Félix Mendelssohn
Elias, oratorio (1846)
Les 10 et 11 Janvier 2009 à 20h et 17h
Paris, Théâtre des Champs-Elysées
National de France
Kurt Masur, direction
France Musique
Lundi 26 janvier 2009 à 20h
Les 25 et 26 mars 2009 à 20h
Paris, ND de Paris
Ensemble Orchestral de Paris
John Nelson, direction
Elias, du Prophète Mendelssohn
Ample portique à l’échelle d’une cathédrale, mais aussi d’une rare finesse psychologique, l’oratorio Elias de Mendelssohn, tient le haut de l’affiche en ce début d’année Mendelssohn. Fortement inspiré de Haendel et de Bach dont il ressuscite avec un sens visionnaire (scrupule et authenticité du geste interprétatif), les grandes oeuvres sacrées et dramatiques, l’oratorio, qui est l’une des oeuvres les plus applaudies de Mendelssohn de son vivant, profite agréablement de l’année 2009, année commémorative qui en février marque le bicentenaire de la naissance du compositeur surdoué. A cette époque, Mendelssohn, est à la fois, le fondateur du Conservatoire de Leipzig, directeur du Gewandhaus, pianiste, organiste et chef d’orchestre, animateur de nombreux festivals, directeur de la musique du Souverain Frédéric Guillaume IV de Prusse, surtout compositeur génial, estimé entre autres de Schumann.
Mendelssohn n’en est pas à son premier oratorio: il y eut avant Elias de 1846, dix années auparavant l’engageant Paulus, créé lors du 18è festival de Basse-Rhénanie. Mais rien n’égale l’enthousiasme délirant des anglais confrontés à la nouveauté d’Elias, qui leur permet de renouer sur le mode romantique avec le souffle épique et la grandeur humaine des opus baroques de Haendel. Comme auprès de Haydn qui en concevra La Création, autre oratorio miraculeux, Mendelssohn haendélien engagé, s’inscrit dans le renouveau du genre, mais adapté à l’esthétique romantique. Les effectifs sont nombreux : plus de 300 participants, choeurs, solistes et instrumentistes. Tout cela plaît d’emblée à la bourgeoisie mélomane, de Birmingham à Leipzig. Mendelssohn s’est trouvé un public des deux côtés de l’Europe.
Modèle de l’oratorio romantique

Après sa création à Birmingham,
Elias est recréé l’année suivante, en avril 1847, à Londres. Tous les témoins (Schumann bien sûr, mais aussi Wagner, pourtant critique et acide à l’endroit du jeune compositeur juif, trop pénétré de Haendelmania, puis Berlioz en 1848), s’étonnent de sa grandeur géniale, propre aux années 1840:
Symphonie écossaise (1842), musique théâtrale pour
Le Songe d’une nuit d’été (1843), Concerto pour violon (1844), et
Elias en 1846/1847. Comme fresque biblique de tradition récitative, préférant selon la tradition du genre, le récit sur l’action (l’oratorio de Haendel
Theodora, véritable manifeste d’épisme extatique, éloge de la lenteur fait musique, en témoigne),
Elias est pour Mendelssohn, une figure « paternelle », ancestrale, lui qui descend du « Socrate de Berlin, » Moses Mendelssohn, son grand père paternel, dont l’oeuvre comme penseur militant a oeuvré pour l’intégration des juifs dans la société allemande, en particulier berlinoise. Le jeune Félix incarne cette réussite sociale et culturelle. Comme ses autres oratorios, depuis
Paulus, et jusqu’au
Christus, esquissé qui ne verra finalement jamais le jour, le sujet sacré est teinté d’un humanisme rayonnant et fraternel. Luthérien convaincu, Félix opère une réconciliation oecuménique, pacifiant toute tension à naître entre les diverses confessions, chrétiennes et juives…
Au demeurant, le fait que
la figure d’Elie (927 – 850 avant JC) soit un prophète reconnu autant dans les religions judaïque, chrétienne et islamique indique l’universalité du personnage de l’Histoire Biblique. Figure combative, défendant et diffusant la parole du Dieu des Hébreux, Elie se dresse contre la dévotion des Cananéens pour Baal. Il fuit Jézabel qui lui a promis une mort terrifiante. Au cours de sa retraite, il réalise plusieurs miracles, est réveillé par un ange qui lui assure sa nourriture… Enlevé jusqu’au ciel, le Prophète redescendra sur terre pour annoncer le retour de l’Eternel.
Illustration: Philippe de Champaigne, le sommeil d’Elie (DR)