mardi 17 septembre 2024

CRITIQUE, opéra. Paris, Théâtre de l’Athénée, le 8 mars 2024. YVAIN : Gosse de Riche. Amélie Tatti, Philippe Brocard, Aurélien Gasse… LES FRIVOLITÉS PARISIENNES / Pascal NEYRON (mise en scène).

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Victoria Okada
Victoria Okada
Musicologue de formation (Docteure à la Sorbonne), pianiste dans une vie antérieure, Victoria Okada collabore avec différents supports spécialisés dans la musique classique en France et au Japon, et notamment ClassiqueNews. Elle est également une traductrice recherchée (japonais-français / français-japonais) dans le secteur culturel, et en particulier dans les domaines de la musique classique et des beaux-arts.

Les spectacles des Frivolités Parisiennes sont toujours des fêtes. Au Théâtre de l’Athénée – où ont lieu souvent leurs fêtes -, Gosse de riche de Maurice Yvain séduit par la légèreté des années 20, mais aussi par la peinture observatrice des nouveaux riches.

 

 

Si les quiproquos amoureux complexes ont toujours été le sujet favori des vaudevilles, les librettistes de Gosse de riche, Jacques Bousquet et Henri Falk, ont fait fort pour la complication des relations. André le peintre sans sou, Patarin le « financier » de l’art moderne qui lui commande un portrait, Nane la maîtresse du nouveau riche, Colette la fille de Patarin ultra-émancipée, ainsi que Léon le « mari de location » de Nane (pour dissiper les soupçons bien sûr) et Suzanne la femme de Patarin, se retrouvent tous dans une villa bretonne de la baronne Skatinkolowitz.

Dans un décor épuré qui refléterait la simplicité des lignes évoquant l’art moderne (scénographie et lumières de Camille Duchemin, avec collaboration artistique d’Elisabeth de Ereno), les personnages sont habillés avec des vêtements aux éléments géométriques (Sabine Schlemmer, réalisation d’Anaïs Parola et Julia Brochier), Madame Patarin a une coupe de cheveux en forme de tasse à l’envers (perruques et maquillage de Maurine Baldassari et Caroline Boyer), coiffée d’un chapeau-assiette tout cela étant aussi de l’art moderne bien sûr ! La modernité artistique est caricaturée entre autres par un prétendu portrait au format de carte de visite ou par un rideau qui cache le supposé grand tableau, ou la sculpture-rocher dans la villa. Mais on n’oublie pas la tradition : la bigoudène que porte la baronne par exemple. Le miss match avec sa chemise et son pantalon est de… l’art moderne, cela va de soi ! D’ailleurs, les paroles des chansons (il s’agit bien de chansons plutôt que d’airs) mentionnent les noms d’artistes qu’il faut apprécier pour être moderne : Picasso, Picabia, Satie, Stravinsky, Milhaud, ou encore Honegger… Les clichés de bourgeois enrichis sont constamment mis en avant à travers la naïveté des hommes (« impuissants, lâches et parvenus » scande Pascal Neyron dans le programme de salle) et la force des femmes. Le tableau est toujours aussi familier 100 ans après sa création…

Comme à l’accoutumée, Les Frivolités Parisiennes soignent particulièrement l’articulation du parlé et du chanté, en faisant appel à des chanteurs-acteurs rompus à cet exercice délicat et précis. En Colette, la soprano Amélie Tatti régale non seulement avec sa voix frche mais aussi avec sa chorégraphie réglée à la manière de karaté. Son agilité vocale et corporelle apporte un beau mouvement dans la pièce. Le baryton Aurélien Gasse, qui a déjà collaboré avec « Les Frivos » à l’Athénée dans le Testament de la tante Caroline (d’Albert Roussel), tient le rôle du peintre. Un peu timide vocalement parlant au début, sa voix prend l’ampleur après l’entracte (comme d’ailleurs presque tout le monde), pour déployer un timbre chaleureux. Philippe Brocard use de son autorité de basse pour dessiner un Patarin fier, mais cette autorité est le revers de sa faiblesse, et le chanteur excelle pour exprimer la psychologie de son personnage. Lara Neumann, en Dizanne Patarin, ne se ménage pas pour entraîner toute la salle dans un fest-noz survolté au son de binious ; ses incontestables talents de comédienne enchante le public, tout comme Marie Lenormand, irrésistible baronne dont la préoccupation est de soustraire des pourcentages grâce à ses entremises lucratives. Et quelle championne de diction dans une allure folle, tout autant dans le théâtre que dans le chant ! Julie Mossay en Nan et Charles Mesrine en Léon assument parfaitement leurs rôles pas aussi faciles qu’il n’y paraît !

L’orchestre, sans chef, est plus que jamais en forme, s’amuse comme larron en foire dans la fosse, dans un arrangement que nous supposons modernisé, comme toujours, avec des touches propres aux « Frivos ».

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CRITIQUE, opéra. Paris, Théâtre de l’Athénée, le 8 mars 2024. YVAIN : Gosse de Riche. Amélie Tatti, Philippe Brocard, Aurélien Gasse… LES FRIVOLITÉS PARISIENNES / Pascal NEYRON (mise en scène).

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