Si en cette année 2014 nous fêtons le deux cent cinquantième anniversaire de la mort de Jean Philippe Rameau (nous y reviendrons dans une autre chronique) nous oublions, comme de coutume, de célébrer la naissance de nombreux autres compositeurs, plus ou moins oubliés. Le compositeur espagnol Juan Hidalgo (1614-1685) est de ceux ci. Arrivé en France dans la suite de l’infante Marie Thérèse, venue épouser Louis XIV, il a composé nombres de partitions à l’occasion des noces royales célébrées en grande pompe à St Jean de Luz puis à Paris. Jamais rejouées depuis 1660, les oeuvres d’Hidalgo sont rapidement tombées dans l’oubli et il a fallu à Albert Recasens, chef et co-fondateur, avec son père, de La Grande Chapelle, un long et patient travail de recherches musicales et musicologiques pour parvenir à les retrouver et à les rassembler en un programme cohérent.
La Grande Chapelle fête royalement le quadricentenaire Hidalgo
Musicalement moins reconnue que l’Italie, la France et l’Allemagne, l’Espagne a pourtant donné le jour à nombre de compositeurs prolifiques dont fait partie Juan Hidalgo. Ses motets et les villancicos constituent une partie non négligeable de son oeuvre. Des copies ont été retrouvées tant en Europe (Espagne, France, Allemagne) qu’en Amérique du nord (États Unis) et en Amérique latine (Guatemala, Mexique …) démontrant ainsi la popularité de Juan Hidalgo de son vivant. Au programme de ce concert, ce sont des villancicos vocaux ou instrumentaux et des motets vifs et joyeux qui sont chantés alternativement en solo, en duo, à trois ou à quatre.
Les quatre chanteurs de La Grande Chapelle sont dotés de fort belles voix qui se complètent remarquablement; saluons par ailleurs l’excellente diction des quatre solistes qui sont soudés par une évidente complicité et des liens musicaux très forts. Albert Recasens dirige avec sobriété et talent les villancicos et motets à trois et quatre voix dont le ton est à la fois recueilli et allègre. Les deux solistes, respectivement soprano et ténor, brillent particulietement en solo ou en duo, ces deux formes occupant un grand tiers du concert. Pour donner un peu de répit aux chanteurs les musiciens jouent deux villancicos instrumentaux assez courts mais séduisants qui leur permettent de se mettre en valeur avec simplicité.
La Grande Chapelle et son chef reçoivent un accueil très chaleureux d’autant plus qu’avec un programme de musique baroque espagnole le pari était loin d’être gagné. Cependant le talent et la proximité d’Albert Recasens tant avec ses musiciens qu’avec le public lui permet de dévoiler avec aisance un programme de toute beauté composé d’oeuvres oubliées depuis trop longtemps. Saluons le long et patient travail de recherche musicologique, remarquable defendu par La Grande Chapelle car il permet d’exhumer des oeuvres injustement oubliées ; souhaitons que linkyiat8ve du chef donnera lieu à la parution d’un CD d’ici à quelques mois.
Saintes. Abbaye aux dames, le 14 juillet 2014. Juan Hidalgo (1614-1685) : Venid querubines alados, Mas ay piedad, Oh admirable Sacamento, Rompa el aire en suspiros, Pajarillo que cantas alegre, Escuchad mi voz (instrumental), Anarda divina, Cuando el alba aplaude; Suprema deida que miro, Antorcha brillante; Ay corazon amante, Luceros y flores arded y lucid, Cielos que florece el ampo (instrumental), Aunque en el pan del cielo, Oigan en ecos y esdrujulos, Escuchad atended; La Grande Chapelle, Albert Recasens, direction.