lecture palpitante et superlative
D’autant que le dire d’Angela Kirchschlager (Lucrezia palpitante et vertueuse) partage l’effusion vertigineuse de ses partenaires vociférants et déclamatoires. Aucun doute, la version fait figure de référence nouvelle d’un opéra chambriste et bouleversant.
Créé en 1946 avec Kathleen Ferrier dans le rôle-titre, The Rape revivifie en un néoclassicisme réaliste hyperexpressif la force de l’histoire romaine: le pervers et jaloux Tarquinius (impeccable trivialité de Peter Coleman-Wright) s’y entend à violer l’épouse de Collatinus, mari trop enviable.
Tous les chanteurs projettent un texte admirablement dramatisé, de surcroît dans l’acoustique parfaite de Snape Maltings. Au lys de Lucrezia s’oppose la barbarie cynique de l’infâme et décadent Sextus Tarquinius dont le direction toute en nuances intuitives de Knussen éclaire la tare d’ascendance étrusque, l’animalité sombre et fauve. Christopher Purves fait un Collatinus admirable de noblesse attendrie et amoureuse pour son épouse détruite.
Quelle intensité maîtrisée, quelle intériorité flamboyante, ressuscitant le mythe dans sa convulsive et splendide horreur. Autant dire que l’enregistrement opportunément édité par Virgin classics honore idéalement le centenaire Britten 2013. Incontournable.
Benjamin Britten (1913-1976): The Rape of Lucrezia, version de 1947. Ian Bostridge, Angelika Kirchschlager, Susan Gritton, Christopher Purves, Benjamin Russell, Peter Coleman-Wright, Hilary Summers Bianca, Claire Booth, Aldeburgh Festival Ensemble / Oliver Knussen. Virgin 2cd 6026722. Enregistré au festival d’Aldeburg en juin 2011.