Les Amadeus
subliment Haydn
Si le Quatuor Amadeus établi à Londres, impose une élégance rare (que certains disent inégalée) chez Haydn, c’est peut-être parce que en plus d’une articulation irréprochable et un sens de l’équilibre sonore, les musiciens ajoutent ce que beaucoup oublie chez l’auteur de La Création, l’humour, la frénésie des formes neuves, l’expérimentation.
Historiquement, c’est à Londres que Haydn trouva la reconnaissance européenne: preuve qu’il existe bien une certaine forme de distinction relâchée, so british ou Viennoise, comme un caractère commun, de l’impériale Autriche à la non moins aristocratique Angleterre… A l’écoute de ce coffret superlatif, la puissance inventive du « créateur » du quatuor à Esterhazy chez ses patrons jusqu’en 1791, et aussi à Vienne où il continue toute sa vie d’être présent, s’impose avec une rare jubilation et une impertinence qui malgré les dates d’enregistrements, font toute la qualité et l’actualité de l’approche: du mordant, de l’intériorité et une fantaisie gracieuse, jamais usée. Aux côtés des Quatuors Aeolian de Londres (aussi, dont Decca réédite l’intégrale des Quatuors en 22 cd), Kodaly (Budapest) et Angeles (USA), les Amadeus incarnent une certaine idée d’un classicisme viennois nourri de liberté, d’équilibre certes mais aussi d’impertinence.
Pour constituer le coffret des 27 opus et de la version pour cordes des 7 Dernières Paroles du Christ en Croix, Deutsche Grammophon a réuni plusieurs bandes d’époques diverses dont neuf reprises de séances anciennes fixées en mono.
Au global, les enregistrements s’échelonnent de 1963 à 1978 et présentent une bonne part des presque 80 Quatuors écrits par Haydn: Opus 54 à 103, plus les 7 Dernières Paroles. Parmi les plus récents, ceux de l’Opus 74 (cd7), l’opulence de la sonorité, la personnalité, puissante et palpitante du geste, jamais à cours de tendresse ni d’intériorité saisissent. Ecoutez la solennité rentrée de l’Opus 51, la virtuosité si humaine et troublante –vivante– des opus 71, 73 et 77 où brilla le jeu si fiévreux de Johann Peter Salomon, proche de Haydn qu’il accompagna pendant ses 2 séjours à Londres, à partir de 1791. Les amadeus forever and ever. Réédition d’autant plus opportune pour le bicentenaire Haydn en 2009.
Joseph Haydn (1732-1809): Quatuors à cordes (OPus 54, 55, 64, 71, 74, 76, 77, et 103 « inachevé »), Les 7 Dernières Paroles du Christ en croix. Quatuor Amadeus: Norbert Brainin, violon I. Siegmund Nissel, violon II. Peter Schidlof, alto. Martin Lovett, violoncelle. Coffret de 10 cd Deutsche Grammophon. 27 Quatuors à cordes.