PARIS, Almazis, Yakovos Pappas à Saint-Germain des Prés

Saint germain des pres eglisePARIS, Église St-Germain, dim 27 mars, 15h30. Almazis, Iakovos Pappas. On reconnaît bien là l’esprit irrévérencieux et imaginatif qui dépoussière et surprend, la pâte mordante impertinente mais si juste du claveciniste Iakkovos Pappas, châtouilleur impénitent et défricheur plus qu’inspiré qui s’invite comme organiste dans un programme de musique sacrée française, dédiée entre autres à Nicolas Bernier et Jacques Boyvin.
BOYVIN (c. 1649 – 1706) reste célèbre pour ses 2 Livres de Suites d’orgue (1700) et comme organiste de Notre-Dame de Rouen à partir de 1674 jusqu’à sa mort. Pour lui, Cliquot conçoit un nouvel orgue à Rouen « avec 4 manuels, accouplements de pédales et plus de 40 rangées », soit un instrument des plus modernes dont les capacités étaient au diapason de ce virtuose de l’orgue.

NICOLAS BERNIER (1665-1734) étudie à Rome avec Caldara et en rapporte une maestrià exceptionnelle à Paris dans l’art de la cantate : ce qu’illustre le programme présenté par Baroques Graffiti ce 27 mars à Saint-Germain. Proche de Philippe d’Orléans, Bernier est nommé maître de musique à la Sainte-Chapelle à la suite de… MA Charpentier (1704). Bernier occupa ensuite tous les échelons à la Cour, devenant en 1723 l’un des 3 sous-maîtres successeurs de Lalande à la Chapelle royale de Versailles. Son Miserere devient au Concert Spirituel dès 1725, une pièce parmi les plus appréciées et applaudies du public parisien.

 

 

 

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BAROQUE A SAINT-GERMAINalmazis-pappas-saint-germain-baroque
Dimanche 27 mars à 15h30  
Église Saint-Germain des Prés.
Ensemble ALMAZIS
Iakovos Pappas, orgue et Isabel Fernandez soprano
MOTETS & MAGNIFICATS : PLUS D’INFOS ici
Œuvres de Nicolas Bernier, Louis-Nicolas Clérambault,
Michel Corrette et Jacques Boyvin.
Entrée libre, participation aux frais.
Production ensemble Baroques-Graffiti

 

 

 

La Grande Fugue joue La Fontaine pour ses 400 ans

la grande fugue iakovos pappas la fontainePARIS, lun 18 oct 2021, 20h. CONCERT JEAN DE LA FONTAINE. Notre fabuliste inspire les compositeurs… ainsi Clérambault, Godard, Offenbach, Lecocq, Caplet et de nos jours : Isabelle Aboulker. Pour fêter les 400 ans de Jean de la Fontaine la compagnie La Grande Fugue incarne les personnages et les situations dramatiques conçus par La Fontaine, le poète favori du surintendant Fouquet, orfèvre du mot autant que de la morale, observateur et connaisseur de l’âme et des passions humaines.
En bonus,  la troupe de chanteurs et de musiciens jouera avec la complicité de Iakovos Pappas, deux extraits d’Opéras comiques : « Les Deux Chasseurs et la laitière » de Dune et « Blaise savetier » de Philidor, tous deux sur les livrets d’après des Å“uvres de La Fontaine. Des partitions succulentes dont Iakovos Pappas, en spécialiste éclairé et inspiré, avait révélé la finesse et la verve il y a plusieurs années. D’ailleurs, Blaise le savetier de Philidor - perle lyrique de 1759, avait fait l’objet d’un remarquable enregistrement du même Iakovos Pappas, à la tête de son ensemble Almazis

RÉSERVEZ VOS PLACES ici
http://www.studio-raspail.fr/agenda/concert-lyrique/la-grande-fugue-opus-38-musiciens-en-quete-d-auteur-s.html

01 40 05 02 98 – missive@wanadoo.fr | https://societelitteraire.fr/
Prix de la place : 10 euros.

STUDIO RASPAIL
216 bd Raspail 75014 PARIS / Métro : Raspail

Renseignements sur la compagnie La Grande Fugue :

https://www.facebook.com/lagfugue

https://lagrandefugue.com/

ALMAZIS, Iakovos Pappas jouent les FABLES de LA FONTAINE

la-fontaine jean de la fontaine 400 ans en juillet 2021LA FONTAINE, 400 ans. Le 17 juillet 2021 : Almazis. Pour célébrer les 400 ans en 2021 de la naissance de l’illustre conteur, l’ensemble ALMAZIS et son chef Iakovos Pappas abordent 9 fables de Jean de La Fontaine mises en musique par Clérambault et plusieurs extraits des « Deux chasseurs et la laitière », opéra comique d’Egidio Duni, que les interprètes connaissent bien pour les avoir déjà joués entre autres en Vendée, il y a quelques années. Outre la portée moraliste des textes, souvent frappés du bon sens, l’écriture musicale sait exploiter une langue à plusieurs degrés de lecture, aussi poétique que riche en situations dramatiques cocasses, parfois délirantes. Chacune révèle de la part du fabuliste, une fabuleuse connaissance de la psyché humaine, ses faiblesses comme ses indécrottables travers (jalousie, envie, manipulation, mensonge, …). Mais toujours l’esprit de La Fontaine garde l’espoir et une certaine tendresse fraternelle pour ses héros qu’envisage l’élégance de sa prose, d’une rare acuité poétique.

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Samedi 17 juillet 2021
SOIRÉE MUSICALE au CHÂTEAU de VASCOEUIL
Jean de La Fontaine :
« LES FABLES EN MUSIQUE »
Ensemble ALMAZIS
IAKOVOS PAPPAS, direction
RÉSERVEZ vos places
(formule spéciale : exposition, dîner, concert)
http://www.chateauvascoeuil.com/Almazis.php

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almazis-vasta-iakovos-pappas-vasta-concert-annonce-critique-classiquenews-582Fondé depuis 1992 par l’excellent claveciniste et chef Iakovos Pappas, l’ensemble Almazis poursuit dans ce programme son goût des répertoires oubliés, des compositeurs à fort tempérament dont l’écriture musicale sert et articule la rhétorique du texte : le dernier disque réalisé par Iakovos Pappas dédié aux Sonates du méconnu Clément en a témoigné récemment encore en décembre 2020 – CLIC de CLASSIQUENEWS). Le chant de la musique, la qualité des textes sont ici servis par des interprètes pour lesquels le souci d’éloquence et la subtilité du geste ne sont pas de vains mots. Le travail spécifique sur la prononciation dans le chant, la déclamation, et la gestuelle, la curiosité du chef pour les autres disciplines artistiques, sa grande culture et sa sensibilité à servir le répertoire baroque français des XVIIè et XVIIIè, confirment la singularité précieuse d’Almazis.

 
 

 
 

Au programme :
9 fables de Jean de la Fontaine mises en musique par Louis-Nicolas Clérambault, contemporain du poète et trois airs extraits de « Deux Chasseurs & La Laitière », opéra-comique d’Egidio Duni sur un livret d’Anseaume, inspiré de deux fables.

Louis-Nicolas Clérambault (1676-1749)
et les Fables de La Fontaine
Bien que destinées à être originellement récitées, les Fables de La Fontaine, mises en musique, gagnent un souffle dramatique inédit du fait même des rythmes et des tempos ; le débit plus rapide, l’articulation et l’accentuation permises par le chant les rendent mêmes plus accessibles en particulier du jeune public.

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PROGRAMME 

 
Louis-Nicolas Clérambault (1676-1749) / La Fontaine
La tortue et l’aigle (Vanité opiniâtre)

La chèvre, le chevreau et le loup (La méfiance)

Jean-François Dandrieu (1681-1738)
La Chasse (clavecin seul)

Louis-Nicolas Clérambault (1676-1749) / La Fontaine
Le cerf se mirant dans l’eau (L’utile et le beau)

Louis-Claude Daquin (1694-1772)
Le coucou (clavecin seul)

Louis-Nicolas Clérambault (1676–1749) / La Fontaine
La grenouille et le bÅ“uf (L’ambition)
L’âne et le chien (Secours mutuel)

François Francœur (1698-1787)
Sonate en Ré mineur
Adagio-Allemande,
marqué Rondeau-Sarabande-Rondeau, gay.

