dimanche 19 janvier 2025

CRITIQUE, récital lyrique. GSTAAD NEW YEAR MUSIC FESTIVAL, Eglise de Rougemont, le 3 janvier 2024. Lise Davidsen (soprano), Freddie De Tommaso (ténor), James Baillieu (piano)

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Après le formidable concert donné par Sonya Yoncheva la veille, celui prévu avec la soprano norvégienne Lise Davidsen et le ténor italo-britannique Freddie De Tommaso s’annonçait comme l’un des temps forts du Gstaad New Year Music Festival… Las, malgré de très beaux moments, la magie n’a pas opéré et la soirée a laissé plus d’un spectateur sur sa faim (dont votre serviteur), notamment quant à la prestation du second… Mais que s’est-il passé ?…

 

Pour commencer, pour “convenance personnelle” (ou plutôt caprices de Diva…), le programme prévu a été réduit au tiers, 5 airs ou duos passant ainsi à la trappe, la soirée n’excédant pas une heure de chant contre les 1h30 prévu… Mais le principal hiatus du concert a surtout résidé dans l’exiguïté de la minuscule Église de Rougemont, où il se tenait, avec sa capacité d’un grosse centaine de personnes… et dans laquelle la voix de Lise Davidsen, peut-être la plus puissante voix de notre temps, qui remplit avec aisance les vastes vaisseaux que sont le Metropolitan Opera de New-York ou l’Opéra Bastille, s’est ici transformée en brise-tympans !… Et ce dès le “Dich teure Halle” d’ouverture (tiré de Tannhaüser de Wagner) qui – pour impressionnant qu’il fût -, nous a plus sûrement “raidi” plus que transporté… Par extraordinaire, elle convainc mieux dans les airs plus nuancés comme le “Vissi d’arte” puccinien ou le “Ritorna vincitor” verdien, dans lesquels elle parvient à plier ses énormes moyens aux exigence de ces deux arias, et dans lesquels nos oreilles au moins ne furent pas agressées ! Et, surtout, elle parvient à émouvoir dans les deux Lieder de son compatriote Edvard Grieg (Sechs Lieder op. 48 N°5. Zur Rosenzeit et N°6. Ein Traum),en distillant de bien beaux pianissimi, autant qu’une voix de ce format en est capable…

 

Et qu’est-il arrivé à son partenaire du soir, le formidable Freddie De Tommaso qui débute la soirée comme s’il marchait sur des œufs, avec de récurrents problèmes techniques qu’un chanteur de sa trempe ne devrait pas souffrir ?… A t-il été contrarié par l’étroitesse des lieux, s’est-il senti écrasé par sa partenaire qui a fait fi du problème, ou était-il tout simplement indisposé ?… Après un “Celeste Aïda” hurlé plus que chanté (malgré un fabuleux diminuendo, il faut bien l’avouer et rendre à César…), il convainc mieux dans l’aria de Francesco Cilea “E la solita storia del pastore”, délivrée avec plus de mesure et de contenance, et des allégements bienvenus. Mais le naturel revient au galop dans l’air de Mario “Recondita armonia”, avec en plus des aigus serrés et un condamnable manque de finesse. Il se ressaisit avec un “Core’ingrato” napolitain mieux maîtrisé et savamment dosé, tandis que sa partenaire lui emboîte le pas avec le délicieux « I could have danced all night » extrait de My fair Lady de Lowe. Habitués à chanter ensemble, il ne font qu’une bouchée ensuite du dernier air de la soirée, le même « Lippen Schweigen » (extrait de la Veuve joyeuse de Lehar) qui avait clôturé l’autrement convaincant duo réunissant, quelques jours plus tôt, Elina Garanca et Jonathan Tetelman

Au final, le moment le plus touchant et musical de la soirée aura été l’Impromptu en la bémol majeur op. 142/2 de Schubert, interprété par l’accompagnateur des deux stars, l’excellent pianiste sud-africain James Baillieu – qui nous livre nous un Schubert de chair et de sang, d’amour et de tristesse, de passion et de désespoir glacé. Le piano solo semble bien mieux convenir au délicat écrin qu’est l’Eglise de Rougemont…

 

 

 

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CRITIQUE, récital lyrique. 19ème GSTAAD NEW YEAR MUSIC FESTIVAL, Eglise de Rougemont, le 3 janvier 2024. Lise Davidsen (soprano), Freddie De Tommaso (ténor), James Baillieu (piano). Toutes les photos © Patrizia Dietzi

 

VIDEO : Lise Davidsen et Freddie De Tommaso chantent l’air « Lippen Schweigen » (extrait de la Veuve joyeuse de Franz Lehar)

 

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