La musique française n’a aucun secret pour Tugan Sokhiev. Ce concert au programme si original a été donné deux fois les 8 et 9 avril et sera diffusé sur France-Musique le 22 avril 2010.
En première partie, les quatre pièces du Tombeau de Couperin orchestrées par Ravel lui-même, à partir de sa suite pour piano ont permis de s’imprégner d’une couleur et d’un ton typiquement français. De plus en plus le son des meilleurs orchestres internationaux devient semblable, il est important de dire que la phalange toulousaine garde une couleur unique tout en rivalisant avec eux. Cela tient à des bois frais et lyriques, des cuivres brillants et doux et des cordes souples et légères capable d’étinceler sans saturer le son. Tugan Sokhiev a su faire fructifier le travail de Michel Plasson et apporte une précision rythmique et une souplesse de battue qui magnifie cette partition. Elle apparaît modeste et Ravel n’y a pas mis tous les charmes dont il est capable ailleurs. Pourtant que cette musique est élégante et belle ! D’infimes détails touchent et surprennent, intégrées dans une construction d’une précision horlogère. L’orchestre est magnifique et suit son chef comme un seul homme y compris dans des rares mais oh combien subtils rubatos. Et le train d’enfer donné au Rigaudon final a de quoi rivaliser avec les orchestres les plus virtuoses. Tous les pupitres ont excellé avec tout particulièrement des finals d’une précision et d’une poésie sidérante semblant s’évanouir dans un rêve plus que s’arrêter.
Le concerto N° 5 de Camille Saint-Saens est très rarement donné. La partition qui a été composée en un moment de séjour heureux au Caire porte en lui le plaisir du voyage et de la découverte. Tout est subtilement dosé sans aucune ostentation ou tentative d’hégémonie du soliste. Pourtant la virtuosité est extrême mais toujours intégrée à un mouvement musical rempli de poésie. La complicité entre Tugan Sokhiev et Nicholas Angelich est réjouissante. Le pianiste d’origine américaine semble être chez lui dans cette partition qu’il interprète avec beaucoup de sensibilité chantant à certains moments tant il se laisse emporter. Il faut dire que le discours orchestral est si lyrique qu’il est difficile de résister à son charme. Tous les instrumentistes sont dans une sensationnelle insolence de sonorité et une précision rythmique bien appréciable dans les moments faisant penser au Jazz. L’originalité de cette partition, sa richesse sont parfaitement rendus par cette interprétation associant un soliste, un chef et un orchestre, vivant tous la musique à ce niveau d’excellence. Le public a fait une ovation à ces artistes galvanisés. Nicholas Angelich offre ensuite deux bis superbes de sensibilité et d’émotion associant Chopin et Schumann, tous deux nés en 1810.
La deuxième partie du concert très attendue, n’a pas été à la hauteur de ce concerto de piano qui restera comme un moment musical rare.
La dernière symphonie de Saint-Saëns, avec orgue, est rarement offerte au public dans des conditions optimales. Dans les églises c’est l’orchestre qui souffre toujours de la réverbération. Rares au monde sont les salles de concert dotées d’un bel orgue. Ce soir, la lecture est donc symphonique, ce n’est pas une symphonie concertante ou un concerto avec orgue qui devient un instrument parmi d’autres. Ce n’est pas le jeu de Michel Bouvard qui est en cause, lui qui est un interprète si mondialement renommé. Le problème vient de « l’instrument » qui lui a été proposé. Le logiciel qui permet de jouer contient les sons, enregistrés un à un, d’un superbe instrument Cavallie-Coll de Caen. Cette solution se révèle, au final, insatisfaisante pour l’orgue. Si le son paraît compressé, il est probablement trahi par la qualité des enceintes. Car si la puissance est satisfaisante dans le premier mouvement c’est la saturation du son et son imprécision qui gâchent un peu l’oreille dans le final. Par contre il est rare d’entendre un orchestre si beau dans cette symphonie. Les cordes tout particulièrement ont une plénitude rare. Une pulsation océanique semble porter toute la symphonie. La direction de Tugan Sokhiev met particulièrement en lumière d’infimes détails de la partition tout en maîtrisant une rigoureuse construction. Le final est pris à un train d’enfer sans qu’à aucun moment l’orchestre n’en souffre. Par contre l’orgue est dépassé plus d’une fois. Vraiment, puissance et splendeur sonore sont constamment du côté de l’orchestre et jamais l’orgue ne répond à la même hauteur. Une mention toute particulière pour des cuivres absolument somptueux, ce soir encore plus que d’habitude. Le piano à quatre mains est comme une illumination tant le jeu d’Inessa Lecourt et Eloise Urbain est précis et joyeux. Le hautbois a tout au long de la soirée touché l’âme au plus profond par une chaleur de sonorité et une ampleur de souffle confondantes, car il faut signaler que Christian Fougeroux est un soliste absolument remarquable.
Beauté classique, voyage oriental et transatlantique, puis grandiose élévation de la symphonie à un sommet mythique, ce concert est construit avec art. Il aurait conduit à l’apothéose si les problèmes techniques de la restitution de l’orgue ne l’avaient entravé en son dernier mouvement. Tugan Sokhiev a montré une aisance absolue dans les facettes multiples de partitions subtiles avec une direction aussi précise que sensible.
