vendredi 29 mars 2024

Monaco. Grimaldi Forum, le 3 décembre 2006. Wagner, Parsifal en version de concert. Saison événementielle des 150 ans  de l’orchestre Philharmonique de Monaco

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Après la Deuxième symphonie de Gustav Mahler, voici le deuxième temps fort de la saison des 150 ans du Philharmonique de Monte-Carlo. Un nouveau concert qui permettait d’écouter le niveau exceptionnel atteint par le Philharmonique monégasque. Marek Janowski retrouve les musiciens de l’Orchestre dans l’ultime opéra de Richard Wagner. Pourquoi Parsifal ? Parce que la partition eut sa première en dehors des murs de Bayreuth (1882), en 1913 à Monte-Carlo. Parce que l’oeuvre est l’aboutissement spirituel de la pensée musicale du compositeur. Autant dire que les interprètes conduits par le maestro se sont montrés à la hauteur de l’oeuvre.

Janowski manifestement inspiré, conduit l’intensité à son paroxysme se souvenant en son déroulement premier de la lenteur d’un Furtwängler. D’emblée, le chef a ce don de ne pas simplement interpréter une partition mais de la commenter. Comment ne pas céder au pouvoir de la musique, superbement gérée, accomplie avec cohérence et finesse? Imaginons ce qu’auraient pu être les critiques des oreilles en mal d’exigence critique : Des défauts ? Toujours l’acoustique écrasant les médium de la salle, met en difficulté les solistes, toujours le même problème. Qui est placé ici, aura trouvé que Robert-Dean Smith n’avait pas la stature wagnérienne pour Parsifal ; qui est assis là, aura trouvé que Konrad Jarnot, baryton clair, était un peu faible dans son interprétaiton d’Amfortas. Mais pour avoir entendu Villazon et Alagna dans cette même salle, pour avoir écouté les trois actes de Parsifal en trois endroits différents, votre témoin assure que Konrad Jarnot est brave et vigoureux, Robert-Dean Smith exceptionnel et magnifique.
 
Autres critiques ? Même problème pour le Rundfunkchor de Berlin dans la distinction des barytons et des ténors au timbre proche, la stéréophonie héroïque de certains airs masculins, tombe à plat encore à cause de l’acoustique et aussi de la disposition de la version de concert. Reprocherait-on qu’on y préfèrerait de vrais choeurs d’opéra ? On reconnaîtra que la puissance et la violence de certaines émotions ne peuvent être rendues que par une formation plus lyrique, mais quel choeur d’opéra pourrait fournir des pianissimi aussi merveilleux et appropriés au thème du Graal ? Quel choeur d’opéra peut prétendre à cette précision d’horloge
mécanique ?
De son côté, Petra Lang en Kundry, est une voix géante et splendide qui rappelle les interprètes de Karl Boehm, avec un physique de Marlène Dietrich. L’opulence du timbre envoûte le public, il est lui-même, soumis aux artifices de la vénéneuse séductrice, prêt à succomber aux maléfices de Klingsor.
Et laissons ceux qui disent que les cloches avaient une sonorité plus « puccinienne » que celles de Bayreuth, dernier refuge de la critique, et louons le choix et l’effet des filles fleurs, aux timbres parallèles d’un côté et de l’autre de la scène, le premier registre, puissant, le second frais avec le timbre de l’innocence (en particulier Claudia Galli), le troisième, chaleureux. Mais on peut encore louer le choix de la basse vibrante et profonde Bjarni Thor Kristinsson pour un Titurel souverain, de Eike Wilm Schulte pour un Klingsor ferme et d’une prosodie maîtresse, et d’un Gurnemanz, Kristunn Sigmundsson, chargé d’émotion

Musicalement, on peut reprocher à Wagner qu’il ait favorisé la puissance du flux infini dans Parsifal, au détriment parfois de la richesse thématique et de sa force telle qu’il les synthétisa dans Tristan und Isolde. On peut regretter, surtout, le galbe naturel des thèmes des opéras antérieurs. On peut être agacé par sa vision philosophique du monde, certes prenante, mais que la transcription dans le texte fait paraître lente et fastidieuse : elle n’a pas le charme de l’inconscient qui abonde et s’écoule sous la plume d’un Maeterlinck.
On peut se dire qu’il faut un temps de maturation dans la vie de chaque auditeur pour comprendre ce que la vieillesse apporte de simplification, de décantation et de maîtrise (comme pour le Falstaff de Verdi). On se dit qu’il faudrait être musicologue pour admirer tous les présages de Strauss et de Schoenberg dans la partition wagnérienne. Mais, quand, sous la baguette de Janowski, dans le tableau du Graal à la fin du premier acte, le choeur d’hommes s’empare du fameux thème, l’élève jusqu’à ce que tous les instruments et les choeur de coulisse le hissent aux cimes des fréquences sonores, c’est le public tout entier qui pleure.

Monaco. Grimaldi Forum, le 3 décembre 2006. Richard Wagner (1813-1883) : Parsifal en version de concert. Saison événementielle des 150 ans  de l’orchestre Philharmonique de Monaco

Approfondir
Lire notre dossier sur l’oeuvre et la distribution du concert « Parsifal de Richard Wagner« 

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