Louis-Nicolas Clérambault (1676–1749) / La Fontaine
Le rat et l’huitre (Le badaud)
La fourmi et la sauterelle (L’oisiveté)
Le loup et le chien (La liberté)

Egidio Duni (1709-1775)
Les deux Chasseurs et la Laitière (La peau d’ours et le pot de lait)
Voilà la petite Laitière
Voici tout mon projet
Hélas j’ai répandu mon lait

Louis-Nicolas Clérambault (1676–1749) / La Fontaine
Les grenouilles qui demandent un roi (L’amour du changement)

Elizabeth Fernandez, soprano
Céline Martel, violon
Pierre Charles, violoncelle
Iakovos Pappas, clavecin et direction

 
 

 
 

Concert présenté dans le respect des règles sanitaires

Les différentes formules de la Soirée :
Dès 18h, visite du site et de l’exposition 2021 « LES FABLES »
Thématique : les Fables de la Fontaine (1621-1695) pour les 400 ans de la naissance du poète fabuliste. A leur parution à partir de 1668, Les Fables connaissent le succès grâce à leur stratégie narrative – la mise en scène d’animaux permet aux textes de critiquer et de dénoncer- et déjà leurs illustrations complètent leur impact immédiat ; c’est un pan de notre patrimoine culturel et leurs morales enrichissent le fonds de la sagesse populaire. 17 artistes ont « interprété » selon leur sensibilité et leur manière (fantastique,
surréalisme et symbolisme) : La cigale et la fourmi, Le corbeau et le renard, Le loup et l’agneau, La grenouille qui se veut aussi grosse que le bœuf, Le lièvre et les grenouilles…et tant d’autres. Au total, 65 toiles pour 65 fables.
A partir de 19h (sur réservation) AVANT le concert de 20h,
formule dinatoire à la Cascade: 19,50€ /12,50€ enfants

 

 

RÉSERVATION TÉLÉPHONIQUE OBLIGATOIRE :
02 35 236 235
ATTENTION PLACES LIMITÉES

TARIFS (visite incluse) : 25€ et 15€ (enfants + 7 ans, étudiants, pôle emploi)
Accès : 20 Km ROUEN ou GOURNAY sur RN 31 et 10 Km FLEURY sur ANDELLE ou LYONS

 

 

 

 

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LIRE aussi notre dossier spécial 400 ANS de JEAN DE LA FONTAINE

la-fontaine jean de la fontaine 400 ans en juillet 2021Génie poétique, narrateur subtile autant que doué d’une impertinence raffinée, le contemporain de Racine, n’eut pas contrairement à ce dernier, les faveurs du Roi Soleil. Proche du surintendant Fouquet à Vaux le Vicomte, La Fontaine prit la défense du ministre malgré les foudres royales ; et la disgrâce qui foudroya Fouquet, éclaboussa le poète, à jamais écarté des privilèges et pensions de la Cour. Mais à force de louanges et sollicitudes ciblées, il réussira néanmoins à se faire élire à l’Académie, après son contemporain (et ami) Boileau. On connaît évidemment ses fables (inspirées d’Esope), toujours étudiées, piliers dans l’apprentissage de notre langue, terrain propice pour aiguiser l’esprit critique de ous les écoliers de France et de Navarre. Au total 3 recueils fondamentaux de Fables sont publiés en 1668, 1678 puis à l’extrémité de la carrière en 1694 (Livre XII) ; on connaît moins ses Contes. La Fontaine autant moraliste que fabuliste de génie, et orfèvre-narrateur devient académicien en 1684.

  

  

 

ENTRETIEN avec Iakovos Pappas. 6 Sonates clavecin / violon de Charles-François CLÉMENT…

yakovos pappasENTRETIEN avec Iakovos Pappas. L’écriture de Charles-François CLÉMENT nous est révélée par l’instinct et le goût d’un interprète enquêteur de premier plan, Iakovos Pappas dont l’esprit de défrichement est demeuré intact. Clément, génie oublié du XVIIIè français, éblouit par sa virtuosité facétieuse, son mordant expressif, son goût du jeu formel et de l’invention : les 6 Sonates que le claveciniste inspiré ressuscite aujourd’hui (nouveau cd édité par Maguelone – CLIC de CLASSIQUENEWS Noël 2020), avec le concours du violoniste, aussi imaginatif qu’espiègle, Augustin Lusson, saisissent par leur vitalité inclassable : une exception à classer désormais aux côtés des opus de Leclair, Rameau, Mondonville… Entretien exclusif pour classiquenews.com

 

 

 

CLASSIQUENEWS : Comment définir le style de Clément comparé à Leclair, Rameau, Mondonville ?

IAKOVOS PAPPAS : Je dirais en préambule que définir est de nature restrictive, et cela doit être manié avec circonspection. Lorsqu’on définit des états simples ceci ne pose pas de difficulté, mais dès que nous trouvons en face des états si complexes qu’un style artistique, l’art de la définition s’obscurcit souvent, et surtout inutilement. Il est plus aisé d’apercevoir, ou sentir si on veut, un style que le définir d’une façon pleinement satisfaisante adéquate.

On surmonta cette difficulté, laquelle causa beaucoup de céphalées, en définissant par la négation, que les métaphysiciens appellent apophatisme. Bien-sûr ce n’est pas pareille chose vouloir définir le Divin que circonscrire l’œuvre d’un simple mortel.

Cette mise en garde émise, il faut souligner un autre point essentiel, quant à la stylistique française, je veux parler de la tradition. En restant dans le domaine musical français des XVII et XVIII siècles , une chose remarquable frappe un auditeur tant soi peu attentif : sa continuité stylistique. Des personnes n’ayant ni l’ouïe assez fine et attentive, ni un esprit dégagé de préjugés, trouvent que cette musique se ressemble et se répète.

Alors il est important de dégager ce qui appartient à la tradition, c’est-à-dire le vocabulaire commun de ce qui est proprement personnel.

Comme Leclair et Rameau, Clément est un harmoniste accompli ; j’ai déjà énuméré un certain nombre de remarquables passages témoins de sa maîtrise en la matière. D’un autre côté il est capable d’écrire des passages, tel que le second mouvement de la première sonate, d’une tendresse simple comme Mondonville qui y excelle. Il manie également la forme avec une facilité désinvolte, toute personnelle.

La meilleure voie pour comprendre une telle musique est de l’écouter avec une attitude active, sans jamais oublier qu’elle n’est pas conçue comme un loisir ou pour servir de fond sonore.

 

 

 

CLASSIQUENEWS : La part du clavecin est spécifique, comptant 2 voix. Comment se réalisent ses dialogues avec le violon ?

IAKOVOS PAPPAS : Certes Clément intitule son Å“uvre Sonates en trios en comptant une voix pour le violon et deux pour le clavecin! Cependant la réalité est bien plus complexe et deux exemples suffiront à le prouver facilement. En comparant le final de la IIe sonate et le second air de la IVe sonate on s’aperçoit que le premier final est écrit strictement en trois parties, alors que le second en quatre. C’est selon le besoin de chaque pièce, le cadre préétabli peut se réajuster. Une écriture obéissant scrupuleusement au postulat du titre conduirait inévitablement à une écriture scolaire et fatalement à faire bailler! Ceci est un point commun avec Rameau et Mondonville.

D’autre part j’ai déjà indiqué (IIe remarque de mon Essaie) l’absence totale de la basse-continue dans cette œuvre de Clément. Par conséquent le clavecin se voit obligé de suppléer le manque d’improvisation qu’une basse chiffrée lui permettrait avec une série d’accompagnements écrits en toutes notes. Cette profusion d’accompagnements ingénieusement variés que ces Sonates offrent, dépasse d’une part les œuvres antérieures des Mondonville, Corrette et Rameau ; l’imbrication fusionnelle de deux partenaires provoque l’effacement des limites entre les passages d’accompagnement, et, passages solistes. Même le Concerto (1e mouvement, Ve Sonate) ne respecte pas une délimitation nette entre les parties, pourtant signe distinctif d’un concerto.

Il ne faut pas perdre de vue que ce rapport de stricte égalité entre les deux instruments n’a jamais été attesté auparavant, et que peu de compositeurs postérieurs peuvent s’en prévaloir d’y être arrivés.

 

 

 

 

CLASSIQUENEWS : Vous avez choisi comme partenaire le violoniste Augustin Lusson. Sur quels aspects musicaux et techniques avez-vous particulièrement travaillé ?

IAKOVOS PAPPAS : Pendant la période qui nous intéresse, la distinction entre musique proprement dite et technique est quasi nulle. Des œuvres didactiques telles que l’Art de toucher le Clavecin de F. Couperin, ou les Exercices de D. Scarlatti sont éminemment des compositions exigeant un travail d’interprétation, la partie mécanique étant un de ces aspects. Distinguer musique et technique mécanique est une conception bien plus tardive. On peut être musicien exécrable et pouvoir jouer sans difficulté les œuvres didactiques d’un Carl Czerny.

Pour ce qui est déchiffrage d’une partition inconnue, on se trouve dans une position mentale semblable à celle de Jean-François Champollion devant la Pierre de Rosette. Il ne reste que le travail par analogie, puisqu’aucune tradition interprétative ne peut nous être secourable directement. Pouvoir travailler analogiquement suppose obligatoirement une vaste connaissance du répertoire voisin.

Prenons le cas d’indications du mouvement : le finale de la IVe sonate comporte comme indication Presto ; jusqu’à quelle vitesse faut-il le jouer ? La présence d’un grand nombre d’ornements (tremblements et pincés) exclue un jeu trop pressé, comme on pourrait se permettre dans une pièce qui en serait dépourvue. Les ornements sont par ailleurs le sceau de cette musique française, quand bien même elle se trouverait maquillée avec quelque fard italianisant. Le Concerto mouvement initial de la Ve sonate à l’opposé manque d’indications ; comment procède-t-on en pareil cas ? Ainsi un travail expérimental commence afin de trouver l’équilibre entre le débit harmonique, la propreté des ornements et le brillant qu’exige pareille forme musicale. Jouer son instrument est insuffisant quant à ce travail minutieux demandant beaucoup de patience, un esprit ouvert aimant l’aventure ; il faut des personnalités que l’inconnu n’effraie pas, ce qui n’est pas donné à tous. Voici comment fut dicté le choix porté à Augustin Lusson.

