaliste de Shakespeare. Musica Nigella en offre la restitution de la version de chambre que Chausson avait écrite lui-même (pour voix et 6 instruments : flûte, violon, alto, violoncelle, harpe, célesta) aux côtés de la version orchestrale mieux connue. Celle ci a bénéficié de ce premier état dont la présente lecture accuse la prodigieuse imagination du texte poétique ; y souffle le vent sur les flots, une mer bouillonnante, celle qui isole l’île magique fantastique de la pièce shakespearienne, avec en génie insaisissable et spirituel, le facétieux Ariel, esclave (asservi à Prospero) et pourtant déité aérienne…

Les instrumentistes savent articuler et caractériser chaque séquence de La Tempête qui gagne ainsi un relief capiteux ; évidemment d’abord par la voix d’Ariel (aérienne, invocatrice, suave) qui ouvre et conclut le cycle des 6 épisodes. La restitution pour instruments dont le célesta apporte des couleurs infiniment poétiques éclairant le personnage d’un esprit contraint à servir le tyran de l’île dans sa folie ; doué d’une imagination sans limites, Ariel enchante et captive, comme le pur esprit Puck, complice des enchantements équivoques dans le Songe d’une nuit d’été du même Shakespeare.  D’une partition fidèle au drame, les instrumentistes expriment le caractère fantastique et profondément langoureux qui plonge dans le mystère ; le portrait d’Ariel atteint une épaisseur réjouissante. L’équilibre et la volupté du son tout en complicité ressuscite la verve shakespearienne de Chausson.

 

 

Dirigé par Takénori Némoto, Musica Nigella
dévoile avec passion et vivacité

Ernest Chausson, littéraire et ténébriste…

 

 

chaussonDense et dramatique, le Concert pour violon, piano et quatuor à cordes opus 21 éclaire le travail spécifique de Chausson sur la forme concertante, dans l’esprit des Baroques français. La plasticité formelle qui met en scène les divers instruments, en particulier le violon (la pièce créée en 1892 est dédiée au légendaire violoniste belge Eugène Ysaÿe) jouant sur les combinaisons possibles dévoile tout ce qui intéresse alors le compositeur wagnérien, très fidèle à l’esthétique cyclique de Franck : opposition, confrontation, dialogue virtuose et fulgurant des voix solistes ainsi entremêlées. Libre et fantaisiste, l’opus 21 en quatre parties offre une manière d’alternative spécifiquement française au plan quadripartite de forme sonate léguée par les classiques viennois.

Le premier mouvement « décidé » ouvre large et puissant le champs expressif entre gravité et tension mélancolique et aussi une âpreté mordante qu’enrichit une sonorité d’une suavité profonde comme envoûtée. Le chant du violon, comme porté par le piano d’une souplesse enivrée, libère la tension ; il chante sans entrave en un jeu dialogué à deux voix d’une ivresse éperdue.
La Sicilienne, brève voire fugace adoucit la tension du premier mouvement en une légèreté … trop fragile pour durer. Car le mouvement qui suit a occupé, semble-t-il toutes les ressources du compositeur : c’est le sommet évident de la partition. S’y déploie, tenace, en vagues lancinantes, amères, toute la langueur étirée à l’extrême d’un dénuement viscéral, énoncé en un glas lugubre ; ainsi ce 3è mouvement ou « Grave » distingue définitivement le mode introspectif quasiment halluciné, hagard que chérit tant Chausson soit plus de 10 mn d’un climat suspendu, noir presque inquiétant … il faut bien cette soie des ténèbres, au recul vertigineux qui semble traverser le miroir pour que jaillisse comme insouciante la progression palpitante du Finale « très animé » (mais ici parfaitement articulé) où rayonne enfin, dans la lumière, l’admirable double chant, violon / piano.

CLIC D'OR macaron 200L’intérêt du disque relève de la philosophie même du label Klarthe ; favoriser l’émergence des nouvelles générations d’interprètes français (Musica Nigella est né dans le Pas de Calais en 2010) tout en assurant l’exploration d’oeuvres encore méconnues et pourtant passionnantes, comme c’est le cas des 3 partitions ainsi dévoilées. On connaît mieux aujourd’hui, la symphonie en si bémol opus 20 (sommet orchestral de 1891, contemporaine ici du Concert opus 21), Soir de Fête opus 32, le Poème pour violon et orchestre opus 25… Musica Nigella a eu le nez fin de s’investir dans la restitution de chacune des œuvres ici abordées. L’apport est majeur. La réalisation fine et engagée, d’une permanente intelligence expressive et poétique. Autant de caractères d’un ensemble superbement mûr, réjouissant par sa complicité active.

 

 

 

 

 

 

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CD, événement, critique. CHAUSSON le littéraire / Musica Nigella : Chanson perpétuelle, La Tempête, Concert opus 27 – (1 cd Klarthe records)
Enregistrement réalisé en mai 2019 (Pas de Calais) – CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2020.

https://www.klarthe.com/index.php/fr/enregistrements/chausson-le-litteraire-detail

 

 

Musica Nigella
Takénori Némoto, direction musicale & reconstitution
Eléonore Pancrazi, mezzo-soprano (Chanson perpétuelle)
Louise Pingeot, soprano
Pablo Schatzman, violon
Jean-Michel Dayez, piano

Ernest Chausson
Chanson perpétuelle Op. 37 (1898)
La Tempête Op. 18* (1888)
Concert Op. 21 (1891)

 

 

 

Approfondir

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Musica Nigella sur CLASSIQUENEWS, précédent cd édité par Klarthe (mai 2019) :

 

RAVEL exotique musica nigella critique cd annonce concerts classiquenews klarthe records critique classiquenews KLA083couv_lowCD, critique. RAVEL l’exotique. MUSICA NIGELLA (1 cd Klarthe records) – Belles transcriptions (signées Takénori Némoto, leader de l’ensemble) défendues par le collectif Musica Nigella : d’abord le triptyque Shéhérazade (1903) affirment ses couleurs exotiques fantasmées, tissées, articulées, soutenant, enveloppant le chant suave et corsé de la soprano Marie Lenormand (que l’on a quittée en mai dans la nouvelle production des 7 péchés de Weill à l’Opéra de Tours). En dépit d’une prise mate, chaque timbre se dessine et se distingue dans un espace contenu, intime, révélant la splendeur de l’orchestration ravélienne ; désir d’Asie ; onirisme de La Flûte enchantée ; sensualité frustrée de L’indifférent. La soliste convainc par son intelligibilité et la souplesse onctueuse de son instrument. LIRE la critique complète Ravel l’exotique / Musica Nigella

Dmitry Masleev joue Tchaikovsky

FRANCE MUSIQUE, le 27 fév 2020, direct : Dmitry Masleev joue Tchaikovski. Jeune prodige lauréat du Concours Tchaikovsky 2015, le pianiste sibérien Dmitry Masleev vient d’être choisi pour joué le Concert pour piano et orchestre n°1 de Tchaikovski, ce 27 février, Auditorium de Radio France sous la direction d’Emmanuel Krivine.

Dmitry MASLEEVLe pianiste Behzod Abduraimov, souffrant, est contraint d’annuler son interprétation du concerto pour piano et orchestre n°1 de Tchaïkovski ce jeudi 27 février avec l’Orchestre National de France dirigé par Emmanuel Krivine. Il est remplacé par le pianiste Dmitry Masleev, vainqueur du concours Tchaïkovski 2015. Né à Ulan-Ude (Sibérie), Dmitry Masleev a fait ses études au Conservatoire de Moscou en compagnie de Mikhail Petukhov. Le pianiste a édité un excellent cd Scarlatti pour l’articulation, Shostakovitch (pour les couleurs et les caractères émotionnels) chez Melodya, lire ici la critique du cd Scarlatti, Shostakovitch sur classiquenews :
https://www.classiquenews.com/cd-critique-scarlatti-chostakovitch-dmitry-masleev-piano-1-cd-melodyia/

Programme du direct du 27 fév 2020, 20h

Ernest Chausson
Symphonie opus 20

Piotr Ilyitch Tchaïkovski
Concerto pour piano et orchestre n°1

Dmitry Masleev, piano
Orchestre National de France
Emmanuel Krivine, direction

FRANCE MUSIQUE, le 27 fév 2020, direct : Dmitry Masleev joue Tchaikovski. A partir de 19h45

Dmitry MASLEEVCD, critique. SCARLATTI, CHOSTAKOVITCH… Dmitry MASLEEV, piano. (1 cd Melodyia). Il ne faut pas rester sur l’impression très sage en couverture et qui assimile le candidat pianiste à un avatar d’Harry Poter… Les premiers disques sont en général des déclarations d’intention, l’expression d’un jardin personnel qui affirme un geste, un monde sonore, une approche préliminaire appelée à connaître des développements postérieurs. S’agissant du pianiste russe Dmitry MASLEEV (né en mai 1988), la promesse s’avère consistante et le plaisir qui en découle, majeur. C’est une révélationque confirme son Premier Prix au XVè Concours Tchaikovsky à Moscou (2015, l’année où avait été remarqué aussi Debargue qui obtenait alors un 4è Prix) : car le toucher et la conception dynamique du pianiste trentenaire affirment un grand talent qui s’appuie d’abord sur une technicité exigeante, sensible, jamais démonstrative. Le jeu est naturel, allant, sans posture d’aucune sorte. Les Scarlatti coule comme une onde jaillissante avec un sens de l’articulation manifeste…

