Le sommet du comique lyrique (avant Rossini), s’accomplit ici dans une mise en scène claire sans effets confus ni décalages déroutants … Cimarosa préfigurant dans ce chef d’oeuvre de 1792, la verve espiègle rossinienne, 20 ans plus tard, au début des années 1810 (avec le Barbier de Séville de 1816).
Dans son atelier boutique, intitulé « Geronimo & Co », le père Geronimo, est un maître pâtissier plutôt florissant, qui entend marier ses filles pour se payer un blason : le roturier veut finir noble. Mais Carolina a déjà épousé secrètement Paolino (le commis de la boutique) ; ce dernier œuvre pour que le comte Robinson épouse la 2è fille Elisetta… cet aristocrate dans la famille (même secrètement ruiné) tombe à pic ; mais c’est compter sans le coup du sort et un cupidon facétieux : Robinson tombe amoureux de la belle… Carolina, la déjà mariée ; rien ne va plus !
Au Teatro Regio de Parme,
un Cimarosa vocalement pétillant
Reconnaissons d’emblée ce qui fait la valeur de la production : la vitalité d’une troupe de jeunes chanteurs où rayonnent surtout le duo des deux voix graves : Francesco Leone et Jan Antem (ci-dessous), Geronimo et Robinson (lequel après moult rebondissements et quiproquos finit par épouser Elisetta ; au lieu de la première envisagée Carolina…) ; les deux chanteurs sont d’un bout à l’autre, impeccables, articulés, légers, fins, opposant deux tempéraments virils qui jouent autant qu’ils s’affrontent : délectable posture partagée et symétrique.
Jan Antem souligne même dans le rôle de Robinson, ce qui rapproche son profil des héros mozartiens, en particulier de Gugielmo du Cosi fan tutte de Mozart. Le baryton-basse a même déjà l’étoffe d’un Leporello et d’un Don Giovanni (c’est dire). A suivre de près.
A leurs côtés, la Carolina de Giulia Mazzola affirme un même métier déjà sûr : autorité des récitatifs comme des airs et duos. Avec une pointe de désarroi tragique (dans le II surtout : la jeune femme perd la raison dans ces imbroglios à foison, se dévoilant face à Robinson, de plus en plus charmé par sa fraîche et fragile innocence ; c’est le personnage féminin le plus approfondi).
Même sensibilité piquante pour la jeune Elisetta de Marilena Ruta, voix fragile, agile, très musicale et qui sait jouer des mille registres comiques des situations (le rôle rappelle la Despina mozartienne).
Paolino parfois peu assuré, le ténor Antonio Mandrillo manque encore d’assurance vocale malgré un timbre séduisant, idéal dans l’emploi du jeune marié à Carolina (en secret) ; quelques problèmes de justesse tempèrent notre plein enthousiasme. D’autant que c’est lui qui a de principe l’esprit astucieux qui tire les ficelles du stratagème collectif.
Sans être idéalement calibré dans la pure subtilité, l’Orchestra Cupiditas (aux cordes souvent poussives) défend un abattage honnête, en particulier dans les duos, trios, surtout les ensembles au II – la partition multiplie les situations croisées simultanées ; soulignant sans forcer, la proximité de ce Cimarosa avec… Mozart, préfigurant la grâce et le délire rossiniens. S’affirme surtout l’autorité globale de la distribution vocale, regroupant plusieurs jeunes chanteurs italiens au profil prometteur, confirmant les possibilités du barcelonais Jan Antem. Spectacle réjouissant.
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Live STREAMING, opéra. PARMA, Teatro Regio, le 10 mars 2023. CIMAROSA : Il matrimonio segreto. Jan Antem, Giulia Mazzola… EN REPLAY sur OperaVision jusqu’au 10 sept 2023, 12h. https://operavision.eu/fr/performance/il-matrimonio-segreto
Carolina : Giulia Mazzola
Paolino : Antonio Mandrillo
Fidalma : Veta Pilipenko
Geronimo : Francesco Leone
Elisetta : Marilena Ruta
Conte Robinson : Jan Antem
Orchestra Cupiditas
Davide Levi, direction musicale
Mise en scène : Roberto Catalano
ECOUTER / VOIR EN REPLAY :
REVOIR en REPLAY Il Matrimonio segreto de Cimarosa au Teatro Regio de Parma (mars 2023) :
https://operavision.eu/fr/performance/il-matrimonio-segreto
