CRITIQUE, concert, oratorio. Saintes. Abbaye aux dames, le 14 juillet 2014. Falvetti : Il diluvio universale. Mariana Flores, Rad; Fernando Guimaraes, No; Matteo Bellotto, Dio; Fabian Schoffrin, La Morte; Evelyn Ramirez Munoz, La Giustizia Divina; Magali Arnault Stanczak, L’acqua; Caroline Weynants, La Natura Humana; Keyvan Chemirani, percussion; choeur de chambre de Namur; Cappella Mediterranea, Leonardo Garcia Alarcon, direction – Nombre de compositeurs connus et reconnus de leur vivant tombent ensuite dans l’oubli parfois pendant plusieurs décennies voire pendant plusieurs siècles. Tel est le cas de Michelangelo Falvetti (1642-1692) maître de chapelle de la cathédrale de Messine, ville où il s’était installé après y avoir fait ses études. C’est à Messine, en 1682, qu’a été créé son oratorio Il diluvio universale. Falvetti qui connait l’histoire de la ville, punie par le roi d’Espagne après s’être révolté contre lui, s’est inspiré de ce tragique événement. Le compositeur messinois a fait appel au librettiste Vincenzo Giattini pour écrire un livret tiré d’un épisode de l’ancien testament : le déluge qui dura quarante jours et quarante nuits. Dieu ayant décidé de punir le genre humain qui était tombé dans une débauche, une négation de l’existence de Dieu, et une arrogance telles que le châtiment fut exemplaire. Seuls Noé, sa famille et un couple de chaque espèce animale vivant sur terre qui s’étaient, selon le commandement Divin, réfugiés sur une arche pouvant les accueillir tous, furent sauvés du châtiment divin.
Falvetti : Il Diluvio Universale à Saintes
La Capella Mediterranea offre un concert de première classe
Tombé dans l’oubli peu après sa création, ce n’est que trois siècles plus tard que I’oratorio il diluvio Universale renait de ses cendres. Leonardo Garcia Alarcon a brillamment ressuscité le chef d’oeuvre de Falvetti qu’il a défendu avec fougue et brio au cours d’une tournée débutée à Ambronay et qui s’achève à Saintes en ce jour de fête nationale 2014. Pour défendre le chef d’oeuvre de Falvetti Leonardo Garcia Alarcon a invité des artistes jeunes, talentueux et prometteurs. Par ailleurs le chef et ses musiciens, liés par une complicité et une amitié solides qui se sont renforcées pendant la tournée, investissent l’abbatiale avec entrain et gourmandise entrant qui par les nefs latérales, qui par le choeur, qui par la nef centrale.
Parmi les solistes, les courtes interventions de Evelyn Ramirez Munoz (La Giustizia Divina) et de Magali Arnault Stanczak (L’Acqua) sont marquantes; les deux jeunes femmes ont des voix rondes, larges, chaleureuses et lancent un feu d’artifices éblouissant.
Le couple Mariana Flores (Rad) et Fernando Guimaraes (No) est totalement assorti tant par sa jeunesse fougueuse que par deux voix fraîches et complémentaires qui font des récitatifs et des duos de purs joyaux dramatiques. C’est cependant le contre-ténor argentin Fabian Schoffrin (La Morte) qui se taille la part du lion en faisant une entrée très remarquée grimé et maquillé en « grande faucheuse » déterminée tout rafler sur son passage; si son dialogue avec Caroline Weynants (La Natura Humana) est l’un des grands moments de l’oratorio, c’est sa seconde entrée, un tambourin à la main qui se révèle être un moment d’anthologie. Shoffrin prend un malin plaisir à chanter et danser tout en maniant son instrument avec délice. Si les interventions de Matteo Bellotto (Dio) sont légèrement moins convaincantes elles marquent avec force le mécontentement Divin face la débauche des hommes, leur impiété, leur arrogance. Défauts et péchés majeurs qui leur valent une punition exemplaire à laquelle, malgré tous leurs efforts, ils n’échappent pas. Et d’ailleurs le choeur de chambre de Namur fait des merveilles dans l’oratorio jouant parfaitement la terreur, la tristesse la joie du pardon final.
La brillante interprétation de Il diluvio universale par La Capella Méditerranea lui vaut la seule ovation debout du festival tant le public a été séduit. L’enthousiasme est tel que Leonardo Garcia Alarcon concéde trois bis, rejoignant ses chanteuses avec une spontanéité plaisante lors du second bis. Totalement déchaîné, Fabian Schoffrin entraîne le public pour l’accompagner dans un bis endiablé. Il diluvio universale a trouvé en La Capella Mditerranea le meilleur des avocats; espérons que ce très bel oratorio continuera encore sa carrière avortée en 1682. Tel est bien le palmarès déjà méritant d’une partition parmi les plus convaincantes récemment reexhumée.
Saintes. Abbaye aux dames, le 14 juillet 2014. Michelangelo Falvetti (1642-1692) : Il diluvio universale. Mariana Flores, Rad; Fernando Guimaraes, No; Matteo Bellotto, Dio; Fabian Schoffrin, La Morte; Evelyn Ramirez Munoz, La Giustizia Divina; Magali Arnault Stanczak, L’acqua; Caroline Weynants, La Natura Humana; Keyvan Chemirani, percussion; choeur de chambre de Namur; Cappella Mediterranea, Leonardo Garcia Alarcon, direction.