ENTRETIEN avec Li-Kung Kuo (violon) et Cédric Lorel (piano). Le Temps retrouvé…

le-temps-retrouve-disque-img- li kung kuo cedric lorel violon et piano cd review annonce concert cd critique classiquenews CLIC de classiquenews 450ENTRETIEN avec Li-Kung Kuo (violon) et Cédric Lorel (piano). Le Temps retrouvé… Annoncé le 15 nov prochain, le CD «  Le temps retrouvé » suit les traces du violoniste légendaire Eugène Ysaÿe : un guide qui inspire ainsi le violoniste Li-Kung Kuo et le pianiste Cédric Lorel. Le duo explique l’enjeu artistique de leur premier album édité par Cadence Brillante : ressusciter l’engagement d’une personnalité musicale de premier plan, en lien étroit avec la composition et les auteurs de son temps… Si Ravel trouvait leurs natures difficiles à faire dialoguer, les deux instrumentistes déploient a contrario une étonnante complicité qui fait chanter les partitions choisies : Ysaÿe, Saint-Saëns, Chausson, Debussy… A deux voix, Li-Kung Kuo et Cédric Lorel ressuscitent un âge d’or de la musique de chambre française. Entretien avec les deux musiciens à propos de leur premier album dont le programme est aussi le sujet d’un concert exceptionnel le 2 décembre 2019, à Paris, Salle CORTOT.

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 Cédric LOREL, Li-Kung KUO : Le temps retrouvé

 

 

 

CNC / CLASSIQUENEWS : Que nous transmet aujourd’hui la figure du violoniste Eugène Ysaÿe ?

Li-Kung Kuo et Cédric Lorel : « Artiste aux dons multiples, immense interprète, professeur recherché et compositeur de talent, Ysaye a suscité nombre de créations et de collaborations artistiques à travers toute l’Europe. Il incarne un idéal de musicien qui dépasse les frontières, tout en étant profondément attaché à son pays et sa culture d’origine. Ses six sonates pour violon constituent un monument du répertoire pour l’instrument, aux côtés de celles de Bach et des caprices de Paganini. Par ailleurs son style est très représentatif de l’école franco-belge du début du siècle, avec une personnalité très marquée qui donne un caractère unique à ses interprétations. Ysaye demeure aujourd’hui encore une référence et un modèle pour tous les violonistes ».

 

 

 

CNC / CLASSIQUENEWS : Quels aspects du musiciens souhaitez-vous éclairer à travers votre programme ?

Li-Kung Kuo et Cédric Lorel : « L’inspirateur, par son art unique de violoniste, de certains des plus grands compositeurs de son temps (étant le dédicataire et le créateur de nombre de chefs-d’Å“uvre, à commencer bien sûr par le Poème d’Ernest Chausson). Egalement, son talent -plus méconnu- de compositeur à travers son « caprice en forme de valse » d’après Saint-Saëns, un aspect de son art que nous aimerions davantage mettre en avant, peut-être pour un futur projet d’enregistrement… ; Ses poèmes symphoniques, rarement joués et enregistrés, méritent également d’être redécouverts ».

 

 

 

CNC / CLASSIQUENEWS : Pouvez-vous nous présenter en quelques mots les défis et le caractère général des oeuvres de Chausson, Saint-Saëns, Debussy ?

Li-Kung Kuo et Cédric Lorel : « Dans la sonate de Debussy, il faut trouver les couleurs et l’atmosphère si typiques de ce compositeur, en gardant une certaine liberté dans le discours musical -un peu comme si l’on voulait donner l’impression d’une improvisation- mais tout en respectant à la lettre les très nombreuses indications. Ceci est rendu encore plus délicat par la brièveté et la densité de l’œuvre, et par le caractère volontiers fantasque du discours musical.

Pour le poème de Chausson, outre sa durée (environ un quart d’heure, d’un seul tenant) et la richesse de l’écriture violonistique, un des défis est de maintenir la tension (et l’attention !) de la première à la dernière note. Inspirée par la nouvelle de Tourgueniev « Le chant de l’amour triomphant », la pièce est en effet d’un post-romantisme exacerbé et parfois même dramatique. Une autre difficulté est bien sûr de faire sonner au mieux la partie de piano transcrite à partir de l’orchestre, en conservant le souffle et l’esprit de cette Å“uvre si originale.

Le discours musical de la sonate de Saint-Saëns est plus simple et direct, et l’effet sur l’auditeur immédiat – la difficulté réside surtout dans la précision de la mise en place et l’écriture très virtuose pour les deux instruments, notamment dans l’étourdissant final. Qu’est ce qui en fait le lien ?

Le caractère cyclique de l’écriture musicale : chez Debussy et Saint-Saëns, certains thèmes et éléments mélodiques se retrouvent d’un mouvement à l’autre, parfois de manière évidente, parfois beaucoup plus subtilement.
Chez Chausson, le thème principal apparaît à plusieurs reprises tout au long de l’oeuvre, instrumenté ou harmonisé différemment. Dans les trois cas, ceci assure une grande unité à des Å“uvres à la forme apparemment très libre. Mais le lien peut-être le plus évident est bien sûr l’admiration et l’amitié qu’ont nourri chacun de ces compositeurs pour Ysaÿe ».

 

 

 

CNC / CLASSIQUENEWS : Vous évoquez Proust et la Sonate de Vinteuil… quel serait les caractéristiques principales de la musique française à l’époque de Proust, dont Vinteuil serait l’emblème ?

Li-Kung Kuo et Cédric Lorel : « Par rapport à la période romantique qui tire à sa fin et dont Saint-Saëns pourrait représenter un des derniers témoignages (tout en évitant certains de ses excès…), le tournant du siècle voit la musique se libérer et s’ouvrir à de nouvelles formes et influences : dégagée de l’emprise de Wagner – bien que son influence soit encore assez sensible chez Chausson, par exemple- un parfum fortement exotique (d’Asie notamment – effet des expositions universelles, mais aussi d’Espagne) imprègne nombre de compositions. Dans le même temps, l’exploration de nouvelles harmonies, un certain équilibre et des dimensions plus « raisonnables » se conjuguent heureusement avec un renouveau de la musique de chambre, dû d’abord principalement à César Franck , et qui poursuivra son accomplissement chez Chausson, Fauré, et nombre de compositeurs de première importance, inspirés et stimulés par des virtuoses exceptionnels ».

 

 

 

CNC / CLASSIQUENEWS : Comment s’est formé votre duo ? Quels sont les caractères qui permettent votre complicité ?

Li-Kung Kuo et Cédric Lorel : « Nous nous sommes rencontrés à l’occasion des concerts d’inauguration du Centre de Musique de Chambre de Paris auxquels Li-Kung participait, en 2015. Ayant en commun une prédilection pour certaines oeuvres et le désir d’explorer un répertoire moins courant et fréquenté, nous avons rapidement eu envie de déchiffrer et jouer ensemble.

Li-Kung a également étudié le piano et a une grande connaissance de l’instrument, son répertoire et ses interprètes, ce qui permet à mon avis une écoute encore plus attentive et une parfaite compréhension mutuelle lors de notre travail. Pour ma part, j’avais déjà pas mal d’expérience de musique de chambre, notamment dans la formation violon/piano, mais je n’avais que rarement eu l’occasion de travailler si en détails, en profondeur et sur la durée, ces Å“uvres magnifiques et passionnantes, mais ô combien exigeantes également.

Ravel pensait que le violon et le piano étaient par nature des instruments tellement différents qu’il était extrêmement difficile de les assortir… nous essayons pour notre part d’aller toujours plus loin pour trouver l’harmonie nécessaire et rendre cohérent un tel ensemble. »

 

 

 Propos recueillis en novembre 2019

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LIRE notre présentation du cd Le Temps retrouvé par Li-Kung Kuo (violon) - Cédric Lorel (piano) / (1 cd Cadence Brillante) – Parution le 15 nov 2019. Concert exceptionnel de lancement, Paris, salle Cortot, lundi 2 décembre 2019, 20h. Réservez votre place ici :

https://www.billetweb.fr/kuo-lorel-le-temps-retrouve

 

 

 

 

NOUVEAU CD

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Parution du cd « Le temps retrouvé »
le 15 novembre 2019

+ d’infos sur le site Cadence Brillante :
http://cadencebrillante.com

 

Cédric LOREL, Li-Kung KUO : Le temps retrouvé

 

 

CONCERT A PARIS

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Concert de lancement
PARIS, Salle Cortot,
Lundi 2 décembre 2019, 20h30

Li-Kung Kuo (violon)
Cédric Lorel (piano)

RÉSERVEZ

https://www.billetweb.fr/kuo-lorel-le-temps-retrouve

 

 

Programme :

Reynaldo Hahn (1874-1947)
Nocturne pour violon et piano

Claude Debussy (1862-1918)
Sonate pour violon et piano

Ernest Chausson (1855-1899)
Poème op. 25

Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Sonate pour violon et piano n°1 op. 75

Eugène Ysaÿe (1858-1931)
Caprice d’après l’Etude en forme de valse op. 52 n°6 de Saint-Saëns

