Fondé en 2004 par son directeur artistique Lionel Meunier, l’ensemble vocal (et désormais) instrumental Vox Luminis, basé en Belgique, a acquis une réputation sans pareille dans le répertoire qui est le sien : la musique vocale de la Renaissance jusqu’à l’époque de Haendel – compositeur qui constitue l’intégralité du concert mis à l‘affiche de la pléthorique saison de la Cité musicale de Metz. Fêtes de Noël obligent, c’est son répertoire sacré – Nisi Dominus, Laudate Pueri et Dixit Dominus (entrecoupée d’extraots de ses Concertos pour orgue op. 4) – qui est mis ce soir à l’honneur.
Le concert débute par une exécution d’extraits des Concertos pour orgue op. 4 du Caro Sassone, interprété ici par le claveciniste Anthony Romaniuk, entouré des instrumentistes de Vox Luminis. C’est dans sa période londonienne que Haendel inventa la forme du concerto pour orgue et orchestre pour servir (justement) d’intermèdes à ses Oratorios et Cantates… Le public était très friand de ces interludes instrumentaux où le compositeur lui-même tenait la partie d’orgue, donnant libre cours à sa virtuosité dans des improvisations très remarquées de ses contemporains – auxquelles Anthony Romaniuk fait à son tour un sort, avec un superbe sens du phrasé et une belle liberté dans les cadences improvisées. Le Psaume Laudate Pueri (HWV 237) qui leur fait suite fut composé en 1707 par Haendel, alors à Rome pour un séjour prolongé qui laissera de profondes traces dans son œuvre. Deux chœurs, placés à droite et à gauche de l’ensemble instrumental, y encadrent une suite d’airs, ici délivrés par la soprano Perrine Devillers, tandis que Lionel Meunier (basse) se tient à droite de l’orgue, pour donner les départs (de la tête ou de la main). La jeune soprano possède cette combinaison gagnante de pureté vocale, de légèreté et de distiller une large gamme d’émotions, qui n’a ainsi pas de mal à gagner le cœur du public messin.
En seconde partie de concert, nous avons la chance d’écouter deux (autres) Motets « romains ». Le Nisi Dominus est une œuvre pour trois solistes (un contre-ténor, un ténor et une basse), chœur et orchestre. C’est un hommage à la qualité des chanteurs de Vox Luminis qui tous pourraient très bien être solistes à part entière, comme les trois chanteurs sortis du chœur pour interprété la partie solo le démontre amplement, tandis que le reste de ’ensemble du chœur gère à la perfection le contrepoint du « Gloria » final. Mais le point culminant de la soirée est sans conteste le Motet final : Dixit Dominus. Écrit alors que Haendel n’avait que 22 ans, c’est une composition remarquable, employant un contrepoint virtuose, un cantus firmus complexe et des accords staccato surprenants, illustrant la destruction des rois et des dirigeants, le tout chanté avec une vigueur et une énergie extraordinaires. Cette fuite en avant est interrompue par le calme paisible du duo de soprano qui crée les sons les plus ravissants. La fugue du passionnant “Gloria” est habilement négocié par Lionel Meunier, permettant à la tension de monter de manière rythmique et dynamique jusqu’à ce qu’elle éclate en une joyeuse conclusion, un véritable tour de force de virtuosité compositionnelle contrapuntique, vocale et orchestrale. Cette œuvre conclut en beauté un concert qui mérite largement les nombreux rappels qu’il suscite de la part d’un public messin venu en nombre pour assister à ce concert de Noël !
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CRITIQUE, concert. METZ, Grande Salle de l’Arsenal, le 18 décembre 2024. HAENDEL : Laudate Pueri, Nisi Dominus, Dixit Dominus. Ensemble Vox Luminis, Lionel Meunier (direction). Crédit photographique (c) Emmanuel Andrieu
VIDEO : Emmanuelle Haïm dirige le « Dixit Dominus » de G. F. Haendel