France 2. VERDI : Stiffelio, jeudi 24 janvier 2019, minuit. MĂȘme en ses annĂ©es « de galĂšre » (de 1842 Ă 1850) comme il le dit lui-mĂȘme, le jeune Verdi maĂźtrise comme personne la coupe frĂ©nĂ©tique et dramatique, rĂ©ussissant Ă rĂ©gĂ©nĂ©rer par son nerf et sa fougue virile, le genre opĂ©ratique dans lâItalie romantique, bientĂŽt libĂ©rĂ©e du joug autrichien. Tous ses opĂ©ras, avec leur action qui porte la volontĂ© et lâautodĂ©termination des peuples rĂ©voltĂ©s, trouvent un Ă©cho immĂ©diat auprĂšs du peuple italienne, cette nation qui nâest pas encore unifiĂ©e mais qui est sur le point de lâĂȘtre. On insistera jamais assez sur la modernitĂ© et lâactualitĂ© prééminente des ouvrages verdiens Ă leur Ă©poque. Verdi est en phase avec la vibration de son temps et rĂ©pond, entretient, nourrit lâĂ©lan libertaire et lâesprit rĂ©volutionnaire des Italiens.
En 8 années, le compositeur génial compose prÚs de 14 opéras, depuis le triomphe de Nabucco, son premier succÚs.
Conçu en 1850, quasi simultanĂ©ment Ă Rigoletto, Stiffelio Ă©voque les souffrances dâun Pasteur trompĂ© par sa femme. Le sujet, scandaleux, dĂ©clencha les foudres de la censure : Verdi dut revoir sa copie originelle. Lâamour, le devoir⊠y forment un terreau fertile en confrontations et situations conflictuelles, entre Stiffelio (vrai tĂ©nor verdien, Ă la fois passionnĂ© et tendre, dâune nouvelle Ă©paisseur psychologique) et son Ă©pouse Lina. Au couple principal (Stiffelio / Lina), Verdi imagine aussi, celui du pĂšre et de sa fille, Stankar / Lina, tout autant fouillĂ© et bouleversant : leurs scĂšnes trĂšs ciselĂ©es, rĂ©vĂ©lant une relation profonde et complexe, annoncent sur le mĂȘme thĂšme, – pĂšre / fille, Rigoletto (Gilda), ou Simon Boccanegra (Amelia)⊠ne relation essentielle dans les opĂ©ras de maturitĂ© de Verdi, lui-mĂȘme, ayant Ă©tĂ© particuliĂšrement foudroyĂ© par le destin car il perdit son Ă©pouse et ses deux fillesâŠ
A Venise, la mise en scĂšne de Johannes Weigand, dans cette production prĂ©sentĂ©e en 2016 Ă La Fenice, reste claire et intense, rĂ©duite Ă un immense portail mĂ©tallique, ouvert ou fermĂ© selon les sĂ©quences dramatiques, Ă©voquant le temple oĂč prĂȘche Stiffelio, le cimetiĂšre, lâintĂ©rieur du chĂąteauâŠ
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Argument / Synopsis :
Le pasteur Stiffelio prĂŽne la vertu et lâamour fraternel, alors quâil est trahi par son Ă©pouse laquelle aime passionnĂ©ment le jeune aristocrate Raffaele. Le pĂšre de Lina est personnellement affectĂ© par la dĂ©loyautĂ© de sa fille Lina : il assassinera son amant. ConfrontĂ©s Ă ce crime dĂ©sastreux et injuste pour la victime, Stiffelio et Lina se retrouvent, savent se pardonner⊠dans lâamour de Dieu.
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France 2: “Au clair de la lune” – “Stiffelio” de Giuseppe Verdi – jeudi 24 janvier 2019 Ă minuit
OpĂ©ra en trois actes de Giuseppe Verdiâšsur un livret de Francesco Maria Piave,  d’aprĂšs Le Pasteur ou l’Ă©vangile au foyer d’Ămile Souvestre et EugĂšne Bourgeois,  créé le 16 novembre 1850 au Teatro Grande de Trieste.
Orchestre et chĆur de La Fenice de Venise
Direction musicale : Daniele Rustioni
ChĆur et Orchestre du Teatro La Fenice
Mise en scĂšne : Johannes Weigand
Distribution
Stiffelio : Stefano Secco
Lina : Julianna Di Giacomo
Stankar : Dimitri Platanias
Raffaele : Francesco Marsiglia
Jorg : Simon Lim
Federico di Frengel : Cristiano Olivieri
Dorotea : Sofia Koberidze
Enregistré en janvier 2016, au Teatro La Fenice
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NOTRE AVIS. Nul doute que le nerf du jeune chef Daniele Rustioni apporte Ă cette production de Stiffelio, opĂ©ra mĂ©connu mais superbe en intensitĂ©, lâĂ©nergie idĂ©ale. Dans cette version de 1850, et sur le livret de Piave, qui Ă©crit aussi celui de Rigoletto contemporain, la partition Ă©blouit par sa coupe dramatique, faisant se succĂ©der duos, trios, quatuor (jusquâau septuor), sans interruption et avec une rĂ©elle gradation expressive et musicale, que permet quand elle est servie parfaitement, lâĂ©criture continue dâun Verdi peu adepte des airs fermĂ©s. Comme Luisa Miller dâaprĂšs Schiller, Stiffelio est un drame noir, oĂč les passions sâembrasent et crĂ©pitent. Vivant, percutant, Ă lâaise dans le rĂŽle-titre, le tĂ©nor Stefano Secco relĂšve le dĂ©fi de la passion noire qui traverse lâesprit impuissant du prĂȘtre dĂ©muni (mĂȘme sâil est missionnĂ© par Dieu). On note un lĂ©ger manque de naturel chez la Lina de Julianna Di Giacomo et chez le Stankar de Dimitri Platanias dont le bronze vocal cependant emporte lâadhĂ©sion. Leur couple vocal gagne en vraisemblance et intensitĂ©. Production rĂ©alisĂ©e Ă la Fenice en janvier et fĂ©vrier 2016. DurĂ©e : 2h
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