PALMYRE NE SERA PLUS QU’UN OPÉRA? Dimanche 17 mai 2015, vers minuit, l’organisation terroriste DAESH est entrée dans les secteurs nord de Palmyre, la perle du désert syrien. Evidemment que pour le lecteur d’un magazine musical, cette information est une redondance, peut-être fastidieuse, des dépêches de l’AFP ou de REUTERS. Si le propre du journalisme, même spécialisé, est d’informer, pourquoi réserver l’émoi informatif aux seuls médias généralistes ?
Palmyre forever
La prise en otage et, pire encore, l’anéantissement des sites immémoriaux du Croissant Fertile n’incombent pas que la politique, l’archéologie ou l’économie militaire. La musique est aussi concernée dans le cœur même de son existence : l’inspiration. Si l’on doit revenir sur les sites vandalisés et saccagés tels l’antique Nimrod ou les murs de Ninive, le mélomane les retrouverait à chaque fois que résonne la Semiramide de Rossini et même dans pléthore d’opéras du baroque.
Et Palmyre, la mythique cité de Zénobie ? Source d’inspiration des livrets de Matteo Norris et surtout du génial Metastasio dont la Zenobia a été mise en musique par des prestigieux compositeurs tels Hasse, Piccinni, Paisiello et Perez. Pourquoi laisser cette musique pâtir de son abandon et que le site même qui fit rêver les artistes devienne la pâture de la barbarie ? Pour les moins baroqueux, c’est à Palmyre que se déroule l’action de l’Aureliano in Palmira, un des premiers opéras de Rossini (1813) dont l’ouverture est un tube absolu parce qu’elle fut réutilisée dans son Barbiere di Siviglia en 1816.
Faut-il sauver Palmyre ? La contemplerons nous derrière un écran sombrer sous les pioches et la dynamite ? Malheureusement il ne suffit plus d’écouter la musique. Ne laissons pas les jalons de notre histoire humaine, devenir, par le seul mandat du chaos, de vieux souvenirs ruinés, des légendes faites de poussière. Et pourtant, si Palmyre devait périr, elle survivra encore à ses décombres par la scène et la musique !