 

 le-temps-retrouve-disque-img- li kung kuo cedric lorel violon et piano cd review annonce concert cd critique classiquenews CLIC de classiquenews 450

  

 

 

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TEASER VIDEO

 

 

PARIS, Cortot, 2 déc 2019. Le Temps retrouvé. Li-Kung Kuo (violon) – Cédric Lorel (piano) / 1 cd Cadence Brillante.

le-temps-retrouve-disque-img- li kung kuo cedric lorel violon et piano cd review annonce concert cd critique classiquenews CLIC de classiquenews 450PARIS, Cortot, 2 déc 2019. Le Temps retrouvé. Li-Kung Kuo (violon) – Cédric Lorel (piano) / 1 cd Cadence Brillante. Sur les traces du violoniste légendaire Eugène Ysaÿe (1858 – 1931), le violoniste Li-Kung Kuo et le pianiste Cédric Lorel explorent en filiations et correspondances ténues, les champs d’une mémoire retrouvée, celle proustienne, qui associent plusieurs compositeurs romantiques français : Hahn, Chausson, Saint-Saëns jusqu’à Claude Debussy. Le programme ressuscite l’esprit fin de siècle et Belle-Epoque, autour de la figure d’Eugène Ysaÿe, personnalité wallone majeure entre les deux siècles, « créateur du Poème et du Concert de Chausson, du Quatuor de Debussy (parmi bien d’autres ) et qui, en compagnie du pianiste Raoul Pugno, interpréta souvent la première Sonate de Saint-Saëns -celle qui, semble-t-il, servit probablement de modèle pour la fameuse “Sonate de Vinteuil ». Ysaÿe créa aussi la fameuse Sonate de Franck et le premier Quintette de Fauré. Le Poème de Chausson est son Å“uvre emblématique qu’il joue dans chacun de ses concerts.

Le nouvel album édité par Cadence Brillante, à paraître le 15 novembre 2019, souligne les diverses facettes d’un âge d’or de la musique de chambre française dont les joyaux se dégustent alors dans l’intimisme des salons parisiens. En imaginant la figure d’un compositeur de l’époque, Vinteuil (qui pourrait être une synthèse de Chausson, Saint-Saëns, Fauré, Franck…), Marcel Proust ressuscite l’esprit et la sonorité d’une période d’importantes évolutions musicales, de Chausson à Debussy. Les deux interprètes restituent l’atmosphère d’une époque remarquable, quand Paris était la capitale musicale du monde.
CLIC_macaron_2014Le violoniste taiwanais Li-Kung Kuo, membre du Centre de musique de chambre de Paris affronte le défi du Caprice d’Ysaÿe, lui-même inspiré par Saint-Saëns ; son complice Cédric Lorel ajoute couleurs et teintes d’un clavier historique, soit un piano Bechstein de 1898 ; Bechstein est un choix judicieux car c’était la marque préférée de Debussy. En jouant Hahn, Chausson, Saint-Saëns (la rare Sonate n°1), Debussy, les deux instrumentistes rendent hommage à un violoniste exceptionnel qui a inspiré nombre de compositeurs majeurs et singuliers. CD & CONCERT événements, élus «  CLIC de CLASSIQUENEWS ».

 

 

 

 

NOUVEAU CD

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Parution du cd « Le temps retrouvé »
le 15 novembre 2019

+ d’infos sur le site Cadence Brillante :
http://cadencebrillante.com

 

Cédric LOREL, Li-Kung KUO : Le temps retrouvé

 

 

CONCERT A PARIS

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Concert de lancement
PARIS, Salle Cortot,
Lundi 2 décembre 2019, 20h30

Li-Kung Kuo (violon)
Cédric Lorel (piano)

RÉSERVEZ

https://www.billetweb.fr/kuo-lorel-le-temps-retrouve

 

 

Programme :

Reynaldo Hahn (1874-1947)
Nocturne pour violon et piano

Claude Debussy (1862-1918)
Sonate pour violon et piano

Ernest Chausson (1855-1899)
Poème op. 25

Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Sonate pour violon et piano n°1 op. 75

Eugène Ysaÿe (1858-1931)
Caprice d’après l’Etude en forme de valse op. 52 n°6 de Saint-Saëns

 

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GRAND ENTRETIEN

Cédric LOREL, Li-Kung KUO : Le temps retrouvéLIRE notre entretien avec le violoniste Li-Kung Kuo et le pianiste Cédric Lorel. Le duo explique l’enjeu artistique de leur premier album édité par Cadence Brillante : ressusciter l’engagement d’une personnalité musicale de premier plan, en lien étroit avec la composition et les auteurs de son temps… Eugène Ysaÿe et les compositeurs de son temps : la Belle Epoque (Hahn, Chausson, Saint-Saëns, Debussy…)

Propos recueillis en novembre 2019

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TEASER VIDEO

 

 

 

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Concert de l’Orchestre des Champs Elysées à Poitiers

TAP-visuel-660-2016-poitiers-tap1Poitiers, TAP. Jeudi 4 février 2016. Orchestre des Champs Elysées : Debussy, Chausson, Magnard.... Somptueuse soirée symphonique au TAP de Poitiers ce soir avec l’éclat poétique des instruments d’époque dans un programme de musique romantique française (et post romantique avec le sommet liquide et impressonniste, La mer de Debussy). Sous la conduite du chef Louis Langrée (applaudi la saison dernière pour Pelléas et Mélisande, les instrumentistes si passionnément engagés dans le jeu historiquement informé et toujours soucieux du timbre et du format sonore originel de chaque instrument, s’engagent pour une trilogie de compositeurs dont l’écriture devrait ce soir gagner en mordant expressif, raffinement poétique, justesse caractérisée, subtil équilibre entre lecture analytique et formidable texture sensuelle. Si le propre des auteurs français est souvent présenté comme ce scrupule particulier pour la transparence, la couleur, la clarté, l’apport de l’Orchestre des Champs Elysées devrait le démontrer dans ce programme qui associe : Debussy, Chausson et Magnard, particulièrement convaincant. C’est de Chausson à Debussy, une leçon d’équilibre entre détails et souffle dramatique qui attend les spectateurs auditeurs du TAP de Poitiers lors de cette grande soirée de vertiges symphoniques.

chaussonSi la pièce maîtresse sur le plan symphonique et orchestral demeure évidemment La Mer de Debussy – sublime triptyque climatique pour grand orchestre, le concert offre un aperçu significatif du wagnérisme personnel d’Ernest Chausson, l’un des symphoniste et poète musicien les plus doués de sa génération (il est né en 1855, et s’éteint fauché trop tôt avant la fin du siècle en 1899). Composé entre 1882 et 1890, le cycle est créé lors de ses 38 ans en 1893 ; Le Poème de l’amour et de la mer opus 19 d’après le texte de son exact contemporain et ami, le poète Maurice Bouchor (1855-1929), le Poème comprend deux volets :
I. La Fleur des eaux : « L’air est plein d’une odeur exquise de lilas » – « Et mon cœur s’est levé par ce matin d’été » – « Quel son lamentable et sauvage »
Interlude
II. La Mort de l’amour : « Bientôt l’île bleue et joyeuse » – « Le vent roulait les feuilles mortes » –  « Le temps des lilas »

Comprenant l’intervention d’une soliste (aujourd’hui soprano ou mezzo, bien que la version de création ait été réaisée par un ténor Désiré Desmet), la partition est à la fois cantate, monologue, ample mélodie pour voix et orchestre où les couleurs et le formidable chant de l’orchestre rivalise d’éclats et de vie intérieure avec la voix humaine. Le cycle des 6 poèmes était probablement quasi achevé quand Chausson commence son opéra Le Roi Arthus, puis après la composition de ce dernier, il révise en 1893 Le Poème pour lui apporter une parure définitive et le faire créer dans une version piano / chant par le ténor Désiré Desmet (Bruxelles, le 21 février 1893). La version orchestrale est assurée ensuite en avril suivant par la cantatrice Eléonore Blanc.
Musique empoisonnée, langoureuse et très fortement mélancolique, le chant de Chausson qu’il s’agisse à la voix ou dans l’orchestre exprime une extase mortifère et nostalgique d’une incurable torpeur qui semble s’insinuer jusqu’à l’intimité la plus secrête, développant une écriture scintillante et suspendue…. wagnérienne. Chausson a évidemment écouté Tristan et Yseult ; il ne cesse de déclarer son allégeance à l’esprit du maître de Bayreuth, en particulier dans un motif mélodique, obsessionnel, qui traverse toutes les mélodies et surtout se développe explicitement dans l’interlude qui relie les deux volets du cycle : La Fleur des eaux et La Mort de l’amour.
Musique “proustienne”, d’un éclectisme rentré, (typique en cela de la IIIè République), d’un parfum wagnérien évident mais si original et personnel (en cela digne des recommandations de son professeur César Franck, lui aussi partisan d’un wagnérisme original et renouvelé), douée d’une forte vie intérieure, l’écriture de Chausson est réitération, connotations, intentions masquées, plénitude des souvenirs et des songes enivrés et embrumés, l’expression d’une langueur presque dépressive qui ne cesse de dire son impuissante solitude. C’est en plus de Tristan, le modèle de Parsifal de Wagner (écouté à sa création en 1882 à Bayreuth) qui est réinterprété, “recyclé” sous le filtre de la puissante sensibilité d’un compositeur esthète et poète. Encore scintillante et claire, La Mort de l’amour, cède la place à l’ombre inquiète et l’anéantissement graduel (La Fleur des eaux); les images automnales, crépusculaires, souvent livides et léthales décrivent un monde à l’agonie, perdu, sans rémission (“le vent roulait les feuilles mortes”… est une marche grave et prenante). Et pour finir, tel une prophétie terrifiante, la dernière mélodie, Le temps des Lilas (écrite dès 1886, et souvent chanté comme une mélodie séparée, autonome) confirme qu’après cette agonie il n’y aura plus de printemps. Le Poème de l’amour et de la mer est la prédiction d’une apocalypse inévitable. Il appartient aux interprètes d’en restituer et la langueur hynoptique et la magie des couleurs orchestrales d’un scintillement dont le raffinement annonce La Mer de Debussy… Le chef quant à lui doit veiller aux équilibres, au format orchestre / voix, pour servir l’une des plus belles musique de chambre au souffle symphonique. L’ampleur et la profondeur mais aussi l’exquise lisibilité mortifère du texte, de ses images d’une sourde et maladive mélancolie.
Même s’il fut fils de famille, et d’un train de vie supérieur à celui de ses confrère compositeur, Chausson, mort stupidement après une mauvaise chute de vélo, savit entretenir autour de lui, l’ambiance d’un foyer artistique et intellectuel ouvert aux tendances les plus avancées de son temps : son salon de la rue de Courcelles à Paris reçoit ses amis Fauré, Duparc et Debussy, mais aussi Mallarmé, Puvis de Chavannes et Monet… A l’écoute de son Poème opus 19, l’auditeur convaincu tirera bénéfice en poursuivant son exploration de l’univers de Chausson avec Le Roi Arthus (offrande personnelle sur l’autel wagnérien), Viviane, Symphonie en si bémol et bien sur, toute sa musique de chambre…

