vendredi 19 avril 2024

Lady Macbeth de Mzensk

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logo_france_musique_DETOUREFrance Musique. Samedi 27 février 2016, 19h. Chostakovitch : Lady Macbeth de Mzensk. Soirée opéra sur France Musique.  Dès sa création à Saint-Petersbourg, alors Leningrad en 1934, – Chosta est âgé de 28 ans (!), l’ouvrage suscite un immense et durable succès. Après la 83 ème représentation, Staline, qui avait voulu suivre l’action lui-même, écrit dans la Pravda, une violente diatribe contre la « cacophonie musicale » ainsi incriminée. Aussitôt l’opéra est retiré – puis révisée et adaptée sous un nouveau titre (Katerina Ismailova) et Chostakovitch sommé de retourner dans la norme audible. Le compositeur est suspecté de connivence occidentale, pas assez populaire et communiste. Un dévoyé… à surveiller. Ainsi commencent les relations entre le compositeur et le régime soviétique, passablement entachées de quiproquos, d’ambivalences troubles, qui n’en finiront pas de malmener psychologiquement l’auteur. Chostakovtich est prêt à partir de ce moment à partir de sa maison, fuir la terreur ambiante, une valise déjà remplie sous le lit… L’histoire est plutôt scandaleuse mais emprunte au romantisme noir et cru de Nikolaï Leskov : épouse d’un marchand, Katerina s’ennuie ferme ; elle trompe son époux en couchant avec l’u de ses employés, le beau Sergueï ; puis étrangle son mari et empoisonne son beau-père en lui servant un plat de champignons empoisonnés.  EN somme, un dragon domestique, obsédé du sexe et prête à tout pour satisfaire son désir. Mais les deux amants criminels sont arêtés et emmenés en Sibérie : là, Sergueï trompe Katerina avec une captive plus jeune et désirable : de dépit et de rage, Katerine pousse la jeune femme dans l’eau glacée et se jette avec elle.

dmitri-chostakovitchTout est donc glacial, froid, sordide. Mais la musique de Chostakovitch dévoile un génie dramatique aussi puissant et tragique que La Dame de Pique de Tchaikovski. Staline avait fustigé le propos immoral du sujet, que le traitement orchestral magnifie davantage (le chant du cor descendant accompagnant la détente des corps post coïtum). De toute évidence le dictateur sanguinaire ne s’était pas trompé sur la violence sublime de la musique qui offre à la crudité de l’action, un souffle d’une magnétique grandeur. Ce qui intéresse Chostakovitch ici, c’est l’expression libre, fauve, féline de la sexualité tout à coup libérée, accélérateur d’émancipation pour une femme jusque là séquestrée, incomprise (voire humiliée par son beau-père), solitaire, impuissante.  Maître de son orchestre, Chostakovitch cisèle les grincements acérés, incandescents des instruments. Déjà, le compositeur se montre redoutable dans l’essor d’un style double : lyrique et parodique, satirique et déluré, d’une ivresse qui confine toujours au cauchemar, entre sincérité et masque. La réalité que la musique magnifie est plus psychologique que dramatique : de superbes climats d’angoisse et de terreur, hallucinations comme dans un songe démoniaque éveillé, surgissent avec un sens millimétré du montage ; car Chostakovitch en fournissant nombre de musiques pour des films muets, a affûté sa maîtrise des enchaînements, mais aussi du développement et de la gradation de chaque tableau. Pour nous, Mstislav Rostropovitch et Myung Whun Chung ont signé de très convaincantes versions de l’opéra interdit de Chostakovitch.

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