C’est la fête à Ravel. La saison de l’Opéra de Monte-Carlo s’achève on ne peut plus brillamment sur L‘Enfant et les Sortilèges et L’Heure espagnole programmés au cours de la même soirée dans la joie et la bonne humeur. Ce faisant, Monaco célèbre deux anniversaires : les cent cinquante ans de la naissance de Maurice Ravel et le centenaire de la création, sur la scène monégasque, de L’Enfant et les Sortilèges, le 21 mars 1925. De toute évidence, cent ans plus tard l’« Enfant » se porte bien !
La rayonnante directrice de l’Opéra de Monte-Carlo, Cecilia Bartoli, en a confié la mise en scène à son prédécesseur Jean-Louis Grinda. Elle a bien fait ! Jean-Louis Grinda a réalisé là un travail d’artiste, d’esthète, d’orfèvre. Il a animé ces Sortilèges de mille détails drôles et précis. Il a situé dans un milieu grand-bourgeois cette histoire de sale gosse qui martyrise les objets, les animaux et les domestiques qui l’entourent. Jean-Louis Grinda anime le lit à baldaquin, le fauteuil, la tasse chinoise, il juche la bonne fée au sommet d’une armoire, il fait apparaître le chat en ombre chinoise, présente l’arithmétique au milieu d’un essaim de bonnets d’âne, utilise à bon escient les effets vidéo. Tout cela est réjouissant et réussi.
La distribution est épatante. Gaëlle Arquez fait l’enfant. Et qu’est-ce qu’elle le fait bien ! Axelle Saint-Cirel incarne sa mère avec brio, Julie Nemer est très Chouette, tandis que Floriane Hasler se fait Tasse. Florie Valiquette fait valoir ses vocalises princières tandis que Jennifer Courcier se retrouve en Chauve-Souris et Cécile Madelin en Ecureuil. Quant à Florian Sempey, Matthieu Lécroart et Cyrille Dubois, ils forment un trio de chanteurs comédiens qui nous réjouit autant dans L’Enfant et les Sortilèges que dans L’Heure espagnole.
Cette Heure espagnole, parlons-en ! Jean-Louis Grinda la monte avec une précision… d’horlogerie suisse. Tout fonctionne à merveille… Là encore, la distribution nous ravit. En plus du réjouissant trio Dubois-Sempey-Lécroart, il y a aussi l’horloger de Vincent Ordonneau – et à nouveau l’excellente Gaëlle Arquez en horlogère.
Dans la fosse, l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo nous sert un Ravel plein d’entrain sous la direction de son chef, l’excellent Kazuki Yamada.
A la bonne heure !
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CRITIQUE, opéra. MONACO, Salle Garnier, le 23 mars 2025. RAVEL : L’Heure espagnole / L’Enfant et les sortilèges. Gaëlle Arquez, Cyrille Dubois, Florian Sempey, Matthieu Lécroart… Jean-Louis Grinda / Kazuki Yamada. Crédit photo © Marco Borrelli