Le premier week-end du Printemps des Arts de Monte-Carlo (qui court jusqu’au 27 avril pour cette 55ème édition !…) a été marqué par une programmation audacieuse, mettant en lumière la radicalité musicale à travers les époques. Bruno Mantovani, compositeur et directeur artistique du festival, a ouvert cette édition 2025 (le 12 mars) avec un concert consacré à Stockhausen (auquel a assisté notre confrère André Peyrègne), puis une création personnelle le surlendemain à la cathédrale de Monaco (à laquelle nous n’avons malheureusement pas pu assister…) – tout en orientant subtilement les projecteurs vers Pierre Boulez, dont l’influence se ressent en filigrane dans les œuvres choisies. Bien que la musique de Boulez soit principalement célébrée le 26 mars, jour anniversaire de sa naissance, son empreinte se devine dans les filiations et les évolutions stylistiques présentées tout au long du festival. Les « before », ces moments de médiation précédant les concerts, permettent d’ailleurs d’aborder plus directement cette figure majeure de la musique contemporaine.
Le 15 mars, à l’Amphithéâtre du One Monte-Carlo, c’est le Quatuor Akilone qui était mis en avant, un ensemble exclusivement féminin, lauréat du Concours de Bordeaux en 2016, et qui a offert un concert remarquable, en explorant les radicalités d’Anton Webern à Beethoven. Leur interprétation des Six Bagatelles op. 9 de Webern a captivé par sa sensualité inattendue, dévoilant l’arrière-plan passionnel de ces miniatures musicales d’une extrême économie de moyens. Dans la Suite lyrique d’Alban Berg, les musiciennes ont magnifié les contrastes, passant d’un vibrato charnel à une évanescence presque fantomatique, restituant toute la complexité émotionnelle de l’œuvre. Leur disposition scénique, dite « à la viennoise », avec les premiers et seconds violons face à face, a renforcé la lisibilité des polyphonies, notamment dans le Quatuor à cordes op. 130 de Ludwig van Beethoven (auquel on a restitué sa Grande fugue finale). Ce dernier, interprété avec une virtuosité impressionnante, a démontré l’engagement profond du quatuor, malgré quelques tensions perceptibles dans les mouvements enchaînés. La Cavatine a été un moment de grâce, tandis que la Grande Fugue finale a confirmé leur maîtrise d’une partition exigeante, véritable sommet de la musique de chambre !
____________________________________________
CRITIQUE, concert. MONACO, 55ème Printemps des Arts de Monte-Carlo (One Monte-Carlo), le 15 mars 2025 (19h30). WEBERN / BERG / BEETHOVEN. Quatuor Akilone. Crédit photo © Emmanuel Andrieu