 

 

 

 

CLASSIQUENEWS : En quoi dévoiler la manière de Clément permet-il de mieux comprendre la forme Sonate au XVIIIe ?

IAKOVOS PAPPAS : Mon dessein initial, était simplement de partager avec le public cette musique qui vient du passé et tend vers l’avenir.

Aussitôt, il apparut indispensable, au cours de l’élaboration du présent enregistrement, de l’accompagner de quelques éclaircissements à l’usage aussi bien des auditeurs curieux que des musiciens se voulant avertis.

Cependant plus je me plongeais dans différents textes en rapport avec mon objet, plus je constatais l’invraisemblable amas d’erreurs, de lieux communs et d’affirmations doctement

étalés avec un aplomb stupéfiant. Et je me suis trouvé dans l’obligation, par honnêteté envers les auditeurs et moi-même, d’élargir le plan de la rédaction initiale.

En premier lieu se pose le problème des vocables : le sort de certains mots fort usités est toujours le même, l’altération ; soit de sa forme soit de son sens, soit des deux à la fois. Quand le signe demeure inchangé et la chose signifiée s’altère, nous nous trouvons nécessairement devant des barrières infranchissables. Sonate ne signifie pas la même chose sous la plume d’un Domenico Gabrielli et sous la plume d’un Jiry Benda ; un menuet de Lully n’a de commun que le nom d’avec celui de Beethoven.

En second lieu le problème des modèles se pose pour pouvoir opérer des comparaisons : affirmer quoi que ce soit du point de vue stylistique, sans avoir une quantité suffisante de sources à comparer, nous condamne à conjecturer au mieux ou à pérorer au pire. Encore une fois plus la définition est restrictive plus on risque de se trouver avec des exceptions embarrassantes. Prendre le cas particulier pour le cas général afin d’ établir une règle se soldera invariablement par un échec et une vision estropiée ; le rétrécissement de la connaissance devient inévitable.

En troisième et dernier lieu, la notion linéaire de l’histoire, amenant par évolution vers un état de perfection, est un colifichet enfantin. La véritable connaissance s’obtient par des longs et pénibles travaux, et pour y parvenir on ne peut aspirer au repos.

Propos recueillis en décembre 2020.

 

 

 

 

clement-sonates-en-trio-pappas-lusson maguelone critique cd classiquenewsCD, événement critique. CLÉMENT : Sonates enCLIC_macaron_20dec13 trio, Iakovos Pappas / Augustin Lusson (Maguelone, 2019). Connaissez-vous les Sonates pour clavecin et violon de Charles François Clément (c 1720 – Paris, 1789) ? En polémiste virtuose, d’une acuité parfois mordante, par son verbe et son geste, le Iakovos Pappas souligne la clarté audacieuse de CF Clément, puissant créateur aux côtés des Leclair, Rameau, Mondonville… A la manière des polémistes du XVIIIè, Iakovos Pappas prend la plume, trempée dans un bain de verve critique voire acerbe contre les tenants du goût et de la culture « classique ». On y goûte son humour et son sens parodique, son esprit libre qui « ose » non sans raison et nombreux arguments, attaquer la légitimité de tout ceux qui jugent ; affichant, claironnant des contre vérités souvent aussi énormes qu’elles sont émises sans vrai discernement. Ce sens analytique s’applique ensuite dans une série de « remarques » qui commente et explique la manière inventive voire décisive de Charles François Clément dont la carrière s’arrête à la Révolution.

CD, événement critique. CLÉMENT : Sonates en trio, Iakovos Pappas / Augustin Lusson (Maguelone, 2019)

clement-sonates-en-trio-pappas-lusson maguelone critique cd classiquenewsCD, événement critique. CLÉMENT : Sonates en trio, Iakovos Pappas / Augustin Lusson (Maguelone, 2019). Connaissez-vous les Sonates pour clavecin et violon de Charles François Clément (c 1720 – Paris, 1789) ? En polémiste virtuose, d’une acuité parfois mordante, par son verbe et son geste, le Iakovos Pappas souligne la clarté audacieuse de CF Clément, puissant créateur aux côtés des Leclair, Rameau, Mondonville… A la manière des polémistes du XVIIIè, Iakovos Pappas prend la plume, trempée dans un bain de verve critique voire acerbe contre les tenants du goût et de la culture « classique ». On y goûte son humour et son sens parodique, son esprit libre qui « ose » non sans raison et nombreux arguments, attaquer la légitimité de tout ceux qui jugent ; affichant, claironnant des contre vérités souvent aussi énormes qu’elles sont émises sans vrai discernement. Ce sens analytique s’applique ensuite dans une série de « remarques » qui commente et explique la manière inventive voire décisive de Charles François Clément dont la carrière s’arrête à la Révolution.

Professeur de clavecin à Paris, Clément a laissé un recueil de 3 cantatilles (Le Départ des guerriers et Le Retour des guerriers en 1750, Le Célibat en 1762), un Livre de Sonates en Trio pour clavecin et violon (1743) – le sujet du présent album ; un journal de clavecin (airs extraits des intermèdes et opéras comiques à la mode, transcrits pour clavecin seul et accompagnement de violon)…publié dès 1762. A l’opéra, Clément compose aussi La Pipée, parodie d’après le Paratorio du napolitain Jommelli (Théâtre Italien, 1756), l’opéra comique la Bohémienne (1756).

En référence à Rameau (Pièces de clavecin en concerts, 1741), Clément pose d’emblée que le clavecin compte pour 2 voix. Sa densité – comme l’est aussi celle de Forqueray, contredit la légèreté d’une musique rocaille et galante qui ne serait être que « creuse ». Personnalité qui touche par sa profondeur et son imagination, Clément maîtrise le jeu égal réservé aux deux instruments, autant qu’un Mondonville (opus III).
Sur le plan structurel, ses 6 Sonates appliquant le schéma lent – vif – lent, suivent Rameau plutôt que Mondonville : la forme à 3 mouvements « traditionnelle », est enrichie (pour 3 d’entre elles) d’inserts au caractère imprévu. Exemple : Sonate III : Allegro-Largo e affettuoso – Minoetto I (rondeau) – Minoetto II – Giga. Allegro. Soit une expérimentation permanente dans l’esprit d’un laboratoire musical.
Le clavecin en verve, autant que le violon donc, indique une écriture raffinée, volubile, juste, attestant de l’éloquence expressive du clavier baroque, – jusqu’à sa pleine disparition en 1776 (à l’Opéra de Paris).

 

 

 

Merveilles de la Sonate française au XVIIIè

Iakovos Pappas ressuscite le génie expérimental
de Charles François Clément

 

 

 

clement-sonates-en-trio-pappas-lussonD’une érudition pertinente, Iakovos Pappas note très judicieusement la place primordiale du rondeau, avec son refrain, court, mémorisable, puis son couplet (trait manifeste dans la Sonate II). Même non indiqué, sa carrure, son allure y sont évidents… En particulier dans le mouvement central. Le fait qu’il soit associé au premier Allegro de la Sonate II est inédit alors. Le claveciniste en expert de la forme distingue chaque variation ainsi élaborée par Clément dans le traitement musical (rondeau noté « aria affetuoso » en forme de gavotte tendre de la Sonate I ; structure rondeau très originale, détaillant la succession du refrain puis des 3 couplets qui suivent pour l’ultime mouvement de la Sonate III, noté « Allegro poco andante »).
Comme s’il suivait l’instinct novateur d’un Clément réformateur, le geste souple de Iakovos Pappas, rappelant très justement l’influence de la danse chantée, prend soin de toujours préserver le flux naturel, l’allant, le rebond flexible de chaque Sonate : cela chante et parle même, mais cela court et ondule.

