vendredi 25 avril 2025

CRITIQUE, concert. AVIGNON, Opéra Grand Avignon, le 26 janvier 2025. VIVALDI / PERGOLESI : Stabat Mater. Paul Figuier (contre-ténor), Bruno de Sa (sopraniste), Ensemble Les Accents, Thibaut Noally (direction)

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique, la danse et l’opéra - mais essentiellement avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Désormais bien ancrée dans le paysage de la cité des Papes, l’Association Musique Baroque en Avignon, toujours ardemment dirigée par son fondateur Robert Dewulf, ne propose pas moins de 7 concerts de prestige lors de cette 25ème édition, dans les lieux les plus emblématiques de la ville. En ce dimanche 26 janvier, ce n’est non pas l’une des innombrables églises et chapelles de la Cité papale qui a été retenue, mais l’Opéra de la ville, et pour cause, les quelque 700 places de l’institution provençale étaient toutes occupées ! Il faut dire que l’affiche avait de quoi faire saliver, avec la venue de Thibault Noally et de son ensemble Les Accents, pour servir d’écrin aux deux superbes voix du contre-ténor français Paul Figuier et du sopraniste brésilien Bruno de Sa.

 

Et le programme n’a certainement pas été étranger non plus au succès remporté par la billetterie, car ces deux “tubes” de la musique baroque que sont les Stabat Mater de Pergolèse et de Vivaldi font toujours se déplacer les mélomanes. Celui de Vivaldi, écrit pour voix solo, échoit au jeune et brillant contre-ténor Paul Figuier, applaudi dernièrement au Festival d’Ambronay. La précoce étendue de ses moyens techniques le portent vers une certaine esthétisation du chant doloriste, aussi bien que jubilatoire, sans pour autant s’en tenir à des artifices vocaux affectés. C’est un chant vécu dans l’évidence et depuis l’intérieur, avec la conviction que l’univers vivaldien dépasse le simple objet décoratif. L’éclat et la vigueur du « Nunc Jubilare » sont d’abord chez le jeune chanteur au service d’un jaillissement autant que d’une plénitude spirituelle. Les qualités objectives du phrasé lui suffisent pour s’assurer une fluidité, une justesse et une conviction de ton toujours fascinantes. Et après l’exécution d’un des multiples concertos du Prêtre roux, interprété avec l’énergie communicative habituelle de Noally et son ensemble, c’est au tour de Bruno de Sa d’ensorceler le public par sa rare voix de sopraniste et sa pyrotechnie associée, dans l’aria vivaldienne “In Furore Iustissimae”, une œuvre en quatre parties contrastées : une aria agitée, un bref récitatif suppliant, une seconde aria de remerciements sincères, et un Alleluia conclusif. Sa tessiture ne cesse de surprendre par sa hauteur d’émission, l’aspect planant dans la manière de prendre les sons, avec un timbre qui s’approche de manière impressionnante de celui d’une soprano, teinté de couleurs rondes et chaudes, tout en étant doté d’un volume impressionnant. Il réussit ici à varier à l’envi le son qu’il parvient à enfler et à faire diminuer sans effort apparent, pour la plus grande joie d’un public fasciné.

 

Tout aussi populaire que les œuvres l’ayant précédées, le Stabat Mater de Pergolèse permet ensuite aux deux interprètes de délivrer naturellement la version réduite pour deux violons, un alto, un violoncelle et une basse. Thibault Noally respecte le caractère galant de l’ouvrage, soutenu par un ensemble instrumental léger et savoureux, fort d’un jeu délié et de sonorités claires, rendant l’écrin de l’Opéra avignonnais presque intimiste. Du côté des deux voix, leur mariage exprime une agréable harmonie, bien que différentes, et le dessin des lignes mélodiques respirent ici le naturel. Ils font assaut de virtuosité dans l‘Alleluia conclusif, et obtiennent un légitime triomphe, sans que nous sachions si l’enthousiaste public leur a arraché des bis, des contraintes ferroviaires nous ayant obligé à quitter la salle à l’issue du dernier ouvrage inscrit au programme…

 

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CRITIQUE, concert. AVIGNON, Opéra Grand Avignon, le 26 janvier 2025. VIVALDI / PERGOLESI : Stabat Mater. Paul Figuier (contre-ténor), Bruno de Sa (sopraniste), Ensemble Les Accents, Thibaut Noally (direction). Crédit photographique (c) Emmanuel Andrieu

 

VIDEO : Paul Figuier chante « In darkness let me dwell‘ de John Dowland

 

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