En première partie, les quatre pièces du Tombeau de Couperin orchestrées par Ravel lui-même, à partir de sa suite pour piano ont permis de s’imprégner d’une couleur et d’un ton typiquement français. De plus en plus le son des meilleurs orchestres internationaux devient semblable, il est important de dire que la phalange toulousaine garde une couleur unique tout en rivalisant avec eux. Cela tient à des bois frais et lyriques, des cuivres brillants et doux et des cordes souples et légères capable d’étinceler sans saturer le son. Tugan Sokhiev a su faire fructifier le travail de Michel Plasson et apporte une précision rythmique et une souplesse de battue qui magnifie cette partition. Elle apparaît modeste et Ravel n’y a pas mis tous les charmes dont il est capable ailleurs. Pourtant que cette musique est élégante et belle ! D’infimes détails touchent et surprennent, intégrées dans une construction d’une précision horlogère. L’orchestre est magnifique et suit son chef comme un seul homme y compris dans des rares mais oh combien subtils rubatos. Et le train d’enfer donné au Rigaudon final a de quoi rivaliser avec les orchestres les plus virtuoses. Tous les pupitres ont excellé avec tout particulièrement des finals d’une précision et d’une poésie sidérante semblant s’évanouir dans un rêve plus que s’arrêter.
Le concerto N° 5 de Camille Saint-Saens est très rarement donné. La partition qui a été composée en un moment de séjour heureux au Caire porte en lui le plaisir du voyage et de la découverte. Tout est subtilement dosé sans aucune ostentation ou tentative d’hégémonie du soliste. Pourtant la virtuosité est extrême mais toujours intégrée à un mouvement musical rempli de poésie. La complicité entre Tugan Sokhiev et Nicholas Angelich est réjouissante. Le pianiste d’origine américaine semble être chez lui dans cette partition qu’il interprète avec beaucoup de sensibilité chantant à certains moments tant il se laisse emporter. Il faut dire que le discours orchestral est si lyrique qu’il est difficile de résister à son charme. Tous les instrumentistes sont dans une sensationnelle insolence de sonorité et une précision rythmique bien appréciable dans les moments faisant penser au Jazz. L’originalité de cette partition, sa richesse sont parfaitement rendus par cette interprétation associant un soliste, un chef et un orchestre, vivant tous la musique à ce niveau d’excellence. Le public a fait une ovation à ces artistes galvanisés. Nicholas Angelich offre ensuite deux bis superbes de sensibilité et d’émotion associant Chopin et Schumann, tous deux nés en 1810.
La deuxième partie du concert très attendue, n’a pas été à la hauteur de ce concerto de piano qui restera comme un moment musical rare.
La dernière symphonie de Saint-Saëns, avec orgue, est rarement offerte au public dans des conditions optimales. Dans les églises c’est l’orchestre qui souffre toujours de la réverbération. Rares au monde sont les salles de concert dotées d’un bel orgue. Ce soir, la lecture est donc symphonique, ce n’est pas une symphonie concertante ou un concerto avec orgue qui devient un instrument parmi d’autres. Ce n’est pas le jeu de Michel Bouvard qui est en cause, lui qui est un interprète si mondialement renommé. Le problème vient de « l’instrument » qui lui a été proposé. Le logiciel qui permet de jouer contient les sons, enregistrés un à un, d’un superbe instrument Cavallie-Coll de Caen. Cette solution se révèle, au final, insatisfaisante pour l’orgue. Si le son paraît compressé, il est probablement trahi par la qualité des enceintes. Car si la puissance est satisfaisante dans le premier mouvement c’est la saturation du son et son imprécision qui gâchent un peu l’oreille dans le final. Par contre il est rare d’entendre un orchestre si beau dans cette symphonie. Les cordes tout particulièrement ont une plénitude rare. Une pulsation océanique semble porter toute la symphonie. La direction de Tugan Sokhiev met particulièrement en lumière d’infimes détails de la partition tout en maîtrisant une rigoureuse construction. Le final est pris à un train d’enfer sans qu’à aucun moment l’orchestre n’en souffre. Par contre l’orgue est dépassé plus d’une fois. Vraiment, puissance et splendeur sonore sont constamment du côté de l’orchestre et jamais l’orgue ne répond à la même hauteur. Une mention toute particulière pour des cuivres absolument somptueux, ce soir encore plus que d’habitude. Le piano à quatre mains est comme une illumination tant le jeu d’Inessa Lecourt et Eloise Urbain est précis et joyeux. Le hautbois a tout au long de la soirée touché l’âme au plus profond par une chaleur de sonorité et une ampleur de souffle confondantes, car il faut signaler que Christian Fougeroux est un soliste absolument remarquable.
Beauté classique, voyage oriental et transatlantique, puis grandiose élévation de la symphonie à un sommet mythique, ce concert est construit avec art. Il aurait conduit à l’apothéose si les problèmes techniques de la restitution de l’orgue ne l’avaient entravé en son dernier mouvement. Tugan Sokhiev a montré une aisance absolue dans les facettes multiples de partitions subtiles avec une direction aussi précise que sensible.
Toulouse. Halle Aux Grains. 8 et 9 Avril 2010. Maurice Ravel (1875-1937) Le Tombeau de Couperin ; Camille Saint-Saëns (1835-1921) Concerto pour piano et orchestre n°5 en fa majeur, Op.103, l’Egyptien ; Symphonie n°3 en ut mineur, avec orgue. Nicholas Angelich, piano ; Orchestre National du capitole de Toulouse. Tugan Sokhiev, direction