LE CLAVECIN DES LUMIERES… S’agissant de la structure même des parties, le claveciniste s’interroge sur les éléments qui relèvent de la rhétorique même du discours musical, soulignant le bon usage du point d’orgue (point d’arrêt), opportun entre autres lorsqu’il indique le début d’une section improvisée (cadence), en règle générale jouée sans reprises (comme Corelli au siècle précédent, dans ses Préludes à mouvement lent ou modéré). Toute l’esthétique expressive fondée sur la respiration et le rebond naturel s’en trouve éclaircie. A partir d’une analyse très fine des partitions éditées au XVIIIè, Iakovos Pappas intègre aussi le phénomène émergeant au début du XVIIIè (avec Veracini, Geminiani ou Locatelli), le point d’orgue sans limite tend à défaire la « régularité du rythme périodique » et accentuer la lente et inéluctable « dislocation «  de la forme des mouvements. En France Dandrieu et Rameau indiquent les points d’arrêt, comme Guillemain, Guignon, Duphly et Jean-Marie Leclair (qui fut danseur), en particulier dans la décennie 1730 – 1740. Incroyable parcours de la notation ainsi relevée qui mène jusqu’à Ernelinde de FAD Philidor de 1767, « littéralement noyé » sous les points d’orgue !
Tout cela indique l’évolution permanente de la forme, soumise à l’invention des compositeurs, à la ténacité de leur geste libre face à la mécanisation du rythme (batteries interminables « inventées à la fin du XVIIè en Italie »). Une défense du génie français se glisserait-elle ainsi grâce à une argumentation qui séduit par son éloquence ?
La conception première et le geste qui en découle sont ainsi restituée dans leur contexte et leur ineffable parure ; l’approche et la lecture qui sont ici proposées saisissent par leur finesse et leur ouverture ; c’est un retour aux fondements même de la « Révolution baroqueuse » propre aux années 1970 ; Iakovos Pappas suggère, évoque, prend en compte toutes les options à partir des notations minutieusement constatées ; cette culture philologique nourrit un questionnement perpétuel sur chaque mesure, chaque formule rythmique ; le sens, la direction, la réalisation d’une poésie musicale dont la richesse et la carrure toujours en métamorphose singularisent l’écriture française. Voilà qui réhabilite Clément au rang des créateurs les plus imprévisibles et les plus pertinents de son époque. D’autant que le violon d’Augustin Lusson, satellite libre et lui aussi virtuose, renforce le tempérament et l’intention artistique du programme. L’élève de Patrick Bismuth, remarqué par Sigiswald Kuijken partage l’acuité d’esprit, l’expressivité articulée de Iakovos Pappas. Ces deux là s’électrisent. Clément ne pouvait rencontrer meilleurs alliés.

On croit vivre de nouveau le temps des défricheurs… quand nombre d’interprètes savaient oser, expliquer, convaincre, révélant dans le Baroque tout ce qu’il a de neuf, de moderne, d’inouï, d’imprévisible et de saisissant.

 

 

 

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CLIC_macaron_2014CD événement, critique. Charles-François CLÉMENT (1720 – 1789) : Sonates en trio, Iakovos Pappas, clavecin / Augustin Lusson, violon (Maguelone, 2019) – 6 Sonates en trio, 1743 – Livre cd Maguelone MAG 358.435 – Enregistrement sept 2019 – durée : 1h10. Notice livret : essai “Considérations sur la légitimité de l’autorité critique et son usurpation†par Iakovos Pappas – CLIC de CLASSIQUENEWS Noël 2020

 

 

 

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LIRE aussi notre annonce du livre cd Charles François Clément : Sonates en trio / Iakovos Pappas :
http://www.classiquenews.com/cd-evenement-critique-clement-sonates-en-trio-iakovos-pappas-maguelone-2019/

 

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LIRE aussi notre ENTRETIEN EXCLUSIF avec Iakovos PAPPAS à propos de Charles François Clément, génie oublié du XVIIIè français :

yakovos pappasENTRETIEN avec Iakovos Pappas. L’écriture de Charles-François CLÉMENT nous est révélée par l’instinct et le goût d’un interprète enquêteur de premier plan, Iakovos Pappas dont l’esprit de défrichement est demeuré intact. Clément, génie oublié du XVIIIè français, éblouit par sa virtuosité facétieuse, son mordant expressif, son goût du jeu formel et de l’invention : les 6 Sonates que le claveciniste inspiré ressuscite aujourd’hui (nouveau cd édité par Maguelone – CLIC de CLASSIQUENEWS Noël 2020), avec le concours du violoniste, aussi imaginatif qu’espiègle, Augustin Lusson, saisissent par leur vitalité inclassable : une exception à classer désormais aux côtés des opus de Leclair, Rameau, Mondonville… Entretien exclusif pour classiquenews.com

 

 

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CD, événement critique. CLÉMENT : Sonates en trio, Iakovos Pappas (Maguelone, 2019)

clement-sonates-en-trio-pappas-lusson maguelone critique cd classiquenewsCD, événement critique. CLÉMENT : Sonates (Maguelone, 2019). Le claveciniste Iakovos Pappas ne fait pas que ressusciter l’écriture audacieuse d’un créateur français oublié, Charles François Clément mort à Paris en 1789. Il en explique très minutieusement les qualités compositionnelles (plan, références à la danse, importance du rondeau, parité entre le violon et le clavecin, ce dernier comptant pour deux voix…). : l’auditeur mesure une conception et une pensée musicale aussi audacieuse voire complexe que Mondonville et … Rameau. Clément a fait évoluer le genre du Trio et de la musique instrumentale française au XVIIIè d’une manière marquante, par son originalité et sa fantaisie expérimentale. Avec la liberté de ton des polémistes des Lumières, le claveciniste n’oublie pas aussi dans la première partie du livret d’épingler les préjugés et fausses croyances sur la musique baroque et le classicisme, n’hésitant pas à mettre en doute aussi ceux qui jugent (les critiques) quand il ne faudrait pourtant que prendre en compte leeur argumentaiton et la légitimité de leur autorité critique… Livre cd événement, CLIC de CLASSIQUENEWS Noël 2020. Prochaine critique dans le mag cd dvd livres de classiquenews.com. Parution numérique, dès le 1er décembre 2020 – Parution physique : 4 décembre 2020. Plus d’infos sur le site du label Maguelone

CLIC_macaron_2014CD événement, annonce. Charles-François CLÉMENT (1720 – 1789) : Sonates en trio, Iakovos Pappas, clavecin / Augustin Lusson, violon (Maguelone, 2019) – CLIC de CLASSIQUENEWS Noël 2020 – 6 Sonates en trio, 1743 – Livre cd Maguelone MAG 358.435 – Enregistrement sept 2019 – durée : 1h10. Notice livret : essai “Considérations sur la légitimité de l’autorité critique et son usurpation” par Iakovos Pappas.

CD, VASTA : Reine de Bordélie (1 cd Maguelone, Almazis, Yakovos Pappas, 2018)

VASTA-almazis-cd-livre-critique-annonce-classiquenews-cd-par-classiquenewsCD, VASTA : Reine de Bordélie (1 cd Maguelone, Almazis, Yakovos Pappas, 2018). Plus affûté et engagé que jamais, le chef et claveciniste Iakovos Pappas poursuit l’idée d’un Baroque séditieux, libertaire, plus expérimental que convenu voire complaisant. Voilà un Baroque qui dérange et qui nous plapit…. dont les délices ont ravi les spectateurs lors d’un concert bienvenu, prélude à ce disque, présenté à la BNF. Les manuscrits concernés y sont tous conservés – dormants, oubliés,… jusqu’à aujourd’hui. Les cordes âpres, mordantes, expressives, le clavier et les voix très en verve savent ici ressusciter l’irrévérence inventive des libres penseurs et des érotomanes du XVIIIè. Le texte de Piron (Vasta, Reine de Bordélie) choisi dans ce programme réjouissant, souligne combien dès son début, le XVIIIè français manie la langue avec délire, poésie et invention ; l’épigrammiste évoque cet essor remarquable du Baroque insoumis, revenu à son irrespect critique ; interprètes, textes et musique accréditent l’émergence d’une pensée souveraine, féconde pour les arts, stimulante pour l’esprit. A travers un texte provocateur en façade, c’est la liberté recréatrice de l’art qui est célébré et grâce à Almazis, l’inspirante liberté (pour les interprètes) de la satire critique.

EROTIQUE INSOLENCE, BAROQUE PARODIQUE

En liaison avec l’insolence inspirée de l’épigrammiste français Alexis Piron (1689-1773) qui fournit le texte de cette tragédie imaginaire, Iakovos Pappas a scrupuleusement sélectionné les musiques les plus adaptées. L’Académicien déchu, qui perdit son fauteuil et ses palmes d’Immortel, en raison justement de ses saillies et pointes géniales (Ode à Priape, texte de jeunesse) laisse surtout un texte d’une rare éloquence comique, prétexte de ce programme : « Vasta, reine de Bordélie ».  Piron concentre l’inspiration emblématique du XVIIIè français : la comédie, en ce qu’elle cultive et révèle les vertus de la verve satirique,  de l’insolence poétique. Erotique et même poétiquement obscène, le texte cible en réalité la censure et la politique, la chape asphyxiante qui corsète toute la société de l’Ancien Régime.

A travers l’intrigue, une mère (Vasta) et sa fille (Conille) s’affrontent à travers leurs amants. La « goulue », Vasta démontre sans morale, sa souveraine prééminence, – un tempérament virile en vérité (formidable, sincère, hallucinée Elizabeth Fernandez), sacrifiant sa fille (trop molle : larmoyante et habitée elle aussi Delphine Guevar) ; la reine décide : elle célèbre l’endurance admirable du prince « Fout Six coups » (et son accent provincial bien trempé : truculent Christophe Crapez). Tous les chanteurs rehaussent par leur esprit de caractérisation, et un vrai plaisir de la langue (et ses méandres sémantiques souvent hilarants), l’irrévérence du livret ; tous sont habiles à transférer d’authentiques situations tragiques et nobles, dans un texte d’une liberté amorale, provocante, … voire dangereuse.  L’amateur des tragédies en musique retrouve le caractère des vraies scènes éplorées, à la fois langoureuses et suspendues, de vraies tensions affrontées,… mais dans une langue crue, totalement et outrageusement décalée.
Ce principe parodique prend une dimension emblématique dans le récit du viol de Vit-Mollet par Fout Six coups, rapporté par Couille au cul (excellent Guillaume Durand, fin du II) : au récit savoureux répond l’engagement des instrumentistes très proches du texte.

