lundi 24 mars 2025

Le pianiste Jean-Nicolas Diatkine à Gaveau

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Diatkine jean nicolas piano gaveau JNDParis, Salle Gaveau, le 12 novembre 2014, 20h30. Récital Jean-Nicolas Diatkine, piano. Beethoven, Brahms, Ravel, Chopin marquent chacun un jalon dans les traversées intérieures que propose le pianiste Jean-Nicolas Diatkine. Dans la Vienne du premier romantisme, les Sonates pour piano de Beethoven font l’admiration des mélomanes : dans les salons de la bonne société où le décoratif et le moderne stimulent l’attrait pour l’élégance musicale, la personnalité de monsieur Ludwig Van Beethoven intrigue déjà. Victime de son succès fracassant, le compositeur pianiste regrette que bon nombre d’éditeurs publient sans son contrôle, de nombreuses transcriptions de ses oeuvres. La Sonate n°9 prend le contrecoup de cette usurpation organisée : Beethoven en écrit lui-même la transcription pour quatuor à cordes : dans sa conception même pour le piano, Ludwig y concentre et renouvelle dans le même temps le principe des 4 voix dialoguées (dans l’esprit facétieux, resserré, élégantissime du modèle pour tous, Haydn). Les 4 parties discutent et concertent sur le clavier avec une telle souplesse et vivacité que l’on pense à l’inverse : Beethoven n’aurait-il pas écrit d’abord le quatuor puis sa transcription pour le piano seul ?… Depuis la madrigal monteverdien, jamais le musique n’aura à ce point exprimer la volubilité concertante, le plaisir rare et d’un instant partagé, vécu à … quatre, comme l’emblème d’une conversation fraternelle… déjà se profile la fraternité de l’Hymne à la joie, composé effectivement 25 ans après.

A l’inverse, Brahms dans ses huit pièces de l’opus 76 se replie en une introspection féconde, d’une rare intériorité qui sait pourtant comme Sibelius, interroger le mystère de la nature, comme s’il s’agissait d’établir une secrète correspondance entre les élans de l’âme solitaire avec les phénomènes du cosmos. En références à Mendelssohn, le critique Hansslick, son champion, vivement remonté contre Wagner alors, y  parle de « Romances sans paroles » : plénitude expressive des notes, aussi puissantes que les mots du poète.

 

 

 

De la Structure à la Magie

Jean-Nicolas Diatkine à Gaveau

 

diatkine jean nicolas piano salle gaveauDans Gaspard de La Nuit, d’après les trois poèmes d’Aloysius Bertrand (1820), Ravel  ressuscite les mondes enchantés fantastiques du romantisme germanique le plus troublant. Jean-Nicolas Diatkine précise combien l’écriture filigranée et ciselée du musicien répond précisément au raffinement parfois délirant mais subjuguant du poème originel : « Soulignons seulement comment Ravel y  exprime le caractère diabolique du lutin Scarbo : Tout en se dilatant jusqu’ à devenir aussi grand qu’une cathédrale puis rétrécir et disparaître sous le lit, il émet toutes sortes de sons inquiétants auxquels se mêlent des caractères de danse hispaniques parfaitement reconnaissables. La féminité de ces rythmes diaboliques nous emmène  bien loin  de Méphistophélès tel que Liszt le conçoit dans sa valse du même nom, valse dont la virtuosité a pourtant certainement  influencé Ravel dans sa composition « , l’on ne saurait être plus sensible et ouvert à la puissante et féconde magie du miroitement poétique.

Diatkine jean nicolas piano salle gaveau diatkine jean nicolas ditakine pianiste 428589_jean-nicolas-diatkine-recital-de-piano-1_203319Le récital événement de Jean-Nicolas Diatkine se conclue par les Trois Mazurkas, et la Sonate N°3 op.58 de Frédéric Chopin dont on ne souligne pas assez l’intensité douloureuse parfois impétueuse et puissante de l’étoffe musicale : si Liszt brille et pavane, volontiers démonstratif et toujours très virtuose, surtout pendant sa période de récitaliste-, Frédérici Chopin tout en cultivant le murmure crépusculaire et les climats allusifs, exprime tout autant une étonnante force de détermination.  Jean-Nicolas Diatkine nous rappelle l’expression du compositeur, ici particulièrement emblématique : « La plume me brûle les doigts ». Le pianiste ajoute, pour conclure sa présentation du programme à Gaveau : « Laissons donc le dernier mot à Marcel Proust : « Les phrases au long col sinueux et démesuré de Chopin, si libres, si flexibles, si tactiles, qui commencent par chercher et essayer leur place en dehors et bien loin de la direction de leur départ, bien loin du point où on avait su espérer qu’atteindrait leur attouchement, et qui ne se jouent dans cet écart de fantaisie que pour revenir plus délibérément – d’un retour plus prémédité, avec plus de précision, comme sur un cristal qui résonnerait jusqu’à faire crier – vous frapper au cœur. »

Récital du pianiste Jean-Nicolas Diatkine. Paris, Salle Gaveau, mercredi 12 novembre 2014, 20h30.

Programme

Beethoven, Sonate N°9 op.14 N°1
Brahms, Huit pièces pour piano op.76
Ravel, Gaspard de la Nuit
Chopin, Trois Mazurkas, Sonate N°3 op.58

Jean-Nicolas Diatkine : en savoir plus

À lire et à écouter 

Critique musicale sur France Musique, émission « Changez de disque » : 
http://bit.ly/1lPndjQ
Interview de Jean-Nicolas Diatkine par Thierry Vagne: 
http://vagnethierry.fr/jean-nicolas-diatkine/ 
Vidéo du concert de Jean-Nicolas Diatkine du 5 décembre 2011, salle >
Gaveau: http://youtu.be/B-PQGZe_IGY
Son CD consacré à Liszt, Schumann & Bonet, est disponible sur 
Qobuz.com: http://bit.ly/131bciE
La page officielle facebook de JN Diatkine: https://www.facebook.com/jean.nicolas.diatkine.pianiste 

Discographie 

Beethoven : n° 21 en do Majeur, opus 53,Waldstein –  Robert Schumann : Carnaval, opus 9. Enregistrement 2012.   Franz Liszt : Sonate en si mineur – Robert Schumann : Kreisleriana – Narcis Bonet : Cincos Noturnos (Parnassié Editions 2007).  Sélection de Mélodies de Georges Bizet avec Zeger Vandersteene, ténor (Gents MuzikaalArchief 2006).  Les 16 Mélodies de Henri Duparc avec Zeger Vandersteene, ténor (Gents MuzikaalArchief 2005). 

 

Informations pratiques salle Gaveau 

Mercredi 12 novembre 2014 à 20h30
Salle Gaveau
45 rue de la Boétie
75008 Paris
Tarifs : 45 €, 35 €, 25 €, 15 €
Réservation : 01 49 53 05 07
www.sallegaveau.com 

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