lundi 9 juin 2025

CRITIQUE, concert. PARIS, Philharmonie, le 5 JUIN 2025. GESUALDO. Compagnie Amala Dianor, Les Arts Florissants, Paul Agnew (direction)

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Dans l’ardent printemps qui s’achève humide au creux de la cité luisante de lueurs éclatantes, les immenses vaisseaux de la musique étincelants de pluie enhardissent leur proue musicale aux limbes de Paris. Dans la salle des concerts de la Philharmonie de Paris, cette nef conçue par Christian de Portzamparc, une ambiance brumeuse et mystérieuse accueillit le spectateur comme l’encens dans une cérémonie secrète digne des proto-chrétiens. 

 

Poursuivant son exploration du répertoire madrigalesque, Paul Agnew à la tête des Arts Florissants nous promettait une nouvelle manière d’être immergés dans l’univers sacré de Carlo Gesualdo. Entendre les Tenebrae responsoria en dehors de la liturgie parait une exploration dans un univers tellement éloigné de la sensibilité de notre temps qu’il était nécessaire de nous apporter un éclairage qui permette à cette musique drapée de toutes les nuances de jais du crêpe et du satin de faire surgir les fulgurantes nuances de l’ostensoir. C’est en réunissant d’emblée un plateau vocal de haute teneur que Paul Agnew a rendu ces pages inoubliables de couleurs et de nuances. Autour du chef et ténor, on a pu entendre Miriam Allan, Hannah Morrison, Mélodie Ruvio, Sean Clayton et Edward Grint. Toutes et tous d’une précision et d’un abattage parfaits, de plus qu’ils ont figuré, tels les retables d’antan, les différentes stations du Chemin de Croix et de la Passion du Christ. 

Associés étroitement à ces Répons de Gesualdo les sublimissimes danseuses et danseurs de la Compagnie Amala Dianor ont rendu à cette musique nocturne et sacré, une théâtralité hors du commun. Nous avons particulièrement remarqué, dans le rôle christique, Damiano Bigi, d’une présence ahurissante. Outre la puissante et superbe chorégraphie, signée Amala Dianor, Damiano Bigi est sculptural dans l’intention mais débordant d’une sensualité naturelle qui figure les plus belles toiles de maîtres anciens. Les lumières de Xavier Lazarini sont autant de pinceaux qui sculptent l’ineffable pour concevoir l’espace de cette cérémonie où nous avons toutes et tous communié, initiés à nouveau dans les rites humains de la mort et de la promesse de la régénération.  

Gesualdo, éternel repenti d’un crime passionnel, a su chanter mieux que quiconque la souffrance de la perte irréparable, le deuil languissant et l’espoir infime d’une rémission et du pardon. Ce bon soir de juin, on entend les bruits de la ville en pluie, des larmes dont la douleur soulage les passions les plus ardentes.

 

 

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CRITIQUE, concert. PARIS, Philharmonie, le 5 JUIN 2025. GESUALDO. Compagnie Amala Dianor, Les Arts Florissants, Paul Agnew (direction).

 

 

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