La force du programme vient aussi de la variété des auteurs, et des contrastes que leur style font naître : abandon lacrymal – « la princesse n’est plus » / en déchargeant (Benda, plage 25) : noblesse et majesté de la Reine (Marche de Campra, 26) qui salue l’arrivée de son  héros final (Fout-six-coups, exposant les parties de son rival vaincu, Vit-Mollet)… tout s’enchaîne avec un sens délectable des saillies percutantes.

Après les actes de la « tragédie », Iakovos Pappas agence enfin un grand « divertissement » (selon les codes du genre), et agence plusieurs fragments musicaux d’une évidente tension dramatique  : on y relève plusieurs extraits de « Zaïde » de Pancrace Royer (encore une perle oubliée, opportunément révélée ici : « Chasse » en prélude ; enfin « Air des turcs » et « tambourins » pour conclusion.
Le verbe n’est pas omis, grâce à la restitution de 4 séquences chantées, déclamées : Nous perdons Philis (duo de déploration à deux voix mâles); Monologue « Cucumane » (Caquire de De Vessaire, 1780), en voix de tête par le ténor Christophe Crapez, dont la verve insolente exprime déjà le climat révolutionnaire des années 1780…
Tout l’esprit libertaire, délirant est déjà énoncé entre autres dans le Prologue avec « Vive les cons », extrait du Déserteur de Monsigny, 1769 ; dans « On dit que le médecin » de JC Gillier, tout en gouaille et vulgarité ; il est même exacerbé et servi en un geste libéré, déluré, essentiellement linguistique et théâtral : « C’est fait Minon, Minette… » dans l’inoubliable « L’autre jour » de Louis Lemaire décédé en 1750.
De même, le scabreux voire scato (« le pot de chambre », puis « Les Cheminées »…) nourrit la tension du divertissement final, conclusion magnifique de la tragédie érotique proprement dite.
Toujours la verve des chanteurs et des instrumentistes redouble en cocasserie linguistique et triple lecture expressive… c’est une parodie insolente et paillarde (relecture de « Plaisirs d’amour » de Martini placé en fin de Prologue) ; c’est un procès en règle des canons de la tragédie officielle, de ses règles si strictes et asphyxiantes qui ont prévalu de Lully à Rameau, étouffant certainement l’écriture des auteurs : il fallait bien toute la créativité des forains satiriques (que reprennent à leur compte avec combien de justesse, les interprètes d’Almazis) pour en mesurer à la fois le ridicule et le potentiel humoristique ; tous ces décalages en dénoncent allusivement l’artificialité et le manque de vérité d’un genre que Gluck réformera à Paris au début des années 1770.
Or le geste d’Almazis retrouve cette franchise et cette sincérité qui manque tant (que JJ Rousseau appréciait tant). Les textes osés, provocants rétablissent le sang, la pulsion certes primitive, un naturel « populaire » totalement absent du genre noble.
Au clavecin, et à la direction, Iakovos Pappas sait exalter et électriser sa troupe : chanteurs acteurs et comédiens, capables de transformer leur voix, jouant des registres et des types de projection ; instrumentistes sans réserve, soulignant tout ce qu’ont d’irrévérence séditieuse textes et musique : sous leurs doigts amusés mais conscients, se profilent déjà les ferments de la révolte et de la sainte liberté.

On goûte la causticité mordante du texte, paillarde donc choquante au premier degré ; et pourtant furieusement critique à l’endroit du politique, réduit à des êtres de pulsions et de jouissance immédiate ; sur le plan musical, Iakovos Pappas a ainsi résumé tous les effets de la palette lyrique expressive, propre au genre officiel au XVIIè et XVIIIè, la tragédie en musique. D’ailleurs, c’est l’une des partitions les plus scandaleusement musicale, d’un débridé ici désopilant (et qui préfigure toutes les comédies musicales à venir),  Platée de Rameau (1745) qui ouvre l’action centrale. 
 
 

BONUS… La cantate « burlesque » et d’une belle insolence, Actéon de Pierre-César Abeille (décédé en 1733) atteste de l’essor de ce courant baroque paillard, qui sait avec quelle intelligence et raffinement se moquer des codes mythologiques et tragiques. Abeille appartient à la colonie d’auteurs doués d’une extrême acuité expressive et poétique, dont Monteclair ou même JB Rousseau (Odes tirées des Psaumes, 1716) sont d’autres penseurs doués.
La solide gouaille articulée du baryton Guillaume Durand (qui incarne Couille-au-cul dans la tragédie qui précède) sert idéalement le texte, avec une attention affûtée à l’intelligibilité, une exquise et savoureuse compréhension des enjeux des images poétiques, un rien lubrique, et bien habitée. Le vrai sujet ici, c’est ce qu’a vu le chasseur : la nudité de la déesse (précisément ses jolies fesses) : c’est la déesse calipige que cible Abeille dans sa fabuleuse cantate / et le regard impudique du chasseur, sa curiosité irrespectueuse sont le vrai sujet de cette séquence qui ne manque pas de piquant, et là encore ni cocasserie très imaginative:… « Diane se lave le cul avec ses nymphes potagères qui lui servent de chambrières… » etc…

CLIC D'OR macaron 200BAROQUE INSOLENT, BAROQUE INVENTIF…Nerveux et souple, le continuo d’Almazis expose chaque mot, le commente, l’enveloppe d’une ironie poétique délectable.  En choisissant d’achever le cycle de Piron, par cette cantate, véritable joyau en irrévérence poétique et irrespect des convenances mythologiques, Iakovos Pappas rétablit la place de la cantate comme écrin expérimental, propice à renouveler l’écriture lyrique et la construction dramatique, officielles. Abeille, Piron… le chef d’Almazis a bien raison de souligner et la force du texte et la qualité de la musique. On l’on ce dit face à tant de créativité censurée, qu’il nous manque encore bien des informations pour connaître vraiment la diversité de notre patrimoine. Voilà posées, les bases d’une nouvelle recherche à la fois littéraire, poétique, lyrique et musicale qu’il faudrait encore et encore approfondir. A suivre.

 
 
  
 
 

LIRE AUSSI notre présentation critique du CD VASTA

 
 
  
 
 

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VOIR un extrait vidéo de VASTA, Reine de Bordélie, 1773 – extraits du spectacle donné à la BNF Bibliothèque National de France, en avril 2018.
https://www.youtube.com/watch?v=iIzsuzZUDag
 
 
 
VOIR LE TEASER VASTA,  reine de Bordélie, tragédie érotico-lyrique d’Alexis Piron (1773)
Ensemble Almazis – Iakovos Pappas / Co réalisation Bibliothèque Nationale de France
https://vimeo.com/301819639  

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https://vimeo.com/301819639  

 
 
 

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yakovos pappasENTRETIEN avec Iakovos PAPPAS, à propos de VASTA, Reine de Bordélie, 1773… Le 23 novembre 2018 paraît le nouvel album d’Almazis : « Vasta, Reine de Bordélie », tragédie érotico-lyrique d’Alexis Piron. A partir de textes du XVIIIè, le chef et claveciniste, défricheur impertinent, poursuit un travail souvent percutant / pertinent sur les sources baroques. En associant baroque et érotisme, Iakavos Pappas renoue avec l’instinct défricheur des plus grands « baroqueux », … en découle un drame d’un nouveau genre, où là encore, textes et musique, drame et poétique sont indissolublement liés. LIRE notre entretien avec IAKOVOS PAPPAS…

 
 
 

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Cd, critique. PIRON : VASTA Reine de Bordélie (1773) – Almazis (1 livre-cd Maguelone)

VASTA-almazis-cd-livre-critique-annonce-classiquenews-cd-par-classiquenewsCd, critique. PIRON : VASTA Reine de Bordélie (1773) – Almazis (1 cd Maguelone). Au début de ce drame érotique, la Reine de Bordélie, Vasta congédie son amant Vit-Molet (Prince de la cour) en raison de sa mollesse qui lui fait perdre un temps précieux… Frappart, le capitaine des gardes saura, lui, répondre à ses demandes… A moins qu’un prince étranger (Fout-six-coups) ne se montre plus convaincant… La « tragédie » d’Alexis Piron assemble en réalité un matériau musical et lyrique emprunté à divers auteurs du XVIIIè dont Pancrace Royer (extraits de Zaïde), Lemaire, Abeille (Actéon), surtout Rameau (ouverture de Platée), Mondonville (Isbé), Benda, … sans omettre la lyre tragique française à sa source, Lully (Atys). Inspiré par son sujet, Iakovos Pappas sélectionne un catalogue de textes paillards à l’érotisme raffiné qu’il accompagne lui-même et dont il a écrit les arrangements pour les voix (Vive les cons, le siège de l’âme, le pot de chambres, la sodomie, les cheminées…). S’il n’était les références érotiques, toutes les situations dramatiques et lyriques sont bien celles d’un héroïsme tragique et parfois sanglant habituel sur la scène de l’Académie royale (cf. la mort de Conille, fille de Vasta ; ou le sort réservé à Vit-Mollet par Fout-six-coups, comme en atteste le récit de Vit-en-l’air, scène II, Acte III). Au final c’est l’ardeur et l’endurance de Fout-six-coups, prince étranger, porteur d’un sang neuf, régénérateur, que Vasta célèbre devant sa cour.
A travers les pépites savoureuses de textes très inspirés, s’écoule le nerf tragique le plus âpre, tendu, mordant. Dans cette arène, où les mots guerriers et barbares ont troqués le lieu des batailles pour les draps de l’alcôve, on mesure avec quel souci du détail, avec quel soin pour le sens du texte, et pour la cohérence du drame, les musiciens réunis autour du clavecin de Iakovos Pappas, s’ingénient à incarner et rendre palpitant chaque séquence.

