lundi 9 décembre 2024

Bononcini: Messe, Stabat Mater (Alessandrini, 2012) 1 cd Naïve

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Belle première que cette Messe ambitieuse de Bononcini (manuscrit conservé à Florence) quand le Stabat Mater était déjà connu d’après la partition déposée à Modène… Contrepoint rigoureux, efflorescence mélodique, d’une suavité toute italienne, la Messe justifie évidemment l’enregistrement; la direction d’Alessandrini parfois trop droite et presque sêche éclaire surtout l’allant et la progression dramatique de l’écriture et l’on aurait souhaité ici et là, plus de langueur, de respiration fluide, moins de respect stricto sensu à la pure métrique rythmique (Gloria), avec des coups de théorbes trop pointés !

Modènois, Boninicini se fixe à Vienne dès 1705, comme Kapellmeister de la Cour, avant de revenir à Modène (1713) auprès des Este qu’il sert jusqu’à sa mort, livrant quantité d’opéras, de pièces sacrées. Il est donc naturel d’enregistrer Bononcini dans la ville qu’il a servi et illustré de son vivant, apportant en terre autrichienne, cette vitalité sensuelle, lumineuse et vivaldienne propre à la Péninsule.


Bononcini, maître contrapuntiste

Vocalement, le largo du Gratias agimus tibi saisit par l’alliance des deux timbres vocaux solistes (Sara Mingardo et le contre ténor Andrea Arrivabene); le Cum sancto spiritu et son amen final mettent en valeur les qualités d’articulation et de projection expressive des choristes du Concerto Italiano: belle architecture agissante dont la tenue revient au chef, toujours capable dans les étagements et l’ampleur collective, sans perdre pour autant la précision du verbe (il n’a pas été célébré pour son intégrale des madrigaux de Monteverdi pour rien!).

Et le Stabat Mater ? Les dissonances savamment mesurées et récurrentes disent la douleur permanente de la Vierge, mère endeuillée inconsolable et solitaire, perdue, noyée dans sa douleur. Si le chef fait montre d’une tenue précise, battue veillant à la clarté des pupitres contrepointant, il y manque ce supplément d’âme, cette respiration humaine et intérieure qui aurait favorisé avec grâce, l’émotion, la pudeur allusive, l’élégance blessée du verbe. Le contrepoint structure toute l’oeuvre et la marque d’une atmosphère de plus en tendue: comme dans la Messe, Rafaella Milanesi et Sara Mingardo se distinguent très nettement: la première réussit un remarquable O quam tristis… véritable ascension semée de terreurs, d’inquiétude, d’épreuves, vocalement superbement caractérisées. Superbe accord solistes, choeur et instruments aussi dans l’étonnant Fac me plagis.
Les instrumentistes, prise live oblige, ne sont pas toujours d’une justesse impeccable (Quis est homo…); mais la prise de son accuse le relief des risques encourus où s’immiscent de très justes acoups expressifs. Autant dire que malgré sa baguette parfois nette et tranchante, à l’incise parfois âpre, le chef sait aussi  » oser  » une approche nerveuse aux effets captivants. La réalisation de la dernière fugue, de rigueur pour un Stabat, montre à quel point Bononcini était un maître contrapuntiste d’une égale valeur à celle de Bach. C’est dire l’immense valeur de ce programme innovant, et toute autant le risque pleinement assumé du Concerto Italiano. Exaltant.

Antonio Maria Bononcini (1677-1726): Messe en sol mineur, Stabat Mater. Sara Mingardo, Raffaella Milanesi… Concerto Italiano. Rinaldo Allesandrini, direction. Enregistré à Vienne en janvier 2012. 1 cd Naïve OP 30537

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