boutonreservationL’Orchestre des Champs-Elysées au TAP, Poitiers
Jeudi 4 février 2016, 19h30

Albéric Magnard : Hymne à la justice op.14
Ernest Chausson : Poème de l’amour et de la mer op.19
Claude Debussy : La Mer, trois esquisses symphoniques pour orchestre
Durée du concert : 1h20mn (entracte compris)
Louis Langrée, direction
Gaëlle Arquez, mezzo-soprano

Louis Langrée, premier chef invité de l’Orchestre des Champs-Élysées, défend la musique française partout dans le monde. La saison passée à l’Opéra Comique, ils ont créé ensemble l’un des plus beaux Pelléas et Mélisande qu’on ait entendu depuis longtemps, encensé par le public et la critique. C’est justement Debussy qui constitue la pièce maîtresse de ce concert avec le poème symphonique La Mer, fresque impressionniste où le chatoiement des couleurs devrait être magnifié par les instruments d’époque. Le Poème de l’amour et de la mer fut composé seulement 20 ans avant mais illustre une esthétique fort différente, empreinte de l’influence wagnérienne qui dominait encore en France en cette fin du 19e siècle.

L’Orchestre des Champs-Elysées joue Debussy et Chausson à Poitiers

TAP-visuel-660-2016-poitiers-tap1Poitiers, TAP. Jeudi 4 février 2016. Orchestre des Champs Elysées : Debussy, Chausson, Magnard.... Somptueuse soirée symphonique au TAP de Poitiers ce soir avec l’éclat poétique des instruments d’époque dans un programme de musique romantique française (et post romantique avec le sommet liquide et impressonniste, La mer de Debussy). Sous la conduite du chef Louis Langrée (applaudi la saison dernière pour Pelléas et Mélisande, les instrumentistes si passionnément engagés dans le jeu historiquement informé et toujours soucieux du timbre et du format sonore originel de chaque instrument, s’engagent pour une trilogie de compositeurs dont l’écriture devrait ce soir gagner en mordant expressif, raffinement poétique, justesse caractérisée, subtil équilibre entre lecture analytique et formidable texture sensuelle. Si le propre des auteurs français est souvent présenté comme ce scrupule particulier pour la transparence, la couleur, la clarté, l’apport de l’Orchestre des Champs Elysées devrait le démontrer dans ce programme qui associe : Debussy, Chausson et Magnard, particulièrement convaincant. C’est de Chausson à Debussy, une leçon d’équilibre entre détails et souffle dramatique qui attend les spectateurs auditeurs du TAP de Poitiers lors de cette grande soirée de vertiges symphoniques.

chaussonSi la pièce maîtresse sur le plan symphonique et orchestral demeure évidemment La Mer de Debussy – sublime triptyque climatique pour grand orchestre, le concert offre un aperçu significatif du wagnérisme personnel d’Ernest Chausson, l’un des symphoniste et poète musicien les plus doués de sa génération (il est né en 1855, et s’éteint fauché trop tôt avant la fin du siècle en 1899). Composé entre 1882 et 1890, le cycle est créé lors de ses 38 ans en 1893 ; Le Poème de l’amour et de la mer opus 19 d’après le texte de son exact contemporain et ami, le poète Maurice Bouchor (1855-1929), le Poème comprend deux volets :
I. La Fleur des eaux : « L’air est plein d’une odeur exquise de lilas » – « Et mon cœur s’est levé par ce matin d’été » – « Quel son lamentable et sauvage »
Interlude
II. La Mort de l’amour : « Bientôt l’île bleue et joyeuse » – « Le vent roulait les feuilles mortes » –  « Le temps des lilas »

Comprenant l’intervention d’une soliste (aujourd’hui soprano ou mezzo, bien que la version de création ait été réaisée par un ténor Désiré Desmet), la partition est à la fois cantate, monologue, ample mélodie pour voix et orchestre où les couleurs et le formidable chant de l’orchestre rivalise d’éclats et de vie intérieure avec la voix humaine. Le cycle des 6 poèmes était probablement quasi achevé quand Chausson commence son opéra Le Roi Arthus, puis après la composition de ce dernier, il révise en 1893 Le Poème pour lui apporter une parure définitive et le faire créer dans une version piano / chant par le ténor Désiré Desmet (Bruxelles, le 21 février 1893). La version orchestrale est assurée ensuite en avril suivant par la cantatrice Eléonore Blanc.
Musique empoisonnée, langoureuse et très fortement mélancolique, le chant de Chausson qu’il s’agisse à la voix ou dans l’orchestre exprime une extase mortifère et nostalgique d’une incurable torpeur qui semble s’insinuer jusqu’à l’intimité la plus secrête, développant une écriture scintillante et suspendue…. wagnérienne. Chausson a évidemment écouté Tristan et Yseult ; il ne cesse de déclarer son allégeance à l’esprit du maître de Bayreuth, en particulier dans un motif mélodique, obsessionnel, qui traverse toutes les mélodies et surtout se développe explicitement dans l’interlude qui relie les deux volets du cycle : La Fleur des eaux et La Mort de l’amour.
Musique “proustienne”, d’un éclectisme rentré, (typique en cela de la IIIè République), d’un parfum wagnérien évident mais si original et personnel (en cela digne des recommandations de son professeur César Franck, lui aussi partisan d’un wagnérisme original et renouvelé), douée d’une forte vie intérieure, l’écriture de Chausson est réitération, connotations, intentions masquées, plénitude des souvenirs et des songes enivrés et embrumés, l’expression d’une langueur presque dépressive qui ne cesse de dire son impuissante solitude. C’est en plus de Tristan, le modèle de Parsifal de Wagner (écouté à sa création en 1882 à Bayreuth) qui est réinterprété, “recyclé” sous le filtre de la puissante sensibilité d’un compositeur esthète et poète. Encore scintillante et claire, La Mort de l’amour, cède la place à l’ombre inquiète et l’anéantissement graduel (La Fleur des eaux); les images automnales, crépusculaires, souvent livides et léthales décrivent un monde à l’agonie, perdu, sans rémission (“le vent roulait les feuilles mortes”… est une marche grave et prenante). Et pour finir, tel une prophétie terrifiante, la dernière mélodie, Le temps des Lilas (écrite dès 1886, et souvent chanté comme une mélodie séparée, autonome) confirme qu’après cette agonie il n’y aura plus de printemps. Le Poème de l’amour et de la mer est la prédiction d’une apocalypse inévitable. Il appartient aux interprètes d’en restituer et la langueur hynoptique et la magie des couleurs orchestrales d’un scintillement dont le raffinement annonce La Mer de Debussy… Le chef quant à lui doit veiller aux équilibres, au format orchestre / voix, pour servir l’une des plus belles musique de chambre au souffle symphonique. L’ampleur et la profondeur mais aussi l’exquise lisibilité mortifère du texte, de ses images d’une sourde et maladive mélancolie.
Même s’il fut fils de famille, et d’un train de vie supérieur à celui de ses confrère compositeur, Chausson, mort stupidement après une mauvaise chute de vélo, savit entretenir autour de lui, l’ambiance d’un foyer artistique et intellectuel ouvert aux tendances les plus avancées de son temps : son salon de la rue de Courcelles à Paris reçoit ses amis Fauré, Duparc et Debussy, mais aussi Mallarmé, Puvis de Chavannes et Monet… A l’écoute de son Poème opus 19, l’auditeur convaincu tirera bénéfice en poursuivant son exploration de l’univers de Chausson avec Le Roi Arthus (offrande personnelle sur l’autel wagnérien), Viviane, Symphonie en si bémol et bien sur, toute sa musique de chambre…

boutonreservationL’Orchestre des Champs-Elysées au TAP, Poitiers
Jeudi 4 février 2016, 19h30

Albéric Magnard : Hymne à la justice op.14
Ernest Chausson : Poème de l’amour et de la mer op.19
Claude Debussy : La Mer, trois esquisses symphoniques pour orchestre
Durée du concert : 1h20mn (entracte compris)
Louis Langrée, direction
Gaëlle Arquez, mezzo-soprano

Louis Langrée, premier chef invité de l’Orchestre des Champs-Élysées, défend la musique française partout dans le monde. La saison passée à l’Opéra Comique, ils ont créé ensemble l’un des plus beaux Pelléas et Mélisande qu’on ait entendu depuis longtemps, encensé par le public et la critique. C’est justement Debussy qui constitue la pièce maîtresse de ce concert avec le poème symphonique La Mer, fresque impressionniste où le chatoiement des couleurs devrait être magnifié par les instruments d’époque. Le Poème de l’amour et de la mer fut composé seulement 20 ans avant mais illustre une esthétique fort différente, empreinte de l’influence wagnérienne qui dominait encore en France en cette fin du 19e siècle.