CLIC D'OR macaron 200Joué à la BNF en avril 2018, le programme trouve un second souffle au studio qui articule encore davantage les moteurs de la provocation, surtout l’expression d’une pensée libre, imaginative, souveraine dans sa verve délirante et poétique. Le chef et directeur d’Almazis célèbre en vérité l’acuité de la langue française, celle du baroque Alexis Piron, chansonnier vert et cru. Tous les hommes valent par la taille et l’endurance de leur membre ; toutes les femmes sont prêtes à tout pour s’y abandonner sans retenue. Elles ont le rire gras, et la posture complice. Eux redoublent de malice, de saillies satiriques, de nuances parodiques… En Conille, Delphine Guevar (et son « Con goulu »), comme Elizabeth Hernandez (dans le rôle titre), relèvent parfaitement les défis de leurs parties, avec un plaisir manifeste, dans l’expressivité comme l’intelligibilité. D’autant que leurs partenaires et tous les musiciens jouent des notes comme les vers des textes choisis, avec une finesse savoureuse. Il faut infiniment de maîtrise des caractères (tragique, héroïque, langoureux, lacrymal…) pour ressusciter cette mosaïque délurée d’instants cocasses et goguenards, d’une fantaisie sans limite, qui dévoilant le tabou, offre un vent rafraîchissant contre le puritanisme moderne et l’hypocrisie ambiante. On sait gré à Iakovos Pappas et sa troupe engagée de rétablir ce baroque piquant, expérimental, imprévisible et délicieusement impertinent… à mille lieues des recréations actuels dont le sérieux et le noble registre ont fini par asphyxier toute audace et tout esprit d’invention. Le baroque choisi ici souffle l’esprit de Voltaire : il lui faut de la liberté et de l’art. Tout ce que nous offre l’opéra conçu par Iakovos Pappas dans son insolence policée. Irrésistible.

 
 
 
 
 
 

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VOIR un extrait vidéo de VASTA, Reine de Bordélie, 1773 – extraits du spectacle donné à la BNF Bibliothèque National de France, en avril 2018.
https://www.youtube.com/watch?v=iIzsuzZUDag

 
 
VOIR LE TEASER VASTA,  reine de Bordélie, tragédie érotico-lyrique d’Alexis Piron (1773)
Ensemble Almazis – Iakovos Pappas / Co réalisation Bibliothèque Nationale de France
https://vimeo.com/301819639  

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https://vimeo.com/301819639  
 
 
 
 
 
 

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yakovos pappasENTRETIEN avec Iakovos PAPPAS, à propos de VASTA, Reine de Bordélie, 1773… Le 23 novembre 2018 paraît le nouvel album d’Almazis : « Vasta, Reine de Bordélie », tragédie érotico-lyrique d’Alexis Piron. A partir de textes du XVIIIè, le chef et claveciniste, défricheur impertinent, poursuit un travail souvent percutant / pertinent sur les sources baroques. En associant baroque et érotisme, Iakavos Pappas renoue avec l’instinct défricheur des plus grands « baroqueux », … en découle un drame d’un nouveau genre, où là encore, textes et musique, drame et poétique sont indissolublement liés. LIRE notre entretien avec IAKOVOS PAPPAS

 
 
 

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VASTA, Reine de Bordélie. Entretien avec IAKOVOS PAPPAS / ALMAZIS

VASTA-almazis-cd-livre-critique-annonce-classiquenews-cd-par-classiquenewsVASTA, Reine de Bordélie. Entretien avec IAKOVOS PAPPAS, directeur musical et fondateur de l’ensemble Almazis. Le 23 novembre 2018 paraît le nouvel album d’Almazis : « Vasta, Reine de Bordélie », tragédie érotico-lyrique d’Alexis Piron. A partir de textes du XVIIIè, le chef et claveciniste, défricheur impertinent, poursuit un travail souvent percutant / pertinent sur les sources baroques. En associant baroque et érotisme, Iakavos Pappas renoue avec l’instinct défricheur des plus grands « baroqueux », … en découle un drame d’un nouveau genre, où là encore, textes et musique, drame et poétique sont indissolublement liés. Ils questionnent la forme musical, l’intention du texte, le sens d’une situation dramatique. Entre irrévérence, provocation mais pertinence, Iakovos Pappas rétablit la qualité suprême du baroque : sa vitalité critique. Ainsi Vasta 2018 est le fruit attendu d’une gestation longue et reportée (amorcée dès 2003) qui n’a pas manqué évidemment, dans notre société bienpensante, puritaine et ouatée, de susciter refus et incompréhension… Entretien exclusif.

   

 

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CLASSIQUENEWS : Quels sont les critères qui vous ont permis de sélectionner textes et musique pour ce nouveau programme ? 

yakovos pappasIakovos PAPPAS : Je crois que mon goût pour le rire est le principal critère ; le constat aussi d’un raidissement moral général et des relents d’intolérance très inquiétants. D’autre part l’ennui causé par des programmations d’une tristesse à faire mourir instantanément, m’ont également décidé à exploiter ce répertoire pour la plus grande réprobation de la sainte bienséance baroqueuse, prônant la pureté artistique.
Vasta est l’aboutissement de réflexions et de recherches durant une vingtaine d’années, ce qui doit constituer le plus long projet de la musique dite baroque. Déjà en 1998, nous préparions avec Philippe Lénaël dans le cadre du feu « Printemps des Arts de Nantes », une sorte de joute-en-spectacle : opposer Phèdre de Racine à Vasta de Piron ; une levée de boucliers au sein même du conseil d’administration eut raison de notre très grand enthousiasme. Vous comprendrez alors que je suis extrêmement reconnaissant auprès de MM. Jean-Loup Gratton et François Nida qui permirent, par leur impeccable accueil au sein de la Bibliothèque de France, d’achever cette longue aventure.
 

   

 

CLASSIQUENEWS : Qu’est-ce qui préserve la cohérence de l’ensemble ?

Iakovos PAPPAS : En tout cas ni l’argent, ni le pouvoir ; je n’ai ni l’un ni l’autre.
Il se pourrait que les artistes avec lesquels je collabore, trouvent satisfaction à ce que je ne demande rien que je ne pourrais réaliser moi-même ; si vous voulez je suis mon propre cobaye. Peut-être la cohérence est préservée par l’absence de rapports de pouvoir ; je ne fais pas la musique pour assouvir des frustrations en traitant chanteurs et instrumentistes avec la morgue d’un roitelet.

   

 

CLASSIQUENEWS : L’effectif instrumental requis et les chanteurs apportent quels éclairages sur le sens et le dramatisme des œuvres ?

Iakovos PAPPAS : Pour un projet radical et exceptionnel, il faut une équipe exceptionnellement douée et capable d’une expression radicale.
Concernant les chanteurs, qui sont aussi et surtout des acteurs chantants, il n’y a pas beaucoup à dire ; quant à l’effectif, il est imposé par les besoins de Vasta, pièce principale de la production ; enfin rien sauf l’impérieuse nécessité des qualités requises extrêmement rares, surtout présentement : une absence très poussée de scories petit-bourgeois-bien-rangé. Cette distribution obligée ne fut pas un fardeau mais au contraire l’occasion d’expérimentations très fertiles : je fus obligé de revoir
les pièces à l’origine à une voix, tels « Le pot de chambre », et « Si vos cheminées, Mesdames »… en les mettant en plusieurs voix.
La partie instrumentale en revanche a énormément évolué depuis la création de la première version en 2003. A l’époque, il n’y avait que la basse-continue pour soutenir tout le spectacle ; ce qui fut herculéen. Il m’a paru nécessaire, si on voulait atteindre le postulat d’une efficacité radicale, d’ajouter quelque chose qui manquait aux origines, et qui rendrait nos travaux justes et parfaits, du point de vue de l’expression bien sûr ; ainsi naîtra l’idée d’ajouter un prologue, et un divertissement ; utiliser Ariane à Naxos de G. Benda (d’après une version pour quatuor à cordes du XVIIIe siècle) pour transformer des scènes en mélodrame. L’accompagnement musical ajouta quelque chose de trouble et même d‘inquiétant : faut-il rire, faut-il pleurer pendant les deux scènes des messagers ? Il y aurait beaucoup à dire sur ces rapports qui se créent dans le cadre du mélodrame.

   

 

CLASSIQUENEWS : Quel érotisme se précise à travers ce programme ?  Est-on proche de Sade ou des Lumières ? Dénotez-vous une lecture parodique voire satirique à travers le prétexte dramatique ?

