Wolfgang Amadeus Mozart
L’enlèvement au sérail
, 1782
(Die Entführung aus dem serail)
Opéra Théâtre de Saint-Etienne
Les 20, 22 et 24 avril 2007
L’année précédent le triomphe de L’enlèvement, 1781, Mozart s’était imposé véritablement sur la scène lyrique avec son ouvrage seria, Idomeneo, créé à Munich, le 29 janvier 1781. Déjà, le jeune génie de la dramaturgie musicale avait fait sensation dans la peinture psychologique des personnages, l’essor nouveau de l’orchestre (premier personnage aux côtés des figures évoluant sur la scène), celui non moins important voire essentiel du choeur, et l’écriture palpitante des récitatifs.
Aux côtés du costume et de la mise enjouée, apparemment légère et insouciante de l’Arlequin épris des femmes dont on a plus que de raison souligné la paillardise dans une correspondance il est vrai, exubérante et détaillée à l’envi, il y a ce Mozart tendre et sincère, caressant les coeurs comme personnes, d’une profondeur et d’une vérité, inédites avant lui. La musique se fait langage des émotions justes. Théâtre du sentiment, et non plus de la passion, au sens que lui a donné l’opéra, pourtant remarquable et pluriel, de l’âge baroque et préclassique.
Génie de la scène, de toute action sensible et sensée, Mozart a joué des registres et des genres, avant lui, maladroitement cloisonnés. Seria et buffa se mêlent, comique et tragique, sentimental et héroïque, féerique et historique. L’Enlèvement au Sérail créé à l’Opéra de Vienne, en janvier 1782, témoigne de cette emprise de la pulsion féministe, dont la « fureur » préfigure la Rosine du Barbier de Séville de Rossini. Le compositeur réserve même à son héroïne qui porte le prénom de sa jeune et récente épouse, Constanze, un air au développement jamais vu auparavant dans un opéra. Séducteur, Mozart est aussi novateur. Lui qui rêvait d’un opéra en langue allemande, l’équivalent de l’opéra de Monteverdi dans la langue de Goethe, renouvelle aussi avec son Enlèvement, le genre du Singspiel, drame spécifiquement germanique, dont il reprendra le fil, dans son ultime chef d’oeuvre: La Flûte Enchantée, conçue l’année de sa mort, 1791.
Illustration
Claude Gellée dit Le Lorrain, L’embarquement de Cléopâtre à Tarse (Paris, Musée du Louvre)