vendredi 19 avril 2024

Gioacchino Rossini, Le Barbier de Séville (1816)Rennes, Opéra. Du 13 au 20 mai 2007

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Gioacchino Rossini
Le Barbier de Séville

, 1816

Rennes, Opéra
Du 13 au 20 mai 2007

Jean-Claude Malgoire, direction

Le Barbier, joyau de l’opéra rossinien

Rossini reprend l’opéra là où l’avait laissé Cimarosa, qui meurt à Venise en 1801, éreinté après les tortures qui lui furent infligées dans les geôles napolitaine sur l’ordre de la Reine Caroline. La Cambiale di Matrimonio (Venise, 1810), puis surtout Tancrède, d’après Voltaire, créé en 1813, impose le nouveau Cimarosa: Rossini, maître de l’opéra italien. Stendhal applaudit aussi au génie!
Le nouveau champion des dilettanti, ces passionnés d’art lyrique, s’impose grâce à ses dons de mélodistes qu’il applique autant aux voix qu’aux instruments de l’orchestre. Un nouveau rapport voix/instruments, traités à égalité, renouvelle totalement les couleurs musicales du théâtre chanté.
A son aise, autant dans le buffa que le seria, Rossini émerveille les auditeurs avec la grâce, l’esprit, l’élégance qui le caractérisent désormais sur la scène. Elisabetta, regina d’Ingilterra (1815) précède le chef d’oeuvre absolu de l’opéra buffa, Le Barbier de Séville, créé en 1816. L’air de Rosine, « Una voce poco fa », démontre sa maestrià de la ligne vocale dont l’arabesque acrobatique dialogue avec un orchestre harmoniquement enrichi.
Il est vrai que sa rencontre en 1814 avec le castrat Velluti pour Aureliano in Palmira, a été décisive dans l’élaboration de son style ciselé de l’instrumentation vocale. Le compositeur a su immédiatement écrire toutes les ornementations plutôt que de laisser au soin du chanteur l’art de la variation. Plus tard, pour son épouse, la cantatrice Isabella Colbran, aux capacités moindres, Rossini perfectionne l’art des cascades de gorgheggi, ces effets de gosiers propres à mettre en valeur, mais de façon contrôlé, les performances limitées de la chanteuse. Le rondo de la Donna del lago (1819) illustre l’aboutissement de ces recherches stylistiques.

Ligne vocale, ligne instrumentale

Le génie du Barbier tient autant à l’agilité époustouflante de l’écriture vocale (et donc instrumentale) qu’à la profondeur et l’éclat de chacun des personnages. Aucun caractère n’est négligé: Rosine et Figaro, mais aussi Basile ( et son fameux air de la calomnie), et Bartolo (dont l’air buffa « un signor de la mia sorte » est une perle du genre), sont fouillé, vraisemblables, palpitants. Il est vrai que Rossini disposait d’un livret de première qualité, inspiré de la pièce éponyme de Beaumarchais, mais son talent reste d’avoir su composer la musique en rapport.
Et le fameux crescendo rossinien s’insinue en parfaite cohérence avec les besoins de l’action dramatique.
L’élégance de Rossini tient aussi à assouplir considérablement les passages alternés aria/récitatif: en usant avec mesure et intelligence du récitatif accompagnato, Rossini fluidifie son propos, produisant un flot ininterrompu de musique et de chant. Ainsi, l’air du saule de son Otello (1816) contemporain du Barbier, qui permit à la Malibran de triompher sur la scène, comme en témoigne Musset, dévoile l’art de la continuité musicale d’un Rossini, génie de la musique et de l’action.
A partir de 1824, compositeur officiel du régime monarchique français, Rossini, favorisé, comblé d’honneurs et de privilèges, oeuvre profondément pour le renouvellement du genre tragique, pour le « grand genre »: ainsi, Moïse et Pharaon (1827, reprise de son opéra italien créé en 1818, « Mosé in Egitto »). Enfin, c’est Guillaume Telln créé pour l’Opéra de Paris en 1829 qui incarne les dernières recherches du musicien. C’est aussi le dernier opéra d’un Rossini visionnaire qui prépare l’art du bel canto italien serti par Bellini, Donizetti puis Verdi, ou prélude au opéras historiques et spectaculaires de Meyerbeer (Robert le Diable, 1831) ou de Fromental Halévy (La Juive, 1835, recréé à l’Opéra de Paris en mars 2006 avec un grand succès).
Notons que dans le cas du Barbier, le rôle de Rosine fut créé par une contralto coloratoure, la Giorgi-Righetti (Rome, le 20 février 1816); plus tard, les sopranos et les mezzos s’emparèrent du personnage, l’un des plus intéressants du théâtre italien: indépendant, déterminé voire militant et déjà féministe.

Illustration

Gioacchino Rossini (DR)

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