jeudi 28 mars 2024

Britten: The Rape of Lucretia. Ian Bostridge, Oliver Knussen 2 cd Virgin Classics (Aldeburg juin 2011)

A lire aussi
Enregistré au festival d’Aldeburg 2011 (festival fondé par Britten en 1948 sur le littoral du Suffolk), et sous la direction d’un britténien de la première heure, Oliver Knussen (artisan discographique généreux chez Virgin classics), ce Rape of Lucrezia renoue avec l’âpreté quasi insoutenable, du moins troublante et dérangeante du thème du viol abordé dans son épure incisive par Benjamin Britten. Le plateau dominé par le chœur masculin et féminin de Ian Bostridge et de Susan Gritton, exaltant, halluciné (palmes spéciales à Bostridge, prophète visionnaire souvent délirant et toujours articulé soit un narrateur/récitant de première valeur, grâce à ses couleurs nouvelles barytonantes) s’affirme au fur et à mesure de l’action parfaitement abjecte. Le chambrisme irruptif et volcanique, qui laisse toute sa place au verbe incandescent de la tragédie antique, s’exprime ici librement sous la baguette ciselée et ouverte à l’étrange et au lugubre.


lecture palpitante et superlative

D’autant que le dire d’Angela Kirchschlager (Lucrezia palpitante et vertueuse) partage l’effusion vertigineuse de ses partenaires vociférants et déclamatoires. Aucun doute, la version fait figure de référence nouvelle d’un opéra chambriste et bouleversant.
Créé en 1946 avec Kathleen Ferrier dans le rôle-titre, The Rape revivifie en un néoclassicisme réaliste hyperexpressif la force de l’histoire romaine: le pervers et jaloux Tarquinius (impeccable trivialité de Peter Coleman-Wright) s’y entend à violer l’épouse de Collatinus, mari trop enviable.

Tous les chanteurs projettent un texte admirablement dramatisé, de surcroît dans l’acoustique parfaite de Snape Maltings. Au lys de Lucrezia s’oppose la barbarie cynique de l’infâme et décadent Sextus Tarquinius dont le direction toute en nuances intuitives de Knussen éclaire la tare d’ascendance étrusque, l’animalité sombre et fauve. Christopher Purves fait un Collatinus admirable de noblesse attendrie et amoureuse pour son épouse détruite.
Quelle intensité maîtrisée, quelle intériorité flamboyante, ressuscitant le mythe dans sa convulsive et splendide horreur. Autant dire que l’enregistrement opportunément édité par Virgin classics honore idéalement le centenaire Britten 2013. Incontournable.

Benjamin Britten (1913-1976): The Rape of Lucrezia, version de 1947. Ian Bostridge, Angelika Kirchschlager, Susan Gritton, Christopher Purves, Benjamin Russell, Peter Coleman-Wright, Hilary Summers Bianca, Claire Booth, Aldeburgh Festival Ensemble / Oliver Knussen. Virgin 2cd 6026722. Enregistré au festival d’Aldeburg en juin 2011.

- Sponsorisé -
- Sponsorisé -
Derniers articles

CRITIQUE, opéra. PARIS, Théâtre des Champs-Elysées, le 26 mars 2024. LULLY : Atys (version de concert). Les Ambassadeurs-La Grande Ecurie / Alexis Kossenko (direction).

Fruit de nombreuses années de recherches musicologiques, la nouvelle version d’Atys (1676) de Jean-Baptiste Lully proposée par le Centre...
- Espace publicitaire -spot_img

Découvrez d'autres articles similaires

- Espace publicitaire -spot_img