CD, compte rendu critique. Véronique Gens : Néère, mélodies de Hahn, Duparc, Chausson (1 cd Alpha, 2015)

gens veronique melodies duparc hahn chausson alpha cd critique compte rendu review account of CLASSIQUENNEWS CLIC de classiquenews octobre 2015CD, compte rendu critique. Véronique Gens : Néère, mélodies de Hahn, Duparc, Chausson (1 cd Alpha, 2015). Maturité rayonnante de la diseuse. Le timbre s’est voilé, les aigus sont moins brillants, la voix s’est installée dans un medium de fait plus large… autant de signes d’un chant mature qui cependant peut s’appuyer sur un style toujours mesuré et nuancé, cherchant la couleur exacte du verbe. Prophétesse d’une émission confidentielle, au service de superbes poèmes signés Leconte de Lisle, Goethe, Gautier, Louise Ackermann, Viau, Verlaine, Maurice Bouchor, Baudelaire et Banville…, Véronique Gens captive indiscutablement en diseuse endeuillée, sombre et grave, d’une noblesse murmurée et digne. L’expressivité n’est pas son tempérament mais une inclination maîtrisée pour l’allusion, la suggestion parfois glaçante (propre aux climats lugubres et funèbres d’un Leconte de Lisle par exemple quand il évoque le marbre froid de la tombe). La nostalgie générale de Néère de Hahn pose d’emblée l’enjeu de ce programme façonné comme une subtile grisaille : les milles nuances du sentiment intérieur. De notre point de vue, le piano est trop mis en avant dans la prise, déséquilibre qui nuit considérablement à la juste perception de la voix versus l’instrument (déséquilibre criard même dans Trois jours de vendange d’après Daudet). De Hahn, La Gens sait exprimer l’ineffable, ce qui est derrière les mots.

1000 nuances de l’allusion vocale : la mélodie romantique française à son sommet

Chez Duparc, Hahn, Chausson, Véronique Gens subjugue

En accord avec l’instrument seul, la soprano peut tisser une étoffe chambriste somptueuse, feutrée, jamais outrée précisément chez Duparc : douceur grave de Chanson triste (mais que le piano trop mis en avant là encore perce et déchire un équilibre et une balance subtile dont était fervente la voix justement calibrée : carton jaune pour l’ingénieur du son indélicat ; une faute de goût impardonnable car aux côtés du clavier, la soprano mesure, distille cisèle), un rêve vocal qui rétablit le songe du Duparc. C’est un enchantement vécu il y a longtemps dont la sensation persistante fait le climat diffus, vaporeux, brumeux (wagnérien?) de Romance de Mignon (et son apothéose du là-bas d’après Goethe) où la tenue et le soutien comme la couleur des sons filés rappellent une autre diseuse en état de grâce (Régine Crespin) : quel art du tissage de la note et du verbe habité, halluciné, poétique. Enivrée, intacte malgré la perte, l’évocation elle aussi endeuillée nostalgique de Phidylé (1882) déploie sa robe caressante et voluptueuse grâce au medium crémeux, rond, replié et enfoui de la voix melliflu qui appelle à la paix de l’âme : voici assurément le sommet de la mélodie romantique française, écho original du Tristan wagnérien, une résonance extatique d’une subtilité enivrante.

Leconte de Lisle, magicien fantastique et déjà symboliste, fait le lien entre le texte de ce Duparc et la première mélodie des 7 de Chausson qui suivent : le chant est embrasé et halluciné, bien que perdant parfois la parfaite lisibilité des voyelles – problème régulier pour les voix hautes, mais l’intelligence dans l’articulation émotionnelle des vers oscille entre précision, allusion, incantation. La tension des évocations souvent tristes et même dépressives trouve dans la Sérénade italienne d’après Paul Bourget, une liquidité insouciante soudainement rafraîchissante.

CLIC_macaron_2014Des Hahn suivant, plus linguistiques, Véronique Gens semble éclaircir la voix au service de voyelles plus lumineuses structurant les phrases (superbe Rossignol des lilas, hommage au volatile), ciselant là encore le versant métaphorique des vers. Enoncé comme une romance mozartienne (malgré un piano trop présent), à Chloris a la délicatesse d’une porcelaine française usée à Versailles : l’émission endeuillée enveloppe la mélodie d’une langueur suspendue qui fait aussi référence au Bach le plus tendre. C’est évidemment une lecture très incarnée et personnelle de la mélodie de Hahn, autre sommet de la mélodie postromantique française et même cliché ou pastiche étonnamment réussi (1916). Le temps des Lilas de Chausson hypnotise par la justesse des couleurs, la précision allusive de chaque mot vocal : prière extatique et dépressive, voici un autre sommet musical (1886) du postwagnérisme français. Le chant exprime sans discontinuer la profonde et maudite langueur des âmes irradiées. Le tact et le style de La Gens affirme une remarquable acuité dans l’allusion. Même finesse de style et richesse de l’intonation dans l’exceptionnelle Au pays où se fait la guerre de Duparc (1870), prière retenue, pudique d’une femme de soldat : Duparc annonce le désespoir intime de Chausson. Le feu ultime que la soprano sait offrir au mot “retour” finit de saisir. Associé à l’Invitation au voyage de la même période (d’après Baudelaire), ce premier Duparc gagne un regain de splendeur poétique : tragédienne subtile et intérieure, la cantatrice atteint ici un naturel linguistique magicien, imprécation, déclamation, révélation finale dans le recto tono énoncé comme la débrouillement d’une énigme  “ordre et beauté, luxe, calme et volupté”. Il aurait fallu que le récital s’achevât sur ce diptyque Duparc là. Aucun doute, à l’écoute de ses sommets mélodiques, Véronique Gens affirme un talent envoûtant, entre allusion et pudeur (même si ici et là, quelques aigus sonnent serrés, à peine tenus).

Sans la contrainte d’un orchestre débordant, hors de la scène lyrique, le timbre délicat, précieux de Véronique Gens au format essentiellement intimiste gagne ici en studio un somptueux relief : celui qu’affirme son intuition de soliste tragique et pathétique. Si le tempérament indiscutable de la coloriste diseuse s’affirme, on regrette vivement la prise de son qui impose le piano sans équilibre en maints endroits. Oui, carton jaune pour l’ingénieur du son.

CD, compte rendu critique. Véronique Gens, soprano : Néère, mélodies de Hahn, Duparc, Chausson. Susan Manoff, piano. 1 cd Alpha 215. Enregistré au studio Teldex en mars 2015. CLIC de classiquenews d’octobre 2015.

Arthus de Chausson sur France Musique

logo_francemusiqueFrance Musique, ce soir à 19h. Arthus de Chausson. France Musique diffuse en direct de l’Opéra Bastille, la production qui devait marquer le grand retour de l’unique opéra d’Ernest Chausson d’après la légende Arthurienne : Arthus achevé en 1894. C’est pour les auditeurs de France Musique une opportunité utile pour mesurer la valeur d’une musique certes wagnérienne mais puissamment originale … Voici la critique développée de la production du Roi Arthus présenté à Paris à l’Opéra Bastille par notre confrère Ernst Von Beck qui assistait à la représentation du 2 juin dernier. > LIRE notre présentation complète et le compte rendu critique intégral d’ARTHUS.

