vendredi 19 avril 2024

COMPTE-RENDU, concert. BESANCON, le 9 sept 2019. Russian National Orchestra, Nikolaï Lugansky, Mikhaïl Pletnev

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique et à l’opéra - et notamment avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

sergei-rachmaninov-russian-composer1Compte-rendu, concert. Festival de Besançon, Théâtre Ledoux, le 9 septembre 2019. Russian National Orchestra, Nikolaï Lugansky (piano), Mikhaïl Pletnev (direction). C’est à une soirée 100% russe que la 72ème édition du Festival International de Besançon (couplée avec la 56ème édition du fameux Concours International de jeunes chefs d’orchestre) convie un public venu en masse entendre Nikolaï Lugansky dans le célèbre 3ème Concerto pour piano de Sergueï Rachmaninov (illustration ci-contre). De fait, le grand pianiste russe ne déçoit pas les attentes et dialogue avec brio, dès les premiers accord, avec le Russian National Orchestra, phalange fondée et dirigée depuis 1990 par Mikhaïl Pletnev, qui s’était fait connaître en remportant le célèbre Concours Tchaïkovski en 1978.

Le ton est donc donné dès l’attaque du thème initial, et ce sera magistral, avec un tempo maîtrisé et un piano omniprésent. L’ampleur du souffle semble infinie, le discours est d’une brillance et d’une fluidité étonnantes, même dans le legato, et toutes les notes sont très distinctement détachées, ce qui est un régal pour l’oreille.

Après l’entracte, place à la Symphonie n°9 de Dimitri Chostakovitch, une œuvre légère et facétieuse, courte et enjouée. Créée en 1945, elle est la troisième et dernière symphonie composée durant la Seconde Guerre mondiale. Cependant, alors que les Septième et Huitième durent plus d’une heure et nécessitent un effectif imposant, la Neuvième requiert une masse orchestrale classique et dure à peine moitié moins. Mais surtout, elle délaisse l’héroïsme patriotique des deux précédentes pour faire place à des airs enjoués, inspirés de danses rustiques. On sait qu’elle provoqua l’ire de Staline – au point que le compositeur dut craindre pour sa vie – qui s’attendait à une œuvre apothéotique, composée expressément pour sa propre gloire ainsi que pour celle des troupes soviétiques victorieuses du nazisme. Soutenus par les solistes souvent splendides d’un des meilleurs orchestres russes, Pletnev développe une approche emplie d’un humanisme chaleureux, mais sans gommer l’aspect grinçant et sarcastique de cette superbe partition. Il faut souligner l’extraordinaire présence de la petite harmonie, notamment les premiers flûte, clarinette et basson, qui ont prodigué des sonorités prodigieuses. Dans ce trio de solistes, on savoure la spécificité sonore de chaque registre ainsi qu’un remarquable sens du legato. On admire enfin leur remarquable cohérence, qui emmène la symphonie vers sa juste conclusion dans le crescendo final.

diotima-bartok-6-quatuors-a-beziers-theatre-sortieouest-presentation-sur-classiquenews-582La veille (8 sept 2019), nous avons pu assister à une soirée de musique de chambre, au très beau Kursaal de la ville, qui réunissait, pour l’occasion, le Quatuor Arod et le Quatuor Diotima. Le premier interprète le Quatuor N°4 D. 46 en do majeur de Schubert ; il parvient en quelques mesures de pure grâce à nous emporter : il faut dire que le Quatuor Arod est ici dans son répertoire de prédilection, faisant valoir une pulsation rythmique légère et aérienne, en un élan stimulant. L’acoustique très détaillée de la salle bisontine sert cette conception qui manque peut-être parfois de puissance au premier violon, mais qui emporte l’adhésion par son sens des nuances et des couleurs. C’est au célébrissime Quatuor de Ravel que s’est ensuite confronté leurs collègues du Quatuor Diotima :  ils le défendent de manière tout aussi vivante et instinctive, en prêtant attention à la dynamique, parfaitement assurée, et aux tempi, judicieusement choisis.
Les huit artistes se sont également retrouvés dans deux octuors : d’abord dans les Deux Pièces pour octuor à cordes, op. 11 de Dimitri Chostakovitch, une œuvre qui est un témoignage éloquent d’un temps à la fois marqué par le retour à Bach et par un volonté de provocation aussi sain que réjouissant, puis à l’occasion d’une création mondiale, commande expresse du festival au compositeur français Eric Tanguy, en résidence pour cette 72ème édition. Le titre de la pièce est « The desperate man », en référence au célèbre autoportrait (« Le désespéré ») de Gustave Courbet, l’enfant du pays dont on fête cette année le bicentenaire de la naissance. La pièce est très agréable à écouter, très bien écrite, et à son écoute, l’on se rend compte qu’au fil des années, le propos du compositeur se fait moins âpre et spontané, plus consonnant et académique, sans que cela ne doive être pris péjorativement… Illustration : Quatuor Diotima (DR)

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Compte-rendu, concert. Festival de Besançon, Théâtre Ledoux, le 9 septembre 2019. Russian National Orchestra, Nikolaï Lugansky (piano), Mikhaïl Pletnev (direction).

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