Artisan voire orfèvre dans l’art de piloter les masses, Michel Corboz s’est à juste titre taillé une solide réputation de chef choral. Les 36 cd du coffret Corboz disent assez sa curiosité et la faculté d’entreprendre au service des compositeurs, de leur sagacité en terme de fusion orchestrale et chorale. Au cœur de la machine Corboz, la clarté des plans, une spatialité lumineuse et vibrante, le chant fraternel et donc l’incarnation, sans pathos ni outrance d’aucune sorte.
Tête d’affiche du label Erato (avec Alain Lombard,…), Corboz fait partie dès 1964 des « poulains » de Michel Garcin lequel pilote la direction artistique du label français. Leur compagnonnage débute alors avec la Messe a 4 de Monteverdi, source et point de départ d’une étonnante carrière continue, dont le coffret retrace le fil de 1968 à 1997. Son Orfeo avec Eric Tappy marque toujours les esprits ; la gravure légendaire fait de Corboz l’un des pionniers de la Révolution Baroqueuse.
Le spectre des auteurs est vaste ; celui des styles et des écriture
s, des formes aussi ; tout semble inspirer le chef suisse né en 1934 qui a l’intuition des partitions grâce à une sensibilité manifeste qui le porte toujours vers l’articulation et la transparence. S’il a commencé par les Baroques italiens et surtout français (David et Jonathas, Médée de Charpentier, recréations absolues alors, au début des années 1980), le coffret de 36 cd met de côté ses Bach, et s’intéresse surtout aux classiques (Hadyn, Mozart), et remarquablement aux romantiques, de Beethoven, Schubert, Mendelssohn, Schumann à Brahms (pour les Germaniques), Verdi, puis Fauré, Gounod, Saint-Saëns, côté Français ; sans omettre les modernes : Puccini (et sa sublime lecture de la Messa di gloria, pour nous indépassable), Poulenc, Honegger, Vierne, jusqu’à Franck Martin…
La somme présente donc une collection hautement défendue des œuvres maîtresses du répertoire plus récent, que Corboz sait rendre aussi engagées que fraternelles ; parmi les pièces majeures de cette somme de 36 cd, distinguons surtout : les oratorios de Mendelssohn (Elias, Paulus, Christus… complétés par les Psaumes), les Requiem de Mozart, Brahms, Duruflé, Schumann (pour Mignon), Verdi… et en bonus des premières discographiques dont « et la vie l’emporta » de Martin, ou la Missa Sancta Caeciliae de Haydn… La marque de Corboz, au service des Baroques ou des Romantiques : le sentiment avant le souci de l’authenticité. La sincérité avant l’exactitude de la recherche. 40 ans après, ses lectures nous enivrent toujours.
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CRITIQUE CD coffret événement. MICHEL CORBOZ : complete ERATO recordings (36 cd) / Classical & Romantic Eras – Périodes classiques et romantiques. CLIC de CLASSIQUENEWS printemps 2023