L’ouvrage achevé en 1894, est créé en 1903, après la mort de l’auteur (1899), il demeure un écho manifeste du théâtre wagnérien mais d’une conception originale et puissante. C’est tout l’intérêt de le réécouter aujourd’hui pour une juste réévaluation.
Chausson roi arthus opera bastille critique compte rendu 781473-le-roi-arthus-saison-2014-2015Car cette résonance wagnériste est originale et puissante sur le plan autant musical que dramatique. L’argument de cette production est la direction fine et allusive de Philippe Jordan comme le plateau vocal efficace : invité de prestige à Paris, Thomas Hampson presque sexagénaire, toujours aussi fin diseur et wagnérien de première classe : le baryton américain apporte une finesse et parfois un trouble tragique présent dans la musique. Son incarnation sait envisager et rendre visible le rêve qui habite ce roi déjà appelé ailleurs. Cette profondeur est hélas invisible dans l’affligeante mise en scène de Graham Vick : des toiles peintes minimalistes et vaguement primitives, des fleurs en plastic, un canapé rouge… qui s’embrase ; rien qu’un vision simpliste et banale qui manque tellement d’onirisme ; difficile quand même de mesurer ainsi la force d’un ouvrage wagnériste français parmi les plus passionnants du romantisme hexagonal : il serait temps de reconnaître à Chausson comme c’est le cas de Vierne ou Franck, voire Théodore Dubois – récemment revivifié, qu’il existe bel et bien un wagnérisme en France absolument original, et pas que suiveur…  ; de leurs côtés, Roberto Alagna et Sophie Koch en vedettes franco françaises restent corrects, souffrant jusqu’à l’extase immobile puis mourant enfin car Lancelot et la Reine Genièvre, possédés et dévorés par la culpabilité, expireront après avoir trahi le bon roi Arthus, respectivement l’ami et l’époux.  Hélas, manquant de grandeur, de souffle, de mystère (ce vers quoi tend continûment la musique de Chausson), la production du Roi Arthus musicalement cohérente, rate visuellement et scéniquement, son retour dans la Maison. Parce que l’indigence laide de la mise en scène contredit l’appel au rêve, à l’immatérielle abstraction énigmatique de la musique d’un Chausson ivre et en extase… Saluons également la qualité des seconds rôles masculins qui offrent une série de superbe articulation française : Cyrille Dubois (le laboureur), Alexandre Duhamel (Mordred), Stanilas de Barbeyrac, le ténor dont on parle (Lyonnel), même Peter Sidhom, ici même Albérich wagnérien retors passionnant (dans la Tétralogie de Wagner présentée en 2013, dans la mise en scène de Günter Krämer), apporte au logo_francemusiqueprofil du magicien Merlin, une once de profondeur humaine (malgré un français moins impeccable). Avoir et surtout écouter, jusqu’au 14 juin 2015, Paris, Opéra Bastille. Diffusion sur France Musique, le samedi 6 juin 2015 à 19h30.

Compte rendu, opéra. Paris, Opéra Bastille, le 2 juin 2015. Chausson : Le roi Arthus. Thomas Hampson. Philippe Jordan (direction), Graham Vick (mise en scène) …

CHAUSSON ROI ARTHUS Thomas Hampson production opera bastille paris critique compte rendu juin 20154636399_7_b2ae_roberto-alagna-dans-le-roi-arthus_8b7648192ad5ab2d863117e7ad6f3ab5Visuellement décevante, la version d’Arthus présentée actuellement à Paris rate son retour auprès du grand public à cause d’une réalisation scénographie… sans souffle ni trouble, rien qu’anecdotique voire chichiteuse. Un tel décalage entre les milles diaprures allusives de la musique et le misérabilisme confus de la mise en scène porte atteinte à la réussite globale de la production. C’était pourtant la promesse d’un superbe événement lyrique à Paris : la production sur la scène parisienne de l’unique opéra d’Ernest Chausson (1855-1899), l’auteur de l’envoûtant Poème de l’amour et de la mer : Le Roi Arthus qui est sa propre proposition sur le thème de la légende arturienne. L’ouvrage achevé en 1894, est créé en 1903, après la mort de l’auteur (1899), il demeure un écho manifeste du théâtre wagnérien mais d’une conception originale et puissante. C’est tout l’intérêt de le réécouter aujourd’hui pour une juste réévaluation.

 

 

Musicalement irréprochable, la production d’Arthus 2015 à l’Opéra Bastille est visuellement décevante

Légende arthurienne désenchantée …

 

Chausson roi arthus opera bastille critique compte rendu 781473-le-roi-arthus-saison-2014-2015Car cette résonance wagnériste est originale et puissante sur le plan autant musical que dramatique. L’argument de cette production est la direction fine et allusive de Philippe Jordan comme le plateau vocal efficace : invité de prestige à Paris, Thomas Hampson presque sexagénaire, toujours aussi fin diseur et wagnérien de première classe : le baryton américain apporte une finesse et parfois un trouble tragique présent dans la musique. Son incarnation sait envisager et rendre visible le rêve qui habite ce roi déjà appelé ailleurs. Cette profondeur est hélas invisible dans l’affligeante mise en scène de Graham Vick : des toiles peintes minimalistes et vaguement primitives, des fleurs en plastic, un canapé rouge… qui s’embrase ; rien qu’un vision simpliste et banale qui manque tellement d’onirisme ; difficile quand même de mesurer ainsi la force d’un ouvrage wagnériste français parmi les plus passionnants du romantisme hexagonal : il serait temps de reconnaître à Chausson comme c’est le cas de Vierne ou Franck, voire Théodore Dubois – récemment revivifié, qu’il existe bel et bien un wagnérisme en France absolument original, et pas que suiveur…  ; de leurs côtés, Roberto Alagna et Sophie Koch en vedettes franco françaises restent corrects, souffrant jusqu’à l’extase immobile puis mourant enfin car Lancelot et la Reine Genièvre, possédés et dévorés par la culpabilité, expireront après avoir trahi le bon roi Arthus, respectivement l’ami et l’époux.  Hélas, manquant de grandeur, de souffle, de mystère (ce vers quoi tend continûment la musique de Chausson), la production du Roi Arthus musicalement cohérente, rate visuellement et scéniquement, son retour dans la Maison. Parce que l’indigence laide de la mise en scène contredit l’appel au rêve, à l’immatérielle abstraction énigmatique de la musique d’un Chausson ivre et en extase… Saluons également la qualité des seconds rôles masculins qui offrent une série de superbe articulation française : Cyrille Dubois (le laboureur), Alexandre Duhamel (Mordred), Stanilas de Barbeyrac, le ténor dont on parle (Lyonnel), même Peter Sidhom, ici même Albérich wagnérien retors passionnant (dans la Tétralogie de Wagner présentée en 2013, dans la mise en scène de Günter Krämer), apporte au logo_francemusiqueprofil du magicien Merlin, une once de profondeur humaine (malgré un français moins impeccable). Avoir et surtout écouter, jusqu’au 14 juin 2015, Paris, Opéra Bastille. Diffusion sur France Musique, le samedi 6 juin 2015 à 19h30.

Le Rois Arthus de Chausson à l’Opéra Bastille, mai et juin 2015.
Mise en scène : Graham Vick
Direction musicale : Philippe Jordan

Le Roi Arthus: Thomas Hampson
Genièvre: Sophie Koch
Lancelot : Roberto Alagna
Merlin  : Peter Sidhom
Lyonnel: Stanislas de Barbeyrac
Mordred : Alexandre Duhamel
Allan : François Lis
Le Laboureur : Cyrille Dubois
Un Chevalier : Tiago Matos
Un Ecuyer : Ugo Rabec
Soldats : Vincent Morell, Nicolas Marie, Julien Joguet, …
Choeurs et orchestre de l’Opéra National de Paris
Chef des choeurs : José Luis Basso

Paris, Opéra Bastille, le 2 juin 2015

Le Roi Arthus de Chausson à l’Opéra Bastille (mai et juin 2015)

hampson thomas baryton chausson arthus_1Paris, Opéra Bastille. Chausson : Le Roi Arthus. 16 mai >14 juin 2015. Nouvelle production avec dans le rôle titre, l’excellent baryton américain, diseur et fin acteur, Thomas Hampson. Nouveau spectacle scénographie par Graham Vick, très attendu sur la scène parisienne : les ouvrages rares mais majeurs de notre romantisme national ne manquent pas mais peinent toujours à s’imposer au répertoire de la maison… comme les « académiques baroques » Lully et Rameau, toujours parents pauvres du volet baroque qui devrait avoir toute sa place dans la maison lyrique qui vit des subsides des contribuables (lesquels sont en droit d’attendre des propositions artistiques équilibrées, sachant aux côtés des “marronniers” : Traviata, Carmen, La Bohème…, sortir de l’oubli les Å“uvres lyriques hier très applaudies… Lully et Rameau n’ont ils pas toute légitimité à l’Opéra national : auteurs officiels de l’Académie royale de musique, l’ancêtre de notre Opéra de Paris actuel, mais aussi meilleurs créateurs du Baroque français ? S’agissant d’Ernest Chausson, né en 1855, il était temps de programmer cette partition ardente et embrasée, tissée avec des fils de soie wagnériens… Créé en 1903 au Théâtre de La Monnaie à Bruxelles par l’élève de Massenet et de Franck, l’ouvrage est le fruit d’un labeur acharné de 7 ans, de 1888 à 1894. Appelant comme Franck à se détacher de Wagner tout en l’assimilant parfaitement, (Debussy ne dit-il pas lui aussi dans Pelléas, composer “non pas d’après Wagner, mais après Wagner”?), concrètement Chausson et Franck auront réussi ce pari difficile-, Chausson sait captiver par une texture orchestrale somptueusement vénéneuse, à la fois sensuelle et mélancolique qui rappelle évidemment son Poème de l’amour et de la mer, la Symphonie en si bémol ou la Chanson perpétuelle… A la fois romantique et symboliste, Arthus réactive la fascination du geste chevaleresque médiéval soulignant les tragiques amours du champion vainqueur des Saxons, Lancelot et de la reine Genièvre, quand comme Mark dans Tristan, le roi Arthus ne peut démuni solitaire qu’abdiquer face à la violence impérieuse de leur union … le pur amour ne peut s’épanouir librement sur terre et comme Lohengrin, Arthus doit quitter la terre pour rejoindre le ciel. Aux côtés de Sophie Koch (Genièvre) et Roberto Alagna (Lancelot), le baryton américain Thomas Hampson revient en mai et juin 2015 à l’Opéra de Paris pour chanter le roi Arthus sous la direction subtilement articulée et chromatiquement mouvante de l’excellent Philippe Jordan.

