France Musique, le 17 mai, 19h.Wagner : Tristan und Isolde, Production Sellars. Philippe Jordan (avril 2014). Après Salonen (2005), Bychkov (2008), Philippe Jordan reprend le pari de cette production contestée, mais événement : son excès de visuel (les immenses tableaux vivants de Bill Viola, finissant pour certains par « polluer » l’action scénique – si confidentielle-, et la fosse. A la radio, c’est à dire nettoyée de ses artifices trompeurs pour les yeux, le spectacle capté en avril 2014, se concentre sur le travail remarquable d’articulation et de profondeur chambriste de Philippe Jordan, véritable héros de la soirée. D’autant que les solistes, au contact d’une direction aussi filigranée, intérieure, mystérieuse, semblent eux aussi produire de la magie pure : Violetta Urmana fait une Isolde nuancée, elliptique, réussissant enfin les passages pleine voix et pianissimi (suivant la baguette du chef alchimiste). Hélas, le Tristan de Robert D. Smith nage en eaux plus troublées : timbre râpeux et chant limité, usé dans le III. Heureusement, Franz-Josef Selig impose un Mark noble, trouble, maîtrisé, de très grande allure : humain et déchiré. Repris et dédié à Gérard Mortier, décédé il y a peu, le spectacle parisien grâce à la baguette halluciné et en transe d’un Jordan miraculeux enchante de bout en bout. Très grand moment d’envoûtement wagnérien auquel vous ne resterez pas de marbre. Diffusion événement.
Illustration : Gary Lehmann, Violetta Urmana (Bill Viola studio)