jeudi 28 mars 2024

Compte rendu, concert. Réau. Centre pénitentiaire Sud Francilien de Réau (77). Le 15 novembre 2013. 6 musiciens de l’Orchestre de chambre de Paris à la prison de Réau

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Le Centre pénitentiaire Sud Francilien de Réau dans le 77 est l’une des prisons les plus récentes donc les plus modernes de l’Île de France. Son gymnase accueille un concert de musique classique au programme éclectique de Wagner et Beethoven à Offenbach dont l’unité tient à la famille d’instruments requis pour l’occasion : uniquement des cuivres, ceux de l’Orchestre de chambre de Paris, réunis ici en Sextuor.

Fidèle à son esprit mobile, proche de tous les publics, l’ Orchestre parisien a mandaté 6 de ses membres actifs pour défendre une action en prison destinée aux détenus. L’expérience peut paraître exceptionnelle, elle est quasiment familière pour les musiciens, certains la pratiquent depuis presque 10 ans déjà… Tel le violoniste Franck Della Valle (visionner notre reportage vidéo, lien en fin d’article).

 

 

 

La musique en prison

6 musiciens de l’Orchestre de chambre de Paris à la prison de Réau (77)

 

 

Reau_prison_concertTout visiteur sait de quoi il retourne. Pour pénétrer dans l’enceinte du bâtiment, il faut se désaisir de toutes ses affaires personnelles (clés, portable, papiers…) ; on passe plusieurs sas de sécurité que seul un badge préparé et obtenu après moult autorisations, aide à franchir. Puis ce sont plusieurs séries de grilles et de portes blindées qui nous conduisent finalement au lieu du concert.

Un humanisme musical

Heureuse occasion, le temps du programme musical, les murs des cellules volent en éclat, les contraintes du règlement très encadré semblent s’adoucir.  » C’est un concert comme tous ceux que nous réalisons précise l’un des cuivres de l’Orchestre, mais c’est toujours très spécial ».
L’endroit n’est pas neutre et jouer ici, devant tous les détenus, remodèle totalement l’enjeu et le déroulement du concert ; pas de relâche mais une concentration plus active et un esprit intuitif de la part des instrumentistes présents : ils ne font pas que jouer, ils parlent, expliquent, commentent … suscitent d’inévitables questions qui en fin de programme signifient davantage qu’une écoute sage et polie.
Le dispositif en soi n’est pas neuf : beaucoup de musique vivante pénètrent ainsi dans l’espace fermé de la prison. Quoique le classique n’est pas le genre de musique le plus fréquemment joué dans l’enceinte confinée. Mais ce qui est original en revanche c’est le public mixte de cet après midi : les femmes ont rejoint les hommes pour cet instant de partage et de rencontre, scrupuleusement encadré par les surveillants.

Pour les instrumentistes, le véritable enjeu c’est d’abord le don : donner essentiellement sans rien attendre en retour ; ce qui n’empêche pas d’être ému au détour d’un regard, dans le silence d’un geste … d’une attitude, lesquels en disent plus long que tout autre discours. Et si un spectateur sourit, acquiesce, oublie tout ce qui le rattache au lieu et au contexte de sa détention, l’offrande est immense.
C’est pour les détenus, une fenêtre imprévue qui les ouvre sur un horizon nouveau où l’émotion palpable parfois, humanise, où la musique sensibilise… ce peut-être enfin une révélation, la magie de la découverte.

Un détenu demande pourquoi l’Orchestre s’intitule orchestre de chambre ? Un autre veut comprendre la différence entre les instruments : trombone, tuba, trompettes et cor. Une autre parmi les femmes réclament Wagner puis sourit aux premières mesures d’Offenbach…
La performance humaine et artistique des musiciens se voit couronnée par l’inattendu, une déclaration qui sonne comme un superbe hommage :  » J’étais venue pour rompre l’isolement de ma cellule ; comme une récréation. Je découvre tout un monde nouveau, c’est comme si vous m’aviez adressé un courrier… je le reçois avec un immense plaisir. »

Pour ouvrir les murs, rompre la solitude et l’étouffement des cellules, … et aussi d’une certaine manière, accompagner les détenus dans leur reconquête d’un humanisme volontaire : car comme le rappelle très justement Franck Della Valle :  » un détenu sort de prison tôt ou tard « . Le chant des instruments n’a jamais semblé aussi nécessaire pour ce retour à la vie civile.

reportage vidéo
Voir aussi notre reportage vidéo exclusif réalisé le jour du concert : 6 musiciens de l’Orchestre de chambre de Paris à la prison de Réau (77), le 15 septembre 2013.

Dans le Centre pénitentiaire Sud Francilien de Réau (77), le Sextuor de cuivres de l’Orchestre de chambre de Paris offre un concert de musique classique aux détenus de la prison… Expérience singulière qui laisse espérer les bénéfices d’une rencontre aux apports et bénéfices imprévus souvent émouvants … Entretiens avec les musiciens de l’Orchestre de chambre de Paris (15 novembre 2013)

Sextuor de l’Orchestre de chambre de Paris
Programme :  » Cuivres et ors du Rhin  »
œuvres de Beethoven, Charpentier, Delalande, Mouret, Telemann, Haendel, Scheidt, Wagner, Reynaud, Lehar …
Jean-Michel Ricquebourg, Hervé Michelet, trompettes
Daniel Catalanotti, Gilles Bertocchi, cors
Philippe Defurne, trombone
Frédéric Marillier, tuba

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