jeudi 28 mars 2024

CD, Compte rendu critique : Mozart, La Clémence de Titus par Jérémie Rhorer et Le Cercle de l’Harmonie (2 cd Alpha, live, Paris, 2014).

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Sous la baguette du mozartien Jérémie Rohrer,
la Vitellia Karina Gauvin affirme un superbe tempérament vocal et dramatique

 

La prise live accentue les distorsions réalistes, et l’impression de grande vivacité (avec bruits des déplacements sur scène en prime), d’autant que les solistes (certains plus que d’autres) savent saisir l’irisation et l’exacerbation des passions mozartiennes ; voilà un dernier seria ciselé dans la langue des sentiments la plus subtile : La Clémence de Titus en cette année 1791, affirme une nervosité déjà romantique. Il est vrai que Wolfgang sait mieux que personne à son époque, ciseler le chant des désirs, analyser la psyché de chacun de ses personnages. En cela, La Clemenza di Tito est un sommet de vérité tendue, surtout de dévoilement : tout est dit par la musique, mieux que les paroles. La musique réalise la métamorphose des âmes pilotées par l’amour et le mensonge donc la trahison (Sextus manipulé par Vitellia contre Titus).

gauvin karine elvira dans don giovanni de teodor currentzisCôté chanteurs ? La Vitellia, ardente, sensuelle, calculatrice envers Sesto ; vengeresse envers Titus… est une lionne, garce et sirène dont on suit pas à pas l’évolution psychique, de la haine jusqu’à son grand air avec cor de basset obligé, où elle abdique toute entreprise haineuse, et s’humanise enfin. Voilà une vraie incarnation, vocale autant que théâtrale, qui méritait évidemment l’enregistrement. Le miel ardent, dévorant, palpitant de l’ineffable Karina Gauvin se révèle aussi convaincante ici que sa Donna Anna dans un récent Don Giovanni (enregistré par l’impétueux lui aussi Teodor Currentzis pour Sony classical, CLIC de CLASSIQUENEWS) : la diva canadienne irradie de sa flamme incarnée, rugissante et voluptueuse ; irrésistible. Le Sesto tiraillé mais amoureux de celle qui le domine est bien campé par Kate Lindsey ; belle Servilia, rafraîchissante mais jamais trop fleurie de Julie Fuchs… Voilà posés les arguments principaux d’une lecture mordante et expressive qui affirme aujourd’hui, la réussite fascinante du dernier seria de Mozart (1791 – que l’on retrouvera aussi avec le même plaisir dans le coffret dvd de l’intégrale des opéras de Mozart édité par Decca / DG : 33 dvd The complete operas 225 / CLIC de CLASSIQUENEWS).

C’est donc après L’enlèvement au sérail que la Rédaction de classiquenews a distingué d’un CLIC, une nouvelle réussite à porter au crédit du chef mozartien.

Cependant notre enthousiasme ne pourrait passer sous silence l’impossible et approximatif Kurt Streit (Belmonte désastreux) qui se révèle être d’une instabilité proche de la catastrophe : imprécis, aigus serrés et tirés, chant faux et vocalises à la peine : aucune agilité, surtout style martelé, sans finesse ni nuance, ni legato souverain : une sérieuse formation s’impose s’il n’est pas trop tard).

 

 

 

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CD, annonce. MOZART : La Clemenza di Tito par Jérémie Rhorer (2 cd Alpha Live). Grande critique à suivre sur CLASSIQUENEWS, le jour de la parution du cd La Clemenza di Tito / La Clémence de Titus par Jérémie Rhorer, soit le février 2017.

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