Iakovos PAPPAS : Bannissons une rumeur tenace au sujet du mouvement appelé « les Lumières » : du point de vue de la sexualité, les coryphées de ce mouvement sont aussi loquaces que les carpes. Ils semblent restés, telle est mon estimation, dans leur état de petits bourgeois guindés. Lisez Voltaire et Montesquieu, les hérauts présumés des libertés sociales : l’article sur la femme et sur la pédérastie du premier dans son Dictionnaire Philosophique de 1764 (où il n’est question que peu de philia) ; l’article intitulé Crime contre nature de l’Esprit des Lois (Livre XII, chapitre 6) du second. Nous sommes très éloignés de l’esprit qui règne dans Vasta ou La Comtesse d’Olonne (que nous enregistrâmes au début des années 2000) ou La Nouvelle Messaline ou encore Caquire.
L’esprit des pièces choisies est très loin de celui qui règne dans les ouvrages de Sade. Toutes les pièces que nous lûmes sont remplies d’un esprit insinuant, de sel fin, moqueur. A l’opposé des écrits de De Sade, l’acte sexuel n’a pas une fonction punitive ; il n’y a ni viol, ni esprit blasphématoire, ni athéisme, et sûrement pas une apologie du meurtre ; rire est plus important que discourir sur l’existence de Dieu. En même temps il y règne un esprit parodique assez sanglant concernant souvent des auteurs du grand style devenus déjà classiques, inévitablement les Corneille et les Racine.

   

 
  

 

CLASSIQUENEWS : En quoi ce programme original et inédit est-il emblématique d’Almazis ?

Sans vouloir me vanter, je dirai que cette question est tautologique : par postulat Almazis est une formation qui se pose au-delà des clivages de coquetteries esthétiques ordinaires, et éprouve une aversion viscérale pour les collections d’objets enfermés sous cloches de verre et plongés dans du formol.

   

 

Propos recueillis en novembre 2018.

 
 

 
 

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CD, événement. VASTA, REINE DE BORDELIE, tragédie érotico-lyrique d’Alexis PIRON. Almazis, Iakovos Pappas (1 cd Maguelone)
. Parution le 23 novembre 2018. PRESENTATION DU CD : « Vasta, Reine de Bordélie (1773) ou le Théâtre Gaillard ». Quels sont les grands poètes tragiques du XVIIIè, de la mort de LOUIX XIV à 1789 ? Il semble qu’après la tension morale des tragédies de Corneille et de Racine au XVIIè, le XVIIIè s’allège, s’enivre même de comédies plus légères, de ballets afriolants, de spectacles hybrides, mi comiques mi impertinents et toujours satiriques… Autant de réalisations légères et libertines, et rime avec plaisir et libération érotique. Ce sont pour la majorité des partitions d’une liberté formelle que le XIXè puritain a pris soin d’étouffer, d’effacer, d’ignorer.
Inspiré par la rencontre de la musique, de la poésie et du théâtre, l’ouvrage d’Alexis PIRON nous offre un visage des réalisations poudrées voire kitsh que l’on nous sert familièrement. Iakovos Pappas et son ensemble Almazis nous offrent un regard direct sur cette liberté de pensée et de chanter propre à la société inventive d’avant 1789 : libertinage, érotisme ont pour témoin privilégié.. la musique. Ici une chanson à boire valeur de fugue, … les usages populaires ou nobles sont inversés, croisés, métissés. La chanson paillarde du XVIIIè a un charme souvent irrésistible car propre au XVIIIè français, l’écriture en est toujours raffinée, élégante, d’une finesse que Almazis ressuscite avec impertinence et vivacité. Critique du CD VASTA / ALMAZIS à venir dans le mag cd dvd livres de CLASSIQUENEWS

   

   

 

PODCAST AUDIO. Entretien avec Iakovos Pappas, par Pedro Octavio Diaz

Irrévérencieux mais subtil, provocateur mais poétique, André Danican Philidor demeure le génie oublié du baroque comique. Iakovos Pappas et Almazis nous dévoilent dans "Blaise le savetier" d'après La Fontaine, sa verve délirante d'une inestimable poésie... PODCAST AUDIO. Entretien avec Iakovos Pappas, par Pedro Octavio Dia. Entretien avec Iakovos Pappas réalisé à Paris en novembre 2015 par notre rédacteur Pedro Octavo Diaz. Irrévérencieux mais subtil, provocateur mais poétique, le répertorie lyrique défendu par  Iakovos Pappas et Almazis nous dévoilent les joyaux oubliés du théâtre lyrique du XVIIIème siècle.  Dans le paysage très varié de la musique baroque Française, Iakovos Pappas demeure l’infatigable défenseur de la redécouverte de l’opéra comique et des Å“uvres de chambre du XVIIIeme siècle. Fort d’une série de réalisations qui ont rendu des compositeurs tels que Duni ou Philidor à nos oreilles, Iakovos Pappas lance un nouveau défi avec l’enregistrement des Fables de Jean de Lafontaine mises en musique par Louis-Nicolas Clérambault. Par ailleurs, le maestro Grec nous fait part de ses projets futurs et la fondation d’une nouvelle compagnie lyrique… de quoi encourager la redécouverte d’un pan entier de la musique Française méconnue, oubliée, mésestimée… et pourtant majeure par son raffinement instrumentale, son intelligence dramatique, son exigence poétique et littéraire. Actualités : nouveau cd dédié aux fables de La Fontaine, lyre érotique du XVIIIème, rituel funèbre maçonnique versaillais, prochains concerts en juin 2016 à la BNF…

 

 

 

Entretien avec Iakovos Pappas, projets pour Almazis… par Pedro Octavio Pappas by Classiquenews Classiquenews on Mixcloud

VOIR, LIRE aussi Reportage vidéo et Compte-rendu : Saint-Sulpice le Verdon (Vendée). Logis de la Chabotterie, le 6 août 2013. Egidio Duni : Les deux chasseurs et la Laitière. Elisabeth Fernandez, Perrette. Yakovos Pappas, scénographie et direction.

Festival Musiques à la Chabotterie 2013 : Egidio Duni révélé (Les 2 chasseurs et la laitière, 1763). Chaque été, en Vendée, le festival Musique à la Chabotterie devient la scène lyrique du baroque le plus délirant, celui de l’opéra comique. Dans la France Louis XV, les Italiens conquièrent les tréteaux : depuis la Querelle des Bouffons (1752), les auteurs français s’italianisent, y compris Rameau. En 1763, Egidio Duni crée Les 2 chasseurs et la laitière d’après deux fables de La Fontaine. A partir de la poésie morale et cynique du XVIIè, Duni invente un genre comique et satirique qui renouvelle la veine théâtrale en France.  En août 2013, dans la cour d’honneur du logis vendéen, Iakovos Pappas et son ensemble Almazis ressuscitent un jalon de la création comique, furieusement italienne, française par son sens de la satire, insolente et séditieuse par les codes qu’il aime pourfendre… Reportage vidéo CLASSIQUENEWS.COM © 2014. EN LIRE +

 

 

philidor-blise-savetier-almazis-pappas-cd-maguelone-300CD. André Danican Philidor : Blaise le Savetier, 1759 (Almazis, Pappas, 2013)… Iakovos Pappas nous dévoile ici l’un des joyaux bruts du comique français à l’époque où le théâtre de la Foire Saint-Germain éblouit par sa verve délirante, sachant prolonger en le transfigurant le modèle du buffa italien. Créé en 1759 sur la scène du théâtre de l’Opéra Comique de la Foire Saint-Germain, Blaise le Savetier appartient à un cycle particulièrement convaincant où encore au début de sa florissante carrière, André Danican Philidor se met au diapason des Italiens, d’autant plus après la Querelle des Bouffons (1752). Mais avec cette truculence spécifique, à la gouaille parisienne, à l’esprit satirique et parodique. Sedaine librettiste de Philidor réécrit le conte de La Fontaine : au couple de Blaise et Blaisine, l’écrivain acoquine le couple des huissiers, Mr et Mme Pince, venus saisir leurs biens (Blaise préfère se ruiner au cabaret avec Mathurin que travailler et gagner honnêtement sa vie). Ici s’affrontent les caractères et tempéraments abrupts : l’ignoble Mme Pince, nourrie au fiel de l’avarice et de la convoitise à laquelle répond la bonhommie débraillée du Savetier, alcoolique et volage que soulage son épouse bien sage (voire toute aussi paillarde que son époux si sympathique). Au demeurant, tenants d’une sexualité qui ne se cache pas, Blaisine (ex Margot) et Blaise s’avouent leur ancienne aventure avec Mr et Mme Pince… Leur sens de la rivalité et de la surenchère dont se souviendra encore Mozart dans le fameux air du Catalogue de Don Giovanni (air de Leporello à propos des conquêtes de son maître) inscrit davantage l’opéra dans la démesure satirique la plus audacieuse. Sur le plan musical comme poétique

 

 

 

Festival Musiques à la Chabotterie 2013 : Egidio Duni révélé (Les 2 chasseurs et la laitière, 1763)

Pappas iakovos pappasFestival Musiques à la Chabotterie 2013 : Egidio Duni révélé (Les 2 chasseurs et la laitière, 1763). Chaque été, en Vendée, le festival Musique à la Chabotterie devient la scène lyrique du baroque le plus délirant, celui de l’opéra comique. Dans la France Louis XV, les Italiens conquièrent les tréteaux : depuis la Querelle des Bouffons (1752), les auteurs français s’italianisent, y compris Rameau. En 1763, Egidio Duni crée Les 2 chasseurs et la laitière d’après deux fables de La Fontaine. A partir de la poésie morale et cynique du XVIIè, Duni invente un genre comique et satirique qui renouvelle la veine théâtrale en France.  En août 2013, dans la cour d’honneur du logis vendéen, Iakovos Pappas et son ensemble Almazis ressuscitent un jalon de la création comique, furieusement italienne, française par son sens de la satire, insolente et séditieuse par les codes qu’il aime pourfendre… Reportage vidéo CLASSIQUENEWS.COM © 2014.

approfondir

Lire notre critique du dernier cd d’Almazis, Iakovos Pappas : Philidor, Blaise le Savetier (1759).