Tristan français

chaussonPour la création bruxelloise de 1903, quand Puccini a fait triomphé Tosca et Debussy son Pelléas, Chausson déjà disparu (en juin 1899) ne put assister à la création du 30 novembre 1903, avec les décors du peintre symboliste belge Fernand Khnopff (1858-1921). A l’initiative de D’Indy, ardent chaussoniste, Le Roi Arthus synthétise la sensibilité élégante et essentielle de Chauson, compositeur esthète qui tenait dans son hôtel particulier parisien de l’avenue de Courcelles, un salon où dans un écrin affichant les Degas, Lerolle (son beau-frère), Redon, Puvis, Carrière, Signac, Monet, Manet, Vuillard… de grande valeur, toute l’avant garde et les auteurs exigeants savaient échanger et dialoguer. Le roi Arthus est donc l’oeuvre d’un grand lettré, d‘une finesse de goût véritable, sachant dépasser le choc de Wagner (il a vu Parsifal à Bayreuth en 1882). Sur un sujet tiré de l’histoire médiévale bretonne et que Wagner a traité avant lui, Chausson recycle avec un tempérament puissant et original, les principes wagnériens de l’orchestre flamboyant continu, du leit motiv, avec ce goût pour l’accomplissement de la malédiction perpétuelle enchaînant les êtres contre leur gré… Le couple royal Arthus et Guenièvre éclate mais aucun des trois protagonistes avec Lancelot qui fuit avec la reine, ne sort indemne du drame : la mort les attends (Guenièvre et Lancelot), ou le salut hors de ce monde les transporte malgré eux  (apothéose finale et céleste d’Arthus). Graham Vick devrait prendre a contrario de sa mise en scène de Parsifal (1997), Don Carlo (1998) ou de King Arthur (Opéra Bastille), un parti presque austère voire abstrait, soulignant combien Le roi Arthus de Chausson est un drame intimiste et psychologique, sans vraiment d’action. Dans sa vision Arthurienne, Chausson (son livret est très bien écrit, au choix des mots et aux tournures infiniment moins alambiquées que sont les textes de Wagner), fait du Roi trahi, une idée, un symbole (il n’a pas vraiment d’enracinement terrestre dans le déploiement scénique). Seuls Lancelot et surtout la reine Guenièvre sont de réels personnages, qui souffrent, qui désespèrent et comprenant que finalement malgré leur fusion physique, ils n’ont guère d’affinité, se vouent à la mort (Guenièvre se suicide même). Le poison est l’univers entier de Chausson : l’idéal arthurien (les chevaliers à la table ronde) n’y est jamais explicité, l’horizon est bouché, les paysages et le cadre, sombres comme étouffants. C’est évidemment l’orchestre – somptueux-, qui exprime essentiellement cette perte inéluctable de l’harmonie primitive.

 

 

Ernest Chausson : Arthus (1894), opéra créé en 1903, en 3 actes

Synopsis, scènes principales

Opéra Bastille, 16 mai>14 juin 2015. Philippe Jordan, direction. Graham Vick, mise en scène.

Acte 1, le Roi Arthus célèbre la victoire contre les Saxons et le courage de Lancelot son favori. Mais son neveu Mordred, jaloux de Lancelot et amoureux de la reine Genièvre surprend les amants Lancelot et Genièvre. Lancelot blesse Mordred et fuit : Genièvre promet de le rejoindre.

Acte 2, Lancelot prié par Genièvre de reprendre sa place parmi les chevaliers de la Table ronde, ne vainc pas sa honte d’aimer la femme de son ami le roi. Ce dernier rongé par le doute car Mordred lui a rapporté le relation adultérine de Genièvre, consulte Merlin qui lui annonce la fin prochaine du royaume et sa séjour au ciel. Arthus décide de pourchasser Lancelot.

Acte 3, Lancelot rattrapé refuse de combattre son souverain. Genièvre détruite par sa conduite s’étrangle avec ses cheveux. Lancelot regagne le champs de bataille pour y mourir et expirer aux pieds d’Arthus. Ayant jeter ses armes dans la mer, le roi disparaît dans le ciel emporté par une mystérieuse nacelle.

10 représentations à l’Opéra Bastille à Paris
Du 16 mai au 14 juin 2014

Réservez votre place :

16 mai 2015 19:30
19 mai 2015 19:30
22 mai 2015 19:30
25 mai 2015 19:30
28 mai 2015 19:30
02 juin 2015 19:30
05 juin 2015 19:30
08 juin 2015 19:30
11 juin 2015 19:30
14 juin 2015 14:30

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Opéra du Rhin : Le Roi Arthus de Chausson, 1903

chausson_arthus_le-roi-arthus-opera-du-rhin-strasbourg-mulhouse-2014Opéra du Rhin. Le Roi Arthus de Chausson, 14 mars > 13 avril 2014. Après avoir vécu le choc de Parsifal à Bayreuth en 1882 (création de la légende ou festival sacré wagnérien par le chef Hermann Levi), Ernest Chausson écrit sa propre légende arthurienne hanté par le souvenir de Wagner. La composition du Roi Arthus (nom du souverain francisé), se déroule de 1886 à … 1895, soit presque dix ans d’une longue gestation au cours de laquelle le plume et la pensée du musicien opèrent une assimilation très originale du wagnérisme. L’orchestration demeure éminemment française (lumineuse, transparente, véritable sommet de l’écriture orchestrale postromantique), proche de celle de Dukas, annonçant aussi l’univers debussyte (Pelléas). Le chant de l’orchestre omniprésent assure la continuité entre les tableaux, véritable flot continu qui exprime les enjeux psychologiques des protagonistes: Le roi Arthus est trahi par son chevalier favori : Lancelot, qui cultive une secrète liaison avec son épouse, la reine Genièvre. La force vénéneuse de l’amour détruit  ici l’ordre et l’équilibre défendus par les chevaliers de la table ronde. L’amour est un venin qui met à mal l’idéal spirituel du roi… lequel mis en échec et trahi par ses proches, quitte le monde terrestre.

Le livret écrit par le compositeur lui-même dans la tradition des grands auteurs romantiques avant lui, Berlioz et Wagner. De la légende arthurienne, Chausson proche des symbolistes recueille le thème de la malédiction par l’amour, du désir qui bouleverse le jeu fragile des équilibres.

Légende arthurienne

A l’instar de Tristan une Isolde de Wagner, Chausson recompose un quatuor dramatique par lequel passe la tragédie : Tristan, Isolde, Mark et Melot chez le maître de Bayreuth ; Lancelot, Genièvre, le roi Arthus sans omettre le dénonciateur Mordred chez Chausson.

L’opéra est créé à Bruxelles en novembre 1903, Chausson était mort suite à une mauvaise chute de bicyclette en 1899.  Paris n’entendra qu’un extrait (le somptueux troisième acte) … pas avant 1916.

Le premier acte présente les personnages et représente l’adultère entre Genièvre et Lancelot. Au II, la culpabilité des amants ronge les esprits fragilisés : Lancelot et Genièvre, dénoncés au Roi par le jaloux Mordred, fuient ensemble ; éreinté, et de mauvaise grâce, après une rencontre infructueuse avec Merlin, qui prédit la fin de l’ordre chevaleresque, Arthus conduit les chapeliers à la poursuite du couple coupable.

Au III, les solitudes et l’impuissance se précisent encore. Seule, Genièvre désespère car Lancelot a choisi de renoncer à les défendre : la reine traîtresse se suicide (elle s’étrangle avec ses propres cheveux). Sur le champs de bataille, Lancelot refuse de se battre et s’effondre même si Arthus lui pardonne sa faute. Trahi, solitaire entre tous, Arthus est emporté vers le ciel sur une nacelle car une gloire éternelle lui est réservée hors du monde terrestre.

La fin du roi Arthus semble récapituler la geste wagnérienne : l’impuissance languissante des amants (Tristan et Isolde) comme leur trahison à l’endroit de leur ami et mari ; c’est aussi le constat que tout amour fidèle est impossible sur terre, suscitant l’inéluctable défaite et fuite du héros : Arthus comme Lohengrin, est extrait du monde des hommes après avoir été trahi. La tentative d’intégration et de réalisation sociale a échouée, et c’est la musique qui exprime en un long flot orchestral, d’un raffinement inouï, les méandres et circonvolutions de la psyché humaine, prise dans l’étau du désir et du devoir, de l’amour et de la loyauté, de la mort et du renoncement.