Lire notre compte rendu critique du spectacle Les 2 chasseurs et la laitière d’Egidio Duni présenté à la Chabotterie en août 2013

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Découvrir la programmation du festival Musiques à la Chabotterie 2014 (du 24 juillet au 6 août 2014)

 

 

CD. André Danican Philidor : Blaise le Savetier, 1759 (Almazis, Pappas, 2013)

philidor-blise-savetier-almazis-pappas-cd-maguelone-300CD. André Danican Philidor : Blaise le Savetier, 1759 (Almazis, Pappas, 2013)… Iakovos Pappas nous dévoile ici l’un des joyaux bruts du comique français à l’époque où le théâtre de la Foire Saint-Germain éblouit par sa verve délirante, sachant prolonger en le transfigurant le modèle du buffa italien. Créé en 1759 sur la scène du théâtre de l’Opéra Comique de la Foire Saint-Germain, Blaise le Savetier appartient à un cycle particulièrement convaincant où encore au début de sa florissante carrière, André Danican Philidor se met au diapason des Italiens, d’autant plus après la Querelle des Bouffons (1752). Mais avec cette truculence spécifique, à la gouaille parisienne, à l’esprit satirique et parodique. Sedaine librettiste de Philidor réécrit le conte de La Fontaine : au couple de Blaise et Blaisine, l’écrivain acoquine le couple des huissiers, Mr et Mme Pince, venus saisir leurs biens (Blaise préfère se ruiner au cabaret avec Mathurin que travailler et gagner honnêtement sa vie). Ici s’affrontent les caractères et tempéraments abrupts : l’ignoble Mme Pince, nourrie au fiel de l’avarice et de la convoitise à laquelle répond la bonhommie débraillée du Savetier, alcoolique et volage que soulage son épouse bien sage (voire toute aussi paillarde que son époux si sympathique). Au demeurant, tenants d’une sexualité qui ne se cache pas, Blaisine (ex Margot) et Blaise s’avouent leur ancienne aventure avec Mr et Mme Pince… Leur sens de la rivalité et de la surenchère dont se souviendra encore Mozart dans le fameux air du Catalogue de Don Giovanni (air de Leporello à propos des conquêtes de son maître) inscrit davantage l’opéra dans la démesure satirique la plus audacieuse. Sur le plan musical comme poétique.

A l’école de la satire cynique …

CLIC D'OR macaron 200André Danican Philidor fait paraître toutes les figures d’une vie domestique au bord de l’implosion : maris et époux en péril, affrontements musclés, quiproquos cocasses (quand Blaisine ex Margot manipule son ancien amant, Pince), … la force du drame vient du jeu des renversements constants : contre le couples des huissiers pourtant retors, Blaise et Blaisine se montrent autrement plus astucieux, complices dans la malice, solidaires, fins et subtils ou diaboliquement acoquinés, ils trompent le benêt Mr Pince. Au sommet de ce délire bouffe : l’air de Blaise où le baryton chante pour lui-même et singe sa femme (en voix de poitrine), duo pour une seule voix, prouesse vocale en caractérisation et aussi, effet comique intense ; le trio qui suit (plage 21) est l’autre apogée de ce théâtre bouffon (où Philidor singe lui-même avec une impertinente pertinence) Montéclair encore : les options musicales collent parfaitement à la situation concernée. En recyclant une formule de l’opéra tragique, Philidor affirme l’apogée du théâtre comique : il lui offre la langue la plus raffinée qui soit. Et même Mozart ensuite, dans Les Noces de Figaro saura distribuer un sublime trio lui aussi dans une scène où il faut cacher celui qui ne devrait pas se trouver là : acmé dramatique et point d’accomplissement où se révèle le génie des créateurs. Beaumarchais connaissait évidemment le théâtre et la farce de Sedaine.

Tenardier avant l’heure, les Pince façon Sedaine sont d’un cynisme repoussant. Sans morale, voraces et jouisseurs, ils prennent, consument, savent se délecter avec perversité : l’air de Pince (plage 17 : l’argent seul fixe le caprice où les spasmes du basson à peine voilés inaugurent aussi ce réalisme surrexpressif, ce bon sens cinglant et glaçant, idéalement efficace).


Aussi facétieux que ses protagonistes, le jeune Philidor rehausse chaque caractère et chaque situation avec une intelligence pétillante. Le mordant du style sait parodier avec finesse le théâtre tragique et “noble” de Montéclair (Jephté). En moins d’une heure de temps, voici une pochade superbement troussée, qui épingle la folie domestique la plus déjantée. Le sexe, l’argent : la guerre du quotidien envahissent le théâtre contemporain d’un Baroque qui critique, analyse, frappe par sa conscience de la déchéance et du désenchantement social et sociétal. La farce offre alors une réponse en guise de baume. Passionné depuis longtemps par le genre comique et ses grivoiseries inventives, musicalement et dramatiquement succulentes, Iakovos Pappas et son ensemble Almazis sont les ambassadeurs les plus fervents de ce théâtre inhumain en quête d’humanité. Le claveciniste mène un travail passionnants sur le genre comique dont il dévoile ici avec fougue et énergie, le fini et l’esprit spécifiques. Superbe révélation.

André Danican Philidor : Blaise le Savetier, 1759. Caroline Chassany, Blaisine. Elisabeth Fernandez, Mme Pince. Christophe Crapez, Mr Pince. Paul-Alexandre Dubois, Blaise. Jérôme Gueller, un recors. Almazis. Iakovos Pappas, clavecin et direction. Enregistrement live réalisé en août 2013. 1 cd Maguelone MAG 111 196.

Illustrations : Iakovos Pappas (DR)

Approfondir : Iakovos Pappas et Almazis ont à l’été 2013 révélé avec la même intelligence délectable le théâtre délirant poétique de Duni, grand triomphateur du théâtre italien à Paris : lire notre compte rendu des deux chasseurs et la laitière d’Egidio Duni au festival Musique à la Chabotterie en Vendée

CD. Philidor : Blaise le savetier par Almazis, Iakovos Pappas (1 cd Maguelone)

philidor-blaise-savetier-almazis-pappas-cd-maguelone-300CD. Philidor : Blaise le savetier par Almazis, Iakovos Pappas (1 cd Maguelone). Le chef et claveciniste Iakovos Pappas et son ensemble Almazis abordent un nouveau joyau de l’opéra comique français baroque : Blaise le Savetier d’André Danican Philidor. Depuis le début des années 1750, l’heure est aux Italiens mais aussi à l’essor d’actions scéniques cocasses et pittoresques qui épinglent avec facétie et esprit satirique les travers et défauts de la condition humaine. En un acte, créé à la Foire Saint-Germain le 9 mars 1759, Blaise le savetier éblouit par son rythme musical, son intelligence dramatique, son essence parodique. Inspiré par un conte de La Fontaine, l’opéra de Philidor exploite l’opposition des deux couples en présence : Blaise et son épouse Blaisine, plutôt modestes, harcelés par un couple de propriétaires. Le jeu des faveurs, orchestré par le savetier, finit par renverser le pouvoir des nantis. Enregistré en septembre 2013 à la Villa Rose de Malakoff, l’œuvre profite d’une captation réalisée sur le vif. Sa verve s’appuie sur l’engagement de la troupe réunie par Iakovos Pappas toujours très soucieux d’exprimer la saveur mordante des textes du genre comique : un travail sur le verbe, l’énergie des ensemble,  la vitalité séditieuse des situations dramatiques, la poésie délirante des dialogues et des rapports entre les personnages font ici toute la valeur de cette première mondiale. Prochaine critique développée dans le mag cd de clasiquenews.com.

Distribution :

Paul-Alexandre Dubois, Blaise

Caroline Chassany, Blaisine

Christophe Crapez, Monsieur Pince

Elizabeth Fernandez, Madame Prince

Jérôme Guiller, premier Recors

Didier Henry, second Recors

Almazis

Céline Martel, Sophie Iwamura, violons

Pierre Charles, violoncelle

Jon Olaberria, haubois

Antoine Pecqueur, basson

Iakovos Pappas, clavecin et direction

Philidor : Blaise le savetier, 1759. 1 cd Maguelone MAG 111196. Parution : 24 avril 2014.

Lire aussi notre compte rendu des opéras d’après La Fontaine de Duni par Almazis Iakovos Pappas, au festival Musiques à la Chabotterie 2013.