Ernest Chausson : Le roi Arthus, 1903
Drame lyrique en 3 actes sur un livret du compositeur. Créé au Théâtre de la Monnaie le 30 novembre 1903
DIRECTION MUSICALE : Jacques Lacombe
MISE EN SCÈNE : Keith Warner

GENIÈVRE : Elisabete Matos
ARTHUS : Andrew Schroeder
LANCELOT : Andrew Richards
MORDRED : Bernard Imbert
LYONNEL : Christophe Mortagne
ALLAN : Arnaud Richard
MERLIN : Nicolas Cavallier
LABOUREUR : Jérémy Duffau
CHEVALIERS : Dominic Burns, Seong Young Moon Jean-Marie Bourdiol, Jens Kiertzner

ECUYER : Jean-Philippe Emptaz

Chœurs de l’Opéra national du Rhin

Sandrine Abello, direction

Orchestre symphonique de Mulhouse

STRASBOURG
Opéra
ve 14 mars 20h, di 16 mars 15h, ma 18 mars 20h, ve 21 mars 20h, ma 25 mars 20h

MULHOUSE
La Filature
ve 11 avril 20h, di 13 avril 15h

Laurent Korcia joue Chausson et Schumann avec l’Orchestre de Chambre de Paris

L. Korcia®Elodie CrebassaParis, TCE, le 19 mars, 20h. L’Orchestre de chambre de Paris et Laurent Korcia jouent Chausson. Et poursuivent aussi avec la 2ème Symphonie de Robert Schumann, le fil rouge de la saison 2013-2014 de l’Orchestre de chambre de Paris. Le disciple de Massenet et de Franck, ami de Fauré et de Duparc, Ernest Chausson reçoit durablement et profondément l’influence de Wagner. Toute son oeuvre, d’un affinement extrême sur le plan de l’écriture et de l’orchestration, porte la marque de ce poison et de cet envoûtement qui s’exprime en accents passionnés et denses, entre amertume, ivresse anéantissement.
Chef-d’oeuvre du genre, le Poème de l’amour et de la mer, une « mélodie-cantate », pourrait être la réponse en musique à L’Amour et la Vie d’une femme de Schumann. Schumann, précisément, dont la Seconde Symphonie referme le concert : « Elle m’a causé bien des peines ; j’ai passé bien des nuits inquiètes à méditer sur elle », confiera le compositeur.
Le Poème pour violon opus 25 (achevée dès 1893) est aussi original que l’atypique et puissante Symphonie écrite peu avant (1892). Au départ, il s’agissait d’un prolongement ou d’une émanation de la nouvelle de son ami l’écrivain Tourgueniev (le chant de l’amour triomphant), mais la force de sublimation du compositeur détache le Poème de sa filiation littéraire ; c’est une oeuvre absolue, développement personnel de musique pure dont l’immense sensation de vapeur là encore indique dans la carrière de son auteur une maturité captivante. L’œuvre est finalement créée par Eugène Ysaÿe en 1896. D’un caractère wagnérien et proche de ce wagnérisme assimilé de façon si originale à la manière de Franck, le Poème ne laisse pas de frapper chaque auditeur par sa morsure enivrée, l’action du poison wagnérien, distillé tel un baume magique.

Symphonie n°2 de Robert Schumann
Esquissée en 1845, créée à Leipzig en 1846, la Symphonie n°2 approfondit encore l’acte novateur chez Schumann qui porte toute l’architecture par le seul fait de l’écoulement mélodique. L’unité organique naît des multiples cellules thématiques qui se répondent en dialogue, c’est un jaillissement irrésistible et malgré la versatilité psychique de l’auteur, un désir d’organisation et de cohérence par l’acte musical, un formidable hymne à la vie, gorgé d’espérance qui s’oriente dans la lumière. Il est vrai que la Symphonie n°2 de Schumann porte aussi l’empreinte de son mariage tant espéré avec Clara, pianiste et virtuose et véritable muse sur le plan personnel et artistique. Chronologiquement il s’agit en fait de la 3ème Symphonie, composée dans la suite du Concerto pour piano (écrit pour sa chère et tendre épouse).

 

orchestre de chambre de Paris OCP logo 2013

Programme

Chausson :
Poème de l’amour et de la mer
Poème pour violon

Paganini :
I Palpiti pour violon et orchestre

Schumann : Symphonie n°2 en ut majeur

Jean-Jacques Kantorow, direction*
Laurent Korcia, violon*
Ann Hallenberg, mezzo-soprano

*Changement d’artistes : le chef et violoniste Joseph Swensen est remplacé par Jean-Jacques Kantorow à la baguette et Laurent Korcia au violon.

Réservez votre place sur le site de l’Orchestre de chambre de Paris

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Compte-rendu : Fontdouce. Abbaye, 20ème festival estival, le 26 juillet 2013. Concert inaugural. Baptiste Trotignon, Natalie Dessay, Philippe Cassard. Mélodies françaises.

philippe cassard et natalie dessay à fontdouceSaint-Bris des Bois en Charente-Maritime accueille l’inauguration du 20ème Festival de l’Abbaye de Fontdouce. L’endroit magique datant du 12e siècle concentre beauté et mystère. Le concert exceptionnel d’ouverture se déroule en deux parties à la fois contrastées et cohérentes. Il commence de façon tonique avec le pianiste jazz Baptiste Trotignon et se termine avec un duo de choc, la soprano Natalie Dessay et Philippe Cassard au piano !

 

 

Festival de l’Abbaye de Fontdouce,
le secret le mieux gardé de l’été !

 

Située entre Cognac et Saintes, à deux pas de Saint-Sauvant, l’un des plus beaux villages de France, l’ancienne Abbaye Royale obtient le classement de Monument Historique en 1986. Elle fait ainsi partie du riche patrimoine naturel et culturel de la région. Elle en est sans doute l’un de ses bijoux, voire son secret le mieux gardé ! Le maître du lieu (et président du festival Thibaud Boutinet) a comme mission de partager la beauté et faire connaître l’histoire et les milles bontés du site acquis par sa famille il y a presque 200 ans. Après notre séjour estival et musical à l’Abbaye de Fontdouce, toute l’équipe met du coeur à l’ouvrage et le festival est une indéniable réussite !

Le Festival comme le site historique acceptent avec plaisir la modernité et font plaisir aussi aux amateurs des musiques actuelles. L’artiste qui ouvre le concert est un pianiste jazz de formation classique : Baptiste Trotignon régale l’audience avec un jeu à l’expressivité vive, presque brûlante, qui cache pourtant une véritable démarche intellectuelle. Notamment en ce qui concerne sa science du rythme, très impressionnante. Le pianiste instaure une ambiance d’une gaîté dansante, décontractée, contagieuse avec ses propres compositions ; il fait de même un clin d’oeil à la musique classique avec ses propres arrangements « dérangeants » d’après deux valses de Chopin. Mais son Chopin transfiguré va très bien avec son éloquence subtilement jazzy. La musique du romantique  d’une immense liberté formelle, se prête parfaitement aux aventures euphoriques et drolatiques de Trotignon. Un début de concert tout en chaleur et fort stimulant qui prépare bien pour la suite classique ou l’où explore d’autres sentiments.

L’entracte tonique est l’occasion parfaite pour une promenade de découverte, tout en dégustant les boissons typiques du territoire. Le sensation de beauté paisible au long du grand pré, l’effet saisissant et purement gothique de la salle capitulaire, les couleurs et les saveurs du patrimoine qui font vibrer l’âme… Tout prépare en douceur pour le récital de mélodies par Natalie Dessay et Philippe Cassard.

Ils ont déjà collaboré pour le bel album des mélodies de Debussy « Clair de Lune » paru chez Virgin Classics. Pour ce concert d’exception, les deux artistes proposent Debussy mais aussi Duparc, Poulenc, Chabrier, Fauré, Chausson… Un véritable délice auditif et poétique, mais aussi sentimental et théâtral. Natalie Dessay chante avec la véracité psychologique et l’engagement émotionnel qui lui sont propres. Un registre grave limité et un mordant moins évident qu’auparavant n’enlèvent rien à la profondeur du geste vocal. Elle est en effet ravissante sur scène et s’attaque aux mélodies avec un heureux mélange d’humour et de caractère. La diva interprète « Le colibri » de Chausson  avec une voix de porcelaine : la douceur tranquille qu’elle dégage est d’une subtilité qui caresse l’oreille. Philippe Cassard est complètement investi au piano : il s’accorde merveilleusement au chant avec sensibilité et rigueur. La « Chanson pour Jeanne » de Chabrier, la plus belle chanson jamais écrite selon Debussy, est en effet d’une immense beauté. Les yeux de la cantatrice brillent en l’interprétant ; nous sommes éblouis et émus, au point d’avoir des frissons, par la délicatesse de ses nuances et par la finesse arachnéenne de ses modulations. « Il vole » extrait des Fiançailles pour Rire de Poulenc est tout sauf strictement humoristique. La complicité entre les vers de Louise de Vilmorin et la musique du compositeur impressionne autant que celle entre le pianiste et la soprano. Sur scène, ils s’éclatent, font des blagues, quelques fausses notes aussi, se plaignent du bruit des appareils photo… ils mettent surtout leurs talents combinés au service de l’art de la mélodie française, pour le grand bonheur du public enchanté.

Découvrir ainsi la magie indescriptible de l’Abbaye de Fontdouce et déguster sans modération les musiques de son festival d’été reste une expérience mémorable !

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